poèmes pour Elle
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poèmes pour Elle
[ Élévation
]
Poèmes
de Charles
Baudelaire
Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,
Des montagnes, des
bois, des nuages, des mers,
Par
delà le soleil, par delà les
éthers,
Par
delà les confins des sphères étoilées,
Mon esprit, tu te meus
avec agilité,
Et, comme
un bon nageur qui se pâme
dans l'onde,
Tu sillonnes gaiement l'immensité profonde
Avec
une indicible et mâle
volupté.
Envole-toi bien
loin de ces miasmes morbides ;
Va te
purifier dans
l'air supérieur,
Et
bois, comme une pure et divine
liqueur
, Le
feu clair qui remplit les espaces limpides.
Derrière les ennuis
et les vastes chagrins
Qui chargent de leur
poids l'existence brumeuse,
Heureux celui
qui peut d'une aile vigoureuse
S'élancer vers les champs
lumineux et sereins ;
Celui
dont les pensers, comme
des alouettes,
Vers
les cieux le matin
prennent un libre
essor,
- Qui
plane sur la vie, et
comprend sans effort
Le
langage des fleurs
et des choses muettes !
[ Élévation ]
Poèmes de Charles
Baudelaire
]
Poèmes
de Charles
Baudelaire
Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,
Des montagnes, des
bois, des nuages, des mers,
Par
delà le soleil, par delà les
éthers,
Par
delà les confins des sphères étoilées,
Mon esprit, tu te meus
avec agilité,
Et, comme
un bon nageur qui se pâme
dans l'onde,
Tu sillonnes gaiement l'immensité profonde
Avec
une indicible et mâle
volupté.
Envole-toi bien
loin de ces miasmes morbides ;
Va te
purifier dans
l'air supérieur,
Et
bois, comme une pure et divine
liqueur
, Le
feu clair qui remplit les espaces limpides.
Derrière les ennuis
et les vastes chagrins
Qui chargent de leur
poids l'existence brumeuse,
Heureux celui
qui peut d'une aile vigoureuse
S'élancer vers les champs
lumineux et sereins ;
Celui
dont les pensers, comme
des alouettes,
Vers
les cieux le matin
prennent un libre
essor,
- Qui
plane sur la vie, et
comprend sans effort
Le
langage des fleurs
et des choses muettes !
[ Élévation ]
Poèmes de Charles
Baudelaire
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
[ Elle demeure en son palais ]
Elle demeure en son palais, près du Bosphore,
Où la
lune s'étend comme
en un lit nacré
Sa bouche
est interdite et son
corps est sacré,
Et
nul être, sauf moi, n'osa l'étreindre encore.
Des
nègres cauteleux la servent à genoux
Humbles, ils
ont pourtant des regards de menace
Fugitifs à
l'égal d'un éclair roux qui passe
Leur sourire est très blanc
et leurs gestes
sont doux
Ils sont ainsi
mauvais parce
qu'ils sont eunuques
Et
que celle que j'aime a
des yeux sans pareils,
Pleins d'abîmes, de mers, de
déserts, de soleils,
Qui
font vibrer d'amour
les moelles et les nuques.
Leur colère
est le cri haineux de la douleur
Et
moi, je les excuse en la sentant si belle,
Si
loin d'eux à jamais, si près de
moi Pour elle,
Elle les voit souffrir en mordant une fleur.
J'entre
dans le palais baigné
par l'eau charmante,
Où
l'ombre est calme,
où le silence est infini,
Où,
sur les tapis frais
plus qu'un herbage uni,
Glissent avec
lenteur les pas de
mon amante.
Ma Sultane aux yeux noirs
m'attend, comme
autrefois.
Des
jasmins enlaceurs voilent les jalousies
J'admire, en l'admirant, ses parures choisies,
Et
mon âme s'accroche aux bagues
de ses doigts.
Nos
caresses ont de cruels
enthousiasmes
Et
des effrois et des rires
de désespoir
Plus tard une douceur tombe,
semblable au
soir,
Et ce sont des baisers de soeur,
après les spasmes.
Elle redresse un pli de
sa robe, en riant
Et
j'évoque son corps
mûri par la lumière
Auprès du mien,
dans quelque inégal
cimetière,
Sous l'ombre
sans terreur des cyprès
d'orient.
[ Elle demeure en son
palais ]
Poèmes de Renée Vivien
Où la
lune s'étend comme
en un lit nacré
Sa bouche
est interdite et son
corps est sacré,
Et
nul être, sauf moi, n'osa l'étreindre encore.
Des
nègres cauteleux la servent à genoux
Humbles, ils
ont pourtant des regards de menace
Fugitifs à
l'égal d'un éclair roux qui passe
Leur sourire est très blanc
et leurs gestes
sont doux
Ils sont ainsi
mauvais parce
qu'ils sont eunuques
Et
que celle que j'aime a
des yeux sans pareils,
Pleins d'abîmes, de mers, de
déserts, de soleils,
Qui
font vibrer d'amour
les moelles et les nuques.
Leur colère
est le cri haineux de la douleur
Et
moi, je les excuse en la sentant si belle,
Si
loin d'eux à jamais, si près de
moi Pour elle,
Elle les voit souffrir en mordant une fleur.
J'entre
dans le palais baigné
par l'eau charmante,
Où
l'ombre est calme,
où le silence est infini,
Où,
sur les tapis frais
plus qu'un herbage uni,
Glissent avec
lenteur les pas de
mon amante.
Ma Sultane aux yeux noirs
m'attend, comme
autrefois.
Des
jasmins enlaceurs voilent les jalousies
J'admire, en l'admirant, ses parures choisies,
Et
mon âme s'accroche aux bagues
de ses doigts.
