Poèmes pour la nature
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Poèmes pour la nature
Hymne à la terre
... Je te salue, ô Terre, ô Terre porte-grains,
Porte-or, porte-santé, porte-habits, porte-humains,
Porte-fruicts, porte-tours, alme, belle, immobile,
Patiente, diverse, odorante, fertile,
Vestue d'un manteau tout damassé de fleurs
Passementé de flots, bigarré de couleurs.
Je te salue, ô coeur, racine, baze ronde,
Pied du grand animal qu'on appelle le Monde,
Chaste espouse, du Ciel, asseuré fondement
Des estages divers d'un si grand bastiment.
Je te salue, ô soeur, mere, nourrice, hostesse
Du Roy des animaux. Tout, ô grande princesse,
Vit en faveur de toy. Tant de cieux tournoyans
Portent pour t'esclairer leurs astres flamboyans ;
Le feu pour t'eschauffer sur les flotantes nues
Tient ses pures ardeurs en arcade estendues ;
L'air pour te refreschir se plait d'estre secoux
Or' d'un aspre Borée, or' d'un Zephyre doux ;
L'eau, pour te destremper, de mers, fleuves, fonteines
Entrelasse ton corps tout ainsi que de veines. ...
Guillaune de Salluste DU BARTAS
(1544-1590)
... Je te salue, ô Terre, ô Terre porte-grains,
Porte-or, porte-santé, porte-habits, porte-humains,
Porte-fruicts, porte-tours, alme, belle, immobile,
Patiente, diverse, odorante, fertile,
Vestue d'un manteau tout damassé de fleurs
Passementé de flots, bigarré de couleurs.
Je te salue, ô coeur, racine, baze ronde,
Pied du grand animal qu'on appelle le Monde,
Chaste espouse, du Ciel, asseuré fondement
Des estages divers d'un si grand bastiment.
Je te salue, ô soeur, mere, nourrice, hostesse
Du Roy des animaux. Tout, ô grande princesse,
Vit en faveur de toy. Tant de cieux tournoyans
Portent pour t'esclairer leurs astres flamboyans ;
Le feu pour t'eschauffer sur les flotantes nues
Tient ses pures ardeurs en arcade estendues ;
L'air pour te refreschir se plait d'estre secoux
Or' d'un aspre Borée, or' d'un Zephyre doux ;
L'eau, pour te destremper, de mers, fleuves, fonteines
Entrelasse ton corps tout ainsi que de veines. ...
Guillaune de Salluste DU BARTAS
(1544-1590)
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
SENSATION :Rimbaud
Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Réveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la nature, - heureux comme avec une femme.
Arthur Rimbaud Mars 1870.
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Réveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la nature, - heureux comme avec une femme.
Arthur Rimbaud Mars 1870.
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Le semeur / HUGO
LE SEMEUR
C'est au moment crepusculaire
J'admire, assis sous un portail
Ce reste de jour dont s'eclaire
La dernière heure de travail.
Dans les terres, de nuit baignées
Je contemple, ému les haillons
D'un vieillard qui jette à poignées
La moisson future aux sillons.
Sa haute silhouette noire
Domine les profonds labours
On sent à quel point il doit croire
A la fuite utile des jours.
Il marche dans la plaine immense
Va, vient, lance la graine au loin,
Rouvre sa main et recommence
Et je médite, obscur temoin ;
Pendant que, déployant ces voiles
L'ombre, ou se mèle une rumeur,
Semble élargir jusqu'aux étoiles,
Le geste auguste du semeur.
VICTOR HUGO
C'est au moment crepusculaire
J'admire, assis sous un portail
Ce reste de jour dont s'eclaire
La dernière heure de travail.
Dans les terres, de nuit baignées
Je contemple, ému les haillons
D'un vieillard qui jette à poignées
La moisson future aux sillons.
Sa haute silhouette noire
Domine les profonds labours
On sent à quel point il doit croire
A la fuite utile des jours.
Il marche dans la plaine immense
Va, vient, lance la graine au loin,
Rouvre sa main et recommence
Et je médite, obscur temoin ;
Pendant que, déployant ces voiles
L'ombre, ou se mèle une rumeur,
Semble élargir jusqu'aux étoiles,
Le geste auguste du semeur.
VICTOR HUGO
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
L'hymne de nos campagnes
TRYO
Si tu es né dans une cité HLM
Je te dédicace ce poème
En espérant qu'au fond de tes yeux ternes
Tu puisses y voir un petit brin d'herbe
Et les mans faut faire la part des choses
Il est grand temps de faire une pause
De troquer cette vie morose
Contre le parfum d'une rose
C'est l'hymne de nos campagnes
De nos rivières, de nos montagnes
De la vie man, du monde animal
Crie-le bien fort, use tes cordes vocales!
Pas de boulot, pas de diplômes
Partout la même odeur de zone
Plus rien n'agite tes neurones
Pas même le shit que tu mets dans tes cônes
Va voir ailleur, rien ne te retient
Va vite faire quelque chose de tes mains
Ne te retourne pas ici tu n'as rien
Et sois le premier à chanter ce refrain
Assieds-toi près d'une rivière
Ecoute le coulis de l'eau sur la terre
Dis-toi qu'au bout, hé ! il y a la mer
Et que ça, ça n'a rien d'éphémère
Tu comprendras alors que tu n'es rien
Comme celui avant toi, comme celui qui vient
Que le liquide qui coule dans tes mains
Te servira à vivre jusqu'à demain matin!
Assieds-toi près d'un vieux chêne
Et compare le à la race humaine
L'oxygène et l'ombre qu'il t'amène
Mérite-t-il les coups de hache qui le saigne ?
Lève la tête, regarde ces feuilles
Tu verras peut-être un écureuil
Qui te regarde de tout son orgueuil
Sa maison est là, tu es sur le seuil...
Peut-être que je parle pour ne rien dire
Que quand tu m'écoutes tu as envie de rire
Mais si le béton est ton avenir
Dis-toi que c'est la forêt qui fait que tu respires
J'aimerais pour tous les animaux
Que tu captes le message de mes mots
Car un lopin de terre, une tige de roseau
Servira la croissance de tes marmots !
