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Poèmes:Jean Moréas

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Nadej-isis
Rita-kazem
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Poèmes:Jean Moréas

Message par Rita-kazem Sam 17 Avr - 19:26

Rappel du premier message :

Jean Moréas


Jean Moréas est né à Athènes le 15 avril 1856 et mort à Saint-Mandé le
30 avril 1910, Jean Moréas est un poète symboliste grec d'expression
française.



Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Jean-moreas
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Ottilie

Message par julien Dim 18 Avr - 19:12

Des lèvres de bacchide et des yeux de madone,
Des sourcils bifurqués où le diable a son pleige ;
Ses cheveux vaporeux que le peigne abandonne
Sont couronnés de fleurs plus froides que la neige.
Vient-elle de l' alcôve ou bien de l' ossuaire,
Lorsque ses mules d' or frôlent les dalles grises ?
Est-ce voile d' hymen ou funèbre suaire,
La gaze qui palpite aux vespérales brises ?

Autour du burg, la lune, aux nécromants fidèle,
Filtre en gouttes d' argent à travers les ramures.
Et l' on entend frémir, ainsi que des coups d' aile,
Des harpes, dans la salle où rêvent les armures.

julien

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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty D' où vient cette aubade câline

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:01

D' où vient cette aubade câline




D' où vient cette aubade câline
Chantée-on eût dit-en bateau,
Où se mêle un pizzicato
De guitare et de mandoline ?
Pourquoi cette chaleur de plomb
Où passent des senteurs d' orange,



Et pourquoi la séquelle étrange
De ces pèlerins à froc blond ?
Et cette dame quelle est-elle,
Cette dame que l' on dirait
Peinte par le vieux Tintoret
Dans sa robe de brocatelle ?
Je me souviens, je me souviens :
Ce sont des défuntes années,
Ce sont des guirlandes fanées
Et ce sont des rêves anciens !
nadia ibrahimi
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Remembrances I

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:02

Remembrances I




Là-bas, où, sous les ciels attiques,
Les crépuscules radieux
Teignent d' améthyste les dieux
Sculptés aux frises des portiques ;



Où, dans le feuillage argenté
Des peupliers aux torses maigres,
Crépitent les cigales aigres
Ivres des coupes de l' été ;

Là-bas, où d' or fin sont les sables
Et d' azur rythmique les mers,
Où pendent les citrons amers
Dans les bosquets impérissables,

La vierge aux seins inapaisés
Plus belle que la Tyndaride,
Fit couler sur ma lèvre aride
Le dictame de ses baisers.
nadia ibrahimi
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Remembrances

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:03

Remembrances




Dans l' âtre brûlent les tisons,
Les tisons noirs aux flammes roses ;
Dehors hurlent les vents moroses,
Les vents des vilaines saisons.



Contre les chenets roux de rouille,
Mon chat frotte son maigre dos.
En les ramages des rideaux,
On dirait un essaim qui grouille :

C' est le passé, c' est le passé
Qui pleure la tendresse morte ;
C' est le bonheur que l' heure emporte
Qui chante sur un ton lassé.
nadia ibrahimi
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Chevauchée de la mort

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:03

Chevauchée de la mort






La mort chevauche dans la nuit, à travers la plaine.
Le vent de la nuit à travers la plaine halène ;
Le vent halène dans les ajoncs et sur les prêles.
La mort monte un hongre pie et borgne aux jambes grêles.
Et les trépassés sont pendus par la chevelure,
Sont pendus par les pieds, à la queue, à l' encolure,



L'encolure du hongre borgne qui caracole.
La mort chevauche à travers la nuit, comme une folle.
Les vieillards disent : bonne mort, cesse un peu ta course
Nous boirons, dans le creux de nos mains, à cette source.
Et nous-disent les beaux garçons et les belles filles
Pour faire des bouquets nous cueillerons des jonquilles.
nadia ibrahimi
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty La vieille femme

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:04

La vieille femme





Elle entendit geindre un corbeau pelé,
La vieille femme de Berkeley.
Elle l' entendit geindre sur sa tête,
Dans le val de Nith, pendant la tempête.
Et la vieille dit : " je vais mourir,
Le moine mon fils, qu' on l' aille quérir ;



Qu' on aille quérir ma fille la nonne.
Je vais mourir, et Dieu me pardonne ! "
Son fils et sa fille nuitamment
Vinrent, amenant le saint sacrement.
La vieille tressaillit lorsqu' ils entrèrent,
Et ses yeux révulsés se dilatèrent.