Nos
caresses ont de cruels
enthousiasmes
Et
des effrois et des rires
de désespoir
Plus tard une douceur tombe,
semblable au
soir,
Et ce sont des baisers de soeur,
après les spasmes.
Elle redresse un pli de
sa robe, en riant
Et
j'évoque son corps
mûri par la lumière
Auprès du mien,
dans quelque inégal
cimetière,
Sous l'ombre
sans terreur des cyprès
d'orient.
[ Elle demeure en son
palais ]
Poèmes de Renée Vivien
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
[ Elle était déchaussée, elle était décoiffée ]
Elle était déchaussée, elle
était décoiffée,
Assise, les pieds
nus, parmi les joncs
penchants ;
Moi
qui passais par là, je
crus voir une fée,
Et je lui dis: Veux-tu t'en venir
dans les champs ?
Elle me
regarda de ce regard
suprême
Qui
reste à la beauté
quand nous en triomphons,
Et je
lui dis: Veux-tu, c'est le
mois où l'on aime,
Veux-tu nous
en aller sous les arbres
profonds ?
Elle essuya
ses pieds à l'herbe
de la rive ;
Elle me regarda pour la seconde fois,
Et la
belle folâtre alors
devint pensive.
Oh!
comme les oiseaux chantaient au
fond des bois !
Comme
l'eau caressait doucement le rivage
!
Je vis venir à
moi, dans les grands roseaux verts,
La belle
fille heureuse, effarée et sauvage,
Ses
cheveux dans ses
yeux, et riant au travers.
[ Elle
était déchaussée, elle était décoiffée ]
Poèmes de Victor Hugo
était décoiffée,
Assise, les pieds
nus, parmi les joncs
penchants ;
Moi
qui passais par là, je
crus voir une fée,
Et je lui dis: Veux-tu t'en venir
dans les champs ?
Elle me
regarda de ce regard
suprême
Qui
reste à la beauté
quand nous en triomphons,
Et je
lui dis: Veux-tu, c'est le
mois où l'on aime,
Veux-tu nous
en aller sous les arbres
profonds ?
Elle essuya
ses pieds à l'herbe
de la rive ;
Elle me regarda pour la seconde fois,
Et la
belle folâtre alors
devint pensive.
Oh!
comme les oiseaux chantaient au
fond des bois !
Comme
l'eau caressait doucement le rivage
!
Je vis venir à
moi, dans les grands roseaux verts,
La belle
fille heureuse, effarée et sauvage,
Ses
cheveux dans ses
yeux, et riant au travers.
[ Elle
était déchaussée, elle était décoiffée ]
Poèmes de Victor Hugo
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
[ Elle ne sait pas tendre des pièges ]
Elle ne sait pas tendre des pièges
Elle
a les yeux sur sa beauté
Si simple
si simple séduire
Et ce
sont ses yeux qui l’enchaînent
Et
c’est sur moi qu’elle s’appuie
Et
c’est sur elle qu’elle jette
Le filet
volant des caresses.
[ Elle ne sait
pas tendre des pièges ]
Poèmes
de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard
Elle
a les yeux sur sa beauté
Si simple
si simple séduire
Et ce
sont ses yeux qui l’enchaînent
Et
c’est sur moi qu’elle s’appuie
Et
c’est sur elle qu’elle jette
Le filet
volant des caresses.
[ Elle ne sait
pas tendre des pièges ]
Poèmes
de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
[ Elle se penche sur moi ]
Elle se penche sur moi
Le cœur ignorant
Pour
voir si je l’aime
Elle
a confiance elle oublie
Sous
les nuages de ses paupières
Sa
tête s’endort dans mes
mains
Où sommes-nous
Ensemble
inséparables
Vivants
vivants
Vivant
vivante
Et ma
tête roule en ses rêves.
[ Elle se penche sur moi
]
Poèmes
de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard
Le cœur ignorant
Pour
voir si je l’aime
Elle
a confiance elle oublie
Sous
les nuages de ses paupières
Sa
tête s’endort dans mes
mains
Où sommes-nous
Ensemble
inséparables
Vivants
vivants
Vivant
vivante
Et ma
tête roule en ses rêves.
[ Elle se penche sur moi
]
Poèmes
de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
Envers vous,
Je ne change point,
ô vierges de Lesbos
!
Lorsque je poursuis la Beauté
fugitive,
Tel
le Dieu chassant une vierge
au peplos
Très blanc
sur la rive.
Je n’ai point
trahi l’invariable
amour.
Mon
cœur identique et mon
âme pareille
Savent retrouver, dans
le baiser d’un jour,
Celui de la veille.
Et j’étreins Atthis
sur les seins de Dika.
J’appelle en
pleurant, sur le
seuil de sa porte,
L’ombre, que
longtemps ma douleur invoqua,
De Timas
la morte.
Pour l’Aphrodita
j’ai dédaigné l’Éros,
Et je
n’ai de joie et d’angoisse qu’en
elle :
Je ne change
point, ô vierges de Lesbos,
Je
suis éternelle.
[ Envers
vous, belles, ma pensée n’est point changeante ]
Poèmes de Renée Vivien
ô vierges de Lesbos
!
Lorsque je poursuis la Beauté
fugitive,
Tel
le Dieu chassant une vierge
au peplos
Très blanc
sur la rive.
Je n’ai point
trahi l’invariable
amour.
Mon
cœur identique et mon
âme pareille
Savent retrouver, dans
le baiser d’un jour,
Celui de la veille.
Et j’étreins Atthis
sur les seins de Dika.
J’appelle en
pleurant, sur le
seuil de sa porte,
L’ombre, que
longtemps ma douleur invoqua,
De Timas
la morte.
