François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
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François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Rappel du premier message :
Les Amants Malheureux, Ou Le Comte De Comminge
Drame En Trois Actes Et En Vers (1764)
Par François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud(1718-1805)
ACTE 1 SCENE 1
La scène est dans l' abbaye de la trappe.
La toile se lève, et laisse voir un souterrain
vaste et profond, qui est supposé être le lieu
consacré aux sépultures des religieux de la
trappe ; deux ailes du cloître, fort longue
et à perte de vue, viennent aboutir
à ce souterrain. On y descend par deux
escaliers composés de pierres grossièrement
taillées, et d' une vingtaine de degrés.
Il n' est éclairé que d' une lampe.
Au fond du caveau s' élève une grande croix,
telle qu' on en voit dans nos cimetières,
au bas de laquelle est adossé un sépulchre
peu élevé, et formé de pierres brutes ;
plusieurs têtes de morts amoncelées lient ce
monument avec la croix. C' est le tombeau du
célèbre abbé de Rancé, fondateur de la trappe.
Plus avant, du côté gauche, est une fosse qui
paroît nouvellement creusée, sur les bords de
laquelle sont une pioche, une pelle, etc.
Au-devant de la scène, dans un des
côtés, à main droite, est une autre fosse.
Sur les deux ailes de ce souterrain se
distinguent de distance en distance,
et à peu de hauteur de terre, une infinité
de petites croix, qui désignent les sépultures
des religieux.
Les Amants Malheureux, Ou Le Comte De Comminge
Drame En Trois Actes Et En Vers (1764)
Par François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud(1718-1805)
ACTE 1 SCENE 1
La scène est dans l' abbaye de la trappe.
La toile se lève, et laisse voir un souterrain
vaste et profond, qui est supposé être le lieu
consacré aux sépultures des religieux de la
trappe ; deux ailes du cloître, fort longue
et à perte de vue, viennent aboutir
à ce souterrain. On y descend par deux
escaliers composés de pierres grossièrement
taillées, et d' une vingtaine de degrés.
Il n' est éclairé que d' une lampe.
Au fond du caveau s' élève une grande croix,
telle qu' on en voit dans nos cimetières,
au bas de laquelle est adossé un sépulchre
peu élevé, et formé de pierres brutes ;
plusieurs têtes de morts amoncelées lient ce
monument avec la croix. C' est le tombeau du
célèbre abbé de Rancé, fondateur de la trappe.
Plus avant, du côté gauche, est une fosse qui
paroît nouvellement creusée, sur les bords de
laquelle sont une pioche, une pelle, etc.
Au-devant de la scène, dans un des
côtés, à main droite, est une autre fosse.
Sur les deux ailes de ce souterrain se
distinguent de distance en distance,
et à peu de hauteur de terre, une infinité
de petites croix, qui désignent les sépultures
des religieux.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 1 SCENE 6
Comminge, D' Orvigni.
Comminge, arrêtant toujours D' Orvigni qui
veut suivre Euthime .
Non, ne le suivez point... nos loix nous le défendent.
Il revient au fond du théâtre.
Et... que mes pleurs devant vous se répandent.
Toujours plus attendri pour cet infortuné,
À pénétrer son sort, toujours plus entraîné,
Un mouvement confus m' inquiète... m' agite...
Le malheur qui me suit, et s' accroît, et s' irrite.
D' Orvigni... laissez-moi... puis-je vous secourir ? ...
Je ne puis... que donner l' exemple de mourir.
D' Orvigni.
Connoissez D' Orvigni ; c' est peu qu' il se combatte,
Qu' il s' obstine à soumettre un penchant... qui le flatte;
À de plus grands efforts je saurai m' asservir ;
Malgré vous... malgré moi, je saurai vous servir.
Je dompte ma foiblesse, et l'honneur seul me guide.
Par un fidèle écrit je veux qu'Adélaïde
Sache...
Comminge, avec vivacité .
Que je me meurs...
D' Orvigni, aussi vivement .
Que vous l' aimez...
Comminge, D' Orvigni.
Comminge, arrêtant toujours D' Orvigni qui
veut suivre Euthime .
Non, ne le suivez point... nos loix nous le défendent.
Il revient au fond du théâtre.
Et... que mes pleurs devant vous se répandent.
Toujours plus attendri pour cet infortuné,
À pénétrer son sort, toujours plus entraîné,
Un mouvement confus m' inquiète... m' agite...
Le malheur qui me suit, et s' accroît, et s' irrite.
D' Orvigni... laissez-moi... puis-je vous secourir ? ...
Je ne puis... que donner l' exemple de mourir.
D' Orvigni.
Connoissez D' Orvigni ; c' est peu qu' il se combatte,
Qu' il s' obstine à soumettre un penchant... qui le flatte;
À de plus grands efforts je saurai m' asservir ;
Malgré vous... malgré moi, je saurai vous servir.
Je dompte ma foiblesse, et l'honneur seul me guide.
Par un fidèle écrit je veux qu'Adélaïde
Sache...
Comminge, avec vivacité .
Que je me meurs...
D' Orvigni, aussi vivement .
Que vous l' aimez...
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Comminge.
ô dieu !
Qu' avez-vous dit ? Qui ? Moi. Je nourrirois ce feu !
Et vous l' exciteriez, quand vous devez l' éteindre !
Est-ce vous D' Orvigni, que ma vertu doit craindre ? ...
Et j' ose encor l' entendre... et ne le quitte pas ! ...
Ôte-moi de ses yeux, Dieu, viens guider mes pas...
Il fait quelques pas pour se retirer de la scène.
D' Orvigni.
Eh ! Le trahiriez-vous, lorsqu' auprès d' une mère ? ...
Comminge, revenant, et avec transport .
Elle vous est connue ? ... elle voit la lumière...
D' Orvigni.
Elle n'a point encor dans la tombe suivi
Votre père...
Comminge.
Ta main, ô ciel ! Me l' a ravi...
D' Orvigni.
Dépouillé de sa haine et d' un courroux sévère.
Le repentir tardif a fermé sa carrière.
Ce père, alors sensible, ignorant votre sort,
En regrettant un fils, s' accusoit de sa mort...
De votre mère enfin qui gémit dans les larmes
La seul Adélaïde adoucit les alarmes...
Comminge.
Ma mère, Adélaïde...
D' Orvigni.
Unissent leurs douleurs.
Qui peut vous retenir ? ... allez sécher leurs pleurs.
C' est à moi de chérir ce séjour de tristesse ;
Sans doute Adélaïde écoutant la tendresse...
Comminge.
Quoi ! Toujours réveiller un feu si criminel ?
Un amour vertueux n' offense pas le ciel.
Comminge.
Vertueux... D' Orvigni... que sera donc le crime,
Si ce coupable amour vous paroît légitime ? ...
Voulez-vous m' égarer... appésantir mes fers... ?
D' Orvigni.
Pourriez-vous ignorer que depuis quatre hivers
Cet objet d' une flamme à tous les deux si chère,
A vu rompre ses noeuds... que la mort de mon frère...
Comminge, avec un profond désespoir .
Adélaïde est libre, et je suis enchaîné ! ...
Grand dieu ! Suis-je à tes yeux assez infortuné ?
À D' Orvigni.
Retirez-vous cruel, fuyez de ma présence.
Que ne me laissiez-vous mon heureuse ignorance ?
Vous venez redoubler mon supplice infernal ;
De semblables bienfaits sont dignes d' un rival.
D' Orvigni.
Quoi ! Ces liens sacrés...
ô dieu !
Qu' avez-vous dit ? Qui ? Moi. Je nourrirois ce feu !
Et vous l' exciteriez, quand vous devez l' éteindre !
Est-ce vous D' Orvigni, que ma vertu doit craindre ? ...
Et j' ose encor l' entendre... et ne le quitte pas ! ...
Ôte-moi de ses yeux, Dieu, viens guider mes pas...
Il fait quelques pas pour se retirer de la scène.
D' Orvigni.
Eh ! Le trahiriez-vous, lorsqu' auprès d' une mère ? ...
Comminge, revenant, et avec transport .
Elle vous est connue ? ... elle voit la lumière...
D' Orvigni.
Elle n'a point encor dans la tombe suivi
Votre père...
Comminge.
Ta main, ô ciel ! Me l' a ravi...
D' Orvigni.
Dépouillé de sa haine et d' un courroux sévère.
Le repentir tardif a fermé sa carrière.
Ce père, alors sensible, ignorant votre sort,
En regrettant un fils, s' accusoit de sa mort...
De votre mère enfin qui gémit dans les larmes
La seul Adélaïde adoucit les alarmes...
Comminge.
Ma mère, Adélaïde...
D' Orvigni.
Unissent leurs douleurs.
Qui peut vous retenir ? ... allez sécher leurs pleurs.
C' est à moi de chérir ce séjour de tristesse ;
Sans doute Adélaïde écoutant la tendresse...
Comminge.
Quoi ! Toujours réveiller un feu si criminel ?
Un amour vertueux n' offense pas le ciel.
Comminge.
Vertueux... D' Orvigni... que sera donc le crime,
Si ce coupable amour vous paroît légitime ? ...
Voulez-vous m' égarer... appésantir mes fers... ?
D' Orvigni.
Pourriez-vous ignorer que depuis quatre hivers
Cet objet d' une flamme à tous les deux si chère,
A vu rompre ses noeuds... que la mort de mon frère...
Comminge, avec un profond désespoir .
Adélaïde est libre, et je suis enchaîné ! ...
Grand dieu ! Suis-je à tes yeux assez infortuné ?
À D' Orvigni.
Retirez-vous cruel, fuyez de ma présence.
Que ne me laissiez-vous mon heureuse ignorance ?
Vous venez redoubler mon supplice infernal ;
De semblables bienfaits sont dignes d' un rival.
D' Orvigni.
Quoi ! Ces liens sacrés...
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Comminge.
Une éternelle chaîne
M' impose le tourment d' une éternelle peine...
Barbare... quelle mort va déchirer mon sein !
Depuis quatre ans entiers combattant mon destin,
J' ai reculé ce terme affreux, épouventable,
Où devoit m' accabler un joug insupportable,
Où l' amour... où l' espoir... où l' espoir pour jamais
Devoit fuir de ce coeur consumé de regrets!
Enfin, depuis un an, la colère céleste
M'a fait serrer ces noeuds... ces noeuds que je déteste...
Et lorsque j'expirois sous ce cruel fardeau,
Quelle image m'arrête aux portes du tombeau...
