Stances Et Poèmes (1865)Sully Prudhomme
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Stances Et Poèmes (1865)Sully Prudhomme
Printemps oublié
Ce beau printemps qui vient de naître
À peine goûté va finir ;
Nul de nous n’en fera connaître
La grâce aux peuples à venir.
Nous n’osons plus parler des roses :
Quand nous les chantons, on en rit ;
Car des plus adorables choses
Le culte est si vieux qu’il périt.
Les premiers amants de la terre
Ont célébré Mai sans retour,
Et les derniers doivent se taire,
Plus nouveaux que leur propre amour.
Rien de cette saison fragile
Ne sera sauvé dans nos vers,
Et les cytises de Virgile
Ont embaumé tout l’univers.
Ah ! frustrés par les anciens hommes,
Nous sentons le regret jaloux
Qu’ils aient été ce que nous sommes,
Qu’ils aient eu nos coeurs avant nous.
Ce beau printemps qui vient de naître
À peine goûté va finir ;
Nul de nous n’en fera connaître
La grâce aux peuples à venir.
Nous n’osons plus parler des roses :
Quand nous les chantons, on en rit ;
Car des plus adorables choses
Le culte est si vieux qu’il périt.
Les premiers amants de la terre
Ont célébré Mai sans retour,
Et les derniers doivent se taire,
Plus nouveaux que leur propre amour.
Rien de cette saison fragile
Ne sera sauvé dans nos vers,
Et les cytises de Virgile
Ont embaumé tout l’univers.
Ah ! frustrés par les anciens hommes,
Nous sentons le regret jaloux
Qu’ils aient été ce que nous sommes,
Qu’ils aient eu nos coeurs avant nous.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Les Chaînes
J’ai voulu tout aimer, et je suis malheureux,
Car j’ai de mes tourments multiplié les causes ;
D’innombrables liens frêles et douloureux
Dans l’univers entier vont de mon âme aux choses.
Tout m’attire à la fois et d’un attrait pareil :
Le vrai par ses lueurs, l’inconnu par ses voiles ;
Un trait d’or frémissant joint mon coeur au soleil,
Et de longs fils soyeux l’unissent aux étoiles.
La cadence m’enchaîne à l’air mélodieux,
La douceur du velours aux roses que je touche ;
D’un sourire j’ai fait la chaîne de mes yeux,
Et j’ai fait d’un baiser la chaîne de ma bouche.
Ma vie est suspendue à ces fragiles noeuds,
Et je suis le captif des mille êtres que j’aime :
Au moindre ébranlement qu’un souffle cause en eux
Je sens un peu de moi s’arracher de moi-même.
Car j’ai de mes tourments multiplié les causes ;
D’innombrables liens frêles et douloureux
Dans l’univers entier vont de mon âme aux choses.
Tout m’attire à la fois et d’un attrait pareil :
Le vrai par ses lueurs, l’inconnu par ses voiles ;
Un trait d’or frémissant joint mon coeur au soleil,
Et de longs fils soyeux l’unissent aux étoiles.
La cadence m’enchaîne à l’air mélodieux,
La douceur du velours aux roses que je touche ;
D’un sourire j’ai fait la chaîne de mes yeux,
Et j’ai fait d’un baiser la chaîne de ma bouche.
Ma vie est suspendue à ces fragiles noeuds,
Et je suis le captif des mille êtres que j’aime :
Au moindre ébranlement qu’un souffle cause en eux
Je sens un peu de moi s’arracher de moi-même.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Le Vase brisé
À Albert Decrais.
Le vase où meurt cette verveine
D’un coup d’éventail fut fêlé ;
Le coup dut effleurer à peine :
Aucun bruit ne l’a révélé.
Mais la légère meurtrissure,
Mordant le cristal chaque jour,
D’une marche invisible et sûre
En a fait lentement le tour.
Son eau fraîche a fui goutte à goutte,
Le suc des fleurs s’est épuisé ;
Personne encore ne s’en doute ;
N’y touchez pas, il est brisé.
Souvent aussi la main qu’on aime,
Effleurant le coeur, le meurtrit ;
Puis le coeur se fend de lui-même,
La fleur de son amour périt ;
Toujours intact aux yeux du monde,
Il sent croître et pleurer tout bas
Sa blessure fine et profonde ;
Il est brisé, n’y touchez pas.
Le vase où meurt cette verveine
D’un coup d’éventail fut fêlé ;
Le coup dut effleurer à peine :
Aucun bruit ne l’a révélé.