Pour l’Aphrodita
j’ai dédaigné l’Éros,
Et je
n’ai de joie et d’angoisse qu’en
elle :
Je ne change
point, ô vierges de Lesbos,
Je
suis éternelle.
[ Envers
vous, belles, ma pensée n’est point changeante ]
Poèmes de Renée Vivien
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
Celle de toujours, toute
Si je vous dis : j'ai tout abandonné
C'est qu'elle n'est pas celle de mon corps,
Je ne m'en suis jamais vanté,
Ce n'est pas vrai
Et la brume de fond où je me meus
Ne sait jamais si j'ai passé.
L'éventail de sa bouche, le reflet de ses yeux,
Je suis le seul à en parler,
je suis le seul qui soit concerné
Par ce miroir si nul où l'air circule à travers moi
Et l'air a un visage aimant, ton visage,
A toi qui n'as pas de nom et que les autres ignorent,
La mer te dit : sur moi, le ciel te dit : sur moi,
Les astres te devinent, les nuages t'imaginent
Et le sang de la générosité
Te porte avec délices.
Je chante la grande joie de te chanter,
La grande joie de t'avoir ou de ne pas t'avoir,
La candeur de t'attendre, l'innocence de te connaitre,
O toi qui supprimes l'oubli, l'espoir et l'ignorance,
Qui supprimes l'absence et qui me mets au monde,
Je chante pour chanter, je t'aime pour chanter
Le mystère où l'amour me crée et se délivre.
Tu es pure, tu es encore plus pure que moi-même.
[ ]
Poèmes de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard
C'est qu'elle n'est pas celle de mon corps,
Je ne m'en suis jamais vanté,
Ce n'est pas vrai
Et la brume de fond où je me meus
Ne sait jamais si j'ai passé.
L'éventail de sa bouche, le reflet de ses yeux,
Je suis le seul à en parler,
je suis le seul qui soit concerné
Par ce miroir si nul où l'air circule à travers moi
Et l'air a un visage aimant, ton visage,
A toi qui n'as pas de nom et que les autres ignorent,
La mer te dit : sur moi, le ciel te dit : sur moi,
Les astres te devinent, les nuages t'imaginent
Et le sang de la générosité
Te porte avec délices.
Je chante la grande joie de te chanter,
La grande joie de t'avoir ou de ne pas t'avoir,
La candeur de t'attendre, l'innocence de te connaitre,
O toi qui supprimes l'oubli, l'espoir et l'ignorance,
Qui supprimes l'absence et qui me mets au monde,
Je chante pour chanter, je t'aime pour chanter
Le mystère où l'amour me crée et se délivre.
Tu es pure, tu es encore plus pure que moi-même.
[ ]
Poèmes de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard
Iness- Nombre de messages : 834
Date d'inscription : 18/02/2010
Ma Fiancée
L'épouse, la compagne à mon cœur destinée,
Promise à mon jeune tourment,
Je ne la connais pas, mais je sais qu'elle est née ;
Elle respire en ce moment.
Son âge et ses devoirs lui font la vie étroite ;
Sa chambre est un frais petit coin ;
Elle y prend sa leçon, bien soumise et bien droite,
Et sa mère n'est jamais loin.
Ma mère, parlez-lui du bon Dieu, de la Vierge
Et des saints tant qu'il lui plaira ;
Oui, rendez-la timide, et qu'elle brûle un cierge
Quand le tonnerre grondera.
Je veux, entendez-vous, qu'elle soit grave et tendre,
Qu'elle chérisse et qu'elle ait peur ;
Je veux que tout mon sang me serve à la défendre,
A la caresser tout mon cœur.
Déjà dans l'inconnu je t'épouse et je t'aime,
Tu m'appartiens dès ie passe,
Fiancée invisible et dont j'ignore même
Le nom sans cesse prononcé.
A défaut de mes yeux, mon rêve te regarde,
Je te soigne et te sers tout bas :
« Que veux-tu ? Le voici. Couvre-toi bien, prends garde
Au vent du soir, et ne sors pas. »
Pour te sentir à moi je fais un peu le maître,
Et je te gronde avec amour ;
Mais j'essuie aussitôt les pleurs que j'ai fait naître,
Implorant ma grâce à mon tour.
Tu t'assiéras, l'été, bien loin, dans la campagne,
En robe claire, au bord de l'eau.
Qu'il est bon d'emporter sa nouvelle compagne
Tout seul dans un pays nouveau !
Et dire que ma vie est cependant déserte,
Que mon bonheur peut aujourd'hui
Passer tout près de moi dans la foule entr'ouverte
Qui se refermera sur lui,
Et que déjà peut-être elle m'est apparue,
Et j'ai dit : ! La jolie enfant ! »
Peut-être suivons-nous toujours la même rue,
Elle derrière et moi devant.
Nous pourrons nous croiser en un point de l'espace,
Sans nous sourire, bien longtemps,
Puisqu'on n'oserait dire à la vierge qui passe :
O Vous êtes celle que j'attends. »
Un jour, mais je sais trop ce que l'épreuve en coûte,
J'ai cru la voir sur mon chemin,
Et j'ai dit : « C'est bien vous. » Je me trompais sans doute,
Car elle a retiré sa main.
Depuis lors, je me tais ; mon âme solitaire
Confie au Dieu qui sait unir
Par les souffles du ciel les plantes sur la terre
Notre union dans l'avenir.