Si tu es né dans une cité HLM
Je te dédicace ce poème
En espérant qu'au fond de tes yeux ternes
Tu puisses y voir un petit brin d'herbe
Et les mans faut faire la part des choses
Il est grand temps de faire une pause
De troquer cette vie morose
Contre le parfum d'une rose
C'est l'hymne de nos campagnes
De nos rivières, de nos montagnes
De la vie man, du monde animal
Crie-le bien fort, use tes cordes vocales!
Pas de boulot, pas de diplômes
Partout la même odeur de zone
Plus rien n'agite tes neurones
Pas même le shit que tu mets dans tes cônes
Va voir ailleur, rien ne te retient
Va vite faire quelque chose de tes mains
Ne te retourne pas ici tu n'as rien
Et sois le premier à chanter ce refrain
Assieds-toi près d'une rivière
Ecoute le coulis de l'eau sur la terre
Dis-toi qu'au bout, hé ! il y a la mer
Et que ça, ça n'a rien d'éphémère
Tu comprendras alors que tu n'es rien
Comme celui avant toi, comme celui qui vient
Que le liquide qui coule dans tes mains
Te servira à vivre jusqu'à demain matin!
Assieds-toi près d'un vieux chêne
Et compare le à la race humaine
L'oxygène et l'ombre qu'il t'amène
Mérite-t-il les coups de hache qui le saigne ?
Lève la tête, regarde ces feuilles
Tu verras peut-être un écureuil
Qui te regarde de tout son orgueuil
Sa maison est là, tu es sur le seuil...
Peut-être que je parle pour ne rien dire
Que quand tu m'écoutes tu as envie de rire
Mais si le béton est ton avenir
Dis-toi que c'est la forêt qui fait que tu respires
J'aimerais pour tous les animaux
Que tu captes le message de mes mots
Car un lopin de terre, une tige de roseau
Servira la croissance de tes marmots !
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Il faut que tu respires.
ANONYME
Approche-toi petit, écoute-moi gamin
Je vais te raconter l'histoire de l'être humain
Au début y'avait rien au début c'était bien
La nature avançait y'avait pas de chemin
Puis l'homme a débarqué avec ses gros souliers
Des coups de pied dans la gueule pour se faire respecter
Des routes à sens unique il s'est mis à tracer
Des fleches dans la plaine se sont multipliés
Et tous les événements se sont vus maitriser
En deux temps trois mouvements l'histoire était pliée
C'est pas demain la veille qu'on fera marche arrière
On a même commencé à polluer les déserts
Il faut que tu respires
Et ça c'est rien de le dire
Tu vas pas mourir de rire
Et c'est pas rien de le dire
D'ici quelques années on aura bouffé la feuille
Et tes petits enfants ils n'auront plus qu'un oeil
En plein milieu du front ils te demanderont
Pourquoi toi t'en as deux et tu passeras pour un con
Ils te diront comment t'as pu laisser faire ça
T'auras beau te defendre leur expliquer tout bas
C'est pas ma faute à moi c'est la faute aux anciens
Mais y'aura plus personne pour te laver les mains
Tu leur raconteras l'époque où tu pouvais
Manger des fruits dans l'herbe allongé dans les prés
Y'avait des animaux partout dans la forêt
Au début du printemps les oiseaux revenaient
Il faut que tu respires
Et ça c'est rien de le dire
Tu vas pas mourir de rire
Et c'est pas rien de le dire
Il faut que tu respires
C'est demain que tout empire
Tu vas pas mourir de rire
Et c'est pas rien de le dire
Le pire dans cette histoire c'est qu'on est des esclaves
Quelque part assassin ici bien incapable
De regarder les arbres sans se sentir coupable
A moitié défroqué cent pour cent misérable
Alors voilà petit l'histoire de l'être humain
C'est pas joli joli et j'connais pas la fin
T'es pas né dans un chou mais plutôt dans un trou
Qu'on remplit tous les jours comme une fosse à purin
Il faut que tu respires
Et ça c'est rien de le dire
Tu vas pas mourir de rire
Et c'est pas rien de le dire
Il faut que tu respires
C'est demain que tout empire
Tu vas pas mourir de rire
Et ça c'est rien de le dire
Il faut que tu respires
Il faut que tu respires
Approche-toi petit, écoute-moi gamin
Je vais te raconter l'histoire de l'être humain
Au début y'avait rien au début c'était bien
La nature avançait y'avait pas de chemin
Puis l'homme a débarqué avec ses gros souliers
Des coups de pied dans la gueule pour se faire respecter
Des routes à sens unique il s'est mis à tracer
Des fleches dans la plaine se sont multipliés
Et tous les événements se sont vus maitriser
En deux temps trois mouvements l'histoire était pliée
C'est pas demain la veille qu'on fera marche arrière
On a même commencé à polluer les déserts
Il faut que tu respires
Et ça c'est rien de le dire
Tu vas pas mourir de rire
Et c'est pas rien de le dire
D'ici quelques années on aura bouffé la feuille
Et tes petits enfants ils n'auront plus qu'un oeil
En plein milieu du front ils te demanderont
Pourquoi toi t'en as deux et tu passeras pour un con
Ils te diront comment t'as pu laisser faire ça
T'auras beau te defendre leur expliquer tout bas
C'est pas ma faute à moi c'est la faute aux anciens
Mais y'aura plus personne pour te laver les mains
Tu leur raconteras l'époque où tu pouvais
Manger des fruits dans l'herbe allongé dans les prés
Y'avait des animaux partout dans la forêt
Au début du printemps les oiseaux revenaient
Il faut que tu respires
Et ça c'est rien de le dire
Tu vas pas mourir de rire
Et c'est pas rien de le dire
Il faut que tu respires
C'est demain que tout empire
Tu vas pas mourir de rire
Et c'est pas rien de le dire
Le pire dans cette histoire c'est qu'on est des esclaves
Quelque part assassin ici bien incapable
De regarder les arbres sans se sentir coupable
A moitié défroqué cent pour cent misérable
Alors voilà petit l'histoire de l'être humain
C'est pas joli joli et j'connais pas la fin
T'es pas né dans un chou mais plutôt dans un trou
Qu'on remplit tous les jours comme une fosse à purin
Il faut que tu respires
Et ça c'est rien de le dire
Tu vas pas mourir de rire
Et c'est pas rien de le dire
Il faut que tu respires
C'est demain que tout empire
Tu vas pas mourir de rire
Et ça c'est rien de le dire
Il faut que tu respires
Il faut que tu respires
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
La rivière et la prairie
- Jacques CAZOTTE (1719-1792)
La rivière et la prairie
Fable
Causant avec la Prairie,
La Rivière adroitement
Rabattit sur le torrent ;
Je suis sa meilleure amie ;
On croit qu'il est mon parent,
À cause de la ravine,
Qui se prétend ma cousine,
Et dont on dit qu'il descend.