La vieille crispa ses doigts maigris,
La vieille hurla d' effroyables cris :
"Ah ! Miséricorde ! éloignez vite
Le saint sacrement, car je suis maudite.
J' ai mangé sans dégoût et sans remords,
Pendant le sabbat, de la chair de morts.

J' ai su le secret des philtres infâmes,
Et l' herbe qui fait avorter les femmes.
Pour raviver mes poumons gangrenés
J' ai humé l' haleine des nouveau-nés.
Bientôt de l' enfer je serai la cible,
Et mon crime, hélas ! Est irrémissible !

Aspergez mon linceul d' eau sainte, et puis
Placez sur mon sein des branches de buis.
Que dans l' église une forte chaîne
Attache au pavé mon cercueil de chêne.
Que des cierges bénits en quantité
Baignent mon cercueil de leur clarté.

Que des prêtres récitent des prières,
Pendant trois jours, pendant trois nuits entières.
Que les gros bourdons aux lourds battants,
Que les bourdons sonnent fort et longtemps.
Ma fille, mon fils, faites de la sorte,
Pour préserver des démons la morte. "

La vieille femme se tut soudain,
Et son regard devint incertain.
Le sang se figea sous sa peau glacée.
La vieille femme était trépassée.
On l' aspergea d' eau bénite, et puis
On mit sur son sein des branches de buis.

Au milieu de l' église une chaîne
Solide fixa son cercueil de chêne.
De grands cierges blancs en quantité
Lui firent un nimbe de clarté.
Tout autour des prêtres récitèrent
La messe, et cinquante chantres chantèrent.

Et les gros bourdons aux lourds battants,
Les bourdons sonnèrent fort et longtemps.
La première nuit, la clarté des cierges
Fut pure ainsi que des regards de vierges.
Mais l' on entendit la voix des démons
Pareille au vent d' ouest balayant les monts.

Les prêtres récitaient la messe sainte,
Et leur zèle était mêlé de crainte.
Et plus fort toujours les battants battaient,
Et plus haut toujours les chantres chantaient.
Devant le cercueil le moine marmonne
Son rosaire, avec sa soeur la nonne.

Et le coq chanta dans le matin clair,
Et les démons s' enfuirent dans l' air.
La seconde nuit, un éclat sinistre
Vêtit les pécheurs d' ocre et de bistre ;
Et l' on entendit l' ululement
Des démons monter plus distinctement.

Les cloches sonnaient à toute volée,
Les chantres chantaient l' âme désolée,
Et les prêtres priaient tout tremblants
Pâles et tremblants sous leurs surplis blancs.
Et rempli d' effroi le moine marmonne
Son rosaire, auprès de sa soeur la nonne.

Et le coq chanta dans le matin d' or,
Et les démons s' enfuirent encor.
La troisième nuit vint enfin. Livide,
Dans l' ombre où circule une odeur fétide,
La flamme des grands cierges consumés,
Oscille dans les ustres gemmés

Au loin les démons dansent une ronde,
Et l' on entend leur voix, leur voix qui gronde
Pareille au vent d' ouest et pareille aux flots
Qui battent les caps et les îlots.
Et l' on entend leur bouche qui ricane
Comme une gueule de barbacane.

Et les prêtres restent tout tremblants
Tremblants et muets sous leurs surplis blancs.
Et la nonne et le moine son frère
Tombent la face contre la terre.
Et les cloches, hélas ! Ne tintent plus,
Tant les sonneurs de terreur sont perclus.

Les saints claquent des dents au fond des châsses.
Avec fracas s' écroulent les rosaces.
Flambeaux éteints et psaumes finis,
Gloire à l' enfer et péchés punis !
Alors, brisant les verrous de la porte
Un démon vient pour emmener la morte.

Un grand démon à l' oeil phosphorescent :
L'église semble rouge de sang.
A son appel, malgré cordes et chaîne,
S' ouvre à l' instant le lourd cercueil de chêne
"Péchés punis, et gloire à l' enfer !
Reconnais-tu messire Lucifer ? "

La morte se leva blafarde et roide,
Son linceul trempé d' une sueur froide.
Sur la route un cheval les attendait
Qui par les naseaux des flammes rendait.