A moins que, me privant de la jamais connaître,
La mort déjà n'ait emporté
Ma femme encore enfant, toi qui naissais pour l'être
Et ne l'auras jamais été.
daniel- Nombre de messages : 1002
loisirs : lecture,chasse,pêche,course
Humeur : humour
Date d'inscription : 12/06/2008
Paul Eluard: [ Celle de toujours, toute ]
Si je vous dis : j'ai tout abandonné
C'est qu'elle n'est pas celle de mon corps,
Je ne m'en suis jamais vanté,
Ce n'est pas vrai
Et la brume de fond où je me meus
Ne sait jamais si j'ai passé.
L'éventail de sa bouche, le reflet de ses yeux,
Je suis le seul à en parler,
je suis le seul qui soit concerné
Par ce miroir si nul où l'air circule à travers moi
Et l'air a un visage aimant, ton visage,
A toi qui n'as pas de nom et que les autres ignorent,
La mer te dit : sur moi, le ciel te dit : sur moi,
Les astres te devinent, les nuages t'imaginent
Et le sang de la générosité
Te porte avec délices.
Je chante la grande joie de te chanter,
La grande joie de t'avoir ou de ne pas t'avoir,
La candeur de t'attendre, l'innocence de te connaitre,
O toi qui supprimes l'oubli, l'espoir et l'ignorance,
Qui supprimes l'absence et qui me mets au monde,
Je chante pour chanter, je t'aime pour chanter
Le mystère où l'amour me crée et se délivre.
Tu es pure, tu es encore plus pure que moi-même.
Poèmes de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard
C'est qu'elle n'est pas celle de mon corps,
Je ne m'en suis jamais vanté,
Ce n'est pas vrai
Et la brume de fond où je me meus
Ne sait jamais si j'ai passé.
L'éventail de sa bouche, le reflet de ses yeux,
Je suis le seul à en parler,
je suis le seul qui soit concerné
Par ce miroir si nul où l'air circule à travers moi
Et l'air a un visage aimant, ton visage,
A toi qui n'as pas de nom et que les autres ignorent,
La mer te dit : sur moi, le ciel te dit : sur moi,
Les astres te devinent, les nuages t'imaginent
Et le sang de la générosité
Te porte avec délices.
Je chante la grande joie de te chanter,
La grande joie de t'avoir ou de ne pas t'avoir,
La candeur de t'attendre, l'innocence de te connaitre,
O toi qui supprimes l'oubli, l'espoir et l'ignorance,
Qui supprimes l'absence et qui me mets au monde,
Je chante pour chanter, je t'aime pour chanter
Le mystère où l'amour me crée et se délivre.
Tu es pure, tu es encore plus pure que moi-même.
Poèmes de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Désirs de femmes: charnot lucile
Désirs de femmes |
Rage noire, noir
désir,
Peu de femmes osent
dire
Qu'elles ont envie de
frémir
Et de s'approprier le mot
jouir.
Rouge violent,
ardent,
Ravageur est ce désir
latent
D'une pasionaria, poing
levé
Qui revendique le droit
d'aimer;
Rose tendre,
délicatesse
Ce désir fou mais
contenu
De vouloir être ta
maîtresse.
Fleur bleue, tissant l'amour
avec des fils
ténus,
Timide amante, délicate
fiancée
Femmes, laissez donc éclater
votre féminité.
Auteur : charnot lucile |
marie la rebelle- Nombre de messages : 1328
Date d'inscription : 11/07/2008
Victor Ségalen : Éloge de la Jeune Fille
Éloge de la Jeune Fille | |
Magistrats! dévouez aux épouses vos arcs triomphaux. Enjambez les routes avec la louange des veuves obstinées. Usez du ciment, du faux marbre et de la boue séchée pour dresser les mérites de ces dames respectables, -- c'est votre emploi. Je garde le mien qui est d'offrir à une autre un léger tribut de paroles, une arche de buée dans les yeux, un palais trouble dansant au son du coeur de la mer. o Ceci est réservé à la seule Jeune Fille. A celle à qui tous les maris du monde sont promis, -- mais qui n'en tient pas encore. A celle dont les cheveux libres tombent en arrière, sans empois, sans fidélité, et les sourcils ont l'odeur de la mousse. A celle qui a des seins et qui n'allaite pas ; un coeur et n'aime pas ; un ventre pour les fécondités, mais décemment demeure stérile. A celle riche de tout ce qui viendra ; qui va tout choisir, tout recevoir, tout enfanter peut-être. A celle qui, prête à donner ses lèvres à la tasse des épousailles, tremble un peu, ne sait que dire, consent à boire, -- et n'a pas encore bu. Victor Ségalen | |
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
François de Malherbe
DESSEIN DE QUITTER UNE FEMME
Qui ne le contentait que de promesses
Qui ne le contentait que de promesses
Beauté, mon beau souci, de qui l'âme incertaine A comme l'Océan son flux et son reflux : Pensez de vous résoudre à soulager ma peine, Ou je me vais résoudre à ne la souffrir plus. Vos yeux ont des appas que j'aime et que je prise, Et qui peuvent beaucoup dessus ma liberté : Mais pour me retenir, s'ils font cas de ma prise, Il leur faut de l'amour autant que de beauté. Madame, songez-y, vous perdez votre gloire De me l'avoir promis et vous rire de moi, S'il ne vous en souvient vous manquez de mémoire, Et s'il vous en souvient vous n'avez point de foi. Quand je pense être au point que cela s'accomplisse, Quelque excuse toujours en empêche l'effet : C'est la toile sans fin de la femme d'Ulysse, Dont l'ouvrage du soir au matin se défait. J'avais toujours fait compte, aimant chose si haute, De ne m'en séparer qu'avecque le trépas, S'il arrive autrement ce sera votre faute De faire des serments et ne les tenir pas. |