Et pour rendre ma fin plus effrayante encore?
Elle est libre, elle m'aime... ô ciel!... et je l'adore...
Oui, tous mes sens sont pleins de ce fatal amour.
Je le dis à la nuit, je le redis au jour ;
Oui, ce feu me dévore, il embrâse mon ame...
Le ciel ne sauroit plus maîtriser cette flamme...
Ah ! Que votre pitié pardonne au désespoir ;
Ne m' abandonnez pas. Je veux encor vous voir...
Vous parler... dans ce lieu... que D' Orvigni décide ;
Si je dois... je n' entends... ne vois qu' Adélaïde...
D'Orvigni, en se retirant .
Que je le plains, hélas !
Une éternelle chaîne
M' impose le tourment d' une éternelle peine...
Barbare... quelle mort va déchirer mon sein !
Depuis quatre ans entiers combattant mon destin,
J' ai reculé ce terme affreux, épouventable,
Où devoit m' accabler un joug insupportable,
Où l' amour... où l' espoir... où l' espoir pour jamais
Devoit fuir de ce coeur consumé de regrets!
Enfin, depuis un an, la colère céleste
M'a fait serrer ces noeuds... ces noeuds que je déteste...
Et lorsque j'expirois sous ce cruel fardeau,
Quelle image m'arrête aux portes du tombeau...
Et pour rendre ma fin plus effrayante encore?
Elle est libre, elle m'aime... ô ciel!... et je l'adore...
Oui, tous mes sens sont pleins de ce fatal amour.
Je le dis à la nuit, je le redis au jour ;
Oui, ce feu me dévore, il embrâse mon ame...
Le ciel ne sauroit plus maîtriser cette flamme...
Ah ! Que votre pitié pardonne au désespoir ;
Ne m' abandonnez pas. Je veux encor vous voir...
Vous parler... dans ce lieu... que D' Orvigni décide ;
Si je dois... je n' entends... ne vois qu' Adélaïde...
D'Orvigni, en se retirant .
Que je le plains, hélas !
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 1 SCENE 7
Comminge, seul .
L' enfer est dans mon coeur...
Je ne me connois plus... arme-toi, Dieu vengeur,
Contre un cher ennemi que j' aime... et j' idolâtre...
Ce n' est pas trop de toi, grand dieu, pour le combattre.
ACTE 2 SCENE 1
Comminge, seul, descendant dans une
situation qui annonce sa douleur, s' avance sur
la scène, reste quelque tems dans un profond
accablement, et dit :
Quel nuage de mort s' étend autour de moi ! ...
Sais-je ce que je veux ? ... sais-je ce que je doi ?
Dans ce lieu, D' Orvigni revient et va m' entendre :
Eh ! Quel est mon espoir... et que dois-je prétendre ?
Rejetter mes liens ; rompre des fers sacrés...
Trahir tous les sermens que ma bouche a jurés...
Et ce voeu de mon coeur, le voeu de la nature,
Ce serment solemnel d' une tendresse pure,
N' ont-ils pas précédé ces sermens odieux ? ...
L' homme est-il un esclave enchaîné par les cieux ?
Pour sa foiblesse est-il quelque joug volontaire ?
Des humains malheureux le bienfaiteur, le père,
Ce dieu qui nous créa, qu' on ne peut trop chérir,
Comme un sombre tyran verroit avec plaisir
L' aiguillon des douleurs déchirer son image,
Une éternelle mort détruire son ouvrage ?
Mes larmes nourriroient sa jalouse fureur.
Et mes tourmens feroient sa gloire et sa grandeur !
Ce seroit le servir, lui rendre un digne hommage,
Que d' épuiser mes jours dans un long esclavage ? ...
Non. Je reprens mes droits. L' aveugle humanité,
Ne doit former des voeux que pour la liberté ;
Que pour saisir, hélas ! La lueur peu constante
D' un bonheur fugitif, qui trompe notre attente.
Tous ces affreux sermens sont enfin oubliés.
J' adore Adélaïde, et je vole à ses pieds ;
Qu' un moment je la vois ; et tous mes maux s' effacent ; ...
Tous ses charmes déjà dans mon coeur se retracent.
Si le ciel s' offensoit du retour de mes feux,
Il sauroit les éteindre, et triompheroit d' eux...
Poursuis, lâche Comminge ; outrage un dieu suprême ;
À l' audace, au parjure ajoute le blasphême.
Apostat sacrilège, où vient de t' emporter
Un amour insensé... que tu ne peux dompter ? ...
Tu parles de briser la chaîne qui te lie !
Juge de ta bassesse, et vois ta perfidie.
Si ce phanthôme vain, qui fascine les yeux,
Qui n' a de la vertu que l' éclat spécieux,
Si l' honneur t' arrachoit ta promesse frivole ;
Réponds. Oserois-tu manquer à ta parole ?
Et la religion, tous les peuples des cieux...
Dieu même par ta bouche a prononcé tes voeux...
Et tu les trahirois ? ... ce dieu prêt à t' absoudre,
S' il ne peut te toucher, ne crains-tu pas sa foudre ?
Sur ta tête coupable entends-tu ces éclats ?
Vois sortir... vois monter des gouffres du trépas,
Ces spectres ténébreux... toutes ces pâles ombres
Me lancent... quels regards et menaçans et sombres ! ...
Comminge, seul .
L' enfer est dans mon coeur...
Je ne me connois plus... arme-toi, Dieu vengeur,
Contre un cher ennemi que j' aime... et j' idolâtre...
Ce n' est pas trop de toi, grand dieu, pour le combattre.
ACTE 2 SCENE 1
Comminge, seul, descendant dans une
situation qui annonce sa douleur, s' avance sur
la scène, reste quelque tems dans un profond
accablement, et dit :
Quel nuage de mort s' étend autour de moi ! ...
Sais-je ce que je veux ? ... sais-je ce que je doi ?
Dans ce lieu, D' Orvigni revient et va m' entendre :
Eh ! Quel est mon espoir... et que dois-je prétendre ?
Rejetter mes liens ; rompre des fers sacrés...
Trahir tous les sermens que ma bouche a jurés...
Et ce voeu de mon coeur, le voeu de la nature,
Ce serment solemnel d' une tendresse pure,
N' ont-ils pas précédé ces sermens odieux ? ...
L' homme est-il un esclave enchaîné par les cieux ?
Pour sa foiblesse est-il quelque joug volontaire ?
Des humains malheureux le bienfaiteur, le père,
Ce dieu qui nous créa, qu' on ne peut trop chérir,
Comme un sombre tyran verroit avec plaisir
L' aiguillon des douleurs déchirer son image,
Une éternelle mort détruire son ouvrage ?
Mes larmes nourriroient sa jalouse fureur.
Et mes tourmens feroient sa gloire et sa grandeur !
Ce seroit le servir, lui rendre un digne hommage,
Que d' épuiser mes jours dans un long esclavage ? ...
Non. Je reprens mes droits. L' aveugle humanité,
Ne doit former des voeux que pour la liberté ;
Que pour saisir, hélas ! La lueur peu constante
D' un bonheur fugitif, qui trompe notre attente.
Tous ces affreux sermens sont enfin oubliés.
J' adore Adélaïde, et je vole à ses pieds ;
Qu' un moment je la vois ; et tous mes maux s' effacent ; ...
Tous ses charmes déjà dans mon coeur se retracent.
Si le ciel s' offensoit du retour de mes feux,
Il sauroit les éteindre, et triompheroit d' eux...
Poursuis, lâche Comminge ; outrage un dieu suprême ;
À l' audace, au parjure ajoute le blasphême.
Apostat sacrilège, où vient de t' emporter
Un amour insensé... que tu ne peux dompter ? ...
Tu parles de briser la chaîne qui te lie !
Juge de ta bassesse, et vois ta perfidie.
Si ce phanthôme vain, qui fascine les yeux,
Qui n' a de la vertu que l' éclat spécieux,
Si l' honneur t' arrachoit ta promesse frivole ;
Réponds. Oserois-tu manquer à ta parole ?
Et la religion, tous les peuples des cieux...
Dieu même par ta bouche a prononcé tes voeux...
Et tu les trahirois ? ... ce dieu prêt à t' absoudre,
S' il ne peut te toucher, ne crains-tu pas sa foudre ?
Sur ta tête coupable entends-tu ces éclats ?
Vois sortir... vois monter des gouffres du trépas,
Ces spectres ténébreux... toutes ces pâles ombres
Me lancent... quels regards et menaçans et sombres ! ...
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Le tombeau de Rancé.
Du fond de ce sépulchre, une lugubre voix...
Il s' ouvre... quel objet... c' est Rancé que je vois...
Lui qui vient me couvrir du feu de sa colère ! ...
Il s' élève... arrêtez... arrêtez, ô ! Mon père...
Il parle ! ... malheureux, où vas-tu t' égarer !
Des bras... du sein d' un dieu tu veux te retirer...
Tu veux rompre ces noeuds, dont lui-même t' attache ? ...
À tes yeux aveuglés ton jugement se cache ? ...
À ton oreille en vain ton arrêt retentit ? ...
Le ciel t' a rejetté... tremble... l' enfer rugit,
Il demande sa proye... et déjà la dévore...
Du fond de ce sépulchre, une lugubre voix...
Il s' ouvre... quel objet... c' est Rancé que je vois...
Lui qui vient me couvrir du feu de sa colère ! ...
Il s' élève... arrêtez... arrêtez, ô ! Mon père...
Il parle ! ... malheureux, où vas-tu t' égarer !
Des bras... du sein d' un dieu tu veux te retirer...
Tu veux rompre ces noeuds, dont lui-même t' attache ? ...
À tes yeux aveuglés ton jugement se cache ? ...
À ton oreille en vain ton arrêt retentit ? ...
Le ciel t' a rejetté... tremble... l' enfer rugit,
Il demande sa proye... et déjà la dévore...
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 2 SCENE 2
Comminge, D' Orvigni.
On voit D' Orvigni descendre de l' escalier au
côté droit avec une lettre à la main ; il lève
quelquefois les yeux au ciel, ils retombent
sur cet écrit, et il annonce la plus profonde
douleur ; il vient sur la scène.
Comminge, ne l' appercevant pas, continue.
Que faut-il ? ... repousser l'image que j'adore...
Arracher de mon coeur un penchant immortel...
Oublier un objet... qui vient avec le ciel
Partager mon hommage, et disputer mon ame...