Le démon fit monter la vieille en croupe,
Et partit au galop avec sa troupe.
Il partit au galop par des chemins
Dont le roi Christus garde les humains !
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty La veuve

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:05

La veuve






La jeune femme chante, au balcon assise,
Et sa triste chanson pleure dans la bise.
La jeune femme chante et tous les bateaux
Carguent leur voilure et baissent leurs drapeaux.
Un vaisseau de guerre, une grande galère,



Garde ses drapeaux et sa voilure entière.
" Baisse, mon vaisseau, baisse ton pavillon,
Car ce que je chante est bien triste chanson :

Il me fallait du lait de guivre, et la graisse
Du grand cerf nourri par la main de l' ogresse,
Pour guérir le mal de mon pauvre mari
Qui se tordait au lit malade et flétri.
Le temps de monter sur les rochers de neige,
Le temps de préparer pour la guivre un piège,
Le temps de revenir, mon pauvre mari
Qui se tordait au lit, malade et flétri,
La croix de la tombe a pris pour belle-mère,
Et pour épouse, hélas ! Il a pris la terre."
nadia ibrahimi
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty La femme perfide

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:06

La femme perfide




L' eau du bain perle encore en ses cheveux de jais.
Elle a mis pour sourcils le plumage des geais.
Elle a mis dans ses yeux le jaspe et l' hyacinthe.
D' argent tissé, de soie et d' or sa taille est ceinte.



Des roses du rosier elle a plein ses deux mains.
Elle revient du bain à l' ombre des jasmins.
Quatre tours de sequins ornent sa gorge altière.
Elle revient du bain portée en sa litière.

"O ma sœur, vous avez les yeux d' une houri.
N' être pas votre frère, être votre mari !
Et si je suis ta sœur et femme de ton frère,
Va tuer mon mari, tu pourrais bien me plaire.

Comment tuer mon frère ? Il faut une raison,
Il faut une raison pour cette trahison.
Va le trouver et dis : " je veux que l' on partage ;
Pour moi la belle part je veux de l' héritage ! "

Il serre son khandjar, il monte son cheval,
Et hop et hop il va galopant par le val.
" Kostandi, Kostandi, je veux que l' on partage ;
Pour moi la belle part je veux de l' héritage.

Sois donc heureux, mon frère, et n' aie aucun souci.
Pour toi la belle part, pour toi la mienne aussi. "
la bonté de son frère amollit son courage.
Le front sur les genoux, il sanglote de rage.

Il serre son khandjar, il monte son cheval,
Et hop et hop il va galopant par le val.
"Ma sœur de l' eau, de l' eau que je lave ma lame
Du sang de ton mari, car il a rendu l' âme. "

Elle saisit un broc de vin clair, tellement
Dans sa joie effrénée elle a d' empressement.
Il la prend par sa longue et belle chevelure,
Et lui tranche, d' un coup, la tête à l' encolure.

La tête dans sa main, il monte son cheval,
Et hop et hop il va galopant par le val.
"Mouds-la, meunier, et fais de la farine rouge,
Du fard pour la catin, et du fard pour la gouge."
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Agha Veli

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:07

Agha Veli





Dans la salle de sa maison,
De sa maison aux cent fenêtres,
Avec ses pareils et ses maîtres
Il partage la venaison :
Parmi les fleurs des champs en gerbes
Ce sont des sangliers entiers,
Des chevreuils roux et des quartiers
De cerfs aux ramures superbes.



Les eunuques silencieux
Versent les liqueurs parfumées
Dans les fines coupes gemmées
Et dans les hanaps précieux ;
Tandis que pour charmer la fête,
Des esclaves de Bassora
Dansent au son du tamboura
Avec un sabre sur la tête.

Un oiseau rose, oiseau joli,
Oiseau qui parle, tel un homme,
L'on ne sait d' où, l'on ne sait comme,
Il entre et dit : "Agha Véli
Ta belle aux yeux et ta blonde,
Ta blonde aux baisers de carmin,
On va la marier demain
Au fils du roi de Trébizonde."