Je serais désespérée
De dire à d'autres qu'à vous
Ce qu'en pense la contrée ;
Mais il y passe, entre nous,
Pour un scélérat insigne,
Il a fait un trait indigne.
Quelque part, près de ces lieux,
On sacrifiait aux Dieux.
Il part du haut de la cime ;
Comme un foudre il se répand,
Entraîne, chemin faisant,
L'idole, le desservant,
Les dévots et la victime.
Il n'a pas de lit certain ;
Mais, dans son cours libertin,
Quelque part qu'il s'achemine,
Il saccage, déracine ;
Il s'élance avec fureur,
Précédé par la terreur
Et suivi de la ruine.
Son cours est un vrai fléau.
Ce n'est pas que je me loue ;
Mais regardez bien mon eau,
Vous n'y verrez pas de boue.
Je m'écoule, à petit bruit,
Et, partout sur mon passage,
Plaine, bosquet, pâturage,
Tout s'engraisse, tout fleurit...
La Prairie, impatiente,
Dit, le ciel en soit béni :
La gloire en revient à lui,
Qui vous ménagea la pente.
Mais si, changeant de niveau,
Vous tombiez d'un peu plus haut
Que ce torrent si coupable,
Vous seriez plus intraitable.
Plaignons les gens dont les penchants sont forts :
Il doit leur en coûter pour vaincre la nature :
Quand ils font mal, sans doute ils ont des torts,
Mais Dieu seul en sait la mesure.
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Jean Garamond:La Dure Terre
Le ciment et la lassitude leur donnaient des gestes rigides de pierre
Ils construisaient un port — ils construisaient un pont
Ils astiquaient des locomotives — ils creusaient la terre.
Ils étaient fatigués.
Et fatigués aussi la terre et le port et le pont
des embûches qu'ils dressaient aux hommes avec les lourdes traverses qui courbaturaient les épaules avec les marteaux qui projetaient sur la chair des surprises rouges
avec les chutes camouflés dans la certitude —
Matière rusée — terre cabrée comme une bête libre qu'on met en cage.
C était le soir — les hommes parlaient de leurs habitudes juteuses d'absence.
Et Alzin, coiffeur pour dames, dit :
Maintenant les bateaux enceints d'appels viendront.
Il y aura l'instant catégorique de l'échelle qui remonte
puis la mer qui se dépeuple entre les quais et le bateau qui s'éloigne
et mes yeux qui se noieront dans le lac tanné de mon âme
Moi qui ai l'habitude de rendre plus belles les femmes
J'ai construit un port.
Ils rentraient le soir — Le ciment — la solitude et la lassitude leur donnaient des gestes
rigides de pierre.
Ils construisaient un pont.
Et le pont était couché sur l'eau — simple et trapu
solide comme un pas de géant.
Il était comme un lutteur qui a fait toucher terre à l eau.
C était le soir — les hommes ressassaient leurs habitudes anciennes
et Jean le typographe dit :
J'ai construit un pont —
il est musclé de la moelle de mes muscles
il s'en va d'un pas assuré au-dessus du fleuve
vers une fertile floraison de routes
qui amènent — croisent et renouvellent des vies
au delà du fleuve.
Et j'ai regardé ce pont qui unit deux rives
et je suis fatigué
ce pont ne m'unit à rien.
Les prés au delà du fleuve ignoreront ma promenade
le poids amical de mon corps sur eux
moi qui sais donner aux velins leur meilleure pâture
j'ai construit un pont.
Et Pardoen qui dispose dans les lins et dans les laines
des géométries harmonieuses
Dit :
Tous les jours elles me reviennent blanches grises et sales.
Les routes — les campagnes et les gares
déposent sur elles le baiser poussiéreux de leur vie.
On m'a donné des chiffons de fils de laine.
On m'a donné des boîtes doubles avec de l'huile et du pétrole dedans —
Ma spatule sous la mousse des routes découvre la virginité rouge des
rayons —
L'huile lisse le miroir noir des tenders.
J'écoute courir le sang blanc et bouillant dans le ventre long et
vigoureux.
et la locomotive gémit de cette ardeur.
Locomotive chaude que j'ai parée pour de nouvelles noces avec les
routes
prête à troubler l'égoïste méditation des verdures
chargée de présents et de mauvaises nouvelles
et d'hommes abandonnés — et d'autres qu'on attend
et de rencontres et de soucis
et de morceaux de mes prunelles figés dans les rayons des roues.
Va la vie — et son désarroi — et mon désarroi
et son inadaptation à mon inadaptation
et mes draps de laine qui voulaient corriger les corps.
Et Chastel le Cantalou — cultivateur de son métier
qui est médecin de ses brebis — et ingénieur de ses champs
dit :
Moi, l'homme de la terre, je travaille à la terre —
j'ai arraché dans les champs d'ici les pommes de terre —
la terre s'agrippait — laissait la poussière de sa chair entr'elles.
La terre est dure — elle ne donne pas.
Et le cultivateur d'ici regardait mes mains et mes ampoules
..et approuvait
il me regardait travailler — et comprenait que j'étais de la terre
et m'approuvait.
Mais je suis l'étranger dans sa cuisine
et près de sa femme
Et son chien ne me connaît pas.
Là-bas... chez moi
un chien court au bout du sentier humer l'air
et cherche mon odeur.
Ils se réunissaient le soir
Pardoen qui dessine les tissus — et Alzin le coiffeur pour dames
et Chastel le cultivateur — et Jean le typographe.
Ils mangeaient lentement leur soupe de carottes et de patates.
Le silence pesait de ses comparaisons
puis ils éveillaient la vie qui continuait sourdement dans leurs
mémoires.
Un poème terne entrelaçait la campagne — les villes — les maisons
les lits peuples qui sentent bon la lessive
et leur détresse d'hommes sans liberté.