Que dis-je ? ... Adélaïde... elle seule m' enflamme...
Tu tonnes, Dieu jaloux... eh bien... j' obéirai...
À tes loix asservi, j' oublierai... je mourrai.
Il apperçoit D' Orvigni, fait quelques pas au-devant de lui.
D' Orvigni... mais d' où viens ce trouble... ces alarmes...
D' Orvigni a toujours les yeux attachés sur la
lettre, et avance sur le théâtre.
Ses yeux sur un écrit qu'il trempe de ses larmes ! ...
Avec transport.
Ah ! Parlez, D' Orvigni... tous mes sens déchirés...
Parlez... Adélaïde... à ce nom vous pleurez ! ...
D' Orvigni, le regardant avec attendrissement .
Comminge... ah ! Malheureux ! ...
Comminge, avec transport .
Dans mon ame éperdue
Achevez d' enfoncer le poignard qui me tue...
Mes chagrins... mes douleurs peuvent-ils plus s'aigrir?
D' Orvigni, avec une profonde douleur.
Nous n' avons plus tous deux, Comminge... qu'à mourir.
Comminge.
Tout ce que j' aime, ô Dieu ! ... donnez-moi cette lettre...
D'Orvigni.
La pitié dans tes mains ne doit point la remettre...
Je t' épargne des maux...
Comminge.
Je veux m'en pénétrer.
D' Orvigni.
C' est à moi de souffrir.
Comminge, D' Orvigni.
On voit D' Orvigni descendre de l' escalier au
côté droit avec une lettre à la main ; il lève
quelquefois les yeux au ciel, ils retombent
sur cet écrit, et il annonce la plus profonde
douleur ; il vient sur la scène.
Comminge, ne l' appercevant pas, continue.
Que faut-il ? ... repousser l'image que j'adore...
Arracher de mon coeur un penchant immortel...
Oublier un objet... qui vient avec le ciel
Partager mon hommage, et disputer mon ame...
Que dis-je ? ... Adélaïde... elle seule m' enflamme...
Tu tonnes, Dieu jaloux... eh bien... j' obéirai...
À tes loix asservi, j' oublierai... je mourrai.
Il apperçoit D' Orvigni, fait quelques pas au-devant de lui.
D' Orvigni... mais d' où viens ce trouble... ces alarmes...
D' Orvigni a toujours les yeux attachés sur la
lettre, et avance sur le théâtre.
Ses yeux sur un écrit qu'il trempe de ses larmes ! ...
Avec transport.
Ah ! Parlez, D' Orvigni... tous mes sens déchirés...
Parlez... Adélaïde... à ce nom vous pleurez ! ...
D' Orvigni, le regardant avec attendrissement .
Comminge... ah ! Malheureux ! ...
Comminge, avec transport .
Dans mon ame éperdue
Achevez d' enfoncer le poignard qui me tue...
Mes chagrins... mes douleurs peuvent-ils plus s'aigrir?
D' Orvigni, avec une profonde douleur.
Nous n' avons plus tous deux, Comminge... qu'à mourir.
Comminge.
Tout ce que j' aime, ô Dieu ! ... donnez-moi cette lettre...
D'Orvigni.
La pitié dans tes mains ne doit point la remettre...
Je t' épargne des maux...
Comminge.
Je veux m'en pénétrer.
D' Orvigni.
C' est à moi de souffrir.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Comminge.
C' est à moi d' expirer.
D' Orvigni, faisant quelques pas pour se retirer.
Adieu, Comminge... adieu.
Comminge, furieux de douleur et s' opposant à
la sortie de D' Orvigni .
Non, cruel ; non, barbare.
Je lirai cet écrit.
D' Orvigni.
Le désespoir l' égare.
avec une douleur animée.
Que me demandes-tu ?
Comminge, avec impétuosité .
La fin de mes malheurs,
Le trépas, cette lettre.
D' Orvigni, la lui donne avec la même vivacité .
Eh bien ! Prends, lis, et meurs.
Comminge, lit .
"Grace à notre recherche, à la fin moins stérile,
Nous avons découvert votre nouvel asyle.
Hélas ! Puissiez-vous y gouter,
Vainqueur des passions, un destin plus tranquille ! ...
Quel coup nous allons vous porter !
Depuis un an, sachez que, du sort poursuivie...
Après s' être arrachée aux lieux qu' elle habitoit...
De son amant, l' ame toujours remplie...
Victime du chagrin qui la persécutoit...
Adélaïde... a terminé... sa vie..."
J'expire.
Il tombe évanoui sur une des sépultures des religieux ;
on se rappellera qu' elles sont un peu élevées de terre.
D' Orvigni, voulant le relever et le soutenir .
O! Mon ami,
que toute la vertu,
Que la religion..."
C' est à moi d' expirer.
D' Orvigni, faisant quelques pas pour se retirer.
Adieu, Comminge... adieu.
Comminge, furieux de douleur et s' opposant à
la sortie de D' Orvigni .
Non, cruel ; non, barbare.
Je lirai cet écrit.
D' Orvigni.
Le désespoir l' égare.
avec une douleur animée.
Que me demandes-tu ?
Comminge, avec impétuosité .
La fin de mes malheurs,
Le trépas, cette lettre.
D' Orvigni, la lui donne avec la même vivacité .
Eh bien ! Prends, lis, et meurs.
Comminge, lit .
"Grace à notre recherche, à la fin moins stérile,
Nous avons découvert votre nouvel asyle.
Hélas ! Puissiez-vous y gouter,
Vainqueur des passions, un destin plus tranquille ! ...
Quel coup nous allons vous porter !
Depuis un an, sachez que, du sort poursuivie...
Après s' être arrachée aux lieux qu' elle habitoit...
De son amant, l' ame toujours remplie...
Victime du chagrin qui la persécutoit...
Adélaïde... a terminé... sa vie..."
J'expire.
Il tombe évanoui sur une des sépultures des religieux ;
on se rappellera qu' elles sont un peu élevées de terre.
D' Orvigni, voulant le relever et le soutenir .
O! Mon ami,
que toute la vertu,
Que la religion..."
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 2 SCENE 3
Comminge, D' Orvigni, le père abbé.
on le voit descendre de l' escalier au côté droit,
il arrive sur la scène.
D' Orvigni, continue sans le voir .
Ah ! Moi-même abattu
Sous ce coup accablant... mes forces m' abandonnent...
Comminge... de la mort les ombres l' environnent...
Quel secours bienfaisant viendra le soulager ? ...
Dans ce séjour...
Le Père Abbé, à part .
Sachons pourquoi cet étranger...
D' Orvigni, toujours soutenant Comminge,
et appercevant le père abbé .
Ah ! Mon père, accourez... daignez... Comminge expire...
Cette lettre... l'amour... que puis-je, hélas ! Vous dire ?
Elle est à terre, auprès de Comminge.
Comminge se relevant en quelque sorte du sein
De la mort, voyant le père abbé, s' écrie :
Elle est morte, mon père !
et il retombe.
Le Père Abbé allant l' embrasser, et le soutenir .
écoutez votre ami,
Déjà votre douleur dans mon sein a gémi ;
La piété console, et n' est que la nature
Ardente à secourir... plus sensible,... plus pure...
De vos pleurs attendri, je viens les essuyer...
Sous le poids du malheur je viens vous appuyer...
D' Orvigni au devant du théâtre .
Quoi ! La religion est si compatissante,
Elle, que tout m' offroit terrible et menaçante !
On la redoute ailleurs, prompte à nous alarmer...
Ah ! Mortels, c' est ici que nous devons l' aimer.
Le Père Abbé toujours auprès de Comminge
et à D' Orvigni .
Voilà des passions les effets déplorables...
A Comminge qu' il tient embrassé.
Ne vous refusez pas à mes soins secourables...
À ma voix revenez de cet accablement.
Comminge se relevant un peu .
Je l' ai perdu... enfer, as-tu d' autre tourment ?
Le Père Abbé à D' Orvigni .
Vous voudrez bien laisser un moment...
Comminge, D' Orvigni, le père abbé.
on le voit descendre de l' escalier au côté droit,
il arrive sur la scène.
D' Orvigni, continue sans le voir .
Ah ! Moi-même abattu
Sous ce coup accablant... mes forces m' abandonnent...
Comminge... de la mort les ombres l' environnent...
Quel secours bienfaisant viendra le soulager ? ...
Dans ce séjour...
Le Père Abbé, à part .
Sachons pourquoi cet étranger...
D' Orvigni, toujours soutenant Comminge,
et appercevant le père abbé .
Ah ! Mon père, accourez... daignez... Comminge expire...
Cette lettre... l'amour... que puis-je, hélas ! Vous dire ?
Elle est à terre, auprès de Comminge.
Comminge se relevant en quelque sorte du sein
De la mort, voyant le père abbé, s' écrie :
Elle est morte, mon père !
et il retombe.
Le Père Abbé allant l' embrasser, et le soutenir .
écoutez votre ami,
Déjà votre douleur dans mon sein a gémi ;
La piété console, et n' est que la nature
Ardente à secourir... plus sensible,... plus pure...
De vos pleurs attendri, je viens les essuyer...
Sous le poids du malheur je viens vous appuyer...
D' Orvigni au devant du théâtre .
Quoi ! La religion est si compatissante,
Elle, que tout m' offroit terrible et menaçante !
On la redoute ailleurs, prompte à nous alarmer...
Ah ! Mortels, c' est ici que nous devons l' aimer.
Le Père Abbé toujours auprès de Comminge
et à D' Orvigni .
Voilà des passions les effets déplorables...
A Comminge qu' il tient embrassé.
Ne vous refusez pas à mes soins secourables...
À ma voix revenez de cet accablement.
Comminge se relevant un peu .
Je l' ai perdu... enfer, as-tu d' autre tourment ?
Le Père Abbé à D' Orvigni .
Vous voudrez bien laisser un moment...
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
D' Orvigni fait quelques pas pour se retirer.
Comminge se relevant avec fureur .
Qu' il demeure,
Mon père... qu' à ses yeux je gémisse... je meure...
Tous mes crimes encor ne lui sont pas connus.
Il m'avoit supposé quelque ombre de vertus ;
Il pourroit m'estimer : de son erreur extrême
Qu' il soit désabusé... que D' Orvigni... vous même...
Que l' enfer... que le ciel... que l' univers entier,
Apprennent des forfaits... qu' on ne peut expier.