Il va trouver ses chevaux roux,
Tachetés comme une panthère,
Qui du sabot bêchent la terre,
La dent longue et l'oeil en courroux.
"Plus vite qu' un cerf dans la plaine,
Plus vite que l' aile du vent,
Bien avant le soleil levant,
Au bout du monde qui me mène ?"

Un vieux cheval, cheval pur sang,
Aux flancs meurtris de mainte entaille
Dans le combat et la bataille,
Hume la brise en hennissant :
"Plus vite qu' un cerf dans la plaine,
Plus vite que l' aile du vent,
Bien avant le soleil levant,
Au bout du monde je te mène."

Ils laissent derrière les monts,
Derrière ils laissent les montagnes :
Par les forêts, par les campagnes,
Ils passent comme des démons.
Les houx géants mordent la selle,
Et le sabot saigne au caillou,
Et dans l' air glacé le hibou
Les frôle, en fuyant, de son aile.

Ils laissent derrière les monts,
Derrière, la campagne brune ;
Dans la rafale, au clair de lune,
Ils passent comme des démons.
Le pic où la lamie hiverne
Est descendu sitôt monté,
Et le dragon épouvanté
Frissonne au fond de sa caverne,

Ils vont, pareils à des démons,
Passant le gué, sautant le fleuve,
Ils vont, qu' il grêle, ils vont, qu' il pleuve,
Par les ravins et par les monts.
Le sang zèbre sa peau de bistre,
La vase lui monte aux mollets ;
Voilà que le pont du palais
Tremble sous leur galop sinistre.

Nul chant de luth répercuté
Dans la tourelle et sous les porches ;
De rouges languettes de torches
Oscillent dans l' obscurité.
Une procession arrive
Escortant un cercueil tout blanc,
Et Véli demande, tremblant
Comme le roseau sur la rive :

"Les prêtres et les fossoyeux,
Dites, quelle est la jeune morte
Que dans ce cercueil on emporte
Couchée en ses cheveux soyeux ? »
« C' est la belle aux yeux bleus, la blonde,
La blonde aux baisers de carmin ;
Elle allait épouser demain
Le fils du roi de Trébizonde. "
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty La comtesse Esmérée

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:07

La comtesse Esmérée






Sur un cheval tout noir à la crinière rousse,
Il galope sur la mousse.
En toque de velours avec des plumes blanches
Il passe sous les branches.
Au galop ! Au galop ! Il passe sous les branches
Avec ses plumes blanches.



Au trot ! Au trot ! Au trot ! Et son grand lévrier
Saute près de l' étrier.
Il va pour épouser la fille de la reine,
La reine sa marraine.
Sur son cheval tout noir à la crinière rousse,
Il galope sur la mousse.
Assise à son balcon, sans page et sans duègne.
La comtesse se peigne.
Et, quand elle sourit, des lys et des jasmins
Lui tombent dans les mains.

Avec un peigne d' or, sans page et sans duègne,
La comtesse se peigne.
"Beau capitaine qui passez, la mine fière,
Allez-vous à la guerre ?
Je vais pour épouser la fille de la reine,
La reine ma marraine.
Comme un diamant bleu reluit ta barbe brune,
Mes cheveux sont clair de lune.
Je vais pour épouser la fille de la reine,
La reine ma marraine.

Et lorsque je souris, des lys et des jasmins
Me tombent dans les mains..."
La belle dans ses bras, il passe sous les branches
Avec ses plumes blanches.
Sur son cheval tout noir à la crinière rousse,
Il galope sur la mousse.
Il n' épousera pas la fille de la reine,
La reine sa marraine.
nadia ibrahimi
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty L'épouse fidèle

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:08

L'épouse fidèle






A la fraîche fontaine,
Sous le grand peuplier,
A la fraîche fontaine
S' arrête un cavalier.
Son noir cheval est blanc
D' écume et de poussière,
Il est blanc de la queue
Jusques à la crinière



A la fraîche fontaine,
Sous le grand peuplier,
A la fraîche fontaine
S' arrête un cavalier.
"La belle qui puisez
Dans le seau d' or cerclé,
Versez au cavalier
Et versez à la bête. "

Elle verse de l' eau
Sans relever la tête,
Elle verse de l' eau
Avec un long sanglot.
"Qu' avez-vous donc, la belle,
A sangloter ainsi ?
Avez-vous du chagrin,
Avez-vous du souci ?