Le ciel grisonnant était comme un grand oeillet pâle
accroché à la boutonnière de la vie.
21 avril 1942. Jean Garamond
rayane- Nombre de messages : 1418
Date d'inscription : 23/09/2008
Renée Jeanne Mignard:nature
Automnale
L’été s’en est allé aux dernières vendanges.
Chaque soir le soleil se meurt un peu plus tôt.
Le bleu du ciel pâlit. Le merle et la mésange
Ont déjà déserté la fontaine aux oiseaux.
Le grand chêne attristé laisse pleurer ses feuilles
Que le vent plus hardi conduit à leur trépas.
Elles ont recouvert le sol qui les recueille
D’un tapis mordoré qui craque sous les pas.
L’abeille ne boit plus au calice des roses.
Le papillon de mai ne s’éveillera pas. Le jardin fatigué paresse, se repose,
Avant que d’affronter décembre et ses frimas.
L’hirondelle a rejoint des aurores lointaines.
La fumée, sur le toit, danse au rythme du vent.
Quand la brume du soir emprisonne la plaine,
Le vol des souvenirs s’alanguit doucement.
L’été s’en est allé aux dernières vendanges.
Chaque soir le soleil se meurt un peu plus tôt.
Le bleu du ciel pâlit. Le merle et la mésange
Ont déjà déserté la fontaine aux oiseaux.
Le grand chêne attristé laisse pleurer ses feuilles
Que le vent plus hardi conduit à leur trépas.
Elles ont recouvert le sol qui les recueille
D’un tapis mordoré qui craque sous les pas.
L’abeille ne boit plus au calice des roses.
Le papillon de mai ne s’éveillera pas. Le jardin fatigué paresse, se repose,
Avant que d’affronter décembre et ses frimas.
L’hirondelle a rejoint des aurores lointaines.
La fumée, sur le toit, danse au rythme du vent.
Quand la brume du soir emprisonne la plaine,
Le vol des souvenirs s’alanguit doucement.
nisrine nacer- Nombre de messages : 1044
Date d'inscription : 09/09/2008
Re: Poèmes pour la nature
Balade en montagne
Je goûte au silence du matin,
Dans la courbe tendre du chemin,
La rosée perle de son écrin,
Dans un chaud soleil de juin.
Mon regard pénètre émerveillé,
Au coeur de ce vallon,
Où se dresse en toute beauté,
La cime fière du Bric Berchet.
Je goûte à l'arôme délicat,
Des fleurs qui guide mes pas,
Tandis que se perche du haut des mélèzes,
Une odeur parfumée de sève,
Le chemins enlace la pente,
Se blottit au creux du ravin,
Le torrent dans le lointain chante
Sous une pluie d'éclats cristallins
Auteur inconnu
Je goûte au silence du matin,
Dans la courbe tendre du chemin,
La rosée perle de son écrin,
Dans un chaud soleil de juin.
Mon regard pénètre émerveillé,
Au coeur de ce vallon,
Où se dresse en toute beauté,
La cime fière du Bric Berchet.
Je goûte à l'arôme délicat,
Des fleurs qui guide mes pas,
Tandis que se perche du haut des mélèzes,
Une odeur parfumée de sève,
Le chemins enlace la pente,
Se blottit au creux du ravin,
Le torrent dans le lointain chante
Sous une pluie d'éclats cristallins
Auteur inconnu
nisrine nacer- Nombre de messages : 1044
Date d'inscription : 09/09/2008
Nayahcruize
Montagne et présence éternelle
Sur les sentiers frappés par des pas répétés,
Une ombre se glisse, légère et triste.
Seule dans l'obscurité par la lune éclairée,
Je compte les années qui nous ont séparées.
Ici nous étions heureux ; les bois riaient à nos jeux ;
Sous les pins embrumés, ton parfum s'attardait.
Nous leur racontions notre amour à chacun de nos séjours ;
"J'irai où tu iras"! Disais-je d'une voix
Remplie d'éternité, à ta cause vouée.
Il y a ici encore tant de ces choses que le temps
N'est capable d'effacer, ni de faire oublier.
La montagne en échos crie ton nom, chante tes mots;
Elle n'a point oublié ces deux voix du passé
Qui se lièrent à jamais dans ce temple déserté ;
A la pointe de l'aurore elles résonnent encore
De la vallée livide jusqu'aux crêtes arides.
Au lever du soleil, une tristesse vermeille
Attend en silence les aveux d'une présence.
Si aujourd'hui tu n'es plu, c'est que la vie s'est plut
A briser ses enfants ; et moi, égarée chez les vivants,
Suspendue à la mort sereine, je te survis à grand peine ;
Et armée de tout mon courage, j'attends la fin de ton voyage,
Lorsque étendus sur notre lit de foi, la vie véritable te réveillera.
Sur les sentiers frappés par des pas répétés,
Une ombre se glisse, légère et triste.
Seule dans l'obscurité par la lune éclairée,
Je compte les années qui nous ont séparées.
Ici nous étions heureux ; les bois riaient à nos jeux ;
Sous les pins embrumés, ton parfum s'attardait.
Nous leur racontions notre amour à chacun de nos séjours ;
"J'irai où tu iras"! Disais-je d'une voix
Remplie d'éternité, à ta cause vouée.
Il y a ici encore tant de ces choses que le temps
N'est capable d'effacer, ni de faire oublier.
La montagne en échos crie ton nom, chante tes mots;
Elle n'a point oublié ces deux voix du passé
Qui se lièrent à jamais dans ce temple déserté ;
A la pointe de l'aurore elles résonnent encore
De la vallée livide jusqu'aux crêtes arides.
Au lever du soleil, une tristesse vermeille
Attend en silence les aveux d'une présence.
Si aujourd'hui tu n'es plu, c'est que la vie s'est plut
A briser ses enfants ; et moi, égarée chez les vivants,
Suspendue à la mort sereine, je te survis à grand peine ;
Et armée de tout mon courage, j'attends la fin de ton voyage,
Lorsque étendus sur notre lit de foi, la vie véritable te réveillera.
nisrine nacer- Nombre de messages : 1044
Date d'inscription : 09/09/2008
Anna De Noailles
L'offrande à la nature
Nature au coeur profond sur qui les cieux reposent,
Nul n'aura comme moi si chaudement aimé
La lumière des jours et la douceur des choses
L'eau luisante et la terre où la vie a germé.