Qu' une ame... sans remords, devant vous se déploye.
Oui, dans ce même instant, où le ciel me foudroye,
Je formois le projet... tout mes liens rompus...
J'allois porter mon coeur aux pieds... elle n' est plus!
Et ce dieu m' en punit...
Il retombe.
Le Père Abbé.
Ses esprits éperdus...
A D' Orvigni.
Souffrez...
D' Orvigni se retire.
Comminge revenu à lui, et voyant sortir son
ami .
Vous me quittez !
D' Orvigni se retournant .
Je reviendrai...
Comminge avec attendrissement au père abbé .
Mon père...
Vous n' empêcherez point qu' il ferme ma paupière ? ...
Comminge se relevant avec fureur .
Qu' il demeure,
Mon père... qu' à ses yeux je gémisse... je meure...
Tous mes crimes encor ne lui sont pas connus.
Il m'avoit supposé quelque ombre de vertus ;
Il pourroit m'estimer : de son erreur extrême
Qu' il soit désabusé... que D' Orvigni... vous même...
Que l' enfer... que le ciel... que l' univers entier,
Apprennent des forfaits... qu' on ne peut expier.
Qu' une ame... sans remords, devant vous se déploye.
Oui, dans ce même instant, où le ciel me foudroye,
Je formois le projet... tout mes liens rompus...
J'allois porter mon coeur aux pieds... elle n' est plus!
Et ce dieu m' en punit...
Il retombe.
Le Père Abbé.
Ses esprits éperdus...
A D' Orvigni.
Souffrez...
D' Orvigni se retire.
Comminge revenu à lui, et voyant sortir son
ami .
Vous me quittez !
D' Orvigni se retournant .
Je reviendrai...
Comminge avec attendrissement au père abbé .
Mon père...
Vous n' empêcherez point qu' il ferme ma paupière ? ...
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 2 SCENE 4
Comminge, le père abbé.
Le Père Abbé.
C' est à mes seuls regards que vous devez offrir
Les blessures d' un coeur...
Comminge, toujours sur cette sépulture, et
avec une espece de fureur .
Que rien ne peut guérir,
Mon père. C' en est fait. Qu' il me réduise en poudre,
Ce dieu... qui s' est vengé... j' attends ici sa foudre.
Il embrasse la terre avec transport.
Le Père Abbé.
Ah ! Malheureux Arsène ! Ah ! Mon fils... connoissez
Ce dieu qui vous entend, et que vous offensez.
Sans doute, contre vous, s'armant de son tonnerre,
Il peut de sa justice épouvanter la terre,
Montrer à sa frayeur dans votre châtiment,
Du céleste couroux l' éternel monument ;
De ses coups exposer le spectacle terrible...
Mais ce dieu... c'est un père indulgent et sensible...
Et vous en abusez, enfant dénaturé ? ...
Comminge, dans la même situation .
Mon père... ah ! Loin de moi ce dieu s' est retiré.
Il m' ôte Adélaïde !
Il dit ces mots en pleurant .
Comminge, le père abbé.
Le Père Abbé.
C' est à mes seuls regards que vous devez offrir
Les blessures d' un coeur...
Comminge, toujours sur cette sépulture, et
avec une espece de fureur .
Que rien ne peut guérir,
Mon père. C' en est fait. Qu' il me réduise en poudre,
Ce dieu... qui s' est vengé... j' attends ici sa foudre.
Il embrasse la terre avec transport.
Le Père Abbé.
Ah ! Malheureux Arsène ! Ah ! Mon fils... connoissez
Ce dieu qui vous entend, et que vous offensez.
Sans doute, contre vous, s'armant de son tonnerre,
Il peut de sa justice épouvanter la terre,
Montrer à sa frayeur dans votre châtiment,
Du céleste couroux l' éternel monument ;
De ses coups exposer le spectacle terrible...
Mais ce dieu... c'est un père indulgent et sensible...
Et vous en abusez, enfant dénaturé ? ...
Comminge, dans la même situation .
Mon père... ah ! Loin de moi ce dieu s' est retiré.
Il m' ôte Adélaïde !
Il dit ces mots en pleurant .
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Le Père Abbé.
Et vous osez, mon frère,
Élever jusqu'à lui votre voix téméraire ?
Dans vos impiétés vous accusez le ciel ?
Rendez grace plûtôt à son bras paternel ;
Que dis-je ? Vous pleurez l' objet qu' il vous enlève?
Il frappe Adélaïde. Et qui conduit le glaive ?
Qui l' immole ? ... homme aveugle, ouvre les yeux ; c' est toi
C' est toi, qui trahissant ta promesse, ta foi,
Transfuge des autels, pour marcher vers l' abyme,
Courois te rendre au monde, à la fange du crime.
Ce dieu qui d' un regard perce l' immensité,
Les profondeurs du tems, et de l' éternité,
Il a lu dans ton coeur, dans ses plis les plus sombres,
En a développé les criminelles ombres ;
Il t' a vu prêt enfin à rompre tes sermens...
Il te ravit l' auteur de tes égaremens.
Sa clémence outragée à l' homme t' abandonne...
S' il t' échappe des pleurs, que le ciel te pardonne,
Qu' ils implorent ta grace, et celle de l' objet...,
Par la voix du devoir je vous parle à regret...
Donnez-moi votre bras...
il relève Comminge qui fait des efforts, et
s' appuye sur le bras du père abbé.
Et vous osez, mon frère,
Élever jusqu'à lui votre voix téméraire ?
Dans vos impiétés vous accusez le ciel ?
Rendez grace plûtôt à son bras paternel ;
Que dis-je ? Vous pleurez l' objet qu' il vous enlève?
Il frappe Adélaïde. Et qui conduit le glaive ?
Qui l' immole ? ... homme aveugle, ouvre les yeux ; c' est toi
C' est toi, qui trahissant ta promesse, ta foi,
Transfuge des autels, pour marcher vers l' abyme,
Courois te rendre au monde, à la fange du crime.
Ce dieu qui d' un regard perce l' immensité,
Les profondeurs du tems, et de l' éternité,
Il a lu dans ton coeur, dans ses plis les plus sombres,
En a développé les criminelles ombres ;
Il t' a vu prêt enfin à rompre tes sermens...
Il te ravit l' auteur de tes égaremens.
Sa clémence outragée à l' homme t' abandonne...
S' il t' échappe des pleurs, que le ciel te pardonne,
Qu' ils implorent ta grace, et celle de l' objet...,
Par la voix du devoir je vous parle à regret...
Donnez-moi votre bras...
il relève Comminge qui fait des efforts, et
s' appuye sur le bras du père abbé.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Comminge.
Qu' exigez-vous, mon père ?
J' allois sur cette tombe achever ma misère.
Pourquoi me rappeller à ce jour que je fuis ?
Nommez-moi criminel... ? Je sais que je le suis,
Mais cet objet, mon père,... il n'étoit point coupable ;
J' ai fait tous ses malheurs... le ciel inexorable
Auroit dû sur moi seul appésantir ses coups,
Et sur Adélaïde il les réunit tous ! ...
Le Père Abbé.
Respectez ses décrets ; adorez ses vengeances,
Et souffrez...
Comminge.
Il a mis le comble à mes souffrances.
Je ne le cache point. Irois-je vous tromper?
Son bras, du coup mortel est venu me frapper.
Je crains peu le trépas : je le vois d' un oeil ferme,
Comme de mes malheurs le remède et le terme.
Mais ce que je redoute, est un dieu couroucé...
Retirez donc ce trait, dans mon coeur enfoncé;
Je frémis de le dire... Adélaïde est morte...
Et sur Dieu, cependant, plus que jamais l'emporte.
Voilà le seul objet qui me suit au tombeau.
À la pâle clarté de ce triste flambeau,
C' est elle que je vois, plus séduisante encore.
Aux autels prosterné, c' est elle que j' adore ;
D' autant plus accablé de ma funeste erreur,
Que même, le remord n' entre plus dans mon coeur...
Tout, de ma passion entretient les amorces.
Qu' exigez-vous, mon père ?
J' allois sur cette tombe achever ma misère.
Pourquoi me rappeller à ce jour que je fuis ?
Nommez-moi criminel... ? Je sais que je le suis,
Mais cet objet, mon père,... il n'étoit point coupable ;
J' ai fait tous ses malheurs... le ciel inexorable
Auroit dû sur moi seul appésantir ses coups,
Et sur Adélaïde il les réunit tous ! ...
Le Père Abbé.
Respectez ses décrets ; adorez ses vengeances,
Et souffrez...
Comminge.
Il a mis le comble à mes souffrances.
Je ne le cache point. Irois-je vous tromper?
Son bras, du coup mortel est venu me frapper.
Je crains peu le trépas : je le vois d' un oeil ferme,
Comme de mes malheurs le remède et le terme.
Mais ce que je redoute, est un dieu couroucé...
Retirez donc ce trait, dans mon coeur enfoncé;
Je frémis de le dire... Adélaïde est morte...
Et sur Dieu, cependant, plus que jamais l'emporte.
Voilà le seul objet qui me suit au tombeau.
À la pâle clarté de ce triste flambeau,
C' est elle que je vois, plus séduisante encore.
Aux autels prosterné, c' est elle que j' adore ;
D' autant plus accablé de ma funeste erreur,
Que même, le remord n' entre plus dans mon coeur...
Tout, de ma passion entretient les amorces.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Le Père Abbé.
La grace, mon cher fils, vous prêtera ses forces ;
Vous êtes un dépôt à ses soins confié.
D' un si cruel tourment le ciel aura pitié.
Qu' un espoir courageux vous flatte, et vous anime.
Criez à votre dieu du profond de l' abyme ;
D' un honteux esclavage il brisera les fers.
Le créateur des cieux, le souverain des mers,
Qui fait taire d' un mot les bruyantes tempêtes,
Enchaîne avec les vents la foudre sur nos têtes,
Saura rendre le calme à vos sens agités ;
Mais le zèle constant obtient seul ses bontés.
Voulez-vous réveiller dans votre ame impuissante
Ces sublimes élans, cette flamme agissante,
Qui nous porte à l' amour de la divinité ?
Qu' un tableau de terreur frappe l' humanité.
Devant vos yeux sans cesse appellez la peinture
De cette mort, l' effroi de l' humaine nature.
Plus docile à nos loix, achevez de creuser
Cette fosse, où l' argile ira se déposer.