Mon mari fait la guerre.
Voilà sept ans à Pâques.
J' attends encore un an
Et puis j' entre au couvent.
« Votre mari, la belle,
est mort l' hiver dernier,
et j' ai payé les chantres,
Les chantres et le prêtre.»

« Si vous avez payé
Les chantres et le prêtre,
Je vous rendrai l' argent,
L' argent et l' intérêt. »
« Rendez-moi donc, la belle,
Rendez-moi le baiser
Que j' ai mis sur ses lèvres
Avant de l' enterrer ! »

Comme des fleurs au vent
Mes baisers sont allés !
Je vous rendrai l' argent,
L'argent et l' intérêt.
« Réjouis-toi, la belle,
Car je suis ton mari.
J' ai dans mon escarcelle
Cent bagues de rubis. »

Pour les doigts de ma main
Vos bagues sont trop grandes ;
Passez votre chemin,
Seigneur, et Dieu vous garde.
« Dans ton jardin le myrte
Fleurit même en octobre,
Une lampe d' ivoire
Brûle dans ton alcôve. »

Avec notre voisine
Vous avez bavardé.
Des signes de mon corps
Dites, et je croirai.
« Un joli signe blond
Frise à ton cou de lait,
Un autre orne ton ventre
Et seul, je l' ai touché. »


« Nourrice, ma nourrice.
Va dresser notre lit,
Car c' est lui mon mari,
C' est lui mon bien-aimé ! "
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Airs de danse

Message par nadia ibrahimi Mar 20 Avr - 8:08

Airs de danse




C'est la belle aux yeux,
C'est la belle aux yeux de mûre,
C'est la belle aux yeux de mûre ;
La belle aux cheveux,
La belle aux cheveux de mûre,
Aux cheveux soyeux.



Elle porte les habits,
Les habits dorés du klephte,
Les habits dorés du klephte ;
Elle porte le fusil,
Le fusil doré du klephte
Et le yatagan aussi.

"Pourquoi rire ainsi,
Compagnon, pourquoi donc rire ?
Compagnon, pourquoi donc rire ?
La belle lui dit.
Il ne cessa pas de rire
Et lui répondit :

"Je vois le soleil,
Je vois le soleil qui brille,
Je vois le soleil qui brille,
Et ton sein vermeil,
Et ton sein vermeil qui brille
Comme le soleil. "

C'est la belle aux yeux,
C'est la belle aux yeux de mûre,
C'est la belle aux yeux de mûre ;
La belle aux cheveux,
La belle aux cheveux de mûre,
Aux cheveux soyeux.
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Madrigale

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:09

Incarnate et dodue et narguant les chloroses,
Avec ta bouche rutilante et ton maintien
Impudique, et ton front que le remords chrétien
Ne saurait assombrir de hantises moroses ;
Avec tes seins petits et tes hanches décloses,
Et tes cheveux tordus, tu représentes bien
Ce conventionnel amour, que l' art païen
Mais le nôtre-para de rubans et de roses.
Or, je rêve d' un temple aux doriques piliers
Où grimpent les volubilis parmi les mauves ;
Et dans le pur acier de tes prunelles fauves
Je vois des bois de myrte aux nymphes familiers,
Et des ruisseaux furtifs où boivent les dorcades,
Et qui coulent par mélodieuses saccades.
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Florence

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:10

Le soleil brille et brûle
Dans un ciel indigo.
L' Arno coule très jaune
Sous le Ponte-Vecchio.
A Fiesole, aux Cascines,
Viale dei colli,
Les marquises exquises,
Oeil noir et teint pâli,

Adressent des sourires
Et des signes savants
Du fond de leurs calèches
Aux cavaliers servants.
Et dans la ville-neuve
Les sons des clavecins
Se mêlent aux prières
D' obèses capucins.
nisrine nacer
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Le rhin

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:11

Aux galets le flot se brise
Sous la lune blanche et grise,
O la triste cantilène
Que la bise dans la plaine !
Elfes couronnés de jonc,
Viendrez-vous danser en rond ?
Hou ! Hou ! Le héron ricane
Pour faire peur à la cane.
Trap ! Trap ! Le sorcier galope
Sur le bouc et la varlope.
Elfes couronnés de jonc,
Viendrez-vous danser en rond ?