Nature au coeur profond sur qui les cieux reposent,
Nul n'aura comme moi si chaudement aimé
La lumière des jours et la douceur des choses
L'eau luisante et la terre où la vie a germé.
nisrine nacer- Nombre de messages : 1044
Date d'inscription : 09/09/2008
Samivel poète et randonneur
Les vraies merveilles ne coûtent pas un centime
Ici commence la liberté.
La liberté de bien se conduire.
Voici l'espace, voici l'air pur, voici le silence,
Le royaume des aurores intactes et des bêtes naïves.
Tout ce qui vous manque dans les villes,
est ici préservé pour votre joie.
Enterrez vos soucis et emmenez vos boites de conserves.
Les papiers gras sont les cartes de visite des mufles.
Ouvrez vos yeux et vos oreilles fermez vos transistors.
Pas de bruit de moteur inutile, pas de klaxons.
Écoutez les musiques de la montagne.
Récoltez de beaux souvenirs, mais ne cueillez pas les fleurs.
N'arrachez surtout pas les plantes : il pousserait des pierres.
Ne mutilez pas les fleurs, marchez sur les sentiers.
Il faut beaucoup de brins d'herbe pour tisser un homme.
Oiseaux, chevreuils, lapins, chamois,
Et tout ce petit peuple de poil et de plume
ont désormais besoin de votre amitié pour survivre.
Déclarez la paix aux animaux timides.
Ne les troublez pas dans leurs affaires
L'ennemi des bêtes est l'ennemi de la vie.
Afin que les printemps futurs réjouissent encore vos enfants !
Ici commence la liberté.
La liberté de bien se conduire.
Voici l'espace, voici l'air pur, voici le silence,
Le royaume des aurores intactes et des bêtes naïves.
Tout ce qui vous manque dans les villes,
est ici préservé pour votre joie.
Enterrez vos soucis et emmenez vos boites de conserves.
Les papiers gras sont les cartes de visite des mufles.
Ouvrez vos yeux et vos oreilles fermez vos transistors.
Pas de bruit de moteur inutile, pas de klaxons.
Écoutez les musiques de la montagne.
Récoltez de beaux souvenirs, mais ne cueillez pas les fleurs.
N'arrachez surtout pas les plantes : il pousserait des pierres.
Ne mutilez pas les fleurs, marchez sur les sentiers.
Il faut beaucoup de brins d'herbe pour tisser un homme.
Oiseaux, chevreuils, lapins, chamois,
Et tout ce petit peuple de poil et de plume
ont désormais besoin de votre amitié pour survivre.
Déclarez la paix aux animaux timides.
Ne les troublez pas dans leurs affaires
L'ennemi des bêtes est l'ennemi de la vie.
Afin que les printemps futurs réjouissent encore vos enfants !
nisrine nacer- Nombre de messages : 1044
Date d'inscription : 09/09/2008
Albert Samain: Le Fleuve
Sous l'être universel, vois l'éternel Symbole.
Victor HUGO.
Conçu dans l’ombre aux flancs augustes de la terre,
Le fleuve prend sa vie aux sources du mystère.
Il est le fils des monts déserts et des glaciers ;
Et les vieux rocs pensifs, farouches nourriciers
Du limpide cristal distillé par la voûte,
Dans l’ombre, de longs jours l’abreuvent goutte à goutte,
L’écoutent gazouiller dans son lit de cailloux,
Si faible encore, avec un murmure très doux,
Et suivent, attendris, ses limpides manèges
Parmi la radieuse innocence des neiges.
Tel il grandit, gardé par l’antre paternel,
Pur de la pureté des glaces - près du ciel.
Mais déjà, frémissant de conquérir l’espace,
Il s’élance, et ruisseau turbulent et vorace,
Emporte en bouillonnant dans ses flots confondus
Des herbes, des rochers et des sapins tordus ;
Puis, torrent blanc d’écume, il déserte les cimes ;
Jaloux de l’avalanche, il se rue aux abîmes,
Et sur les rocs fumants, ivre et précipité,
S’écrase et tombe en des cascades de clarté !
Au fond des ravins noirs sa fureur s’est éteinte.
Il respire à présent, car la plaine est atteinte,
La plaine pacifique aux horizons d’épis.
Il promène, étalé, de longs jours assoupis
Parmi les terrains roux, les vergers, les pâtures,
Le décor symétrique et calme des cultures,
Et coule monotone et pareil aux bœufs lents
Attelés sur la route aux chars de foin tremblants.
Le rire de l’été rayonne sur ses berges.
Des troupeaux çà et là boivent à ses flots vierges ;
Il rencontre, en passant, des villages, des bourgs ;
Maints châteaux dans ses eaux claires mirent leurs tours
Et, charmant, il s’attarde, il serpente, il chatoie,
Une frange de fleurs à sa robe de soie.
Pourtant il reste en lui des flammes du passé ;
Et, parfois, quand l’hiver plus fort l’a terrassé,
Comme un taureau qu’on couche en pesant sur ses cornes,
Tout à coup, s’échappant, crevant les glaçons mornes,
Balayant l’horizon, brisant tout, tordant tout,
Faisant sauter les ponts de pierre d’un seul coup
- Car l’âme des fléaux géants est dans son âme -
Il arrive comme le vent, comme la flamme !
Et les peuples, béants d’horreur sur les coteaux,
Écoutent dans la nuit passer ses grandes eaux,
Jusqu’au jour où, lion fatigué de ravages,
Il retourne à pas lents dormir sur ses rivages,
Et reprend, souriant sous l’azur attiédi,
Le rêve nonchalant de ses après-midi.
Cependant il s’étend. Ses eaux autoritaires
Rançonnent durement les ruisseaux tributaires,
Et riche de ses flots par des flots augmentés,
Il marche comme un roi vainqueur vers les cités.
Chargé d’orgueil, au loin, sur les plaines fertiles,
Il regarde traîner son manteau semé d’îles,
Et, superbe, à plaisir prodiguant les détours,
S’avance vers la ville aux immenses faubourgs
Où, plein de majesté, comme les patriarches,
Il entre, glorieux, sous la splendeur des arches !
La Ville avec orgueil, du haut des grands quais blancs
Regarde s’avancer ses flots nobles et lents.