Mais se souffle immortel, cet esprit d' un dieu même,
Tremblez qu' il n' ait sur l' homme attiré l' anathême ;
Tremblez ; envisagez l' arbitre souverain,
Sur cette fosse assis, la balance à la main ;
Le père a disparu, vous voyez votre juge ;
Il prononce. Où sera, mortel, votre refuge ?
En lui montrant sa fosse.
C' est donc là que penché sous le glaive d' un dieu,
C' est là que vous devez ensevelir ce feu,
Qu' il faut que votre coeur se soumette, se brise,
Sur vos devoirs cruels que la mort vous instruise...
Avec ce maître affreux je vous laisse. Je vais
Près d' Euthime...
Il fait quelques pas pour se retirer.
La grace, mon cher fils, vous prêtera ses forces ;
Vous êtes un dépôt à ses soins confié.
D' un si cruel tourment le ciel aura pitié.
Qu' un espoir courageux vous flatte, et vous anime.
Criez à votre dieu du profond de l' abyme ;
D' un honteux esclavage il brisera les fers.
Le créateur des cieux, le souverain des mers,
Qui fait taire d' un mot les bruyantes tempêtes,
Enchaîne avec les vents la foudre sur nos têtes,
Saura rendre le calme à vos sens agités ;
Mais le zèle constant obtient seul ses bontés.
Voulez-vous réveiller dans votre ame impuissante
Ces sublimes élans, cette flamme agissante,
Qui nous porte à l' amour de la divinité ?
Qu' un tableau de terreur frappe l' humanité.
Devant vos yeux sans cesse appellez la peinture
De cette mort, l' effroi de l' humaine nature.
Plus docile à nos loix, achevez de creuser
Cette fosse, où l' argile ira se déposer.
Mais se souffle immortel, cet esprit d' un dieu même,
Tremblez qu' il n' ait sur l' homme attiré l' anathême ;
Tremblez ; envisagez l' arbitre souverain,
Sur cette fosse assis, la balance à la main ;
Le père a disparu, vous voyez votre juge ;
Il prononce. Où sera, mortel, votre refuge ?
En lui montrant sa fosse.
C' est donc là que penché sous le glaive d' un dieu,
C' est là que vous devez ensevelir ce feu,
Qu' il faut que votre coeur se soumette, se brise,
Sur vos devoirs cruels que la mort vous instruise...
Avec ce maître affreux je vous laisse. Je vais
Près d' Euthime...
Il fait quelques pas pour se retirer.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Comminge vivement.
Mon père, éclairez ses secrets...
Tantôt je l' ai revu... je résiste avec peine
Au desir de savoir quel objet le ramène,
En ces lieux... sur ma trace... il semble partager
Mes chagrins, mes travaux... il veut les soulager ! ...
Sur ma fosse il levoit une main défaillante,
Et sa main retomboit toujours plus languissante...
Il gémissoit, mon père... il me connoit... sachez...
Dans quelle sombre nuit ses destins sont cachés ! ...
Moi-même... en ce moment quel sentiment me guide ? ...
Qui peut m' intéresser après Adélaïde ?
Le Père Abbé.
Eh quoi, toujours ce nom ?
Comminge.
Ah, mon père!
Mon père, éclairez ses secrets...
Tantôt je l' ai revu... je résiste avec peine
Au desir de savoir quel objet le ramène,
En ces lieux... sur ma trace... il semble partager
Mes chagrins, mes travaux... il veut les soulager ! ...
Sur ma fosse il levoit une main défaillante,
Et sa main retomboit toujours plus languissante...
Il gémissoit, mon père... il me connoit... sachez...
Dans quelle sombre nuit ses destins sont cachés ! ...
Moi-même... en ce moment quel sentiment me guide ? ...
Qui peut m' intéresser après Adélaïde ?
Le Père Abbé.
Eh quoi, toujours ce nom ?
Comminge.
Ah, mon père!
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Le Père Abbé.
Mes yeux
D' Euthime éclairciront les ennuis ténébreux.
Sans doute il m' apprendra quelle raison puissante
Entraîne sur vos pas sa douleur gémissante ;
Je vous en instruirai. Que son sort est touchant !
Au matin de ses jours, il penche à son couchant !
Je crains que sa langueur, de ses larmes nourrie,
Du sommeil de la mort ne soit bientôt suivie.
Comminge avec transport.
Il mourroit !
Le Père Abbé.
Le trépas pourra nous l' enlever...
Allez sur cette fosse apprendre à le braver.
Le chrétien, qu' ai-je dit ? Son infidèle image,
Cet être décoré du vain titre de sage,
Cet enfant de l' orgueil s' accoutume à mourir.
Comminge se prosterne devant le père abbé
qui sort.
Mes yeux
D' Euthime éclairciront les ennuis ténébreux.
Sans doute il m' apprendra quelle raison puissante
Entraîne sur vos pas sa douleur gémissante ;
Je vous en instruirai. Que son sort est touchant !
Au matin de ses jours, il penche à son couchant !
Je crains que sa langueur, de ses larmes nourrie,
Du sommeil de la mort ne soit bientôt suivie.
Comminge avec transport.
Il mourroit !
Le Père Abbé.
Le trépas pourra nous l' enlever...
Allez sur cette fosse apprendre à le braver.
Le chrétien, qu' ai-je dit ? Son infidèle image,
Cet être décoré du vain titre de sage,
Cet enfant de l' orgueil s' accoutume à mourir.
Comminge se prosterne devant le père abbé
qui sort.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 2 SCENE 5
Comminge seul et revenant au-devant du
théâtre .
Que je suis malheureux ! ... tout me vient attendrir...
Cet Euthime... ah ! Comminge, écarte les alarmes ;
Dans tes yeux presque éteints est-il encor des larmes ?
Sous le froid de la mort prêt s' anéantir
Ton coeur au sentiment pourroit-il se r'ouvrir ?
J' ai tout perdu... c' est moi, que le tombeau dévore !
C' est moi qui ne suis plus... ô mon Dieu que j'implore,
Tu veux... que je l' oublie... ô comble de douleurs !
Tu prétens lui ravir jusqu' à mes derniers pleurs ?
Et ce suprême effort... n' est point en ma puissance...
Pardonne, dieu vengeur, je sais... que je t'offensse...
Je voudrois... t' obéir...
Il va au tombeau de Rancé, embrasse ce tombeau
avec transport, et y répand des larmes.
ah ! Donne moi ton coeur,
Toi, qui des passions domptas l' attrait vainqueur.
Rancé... tu sus aimer, tu connus la tendresse,
Tu sauras... comme il faut surmonter sa foiblesse...
Sois sensible à mes cris, viens... viens à mon secours,
Viens combattre un tyran... que je chéris toujours.
Mes larmes vainement inonderoient ta tombe? ...
Aimas-tu comme moi ? ... sous mes maux je succombe...
Il est penché sur le tombeau, aux pieds de la
croix, et dans un profond accablement.
Comminge seul et revenant au-devant du
théâtre .
Que je suis malheureux ! ... tout me vient attendrir...
Cet Euthime... ah ! Comminge, écarte les alarmes ;
Dans tes yeux presque éteints est-il encor des larmes ?
Sous le froid de la mort prêt s' anéantir
Ton coeur au sentiment pourroit-il se r'ouvrir ?
J' ai tout perdu... c' est moi, que le tombeau dévore !
C' est moi qui ne suis plus... ô mon Dieu que j'implore,
Tu veux... que je l' oublie... ô comble de douleurs !
Tu prétens lui ravir jusqu' à mes derniers pleurs ?
Et ce suprême effort... n' est point en ma puissance...
Pardonne, dieu vengeur, je sais... que je t'offensse...
Je voudrois... t' obéir...
Il va au tombeau de Rancé, embrasse ce tombeau
avec transport, et y répand des larmes.
ah ! Donne moi ton coeur,
Toi, qui des passions domptas l' attrait vainqueur.
Rancé... tu sus aimer, tu connus la tendresse,
Tu sauras... comme il faut surmonter sa foiblesse...
Sois sensible à mes cris, viens... viens à mon secours,
Viens combattre un tyran... que je chéris toujours.
Mes larmes vainement inonderoient ta tombe? ...
Aimas-tu comme moi ? ... sous mes maux je succombe...
Il est penché sur le tombeau, aux pieds de la
croix, et dans un profond accablement.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 2 SCENE 6
Comminge, Euthime.
(ce dernier descend de l' escalier au côté droit ;
c' est de ce même côté que Comminge a les deux mains
et la tête appuyées sur le tombeau, il est donc
assez naturel qu' il ne voye pas Euthime, qui
n' apperçoit point aussi Comminge. Euthime se
traîne en quelque sorte jusqu' à sa fosse ; on se
souviendra qu' elle est sur le devant du théâtre
à droite ; ce religieux qui a toujours la tête
enfoncée dans son habillement, examine long-tems
son dernier asyle, il gémit, il y tend les deux
mains qu' il lève ensuite au ciel, il quitte ce lieu
de la scène, fait quelques pas pour se retirer,
apperçoit Comminge, paroit troublé, va à lui,
s' en écarte, revient enfin ; Comminge qui
ne l' a pas vu, se lève, et passe au côté gauche du
théâtre près de la fosse ; Euthime court prendre sa
place. Il a remarqué que Comminge avoit laissé
échapper ses pleurs sur le tombeau, il y demeure
dans la même situation où l' on vient de voir Comminge.)
Comminge se levant, comme on vient de le dire, et
allant vers sa fosse .
Allons nous acquiter d' un barbare devoir.
Qu' ai-je dit ? Le trépas n' est-il point mon espoir ?
il prend la pioche.
Ô terre, dans tes flancs ! ... à ton sein qui m' appelle...
Puis-je rendre assez-tôt ma substance mortelle ?
Il est aisé de sentir que Comminge veut parler de son corps.
Ce coeur, par vingt tyrans, déchiré, dévoré...
Pourroit-il assez-tôt être au néant livré ? ...
Il enfonce la pioche, creuse la terre, trouve de
la résistance. Pendant ce tems Euthime donne des
baisers au tombeau, on diroit qu' il veut
recueillir dans son coeur les larmes de
Comminge.
Tu m' opposes, ô terre, un rocher inflexible...
il arrache des pierres qu' il jette sur le bord
de la fosse.
Ah ! T' ouvrir sous mes coups, c' est te montrer sensible...
Il prend la pele, et jette la terre de côté et
D' autre, il met les pieds dans sa fosse.
ô mon Dieu, c' est ici que tu me soumettras...
de l' amour c' est ici que tu triompheras...