Au caveau rongé de mousse
L' empereur à barbe rousse,
Le front dans les mains, sommeille.
Le nain guette la corneille.
Elfes couronnés de jonc,
Viendrez-vous danser en rond ?

Mais déjà l' aurore émerge,
De rose teignant la berge,
Et s' envolent les chimères
Comme un essaim d' éphémères.
Elfes couronnés de jonc,
Vous ne dansez plus en rond !
nisrine nacer
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Nevermore

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:12

Le gaz pleure dans la brume,
Le gaz pleure, tel un oeil.
Ah ! Prenons, prenons le deuil
De tout cela que nous eûmes.
L' averse bat le bitume,
Telle la lame l' écueil.
Et l' on lève le cercueil
De tout cela que nous fûmes.
O n' allons pas, pauvre sœur,
Comme un enfant qui s' entête,
Dans l' horreur de la tempête
Rêver encor de douceur,
De douceur et de guirlandes.
L’hiver fauche sur les landes.
nisrine nacer
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Geste

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:14

Alme fleur, fleur d' éden, hanebane d' enfe.
Ta bouche, et tes seins lourds que d' or tissé tu brides !
Nous allions par les bois pleins de monstres hybrides,
Toi de pourpre vêtue et moi bardé de fer.
Sous mon épée alors plus prompte que l' éclair,
Crânes fendus, les dos troués, les yeux stupides,
Tombaient les nains félons et les géants cupides.
Et les citoles des jongleurs sonnaient dans l' air.

Docile au joug, qu' il eût fallu que j' abolisse,
J' ai trop longtemps humé la saveur du calice,
Quand l' ennemi veillait sur les quatre chemins.
Le palais fume encore et l' île est saccagée.
Quel sortilège impur en guivre t' a changée,
Toi qui berçais mon cœur avec tes blanches mains ?
nisrine nacer
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Toute la babiole

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:15

Voilà pourtant le but inepte des choses.
Les fins parfums de la jupe qui froufroute
Le long du trottoir blanc comme la grand' route,
Les lourds parfums de la lourde chevelure,
Nattes au dos, torsades sur l' encolure.
La pénitence après le péché, sans doute
L' orgueil et l' avarice et l' envie, et toute
La babiole ; et l' amour de la nature,
Et même la lune à travers la verdure ;
Et même la lune et même l' espoir, cette
O cette folie ! Et le soleil, ses hâles,
Et la pluie, et la tristesse des jours pâles.
Et bouquets qu' on souhaite et bouquets qu' on jette.
Et la bonne tiédeur des premières bûches,
Et sa gorge en les dentelles et les ruches.
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Et j'irai le long de la mer éternelle

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:16

Et j' irai le long de la mer éternelle
Qui bave et gémit en les roches concaves,
En tordant sa queue en les roches concaves ;
J' irai tout le long de la mer éternelle.
Je viendrai déposer, ô mer maternelle,
Parmi les varechs et parmi les épaves,
Mes rêves et mon orgueil, mornes épaves,
Pour que tu les berces, ô mer maternelle.
Et j' écouterai les cris des alcyons
Dans les cieux plombés et noirs comme un remords,
Leurs cris dans le vent aigu comme un remords.
Et je pleurerai comme les alcyons,
Et je cueillerai, triste jusqu' à la mort,
Les lys des sables pâles comme la mort.
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Par la douce pitié

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:17

Par la douce pitié qui s' attendrit au pli,
Pourtant dur, de ta lèvre, inaccessible amante,
Saurais-tu donc effacer la marque infamante
Que la vie imprima sur mon front assoupli !
Sois, au moins, la main qui berce, et lorsque a faibli
Mon orgueil, et ce pendant que geint la tourmente,
Abrite-moi comme d' une magique mante,
Des ténèbres de ta chevelure d' oubli ;

Et que de tes yeux la translucide prunelle
Me verse la fraîcheur et la paix solennelle
De la mare endormie en un lit de roseaux.
Mais surtout garde-toi bien close, et taciturne,
Tel que sous le soleil un augural oiseau.
Car mon âme frémit de regarder dans l' urne.
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Sous vos longues chevelures

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:18

Sous vos longues chevelures, petites fées,
Vous chantâtes sur mon sommeil bien doucement,
Sous vos longues chevelures, petites fées,
Dans la forêt du charme et de l' enchantement.
Dans la forêt du charme et des merveilleux rites,
Gnomes compatissants, pendant que je dormais,
De votre main, honnêtes gnomes, vous m' offrîtes
Un sceptre d' or, hélas ! Pendant que je dormais.