Les vieux palais bâtis par les races lointaines
Suspendent sur ses eaux leurs terrasses hautaines.
Les rêveurs éblouis vont voir, les soirs vermeils,
Sur ses flots somptueux descendre les soleils ;
Et la nuit jette au fond de ses ondes funèbres
Des secrets qu’il emporte à Dieu dans les ténèbres.
Un peuple de bateaux le sillonnent sans fin.
Il apporte le blé, le fer, le bois, le vin,
Et fait sur son chemin bénir ses eaux royales
Par les grands bras levés des saintes cathédrales !
Il est religieux, sacré, fécond, puissant,
Et coule au cœur des nations comme le sang.
L’horizon s’élargit, respectueux ; la Terre,
Orgueilleuse de lui, comme une bonne mère,
Le salue au passage avec ses bois, ses champs,
Ses vignes, ses moissons et ses jardins penchants.
L’âge l’a couronné de sagesse ; il respire
La brise parfumée aux fleurs de son empire,
Et revêtu de force et de sérénité
Marche tout plein déjà de sa divinité.
Triomphateur altier consacré par l’histoire,
Charriant sous maint pont sonore un flot de gloire,
Il va de plus en plus magnifique et profond.
Déjà de hauts vaisseaux apparaissent qui font
Palpiter sur ses eaux des gonflements de voiles.
Chaque nuit sa splendeur réfléchit plus d’étoiles.
Le vent lointain qui vient d’horizons ignorés
Soulève vers le soir ses cheveux azurés.
L’Océan ! L’Océan !... déjà vers sa narine
Monte en souffle puissant la grande odeur marine.
Il tressaille, il s’émeut ; déjà de sourds reflux
Troublent obscurément ses flots irrésolus.
Il a compris ; là-bas l’attend l’ultime épreuve.
Au fils des monts altiers, roi des plaines, au fleuve,
La mort dresse là-bas le lit universel,
Brodé d’écume blanche et parfumé de sel.
Alors multipliant ses ondes épandues,
Superbe, débordant au loin les étendues,
Il étreint l’horizon immense peu à peu
De l’attendrissement d’un magnifique adieu ;
Puis, enlacé déjà par l’épouse fatale,
Dans un effort suprême, il grandit, il s’étale
Et, pareil à la mer, qu’inonde un couchant d’or,
Il entre dans l’orgueil sublime de sa mort.
Victor HUGO.
Conçu dans l’ombre aux flancs augustes de la terre,
Le fleuve prend sa vie aux sources du mystère.
Il est le fils des monts déserts et des glaciers ;
Et les vieux rocs pensifs, farouches nourriciers
Du limpide cristal distillé par la voûte,
Dans l’ombre, de longs jours l’abreuvent goutte à goutte,
L’écoutent gazouiller dans son lit de cailloux,
Si faible encore, avec un murmure très doux,
Et suivent, attendris, ses limpides manèges
Parmi la radieuse innocence des neiges.
Tel il grandit, gardé par l’antre paternel,
Pur de la pureté des glaces - près du ciel.
Mais déjà, frémissant de conquérir l’espace,
Il s’élance, et ruisseau turbulent et vorace,
Emporte en bouillonnant dans ses flots confondus
Des herbes, des rochers et des sapins tordus ;
Puis, torrent blanc d’écume, il déserte les cimes ;
Jaloux de l’avalanche, il se rue aux abîmes,
Et sur les rocs fumants, ivre et précipité,
S’écrase et tombe en des cascades de clarté !
Au fond des ravins noirs sa fureur s’est éteinte.
Il respire à présent, car la plaine est atteinte,
La plaine pacifique aux horizons d’épis.
Il promène, étalé, de longs jours assoupis
Parmi les terrains roux, les vergers, les pâtures,
Le décor symétrique et calme des cultures,
Et coule monotone et pareil aux bœufs lents
Attelés sur la route aux chars de foin tremblants.
Le rire de l’été rayonne sur ses berges.
Des troupeaux çà et là boivent à ses flots vierges ;
Il rencontre, en passant, des villages, des bourgs ;
Maints châteaux dans ses eaux claires mirent leurs tours
Et, charmant, il s’attarde, il serpente, il chatoie,
Une frange de fleurs à sa robe de soie.
Pourtant il reste en lui des flammes du passé ;
Et, parfois, quand l’hiver plus fort l’a terrassé,
Comme un taureau qu’on couche en pesant sur ses cornes,
Tout à coup, s’échappant, crevant les glaçons mornes,
Balayant l’horizon, brisant tout, tordant tout,
Faisant sauter les ponts de pierre d’un seul coup
- Car l’âme des fléaux géants est dans son âme -
Il arrive comme le vent, comme la flamme !
Et les peuples, béants d’horreur sur les coteaux,
Écoutent dans la nuit passer ses grandes eaux,
Jusqu’au jour où, lion fatigué de ravages,
Il retourne à pas lents dormir sur ses rivages,
Et reprend, souriant sous l’azur attiédi,
Le rêve nonchalant de ses après-midi.
Cependant il s’étend. Ses eaux autoritaires
Rançonnent durement les ruisseaux tributaires,
Et riche de ses flots par des flots augmentés,
Il marche comme un roi vainqueur vers les cités.
Chargé d’orgueil, au loin, sur les plaines fertiles,
Il regarde traîner son manteau semé d’îles,
Et, superbe, à plaisir prodiguant les détours,
S’avance vers la ville aux immenses faubourgs
Où, plein de majesté, comme les patriarches,
Il entre, glorieux, sous la splendeur des arches !
La Ville avec orgueil, du haut des grands quais blancs
Regarde s’avancer ses flots nobles et lents.
Les vieux palais bâtis par les races lointaines
Suspendent sur ses eaux leurs terrasses hautaines.
Les rêveurs éblouis vont voir, les soirs vermeils,
Sur ses flots somptueux descendre les soleils ;
Et la nuit jette au fond de ses ondes funèbres
Des secrets qu’il emporte à Dieu dans les ténèbres.
Un peuple de bateaux le sillonnent sans fin.
Il apporte le blé, le fer, le bois, le vin,
Et fait sur son chemin bénir ses eaux royales
Par les grands bras levés des saintes cathédrales !
Il est religieux, sacré, fécond, puissant,
Et coule au cœur des nations comme le sang.