magda- Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010
Recette de femme :Vinicius de Moraes
Que les très laides me pardonnent mais la beauté est fondamentale. Il faut dans tout cela qu'il y ait quelque chose d'une fleur, quelque chose d'une danse, quelque chose de haute couture dans tout cela (ou alors Que la femme se socialise élégamment en bleu comme dans la République Populaire Chinoise). Il n'y a pas de moyen terme. Il faut que tout soit beau. Il faut que, tout à coup on ait l'impression de voir une aigrette à peine posée, et qu'un visage acquière de temps en temps cette couleur que l'on ne rencontre qu'à la troisième minute de l'aurore. Il faut que tout cela soit sans être, mais que cela se reflète et s'épanouisse dans le regard des hommes. Il faut, il faut absolument que tout soit beau et inespéré. Il faut que des paupières closes rappellent un vers d'Eluard, et que l'on caresse sur des bras quelque chose au delà de la chair : et qu'au toucher ils soient comme l'ambre d'un crépuscule. Ah, laissez-moi vous dire
| Vinicius de Moraes |
magda- Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010
Sylvia Plath, "Célibataire"
Or, cette jeune fille pointilleuse Lors d'une cérémonieuse promenade en avril Avec son dernier soupirant Fut soudain frappée, intolérablement, Par le brouhaha irrégulier des oiseaux Et par le désordre des feuilles Affligée par ce tumulte, elle Vit les gestes de son amoureux déséquilibrer l'air Sa démarche s'égarer, inégale A travers une rangée de fougères et de fleurs. Elle jugea les pétales en désarroi, La saison tout entière négligée. Comme elle aspirait à l'hiver, alors! Scrupuleusement austère dans son ordre de blanc et de noir, Glace et roc, chaque sentiment bien circonscrit Et la discipline glacée du coeur Exacte comme un flocon de neige. Mais ici - un bourgeonnement Assez turbulent pour jeter ses cinq esprits royaux Dans une bigarrure vulgaire - Trahison insupportable. Que les idiots Titubent, étourdis, dans le chahut printanier: Elle se retira adroitement Et autour de sa maison elle dressa Une telle barricade d'obstacles et barbelés Contre la saison mutinée Qu'aucun homme insurgé ne put espérer la briser Par juron, poing, menace Ni même par amour. Sylvia Plath Traduction inédite d'Anne Mauger pour Vivre en Poésie |
magda- Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010
Sonnet:Honoré d' URFÉ
- (1567-1625)
Qu'il connaît qu'on feint de l'aimer
Elle feint de m'aimer, pleine de mignardise,
Soupirant après moi, me voyant soupirer,
Et par de feintes pleurs témoigne d'endurer
L'ardeur que dans mon âme elle connaît éprise.
Le plus accort amant, lorsqu'elle se déguise,
De ses trompeurs attraits ne se peut retirer :
Il faut être sans coeur pour ne point désirer
D'être si doucement déçu par sa feintise.
Je me trompe moi-même au faux bien que je vois,
Et mes contentements conspirent contre moi.
Traîtres miroirs du coeur, lumières infidèles,
Je vous reconnais bien et vos trompeurs appas :
Mais que me sert cela, puisqu'Amour ne veut pas,
Voyant vos trahisons, que je me garde d'elles ?
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Villanelle d'Amidor reprochant une légèreté
- Honoré d' URFÉ (1567-1625)
À la fin celui l'aura
Qui dernier la servira.
De ce coeur cent fois volage,
Plus que le vent animé,
Qui peut croire d'être aimé
Ne doit pas être cru sage
Car enfin celui l'aura
Qui dernier la servira.
A tous vents la girouette,
Sur le faîte d'une tour,
Elle aussi vers tout amour
Tourne le coeur et la tête
À la fin celui l'aura
Qui dernier la servira.
Le chasseur jamais ne prise
Ce qu'à la fin il a pris,
L'inconstante fait bien pis,
Méprisant qui la tient prise
Mais enfin celui l'aura
Qui dernier la servira.
Ainsi qu'un clou l'autre chasse,
Dedans son coeur le dernier
De celui qui fut premier
Soudain usurpe la place
C'est pourquoi celui l'aura
Qui dernier la servira.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Jean VAUQUELIN DE LA FRESNAYE
- (1535-1607)
Une belle Vestale habite au beau rivage
Une belle Vestale habite au beau rivage
D'Orne, où c'est qu'elle vit comme en un hermitage.
Quelquefois en son parc elle se sied au bois,
Gaillarde sur les eaux elle sort quelquefois,
Et quelquefois cueillant des fleurs toute pensive,
EIle en orne son sein, assise sur la rive.
Maintenant elle semble une Nymphe des eaux,
Maintenant des forests : et parmi les troupeaux
Bergere on la diroit, n'estoit que trop hautaine
Elle oit de nos flageols les chansons à grand'peine.
Jamais aviendra-t-il qu'elle change son coeur ?
Et que je puisse un jour, comme Arion vainqueur
Attira le daufin au doux son de sa lyre,
Qu'au son de ma musette à la fin je l'attire ?
Et qu'autre Orfé je face encor' marcher apres
(Pour cacher nos amours) les ombreuses forests.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
L'amoureuse: Paul éluard
L'amoureuse
Elle est debout sur mes paupières
Et ses cheveux sont dans les miens,
Elle a la forme de mes mains,
Elle a la couleur de mes yeux,
Elle s'engloutit dans mon ombre
Comme une pierre sur le ciel.
Elle a toujours les yeux ouverts
Et ne me laisse pas dormir.
Ses rêves en pleine lumière
Font s'évaporer les soleils,
Me font rire, pleurer et rire,
Parler sans avoir rien à dire.