Euthime se relève, tourne les yeux vers le ciel,
met sa main sur son coeur, et retombe dans la
même situation.
Mais jusqu' à ce moment permets... je vis encore...
Je sens... qu' Adélaïde est tout ce que j' adore.
Il tombe dans une attitude de douleur sur le
coin de la fosse qui regarde le tombeau, par là
il peut être vu du spectateur ; Euthime qui
continue à n'être pas apperçu de Comminge, fait
quelques pas vers lui, revient, fait des signes
de douleur, retourne et demeure une main
appuyée sur le tombeau.
Pardonne moi, grand dieu, c' est mon dernier soupir...
Pour la dernière fois laisse-moi me remplir
De cet objet... qu' il faut que je te sacrifie.
Pardonne, si malgré le serment qui me lie,
J' ai gardé, dans un sein, qui nourrit son ardeur,
Il tire de son sein, le portrait d' Adélaïde.
Euthime est parvenu jusqu' auprès de Comminge,
Et met une de ses mains à ses yeux, comme s' il
Pleuroit, il écoute Comminge avec intérêt.
Cette image, si chère... attachée à mon coeur...
Eut-on pu l' en ôter, sans m' arracher la vie ?
Il examine le portrait.
Comminge, Euthime.
(ce dernier descend de l' escalier au côté droit ;
c' est de ce même côté que Comminge a les deux mains
et la tête appuyées sur le tombeau, il est donc
assez naturel qu' il ne voye pas Euthime, qui
n' apperçoit point aussi Comminge. Euthime se
traîne en quelque sorte jusqu' à sa fosse ; on se
souviendra qu' elle est sur le devant du théâtre
à droite ; ce religieux qui a toujours la tête
enfoncée dans son habillement, examine long-tems
son dernier asyle, il gémit, il y tend les deux
mains qu' il lève ensuite au ciel, il quitte ce lieu
de la scène, fait quelques pas pour se retirer,
apperçoit Comminge, paroit troublé, va à lui,
s' en écarte, revient enfin ; Comminge qui
ne l' a pas vu, se lève, et passe au côté gauche du
théâtre près de la fosse ; Euthime court prendre sa
place. Il a remarqué que Comminge avoit laissé
échapper ses pleurs sur le tombeau, il y demeure
dans la même situation où l' on vient de voir Comminge.)
Comminge se levant, comme on vient de le dire, et
allant vers sa fosse .
Allons nous acquiter d' un barbare devoir.
Qu' ai-je dit ? Le trépas n' est-il point mon espoir ?
il prend la pioche.
Ô terre, dans tes flancs ! ... à ton sein qui m' appelle...
Puis-je rendre assez-tôt ma substance mortelle ?
Il est aisé de sentir que Comminge veut parler de son corps.
Ce coeur, par vingt tyrans, déchiré, dévoré...
Pourroit-il assez-tôt être au néant livré ? ...
Il enfonce la pioche, creuse la terre, trouve de
la résistance. Pendant ce tems Euthime donne des
baisers au tombeau, on diroit qu' il veut
recueillir dans son coeur les larmes de
Comminge.
Tu m' opposes, ô terre, un rocher inflexible...
il arrache des pierres qu' il jette sur le bord
de la fosse.
Ah ! T' ouvrir sous mes coups, c' est te montrer sensible...
Il prend la pele, et jette la terre de côté et
D' autre, il met les pieds dans sa fosse.
ô mon Dieu, c' est ici que tu me soumettras...
de l' amour c' est ici que tu triompheras...
Euthime se relève, tourne les yeux vers le ciel,
met sa main sur son coeur, et retombe dans la
même situation.
Mais jusqu' à ce moment permets... je vis encore...
Je sens... qu' Adélaïde est tout ce que j' adore.
Il tombe dans une attitude de douleur sur le
coin de la fosse qui regarde le tombeau, par là
il peut être vu du spectateur ; Euthime qui
continue à n'être pas apperçu de Comminge, fait
quelques pas vers lui, revient, fait des signes
de douleur, retourne et demeure une main
appuyée sur le tombeau.
Pardonne moi, grand dieu, c' est mon dernier soupir...
Pour la dernière fois laisse-moi me remplir
De cet objet... qu' il faut que je te sacrifie.
Pardonne, si malgré le serment qui me lie,
J' ai gardé, dans un sein, qui nourrit son ardeur,
Il tire de son sein, le portrait d' Adélaïde.
Euthime est parvenu jusqu' auprès de Comminge,
Et met une de ses mains à ses yeux, comme s' il
Pleuroit, il écoute Comminge avec intérêt.
Cette image, si chère... attachée à mon coeur...
Eut-on pu l' en ôter, sans m' arracher la vie ?
Il examine le portrait.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Voilà... voilà ces traits... que l' on veut que j' oublie ?
Effacez sous mes pleurs... si présens à mes yeux...
Il le couvre de baisers et de larmes.
Ma chère Adélaïde... emporte tous mes voeux...
Euthime les deux mains étendues vers Comminge
qui toujours ne le voit pas, et comme prêt à
s' écrier.
Le dernier sentiment de l' esprit qui m' anime...
Euthime avec un cri...
Ah ! Comte de Comminge !
Il se retire avec une espèce de précipitation.
Comminge remettant avec vivacité le portrait
dans son sein, et étonné
à ces accens ! ...
Il se retourne.
Euthime ! ...
Demeurez...
Euthime se retire vers l' escalier de l' aile droite.
A part.
cette voix... cruel... vous me fuyez...
A lui.
Je n' écoute plus rien... que j' expire à vos pieds...
Euthime avance le bras pour empêcher Comminge
d' approcher.
Quoi... vous me repoussez !
Il demeure interdit.
son empire m' étonne! ...
Euthime a monté déjà quelques marches, et il
tombe les deux mains appuyées sur ses genoux, dans
l' attitude d' une personne qui pleure.
Il pleure ! ...
Effacez sous mes pleurs... si présens à mes yeux...
Il le couvre de baisers et de larmes.
Ma chère Adélaïde... emporte tous mes voeux...
Euthime les deux mains étendues vers Comminge
qui toujours ne le voit pas, et comme prêt à
s' écrier.
Le dernier sentiment de l' esprit qui m' anime...
Euthime avec un cri...
Ah ! Comte de Comminge !
Il se retire avec une espèce de précipitation.
Comminge remettant avec vivacité le portrait
dans son sein, et étonné
à ces accens ! ...
Il se retourne.
Euthime ! ...
Demeurez...
Euthime se retire vers l' escalier de l' aile droite.
A part.
cette voix... cruel... vous me fuyez...
A lui.
Je n' écoute plus rien... que j' expire à vos pieds...
Euthime avance le bras pour empêcher Comminge
d' approcher.
Quoi... vous me repoussez !
Il demeure interdit.
son empire m' étonne! ...
Euthime a monté déjà quelques marches, et il
tombe les deux mains appuyées sur ses genoux, dans
l' attitude d' une personne qui pleure.
Il pleure ! ...
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Comminge avec impétuosité allant
à Euthime, et déjà sur une des marches.
je saurai...
Euthime se relevant, et lui faisant signe
toujours de la main pour qu' il n' avance pas .
Restez... le ciel l' ordonne...
Euthime achève de monter avec peine, tournant
souvent la tête.
Comminge étant étonné et interdit sur le
degré.
Dieu lui même commande ; il enchaine mes pas.
Quel silence cruel que je ne comprends pas ?
Il se retourne vers Euthime qui est au haut de
l' escalier, ce dernier joint les mains, semble
s' adresser au ciel, regarde encore Comminge, et
pousse un profond gémissement.
Euthime... cher Euthime... il gémit... et me quitte !
à Euthime, et déjà sur une des marches.
je saurai...
Euthime se relevant, et lui faisant signe
toujours de la main pour qu' il n' avance pas .
Restez... le ciel l' ordonne...
Euthime achève de monter avec peine, tournant
souvent la tête.
Comminge étant étonné et interdit sur le
degré.
Dieu lui même commande ; il enchaine mes pas.
Quel silence cruel que je ne comprends pas ?
Il se retourne vers Euthime qui est au haut de
l' escalier, ce dernier joint les mains, semble
s' adresser au ciel, regarde encore Comminge, et
pousse un profond gémissement.
Euthime... cher Euthime... il gémit... et me quitte !
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 2 SCENE 7
Comminge seul, revenant sur la scène.
Je ne puis soutenir le trouble qui m' agite...
Ces sons... ces sons touchans... dans mon ame ont porté.
J' ai cru... l' illusion... frappé de tout côté...
Ma douleur... mon tourment... mon désespoir redouble...
Tout ce qui m' environne augmente encore ce trouble...
il vient vers le tombeau.
Ô Dieu qui me punis, que j' offense toujours,
Ô Dieu, viens désunir la trame de mes jours,
Viens me débarrasser du fardeau de mon être...
Il a une main appuyée sur le tombeau.
ACTE 2 SCENE 8
Comminge, D' Orvigni.
D' Orvigni avec précipitation descendant
par l' escalier du côté gauche, et accourant à
Comminge .
Ce malheureux...
Comminge avec transport.
Euthime...
D'Orvigni.
En ce moment, peut être
À son terme arrivé...
Comminge effrayé .
Vous dites ?
D' Orvigni.
à l' instant
Je l' ai vu qu' on traînoit foible, pâle et mourant,
Aux lieux, où la pitié d' une main bienfaisante
Prodigue ses secours à la vie expirante...
Comminge.
Je le perdois... il sort...
D' Orvigni. à travers sa pâleur
J' ai saisi quelques traits... ils ont troublé mon coeur...
Comminge... il faut le voir.
Comminge.
Je le verrai sans doute.
Ce coeur trop déchiré n' a plus rien qu' il redoute.
Il sort.
D' Orvigni.
Je suis vos pas.
à part.
ô ciel ! Prens pitié de ses maux !
S' il n' est point en ces murs, où donc est le repos ?
Comminge seul, revenant sur la scène.
Je ne puis soutenir le trouble qui m' agite...
Ces sons... ces sons touchans... dans mon ame ont porté.
J' ai cru... l' illusion... frappé de tout côté...
Ma douleur... mon tourment... mon désespoir redouble...
Tout ce qui m' environne augmente encore ce trouble...
il vient vers le tombeau.
Ô Dieu qui me punis, que j' offense toujours,
Ô Dieu, viens désunir la trame de mes jours,
Viens me débarrasser du fardeau de mon être...