L’horizon s’élargit, respectueux ; la Terre,
Orgueilleuse de lui, comme une bonne mère,
Le salue au passage avec ses bois, ses champs,
Ses vignes, ses moissons et ses jardins penchants.
L’âge l’a couronné de sagesse ; il respire
La brise parfumée aux fleurs de son empire,
Et revêtu de force et de sérénité
Marche tout plein déjà de sa divinité.
Triomphateur altier consacré par l’histoire,
Charriant sous maint pont sonore un flot de gloire,
Il va de plus en plus magnifique et profond.
Déjà de hauts vaisseaux apparaissent qui font
Palpiter sur ses eaux des gonflements de voiles.
Chaque nuit sa splendeur réfléchit plus d’étoiles.
Le vent lointain qui vient d’horizons ignorés
Soulève vers le soir ses cheveux azurés.
L’Océan ! L’Océan !... déjà vers sa narine
Monte en souffle puissant la grande odeur marine.
Il tressaille, il s’émeut ; déjà de sourds reflux
Troublent obscurément ses flots irrésolus.
Il a compris ; là-bas l’attend l’ultime épreuve.
Au fils des monts altiers, roi des plaines, au fleuve,
La mort dresse là-bas le lit universel,
Brodé d’écume blanche et parfumé de sel.
Alors multipliant ses ondes épandues,
Superbe, débordant au loin les étendues,
Il étreint l’horizon immense peu à peu
De l’attendrissement d’un magnifique adieu ;
Puis, enlacé déjà par l’épouse fatale,
Dans un effort suprême, il grandit, il s’étale
Et, pareil à la mer, qu’inonde un couchant d’or,
Il entre dans l’orgueil sublime de sa mort.
magda- Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010
Albert Samain: Les Monts
Épiques survivants des vieux âges que hante
Une mystérieuse et lointaine épouvante,
Les monts dressent au ciel leur tumulte géant.
La terre les vénère ainsi que ses grands prêtres,
Et, dans la hiérarchie éternelle des êtres,
Ils n’ont au-dessus d’eux, les augustes ancêtres,
Que le grand ancêtre Océan.
Le tonnerre leur plaît. Tout le ciel qui s’embrase
À leurs fronts ceints d’éclairs met un nimbe d’extase.
Ils font rugir la foudre au creux de leurs ravins ;
Et sous les vents du nord à la sauvage allure,
Ils semblent redresser leur antique stature,
Ravis de voir flotter comme une chevelure
Leurs grandes forêts de sapins.
Au-dessus du troupeau servile et gras des plaines,
La fière aridité de leurs formes hautaines
Se drape en plein azur d’un manteau de clartés.
Ils sont les chastes monts aux aigles seuls propices,
Et la mort, les deux mains pleines de maléfices,
Garde sinistrement au bord des précipices
Leurs terribles virginités.
Une douceur aussi dans leur grand cœur circule.
La corne pastorale au fond du crépuscule
De vallon en vallon sonne en se prolongeant.
Avec la brebis blanche et la chèvre grimpante
Les vaches des bergers s’égrènent sur la pente ;
Et toute la montagne, où maint troupeau serpente,
Est pleine de cloches d’argent.
Le soir, c’est derrière eux que le soleil se couche...
Alors, la nuit, vêtus d’une ombre plus farouche,
Ils rendent à leurs pieds les coteaux plus tremblants.
Et quand du fond du ciel la filiale aurore
S’avance, d’un premier rayon pur et sonore
Elle va, comme on fait aux vieillards qu’on honore,
Baiser d’abord leurs cheveux blancs.
Ils sont l’élan puissant et profond de la terre.
L’azur les glorifie, et leur splendeur austère
Exalte les chanteurs aux beaux fronts inspirés.
Leurs pensers sont de grands éclairs sur les abîmes ;
La force des torrents gronde en leurs voix sublimes ;
Et c’est le même vent vertigineux des cimes
Qui souffle dans leurs chants sacrés.
L’arc de Diane sonne aux forêts du Taygète.
Sur le Parnasse en fleur, Apollon Musagète
Fait chanter l’archet d’or dans l’air de cristal bleu.
L’Olympe craque au bruit de l’immortelle joie ;
Sur le Caucase en sang l’affreux vautour s’éploie ;
Et l’Œta voit debout dans le feu qui flamboie
Hercule devenir un dieu.
Moïse au large front d’airain, Orphée imberbe,
Tous les pâles songeurs où s’incarna le verbe,
Pensifs, ont descendu leurs géants escaliers...
Car les monts, où le rêve augustement s’attache,
Ont dans leurs profondeurs une âme qui se cache ;
Et c’est de leurs vieux flancs éventrés qu’on arrache
Le marbre où les dieux sont taillés.
De sommet en sommet bondissant, éperdue,
L’âme-en plein firmament-respire l’étendue,
Et s’enivre du froid sublime de l’éther...
Les routes, les cités, les campagnes reculent,
Toutes les visions de la terre s’annulent ;
Et seuls les grands sommets dans la lumière ondulent
Comme les vagues de la mer.
Les monts ont les glaciers d’argent, les sources neuves
D’où sort la majesté pacifique des fleuves,
Les rocs aériens où l’aigle fait son nid.
Par leurs sentiers hardis, fuyant les embuscades,
Les chamois indomptés mènent leurs cavalcades ;
Et l’arc-en-ciel qui brille au travers des cascades
Fleurit leurs lèvres de granit.
Ainsi, gardant pour eux la terreur des orages,
Ils couvrent à leurs pieds les humbles pâturages
De la grave bonté d’un regard paternel.
Dans l’azur étonné leurs pics superbes plongent.
Sans fin à l’horizon leurs croupes se prolongent ;
Et, doux de la douceur des colosses, ils songent
Dans je ne sais quoi d’éternel.
Une mystérieuse et lointaine épouvante,
Les monts dressent au ciel leur tumulte géant.
La terre les vénère ainsi que ses grands prêtres,
Et, dans la hiérarchie éternelle des êtres,
Ils n’ont au-dessus d’eux, les augustes ancêtres,
Que le grand ancêtre Océan.
Le tonnerre leur plaît. Tout le ciel qui s’embrase
À leurs fronts ceints d’éclairs met un nimbe d’extase.