- entre 1914 et 1921 -
Ce poème provient du recueil intitulé " Capitale de la douleur
Elle est debout sur mes paupières
Et ses cheveux sont dans les miens,
Elle a la forme de mes mains,
Elle a la couleur de mes yeux,
Elle s'engloutit dans mon ombre
Comme une pierre sur le ciel.
Elle a toujours les yeux ouverts
Et ne me laisse pas dormir.
Ses rêves en pleine lumière
Font s'évaporer les soleils,
Me font rire, pleurer et rire,
Parler sans avoir rien à dire.
- entre 1914 et 1921 -
Ce poème provient du recueil intitulé " Capitale de la douleur
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
Note finale par Lucie Poirier
Note finale
La vie s’arrêterait avec l’ampleur de sa colère.
Il établirait le territoire des ailes coupées.
Sa vengeance avait besoin de silence.
Sa haine réclamait l’exécution des insoumises.
Il proclamerait le juste retour des choses,
la hiérarchie naturelle, les droits du sexe fort.
La raison du plus armé est toujours la meilleure.
Le masculin l’emporte sur le féminin.
La pluie rouge a giclé dans l’après-midi neigeux.
Le temps a rétréci.
L’espoir est devenu impossible.
L’horreur a submergé la patience.
Les apprentissages n’auront pas d’aboutissement.
Les connaissances ne seront pas utiles.
Son apothéose fut de les anéantir.
Guerrier frustré, héros misogyne,
il s’est immolé sur son charnier.
Son violent triomphe le laissait-il insatisfait ?
Pourquoi un homme veut-il tuer des femmes ?
Le souvenir s’est installé.
Les pleurs ravagés perdurent.
La douleur est imprégnée.
Elles voulaient savoir,
et, le 6 décembre 1989, à l’école,
il leur a donné une leçon.
Lucie Poirier |
La vie s’arrêterait avec l’ampleur de sa colère.
Il établirait le territoire des ailes coupées.
Sa vengeance avait besoin de silence.
Sa haine réclamait l’exécution des insoumises.
Il proclamerait le juste retour des choses,
la hiérarchie naturelle, les droits du sexe fort.
La raison du plus armé est toujours la meilleure.
Le masculin l’emporte sur le féminin.
La pluie rouge a giclé dans l’après-midi neigeux.
Le temps a rétréci.
L’espoir est devenu impossible.
L’horreur a submergé la patience.
Les apprentissages n’auront pas d’aboutissement.
Les connaissances ne seront pas utiles.
Son apothéose fut de les anéantir.
Guerrier frustré, héros misogyne,
il s’est immolé sur son charnier.
Son violent triomphe le laissait-il insatisfait ?
Pourquoi un homme veut-il tuer des femmes ?
Le souvenir s’est installé.
Les pleurs ravagés perdurent.
La douleur est imprégnée.
Elles voulaient savoir,
et, le 6 décembre 1989, à l’école,
il leur a donné une leçon.
sandrine jillou- Nombre de messages : 1700
loisirs : écrire, courir, vélo.
Date d'inscription : 08/10/2008
Nérée Beauchemin :A celle que j'aime
Nérée Beauchemin :Les floraisons matutinales:A celle que j'aime
Dans ta mémoire immortelle,
Comme dans le reposoir
D'une divine chapelle,
Pour celui qui t'est fidèle,
Garde l'amour et l'espoir.
Garde l'amour qui m'enivre,
L'amour qui nous fait rêver ;
Garde l'espoir qui fait vivre ;
Garde la foi qui délivre,
La foi qui nous doit sauver.
L'espoir, c'est de la lumière,
L'amour, c'est une liqueur,
Et la foi, c'est la prière.
Mets ces trésors, ma très chère,
Au plus profond de ton coeur.
Dans ta mémoire immortelle,
Comme dans le reposoir
D'une divine chapelle,
Pour celui qui t'est fidèle,
Garde l'amour et l'espoir.
Garde l'amour qui m'enivre,
L'amour qui nous fait rêver ;
Garde l'espoir qui fait vivre ;
Garde la foi qui délivre,
La foi qui nous doit sauver.
L'espoir, c'est de la lumière,
L'amour, c'est une liqueur,
Et la foi, c'est la prière.
Mets ces trésors, ma très chère,
Au plus profond de ton coeur.
sandrine jillou- Nombre de messages : 1700
loisirs : écrire, courir, vélo.
Date d'inscription : 08/10/2008
Elle est malade, hélas !
Elle est malade, hélas ! |
Elle est malade, hélas ! que faut-il que je face ? Quel confort ? Quel remede ? Ô cieux, et vous m'oyez Et tandis devant vous ce dur mal vous voyez Oultrager sans pitié la douceur de sa face ! Si vous l'ostez, cruelz, à ceste terre basse, S'il faut d'elle là haut que riches vous soyez, Au moins pensez à moy et, pour Dieu, m'ottroyez, Qu'au moins tout d'une main Charon tous deux nous passe. Ou s'il est, ce qu'on dit des deux freres d'Helene, Que l'un pour l'autre au ciel, et là bas se promène, Or accomplissez moy une pareille envie. Ayez, ayez de moy, ayez quelque pitié, Laissez nous, en l'honneur de ma forte amitié, Moy mourir de sa mort, elle'vivre de ma vie | |
Auteur : Étienne de La Boétie (1530-1563) |
samuel samhoun- Nombre de messages : 724
loisirs : écrire, marcher,voyager
Humeur : changeante !