Il a une main appuyée sur le tombeau.
ACTE 2 SCENE 8
Comminge, D' Orvigni.
D' Orvigni avec précipitation descendant
par l' escalier du côté gauche, et accourant à
Comminge .
Ce malheureux...
Comminge avec transport.
Euthime...
D'Orvigni.
En ce moment, peut être
À son terme arrivé...
Comminge effrayé .
Vous dites ?
D' Orvigni.
à l' instant
Je l' ai vu qu' on traînoit foible, pâle et mourant,
Aux lieux, où la pitié d' une main bienfaisante
Prodigue ses secours à la vie expirante...
Comminge.
Je le perdois... il sort...
D' Orvigni. à travers sa pâleur
J' ai saisi quelques traits... ils ont troublé mon coeur...
Comminge... il faut le voir.
Comminge.
Je le verrai sans doute.
Ce coeur trop déchiré n' a plus rien qu' il redoute.
Il sort.
D' Orvigni.
Je suis vos pas.
à part.
ô ciel ! Prens pitié de ses maux !
S' il n' est point en ces murs, où donc est le repos ?
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 3 SCENE 1
Comminge descendant avec précipitation et
D' Orvigni le suivant avec le même empressement .
Comminge encore sur les degrès .
Non, ne me suivez point.
il est descendu.
D' Orvigni.
Toujours, dans ces lieux sombres !
Qu' y venez-vous chercher!
Comminge.
Les plus funèbres ombres.
S' il étoit sur la terre un séjour plus affreux.
J' y précipiterois les pas d' un malheureux.
Dans la nuit de la mort, que ma douleur se cache.
À me persécuter, tout s' obstine... s' attache...
Euthime... vous savez quel trouble en sa faveur,
Quel pouvoir inconnu semble entraîner mon coeur,
Qu' après Adélaïde, il est le seul, peut-être,
Pour qui le sentiment dans mon ame ait pu naître.
Cet Euthime... que j'aime, et je ne sais pourquoi...
Refuse de me voir... il s' éloigne de moi! ...
Malgré mon désespoir, ma prière, mes larmes,
Il veut à mes regards dérober ses alarmes:
On dit même, je tremble à m' offrir ce tableau
Que l'on voit de ses jours s'obscurcir le flambeau...
S' il m'étoit enlevé... que m'importe sa vie ?
Que dis-je, ô ciel! La mienne à son sort est unie...
Mais, D'Orvigni, d'où vient cet intérêt puissant?
Seroit-ce du malheur le suprême ascendant,
Et des infortunés l'ame éprouvée et tendre
Plus qu'une autre ame enfin cherche-t-elle à s'étendre ?
Où le ciel pour accroître et nos maux, et nos soins,
Met-il le sentiment au rang de nos besoins?
Euthime... à mes côtés je le revois sans cesse...
Il me cherche... me fuit... dans quel trouble il me laisse!
Comminge descendant avec précipitation et
D' Orvigni le suivant avec le même empressement .
Comminge encore sur les degrès .
Non, ne me suivez point.
il est descendu.
D' Orvigni.
Toujours, dans ces lieux sombres !
Qu' y venez-vous chercher!
Comminge.
Les plus funèbres ombres.
S' il étoit sur la terre un séjour plus affreux.
J' y précipiterois les pas d' un malheureux.
Dans la nuit de la mort, que ma douleur se cache.
À me persécuter, tout s' obstine... s' attache...
Euthime... vous savez quel trouble en sa faveur,
Quel pouvoir inconnu semble entraîner mon coeur,
Qu' après Adélaïde, il est le seul, peut-être,
Pour qui le sentiment dans mon ame ait pu naître.
Cet Euthime... que j'aime, et je ne sais pourquoi...
Refuse de me voir... il s' éloigne de moi! ...
Malgré mon désespoir, ma prière, mes larmes,
Il veut à mes regards dérober ses alarmes:
On dit même, je tremble à m' offrir ce tableau
Que l'on voit de ses jours s'obscurcir le flambeau...
S' il m'étoit enlevé... que m'importe sa vie ?
Que dis-je, ô ciel! La mienne à son sort est unie...
Mais, D'Orvigni, d'où vient cet intérêt puissant?
Seroit-ce du malheur le suprême ascendant,
Et des infortunés l'ame éprouvée et tendre
Plus qu'une autre ame enfin cherche-t-elle à s'étendre ?
Où le ciel pour accroître et nos maux, et nos soins,
Met-il le sentiment au rang de nos besoins?
Euthime... à mes côtés je le revois sans cesse...
Il me cherche... me fuit... dans quel trouble il me laisse!
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
D'Orvigni.
Comme vous j' ai senti la même émotion.
Comminge.
Et tout vient ajouter à cette impression.
Avec nos sens flétris nos esprits s'affoiblissent,
Et de notre raison les forces nous trahissent.
J' eusse autrefois d' un songe écarté les erreurs :
J' ouvre aujourd' hui mon ame à ces vaines terreurs ;
Tant l' infortune accable et défigure l' être,
Qui croit dans son orgueil approcher de son maître.
Lorsque l' astre du jour brille au plus haut des cieux,
La règle nous permet d' appeller sur nos yeux
D' un sommeil consolant les douceurs fugitives.
La mort même abbaissoit mes paupières craintives.
Dans le sein du repos j' essayois d' assoupir
Les tortures d' un coeur fatigué de gémir.
Quel songe m' a rempli de ses traces funèbres !
J' errois, dans un désert, à travers les ténèbres.
Du fond de noirs tombeaux, antiques monumens,
J' entendois s' échapper de longs gémissemens ;
Dans les débris épars de ces vieux mausolées,
Je voyois se traîner des ombres désolées.
D' un lamentable écho ces champs retentissoient ;
Des monceaux de cercueils jusqu' aux cieux s'entassoient :
On eût dit que ces bords, de la nature entière,
Du monde enfin étoient l' éternel cimetière.
Tout à l' oreille, aux yeux, au coeur, à tous les sens,
Portoit l' affreuse mort, et ses traits déchirans.
À la sombre lueur d' une torche sanglante,
J' apperçois une femme égarée, et tremblante:
En vêtemens de deuil, les bras levés au ciel,
Dans les pleurs, succombant sous un trouble mortel.
J' approche... Adélaïde... à ses genoux je tombe,
Et n' embrasse, effrayé, qu' une plaintive tombe !
Je repousse de moi ce tombeau gémissant.
Sous les habits d' Euthime un spectre menaçant
S' élève, se découvre, à mes regards présente...
Quelle image ! ... la mort cause moins d' épouvante.
D' un tourbillon de feux il étoit entouré ;
On pouvoit voir son coeur, de flammes dévoré.
Arrête m' a-t-il dit d' une voix douloureuse,
Cruel! ... ma destinée est assez malheureuse!
Puissai-je dans ces feux allumés par le ciel,
Expier les erreurs d' un penchant criminel!
Contemple un monument des célestes vengeances...
Pleure, il est encor tems, répare tes offenses...
Tu vois Adélaïde... à ces mots expirans
Il lance dans mon sein un de ses traits brûlans,
Je t' attends, poursuit-il. Je m' écrie. Il retombe
Et rentre en murmurant dans la nuit de la tombe,
La foudre y suit le spectre, et l' enfer a mugi.
Comme vous j' ai senti la même émotion.
Comminge.
Et tout vient ajouter à cette impression.
Avec nos sens flétris nos esprits s'affoiblissent,
Et de notre raison les forces nous trahissent.
J' eusse autrefois d' un songe écarté les erreurs :
J' ouvre aujourd' hui mon ame à ces vaines terreurs ;
Tant l' infortune accable et défigure l' être,
Qui croit dans son orgueil approcher de son maître.
Lorsque l' astre du jour brille au plus haut des cieux,
La règle nous permet d' appeller sur nos yeux
D' un sommeil consolant les douceurs fugitives.
La mort même abbaissoit mes paupières craintives.
Dans le sein du repos j' essayois d' assoupir
Les tortures d' un coeur fatigué de gémir.
Quel songe m' a rempli de ses traces funèbres !
J' errois, dans un désert, à travers les ténèbres.
Du fond de noirs tombeaux, antiques monumens,
J' entendois s' échapper de longs gémissemens ;
Dans les débris épars de ces vieux mausolées,
Je voyois se traîner des ombres désolées.
D' un lamentable écho ces champs retentissoient ;
Des monceaux de cercueils jusqu' aux cieux s'entassoient :
On eût dit que ces bords, de la nature entière,
Du monde enfin étoient l' éternel cimetière.
Tout à l' oreille, aux yeux, au coeur, à tous les sens,
Portoit l' affreuse mort, et ses traits déchirans.
À la sombre lueur d' une torche sanglante,
J' apperçois une femme égarée, et tremblante:
En vêtemens de deuil, les bras levés au ciel,
Dans les pleurs, succombant sous un trouble mortel.
J' approche... Adélaïde... à ses genoux je tombe,
Et n' embrasse, effrayé, qu' une plaintive tombe !
Je repousse de moi ce tombeau gémissant.
Sous les habits d' Euthime un spectre menaçant
S' élève, se découvre, à mes regards présente...
Quelle image ! ... la mort cause moins d' épouvante.
D' un tourbillon de feux il étoit entouré ;
On pouvoit voir son coeur, de flammes dévoré.
Arrête m' a-t-il dit d' une voix douloureuse,
Cruel! ... ma destinée est assez malheureuse!
Puissai-je dans ces feux allumés par le ciel,
Expier les erreurs d' un penchant criminel!
Contemple un monument des célestes vengeances...
Pleure, il est encor tems, répare tes offenses...
Tu vois Adélaïde... à ces mots expirans
Il lance dans mon sein un de ses traits brûlans,
Je t' attends, poursuit-il. Je m' écrie. Il retombe
Et rentre en murmurant dans la nuit de la tombe,
La foudre y suit le spectre, et l' enfer a mugi.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 3 SCENE 2
Comminge, D' Orvigni,
quatre religieux.
ces quatre religieux paroissent au sortir de
l' aile droite du cloître, au côté de l' escalier ;
ils prennent successivement une des cordes de la
cloche, en se prosternant l' un devant l' autre,
et disant :
Premier Religieux d' une voix sourde et
lugubre .
Mourir.
D'Orvigni entendant les sons funèbres de
cette cloche : (on se souviendra qu' elle sonne
depuis ce moment, jusqu' à la fin de la pièce) .