Ils font rugir la foudre au creux de leurs ravins ;
Et sous les vents du nord à la sauvage allure,
Ils semblent redresser leur antique stature,
Ravis de voir flotter comme une chevelure
Leurs grandes forêts de sapins.
Au-dessus du troupeau servile et gras des plaines,
La fière aridité de leurs formes hautaines
Se drape en plein azur d’un manteau de clartés.
Ils sont les chastes monts aux aigles seuls propices,
Et la mort, les deux mains pleines de maléfices,
Garde sinistrement au bord des précipices
Leurs terribles virginités.
Une douceur aussi dans leur grand cœur circule.
La corne pastorale au fond du crépuscule
De vallon en vallon sonne en se prolongeant.
Avec la brebis blanche et la chèvre grimpante
Les vaches des bergers s’égrènent sur la pente ;
Et toute la montagne, où maint troupeau serpente,
Est pleine de cloches d’argent.
Le soir, c’est derrière eux que le soleil se couche...
Alors, la nuit, vêtus d’une ombre plus farouche,
Ils rendent à leurs pieds les coteaux plus tremblants.
Et quand du fond du ciel la filiale aurore
S’avance, d’un premier rayon pur et sonore
Elle va, comme on fait aux vieillards qu’on honore,
Baiser d’abord leurs cheveux blancs.
Ils sont l’élan puissant et profond de la terre.
L’azur les glorifie, et leur splendeur austère
Exalte les chanteurs aux beaux fronts inspirés.
Leurs pensers sont de grands éclairs sur les abîmes ;
La force des torrents gronde en leurs voix sublimes ;
Et c’est le même vent vertigineux des cimes
Qui souffle dans leurs chants sacrés.
L’arc de Diane sonne aux forêts du Taygète.
Sur le Parnasse en fleur, Apollon Musagète
Fait chanter l’archet d’or dans l’air de cristal bleu.
L’Olympe craque au bruit de l’immortelle joie ;
Sur le Caucase en sang l’affreux vautour s’éploie ;
Et l’Œta voit debout dans le feu qui flamboie
Hercule devenir un dieu.
Moïse au large front d’airain, Orphée imberbe,
Tous les pâles songeurs où s’incarna le verbe,
Pensifs, ont descendu leurs géants escaliers...
Car les monts, où le rêve augustement s’attache,
Ont dans leurs profondeurs une âme qui se cache ;
Et c’est de leurs vieux flancs éventrés qu’on arrache
Le marbre où les dieux sont taillés.
De sommet en sommet bondissant, éperdue,
L’âme-en plein firmament-respire l’étendue,
Et s’enivre du froid sublime de l’éther...
Les routes, les cités, les campagnes reculent,
Toutes les visions de la terre s’annulent ;
Et seuls les grands sommets dans la lumière ondulent
Comme les vagues de la mer.
Les monts ont les glaciers d’argent, les sources neuves
D’où sort la majesté pacifique des fleuves,
Les rocs aériens où l’aigle fait son nid.
Par leurs sentiers hardis, fuyant les embuscades,
Les chamois indomptés mènent leurs cavalcades ;
Et l’arc-en-ciel qui brille au travers des cascades
Fleurit leurs lèvres de granit.
Ainsi, gardant pour eux la terreur des orages,
Ils couvrent à leurs pieds les humbles pâturages
De la grave bonté d’un regard paternel.
Dans l’azur étonné leurs pics superbes plongent.
Sans fin à l’horizon leurs croupes se prolongent ;
Et, doux de la douceur des colosses, ils songent
Dans je ne sais quoi d’éternel.
magda- Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010
Albert Samain-Le chariot d'or: J'aime l'aube...
J'aime l'aube aux pieds nus qui se coiffe de thym,
Les coteaux violets qu'un pâle rayon dore,
Et la persienne ouverte avec un bruit sonore,
Pour boire le vent frais qui monte du jardin,
La grand'rue au village un dimanche matin,
La vache au bord de l'eau toute rose d'aurore,
La fille aux claires dents, la feuille humide encore,
Et le divin cristal d'un bel oeil enfantin.
Mais je préfère une âme à l'ombre agenouillée,
Les grands bois à l'automne et leur odeur mouillée,
La route où tinte, au soir, un grelot de chevaux,
La lune dans la chambre à travers les rideaux,
Une main pâle et douce et lente qui se pose,
"Deux grands yeux pleins d'un feu triste",et,sur toute chose
Une voix qui voudrait sangloter et qui n'ose...
Les coteaux violets qu'un pâle rayon dore,
Et la persienne ouverte avec un bruit sonore,
Pour boire le vent frais qui monte du jardin,
La grand'rue au village un dimanche matin,
La vache au bord de l'eau toute rose d'aurore,
La fille aux claires dents, la feuille humide encore,
Et le divin cristal d'un bel oeil enfantin.
Mais je préfère une âme à l'ombre agenouillée,
Les grands bois à l'automne et leur odeur mouillée,
La route où tinte, au soir, un grelot de chevaux,
La lune dans la chambre à travers les rideaux,
Une main pâle et douce et lente qui se pose,
"Deux grands yeux pleins d'un feu triste",et,sur toute chose
Une voix qui voudrait sangloter et qui n'ose...
magda- Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010
Henri WARNERY :Les Origines
- Henri WARNERY (1859-1902)
Les Origines
Dans la splendeur des cieux un astre vient de naître,
Sur ses langes d'azur j'ai cru le reconnaître ;
Vers lui mon espérance a dirigé son vol.
La Terre ! Ah ! je la vois ! La Terre ! c'est bien elle !
A son souffle embrasé je sens frémir mon aile,
Et j'entends, sous mes pieds, mugir son vaste sol.
Une sueur de feu pend à sa croupe nue ;
Les éclairs sur son front crépitent dans la nue ;
Ses flancs partout béants fument de toutes parts.
Un ciel obscur et lourd sur son écorce pèse,
Et, brisant les parois de l'énorme fournaise,
Les éléments de tout dans les airs sont épars.
Oh ! qui dira l'horreur des premiers jours du monde ;
La matière hurlant dans sa gaine inféconde,
Et soudain ruisselant sur le globe éventré ?
Qui dira le courroux des tempêtes natives,
Et, sortant lentement des ondes primitives,
Les Alpes jusqu'au ciel portant leur front sacré ? [...]
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
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