Date d'inscription : 22/06/2008
La chambre de la châtelaine:Madame Amable TASTU
- Madame Amable TASTU (1798-1885)
La chambre de la châtelaine
...La châtelaine en sa molle indolence,
De ses pensers suivait le cours changeant
Et se taisait. Dans la lampe d'argent,
Qui se balance à la haute solive,
Se consumait le doux jus de l'olive ;
De ses contours ciselés avec art
Quelques rayons échappés au hasard
Vont effleurer le ciel, où se déploie
L'azur mouvant des courtines de soie ;
Les longs tapis, où, d'un épais velours
La blanche hermine enrichit les contours ;
Du dais massif, les angles où se cache
L'or du cimier sous l'ombre du panache,
Et la splendeur des pilastres dorés
Qui de l'estrade entourent les degrés.
D'un champ de soie, où l'argent se marie,
Le beau tissu de la tapisserie...
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
Epître aux femmes:Constance de THÉIS
- Constance de THÉIS (1767-1845)
Epître aux femmes
Ô femmes, c'est pour vous que j'accorde ma lyre ;
Ô femmes, c'est pour vous qu'en mon brûlant délire,
D'un usage orgueilleux, bravant les vains efforts,
Je laisse enfin ma voix exprimer mes transports.
Assez et trop longtemps la honteuse ignorance
A jusqu'en vos vieux jours prolongé votre enfance ;
Assez et trop longtemps les hommes, égarés,
Ont craint de voir en vous des censeurs éclairés ;
Les temps sont arrivés, la raison vous appelle :
Femmes éveillez-vous et soyez dignes d'elle.
Si la nature a fait deux sexes différents,
Elle a changé la forme, et non les éléments.
Même loi, même erreur, même ivresse les guide ;
L'un et l'autre propose, exécute ou décide ;
Les charges, les pouvoirs entre eux deux divisés,
Par un ordre immuable y restent balancés.[...]
Mais déjà mille voix ont blâmé notre audace ;
On s'étonne, on murmure, on s'agite, on menace ;
On veut nous arracher la plume et le pinceau ;
Chacun a contre nous sa chanson, ses bons mots ;
L'un, ignorant et sot, vient, avec ironie,
Nous citer de Molière un vers qu'il estropie ;
L'autre, vain par système et jaloux par métier,
Dit d'un air dédaigneux : Elle a son teinturier.
De jeunes gens à peine échappés au collège
Discutent hardiment nos droits, leur privilège ;
Et les arrêts dictés par la fatuité,
La mode, l'ignorance, et la futilité,
Répétés en écho par ces juges imberbes,
Après deux ou trois jours sont passés en proverbes.
En vain l'homme de bien (car il en est toujours)
En vain l'homme de bien vient à notre secours,
Leur prouve de nos coeurs la force, le courage,
Leur montre nos lauriers conservés d'âge en âge,
Leur dit qu'on peut unir grâces, talents, vertus ;
Que Minerve était femme aussi bien que Vénus ;
Rien ne peut ramener cette foule en délire ;
L'honnête homme se tait, nous regarde et soupire.
Mais, ô dieux, qu'il soupire et qu'il gémit bien plus
Quand il voit les effets de ce cruel abus ;
Quand il voit le besoin de distraire nos âmes
Se porter, malgré nous, sur de coupables flammes !
Quand il voit ces transports que réclamaient les arts
Dans un monde pervers offenser ses regards,
Et sur un front terni la licence funeste
Remplacer les lauriers du mérite modeste !
Ah ! détournons les yeux de cet affreux tableau !
Ô femmes, reprenez la plume et le pinceau.
Laissez le moraliste, employant le sophisme,
Autoriser en vain l'effort du despotisme ;
Laissez-le, tourmentant des mots insidieux,
Dégrader notre sexe et vanter nos beaux yeux ;
Laissons l'anatomiste, aveugle en sa science,
D'une fibre avec art calculer la puissance,
Et du plus et du moins inférer sans appel
Que sa femme lui doit un respect éternel.
La nature a des droits qu'il ignore lui-même :
On ne la courbe pas sous le poids d'un système ;
Aux mains de la faiblesse elle met la valeur ;
Sur le front du superbe, elle écrit la terreur ;
Et, dédaignant les mots de sexe et d'apparence,
Pèse dans sa grandeur les dons qu'elle dispense. [...]
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
La chanson du vannier:André THEURIET
- André THEURIET (1833-1907)
La chanson du vannier
Brins d'osier, brins d'osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier.
Brins d'osier, vous serez le lit frêle où la mère
Berce un petit enfant aux sons d'un vieux couplet :
L'enfant, la lèvre encor toute blanche de lait,
S'endort en souriant dans sa couche légère.
Brins d'osier, brins d'osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier.
Vous serez le panier plein de fraises vermeilles
Que les filles s'en vont cueillir dans les taillis.
Elles rentrent le soir, rieuses, au logis,
Et l'odeur des fruits mûrs s'exhale des corbeilles.
Brins d'osier, brins d'osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier.
Vous serez le grand van où la fermière alerte
Fait bondir le froment qu'ont battu les fléaux,
Tandis qu'à ses côtés des bandes de moineaux
Se disputent les grains dont la terre est couverte.
Brins d'osier, brins d'osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier.
Lorsque s'empourpreront les vignes à l'automne,
Lorsque les vendangeurs descendront des coteaux,
Brins d'osier, vous lierez les cercles des tonneaux
Où le vin doux rougit les douves et bouillonne.
Brins d'osier, brins d'osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier.
Brins d'osier, vous serez la cage où l'oiseau chante,
Et la nasse perfide au milieu des roseaux,
Où la truite qui monte et file entre deux eaux,
S'enfonce, et tout à coup se débat frémissante.
Brins d'osier, brins d'osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier.
Et vous serez aussi, brins d'osier, l'humble claie
Où, quand le vieux vannier tombe et meurt, on l'étend
Tout prêt pour le cercueil. - Son convoi se répand,
Le soir, dans les sentiers où verdit l'oseraie.