Quels sons ! Qu' entens-je ?
Comminge effrayé et regardant ces religieux .
Il se meurt, D' Orvigni ! ...
Second Religieux en observant ce que nous
venons de dire .
Mourir.
Troisième Religieux.
Mourir.
Quatrième Religieux.
Mourir.
ces quatre religieux se retirent ; la cloche est
censée avoir d' autres cordes que tirent d' autres
religieux dans le cloître, qu' on ne voit pas.
Comminge, D' Orvigni,
quatre religieux.
ces quatre religieux paroissent au sortir de
l' aile droite du cloître, au côté de l' escalier ;
ils prennent successivement une des cordes de la
cloche, en se prosternant l' un devant l' autre,
et disant :
Premier Religieux d' une voix sourde et
lugubre .
Mourir.
D'Orvigni entendant les sons funèbres de
cette cloche : (on se souviendra qu' elle sonne
depuis ce moment, jusqu' à la fin de la pièce) .
Quels sons ! Qu' entens-je ?
Comminge effrayé et regardant ces religieux .
Il se meurt, D' Orvigni ! ...
Second Religieux en observant ce que nous
venons de dire .
Mourir.
Troisième Religieux.
Mourir.
Quatrième Religieux.
Mourir.
ces quatre religieux se retirent ; la cloche est
censée avoir d' autres cordes que tirent d' autres
religieux dans le cloître, qu' on ne voit pas.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
D' Orvigni.
Quels accens ! Quelle image !
Comminge.
Je n' en puis plus douter... vous voyez notre usage...
Lorsqu' un de nous expire...
ACTE 3 SCENE 3
Comminge, D' Orvigni, le père abbé
suivi de deux religieux dont l' un a son
mouchoir sur les yeux, l' autre paroît pénétré
de tristesse .
Le Père Abbé à ces religieux, et à peine descendu .
épargnez ces regrets,
Allez, du lit de mort, ordonner les apprêts.
les deux religieux sortent, et remontent
tristement.
Comminge l' appercevant, court à lui emporté
par la douleur, oubliant de se prosterner
selon l' usage .
Euthime...
Le Père Abbé d' un ton attendri .
Va mourir.
Comminge.
Va mourir... ah, mon père !
Le Père Abbé.
Tout le pleure, et moi-même... ô triste ministère ! ...
Que la religion, notre unique soutien,
Subjugue l' homme en nous, anime le chrétien.
Comminge au père abbé .
Ses jours ? ...
Le Père Abbé.
Sont arrivés au moment de s' éteindre.
Comminge du ton de la plus vive douleur.
Ah ! Mes larmes, mes cris ne sauroient se contraindre.
Ô mon père! ... avec lui que ne puis-je expirer! ...
Eh... je croiois n' avoir qu' une mort à pleurer...
A part.
Pardonne, Adélaïde... oui, j'ignore moi-même...
Cet Euthime... je cède à ma douleur extrême...
Au père abbé.
Pour jamais enlevé... je ne le verrai plus ? ...
D' Orvigni au père abbé .
Il ne s' offriroit point... à part. que mes sens sont émus.
Quels accens ! Quelle image !
Comminge.
Je n' en puis plus douter... vous voyez notre usage...
Lorsqu' un de nous expire...
ACTE 3 SCENE 3
Comminge, D' Orvigni, le père abbé
suivi de deux religieux dont l' un a son
mouchoir sur les yeux, l' autre paroît pénétré
de tristesse .
Le Père Abbé à ces religieux, et à peine descendu .
épargnez ces regrets,
Allez, du lit de mort, ordonner les apprêts.
les deux religieux sortent, et remontent
tristement.
Comminge l' appercevant, court à lui emporté
par la douleur, oubliant de se prosterner
selon l' usage .
Euthime...
Le Père Abbé d' un ton attendri .
Va mourir.
Comminge.
Va mourir... ah, mon père !
Le Père Abbé.
Tout le pleure, et moi-même... ô triste ministère ! ...
Que la religion, notre unique soutien,
Subjugue l' homme en nous, anime le chrétien.
Comminge au père abbé .
Ses jours ? ...
Le Père Abbé.
Sont arrivés au moment de s' éteindre.
Comminge du ton de la plus vive douleur.
Ah ! Mes larmes, mes cris ne sauroient se contraindre.
Ô mon père! ... avec lui que ne puis-je expirer! ...
Eh... je croiois n' avoir qu' une mort à pleurer...
A part.
Pardonne, Adélaïde... oui, j'ignore moi-même...
Cet Euthime... je cède à ma douleur extrême...
Au père abbé.
Pour jamais enlevé... je ne le verrai plus ? ...
D' Orvigni au père abbé .
Il ne s' offriroit point... à part. que mes sens sont émus.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
Le Père Abbé.
En ces funèbres lieux il doit bientôt descendre,
Rempli de notre esprit, pour mourir sur la cendre.
Comminge au père abbé .
Vous savez...
Le Père Abbé.
Ses chagrins doivent se dévoiler.
Comminge avec précipitation .
Nous apprendrons, mon père...
Le Père Abbé.
Euthime va parler.
Je le sais de lui-même, et pour grace dernière,
Il demande, affranchi de notre loi sevère
Qu' un grand secret, dit-il, dans son coeur retenu,
À tous les yeux enfin se montre, et soit connu.
Comminge. à part.
Un grand secret ! ... mon trouble à chaque instant augmente.
D' Orvigni à part.
Quels rapports... quels soupçons que ma foiblesse enfante.
En ces funèbres lieux il doit bientôt descendre,
Rempli de notre esprit, pour mourir sur la cendre.
Comminge au père abbé .
Vous savez...
Le Père Abbé.
Ses chagrins doivent se dévoiler.
Comminge avec précipitation .
Nous apprendrons, mon père...
Le Père Abbé.
Euthime va parler.
Je le sais de lui-même, et pour grace dernière,
Il demande, affranchi de notre loi sevère
Qu' un grand secret, dit-il, dans son coeur retenu,
À tous les yeux enfin se montre, et soit connu.
Comminge. à part.
Un grand secret ! ... mon trouble à chaque instant augmente.
D' Orvigni à part.
Quels rapports... quels soupçons que ma foiblesse enfante.
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud
ACTE 3 SCENE 4
Comminge, D' Orvigni, le père abbé, des religieux.
(deux rangs de religieux descendent les bras
croisés sur la poitrine, et dans un grand
accablement, par les deux escaliers. Chacun
fait une génuflexion devant la croix, une
autre devant l' abbé, et ensuite ils vont se
remettre à leur place des deux côtés de
la scène ; les deux colonnes sont en face l' une de
l' autre ; le père abbé est au milieu. Sur un des
côtés du théâtre sont Comminge et D' Orvigni tous
deux accablés de la plus vive douleur, et
paroissant inquiets sur ce que doit revéler
Euthime. On n' oublira pas que la cloche sonnera
toujours, de façon pourtant qu' elle ne couvre
pas la voix.)
Le Père Abbé aux religieux .
Que chacun prenne place, et m' écoute.
les religieux se rangent comme on l' a dit à côté
l' un de l' autre et dans une tristesse
recueillie .
La mort
Sur un de nous s' arrête, et va finir son sort.
Le frère Euthime est prêt à sortir de la vie.
Il attend vos secours ; par ma bouche il vous prie
D' une commune voix d'implorer l'éternel.
Que cet infortuné, vainqueur d'un corps mortel,
Plein de ce feu sacré que l'espérance allume,
Au calice de mort boive sans amertume,
Et que son ame en paix rejettant ses liens,
S' élance au sein d' un dieu, la source des vrais biens.
il se tourne de côté ainsi que tous les religieux
en face de la croix, et adresse cette prière que
lui seul prononce, les religieux ne disant tout
haut que le dernier mot.
"prière.
Dieu suprême, daigne m'entendre;
que l' esprit éternel s'enflamme de ton feu !
Rends à la terre une mortelle cendre.
Mon ame reconnoît, aime, et bénit un dieu."
tous les Religieux répétent à la fois ce
dernier mot .
"Un dieu !"
Le Père Abbé continuant.
"Mon ame en toi seul se confie;
écarte les dangers qui m' attendent au port.
à l' homme, qu' a trompé le songe de la vie,
grand dieu, fais supporter la mort."
Tous les Religieux répétent .
"La mort !"
Comminge, D' Orvigni, le père abbé, des religieux.
(deux rangs de religieux descendent les bras
croisés sur la poitrine, et dans un grand
accablement, par les deux escaliers. Chacun
fait une génuflexion devant la croix, une
autre devant l' abbé, et ensuite ils vont se
remettre à leur place des deux côtés de
la scène ; les deux colonnes sont en face l' une de
l' autre ; le père abbé est au milieu. Sur un des
côtés du théâtre sont Comminge et D' Orvigni tous
deux accablés de la plus vive douleur, et
paroissant inquiets sur ce que doit revéler
Euthime. On n' oublira pas que la cloche sonnera
toujours, de façon pourtant qu' elle ne couvre
pas la voix.)
Le Père Abbé aux religieux .
Que chacun prenne place, et m' écoute.
les religieux se rangent comme on l' a dit à côté
l' un de l' autre et dans une tristesse
recueillie .
La mort
Sur un de nous s' arrête, et va finir son sort.
Le frère Euthime est prêt à sortir de la vie.
Il attend vos secours ; par ma bouche il vous prie
D' une commune voix d'implorer l'éternel.
Que cet infortuné, vainqueur d'un corps mortel,
Plein de ce feu sacré que l'espérance allume,
Au calice de mort boive sans amertume,
Et que son ame en paix rejettant ses liens,
S' élance au sein d' un dieu, la source des vrais biens.
il se tourne de côté ainsi que tous les religieux
en face de la croix, et adresse cette prière que
lui seul prononce, les religieux ne disant tout
haut que le dernier mot.
"prière.
Dieu suprême, daigne m'entendre;
que l' esprit éternel s'enflamme de ton feu !
Rends à la terre une mortelle cendre.
Mon ame reconnoît, aime, et bénit un dieu."
tous les Religieux répétent à la fois ce
dernier mot .
"Un dieu !"
Le Père Abbé continuant.
"Mon ame en toi seul se confie;
écarte les dangers qui m' attendent au port.
à l' homme, qu' a trompé le songe de la vie,
grand dieu, fais supporter la mort."
Tous les Religieux répétent .
"La mort !"
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
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