J' ai su depuis ce temps que c' est mirage et leurre
Les sceptres d' or et les chansons dans la forêt ;
Pourtant, comme un enfant crédule, je les pleure,
Et je voudrais dormir encor dans la forêt.
Qu' importe si je sais que c' est mirage et leurre !
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Désir de vivre et d'être heureux

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:19

Désir de vivre et d' être heureux, leurre et fallace,
Et monstre indéfectible aux têtes renaissantes,
Malgré l' automne et les couronnes marcescentes,
De courir tes hasards mon âme n' est pas lasse.
Car nous n' espérons point d' être jamais, hélas !
Le sage dont l' esprit sûr égorgea les sens ;
Et nous avons au coeur cent taureaux mugissants,
Et la morgue ridicule des guérillas.

Que pour un jour du moins ! Dure et lente rancune
Du destin, laisse-toi fléchir par l' infortune
Et que j' aie un peu de trêve et de réconfort ;
Que je cueille la grappe, et la feuille de myrte
Qui tombe, et que je sois à l' abri de la syrte
Où j' ai fait si souvent naufrage près du port
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty O les cavales

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:23

O les cavales hennissant au vent limpide,
Et les los de triomphe à l' entour des pavois !
Les cavaliers mordent la cendre, et je me vois
Tel un vaincu que la populace lapide.
L' ombre se fait suspecte et veuve des hautbois,
Et l' appareil n' est plus de la fête splendide ;
Et tout à coup par un maléfice sordide
Des belles dames se décharnèrent les doigts.

Lutter, pourquoi ? Quand l' étendard de la conquête
Claque aux remparts trahis ; et faut-il qu' on s' entête
Sous les lustres obscurs à danser d' un pied tors ?
J' entends pleurer comme des chordes sous des plectres ;
Avec de pâles fleurs voici passer des spectres ;
Et je voudrais mourir un peu, comme on s' endort
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Voix qui revenez

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:25

Voix qui revenez, bercez-nous, berceuses voix :
Refrains exténués de choses en allées,
Et sonnailles de mule au détour des allées,
Voix qui revenez, bercez-nous, berceuses voix.
Flacons, et vous, grisez-nous, flacons d' autrefois :
Senteurs en des moissons de toisons recélées,
Chairs d' ambre, chairs de musc, bouches de giroflées.
Flacons, ô vous, grisez-nous, flacons d' autrefois.

En ce matin d' hiver et d' ombre, l' alouette,
En ce matin d' hiver, l' alouette est muette.
Voix qui revenez, bercez-nous, berceuses voix.
Les lys sont coupés dans le jardin, et les roses,
Et les iris au bord des eaux, des eaux moroses.
Flacons, ô vous, grisez-nous, flacons d' autrefois
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty Roses de Damas

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:27

Roses de Damas, pourpres roses, blanches roses,
Où sont vos parfums, vos pétales éclatants ?
Où sont vos chansons, vos ailes couleur du temps,
Oiseaux miraculeux, oiseaux bleus, oiseaux roses ?
O neiges d' antan, vos prouesses, capitans !
A jamais abolis les effets et les causes,
Et pas d' aurore écrite en les métempsycoses :
Baumes précieux, que tous des orviétans !

Surpris les essors aux embûches malitornes.
Les cerfs s' en sont allés la flèche entre les cornes,
Aux durs accords des cors les cerfs s' en sont allés.
Et nous sommes au bois la belle dont les sommes
Pour éternellement demeureront scellés...
Comme une ombre au manoir rétrospectif, nous sommes.
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Poèmes:Jean Moréas - Page 2 Empty O ma lyre

Message par nisrine nacer Mar 20 Avr - 20:28

O ma lyre, cessons de nous couvrir de cendre
Comme auprès d' un cercueil !
Je t' orne de verdure et ne veux plus entendre
Des paroles de deuil.
Mais non, fais retentir d' une douleur non feinte,
Lyre, l' accent amer !
N' es-tu pas l' alcyon qui calme de sa plainte
Les vagues de la mer ?
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