Brins d'osier, brins d'osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier.
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
Ode sur le temps:Antoine-Léonard THOMAS
- Antoine-Léonard THOMAS (1732-1785)
Ode sur le temps
Le compas d'Uranie a mesuré l'espace.
Ô Temps, être inconnu que l'âme seule embrasse,
Invisible torrent des siècles et des jours,
Tandis que ton pouvoir m'entraîne dans la tombe,
J'ose, avant que j'y tombe,
M'arrêter un moment pour contempler ton cours.
Qui me dévoilera l'instant qui t'a vu naître ?
Quel oeil peut remonter aux sources de ton être ?
Sans doute ton berceau touche à l'éternité.
Quand rien n'était encore, enseveli dans l'ombre
De cet abîme sombre,
Ton germe y reposait, mais sans activité.
Du chaos tout à coup les portes s'ébranlèrent ;
Des soleils allumés les feux étincelèrent ;
Tu naquis ; l'Éternel te prescrivit ta loi.
Il dit au mouvement : "Du Temps sois la mesure."
Il dit à la nature :
"Le Temps sera pour vous, l'Éternité pour moi."
Dieu, telle est ton essence : oui, l'océan des âges
Roule au-dessous de toi sur tes frêles ouvrages,
Mais il n'approche pas de ton trône immortel.
Des millions de jours qui l'un l'autre s'effacent,
Des siècles qui s'entassent
Sont comme le néant aux yeux de l'Éternel !
Mais moi, sur cet amas de fange et de poussière
En vain contre le Temps je cherche une barrière ;
Son vol impétueux me presse et me poursuit.
Je n'occupe qu'un point de la vaste étendue
Et mon âme éperdue
Sous mes pas chancelants voit ce point qui s'enfuit.
De la destruction tout m'offre des images.
Mon oeil épouvanté ne voit que des ravages ;
Ici, de vieux tombeaux que la mousse a couverts ;
Là, des murs abattus, des colonnes brisées,
Des villes embrasées ;
Partout les pas du Temps empreints sur l'univers.
Cieux, terres, éléments, tout est sous sa puissance.
Mais tandis que sa main, dans la nuit du silence,
Du fragile univers sape les fondements ;
Sur des ailes de feu, loin du monde élancée,
Mon active pensée
Plane sur les débris entassés par le Temps.
Siècles qui n'êtes plus, et vous qui devez naître,
J'ose vous appeler ; hâtez-vous de paraître,
Au moment où je suis, venez vous réunir.
Je parcours tous les points de l'immense durée
D'une marche assurée :
J'enchaîne le présent, je vis dans l'avenir.
Le soleil épuisé dans sa brûlante course,
De ses feux par degrés verra tarir la source,
Et des mondes vieillis les ressorts s'useront.
Ainsi que des rochers qui du haut des montagnes
Roulent sur les campagnes,
Les astres l'un sur l'autre un jour s'écrouleront.
Là, de l'éternité commencera l'empire ;
Et dans cet océan, où tout va se détruire,
Le Temps s'engloutira, comme un faible ruisseau.
Mais mon âme immortelle, aux siècles échappée,
Ne sera point frappée,
Et des mondes brisés foulera le tombeau.
Des vastes mers, grand Dieu, tu fixas les limites,
C'est ainsi que du Temps les bornes sont prescrites.
Quel sera ce moment de l'éternelle nuit ?
Toi seul tu le connais, tu lui diras d'éclore :
Mais l'univers l'ignore ;
Ce n'est qu'en périssant qu'il en doit être instruit.
Quand l'airain frémissant autour de vos demeures,
Mortels, vous avertit de la fuite des heures,
Que ce signal terrible épouvante vos sens.
A ce bruit, tout à coup, mon âme se réveille,
Elle prête l'oreille
Et croit de la mort même entendre les accents.
Trop aveugles humains, quelle erreur vous enivre !
Vous n'avez qu'un instant pour penser et pour vivre,
Et cet instant qui fuit est pour vous un fardeau !
Avare de ses biens, prodigue de son être,
Dès qu'il peut se connaître,
L'homme appelle la mort et creuse son tombeau.
L'un, courbé sous cent ans, est mort dès sa naissance ;
L'autre engage à prix d'or sa vénale existence ;
Celui-ci la tourmente à de pénibles jeux ;
Le riche se délivre, au prix de sa fortune,
Du Temps qui l'importune ;
C'est en ne vivant pas que l'on croit vivre heureux.
Abjurez, ô mortels, cette erreur insensée !
L'homme vit par son âme, et l'âme est la pensée.
C'est elle qui pour vous doit mesurer le Temps !
Cultivez la sagesse ; apprenez l'art suprême
De vivre avec soi-même ;
Vous pourrez sans effroi compter tous vos instants.
Si je devais un jour pour de viles richesses
Vendre ma liberté, descendre à des bassesses,
Si mon coeur par mes sens devait être amolli,
O Temps ! je te dirais : "Préviens ma dernière heure,
Hâte-toi que je meure ;
J'aime mieux n'être pas que de vivre avili."
Mais si de la vertu les généreuses flammes
Peuvent de mes écrits passer dans quelques âmes ;
Si je peux d'un ami soulager les douleurs ;
S'il est des malheureux dont l'obscure innocence
Languisse sans défense,
Et dont ma faible main doive essuyer les pleurs,
Ô Temps, suspends ton vol, respecte ma jeunesse ;
Que ma mère, longtemps témoin de ma tendresse,
Reçoive mes tributs de respect et d'amour ;
Et vous, Gloire, Vertu, déesses immortelles,
Que vos brillantes ailes
Sur mes cheveux blanchis se reposent un jour.
nadia ibrahimi- Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008
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