Mais la légère meurtrissure,
Mordant le cristal chaque jour,
D’une marche invisible et sûre
En a fait lentement le tour.
Son eau fraîche a fui goutte à goutte,
Le suc des fleurs s’est épuisé ;
Personne encore ne s’en doute ;
N’y touchez pas, il est brisé.
Souvent aussi la main qu’on aime,
Effleurant le coeur, le meurtrit ;
Puis le coeur se fend de lui-même,
La fleur de son amour périt ;
Toujours intact aux yeux du monde,
Il sent croître et pleurer tout bas
Sa blessure fine et profonde ;
Il est brisé, n’y touchez pas.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
L’Habitude
L’habitude est une étrangère
Qui supplante en nous la raison :
C’est une ancienne ménagère
Qui s’installe dans la maison.
Elle est discrète, humble, fidèle,
Familière avec tous les coins ;
On ne s'occupe jamais d’elle,
Car elle a d’invisibles soins :
Elle conduit les pieds de l’homme,
Sait le chemin qu’il eût choisi,
Connaît son but sans qu’il le nomme,
Et lui dit tout bas : « Par ici. »
Travaillant pour nous en silence,
D’un geste sûr, toujours pareil,
Elle a l’oeil de la vigilance,
Les lèvres douces du sommeil.
Mais imprudent qui s’abandonne
À son joug une fois porté !
Cette vieille au pas monotone
Endort la jeune liberté ;
Et tous ceux que sa force obscure
A gagnés insensiblement
Sont des hommes par la figure,
Des choses par le mouvement.
Qui supplante en nous la raison :
C’est une ancienne ménagère
Qui s’installe dans la maison.
Elle est discrète, humble, fidèle,
Familière avec tous les coins ;
On ne s'occupe jamais d’elle,
Car elle a d’invisibles soins :
Elle conduit les pieds de l’homme,
Sait le chemin qu’il eût choisi,
Connaît son but sans qu’il le nomme,
Et lui dit tout bas : « Par ici. »
Travaillant pour nous en silence,
D’un geste sûr, toujours pareil,
Elle a l’oeil de la vigilance,
Les lèvres douces du sommeil.
Mais imprudent qui s’abandonne
À son joug une fois porté !
Cette vieille au pas monotone
Endort la jeune liberté ;
Et tous ceux que sa force obscure
A gagnés insensiblement
Sont des hommes par la figure,
Des choses par le mouvement.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Rosées
À Paul Bouvard.
Je rêve, et la pâle rosée
Dans les plaines perle sans bruit,
Sur le duvet des fleurs posée
Par la main fraîche de la nuit.
D’où viennent ces tremblantes gouttes ?
Il ne pleut pas, le temps est clair ;
C’est qu’avant de se former, toutes,
Elles étaient déjà dans l’air.
D’où viennent mes pleurs ? Toute flamme,
Ce soir, est douce au fond des cieux ;
C’est que je les avais dans l’âme
Avant de les sentir aux yeux.
On a dans l’âme une tendresse
Où tremblent toutes les douleurs,
Et c’est parfois une caresse
Qui trouble, et fait germer les pleurs.
Je rêve, et la pâle rosée
Dans les plaines perle sans bruit,
Sur le duvet des fleurs posée
Par la main fraîche de la nuit.
D’où viennent ces tremblantes gouttes ?
Il ne pleut pas, le temps est clair ;
C’est qu’avant de se former, toutes,
Elles étaient déjà dans l’air.
D’où viennent mes pleurs ? Toute flamme,
Ce soir, est douce au fond des cieux ;
C’est que je les avais dans l’âme
Avant de les sentir aux yeux.
On a dans l’âme une tendresse
Où tremblent toutes les douleurs,
Et c’est parfois une caresse
Qui trouble, et fait germer les pleurs.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Renaissance
Je voudrais, les prunelles closes,
Oublier, renaître, et jouir
De la nouveauté, fleur des choses,
Que l’âge fait évanouir.
Je resaluerais la lumière,
Mais je déplierais lentement
Mon âme vierge et ma paupière
Pour savourer l’étonnement ;
Et je devinerais moi-même
Les secrets que nous apprenons ;
J’irais seul aux êtres que j’aime
Et je leur donnerais des noms ;
Émerveillé des bleus abîmes
Où le vrai Dieu semble endormi,
Je cacherais mes pleurs sublimes
Dans des vers sonnant l’infini ;
Et pour toi, mon premier poème,
Ô mon aimée, ô ma douleur,
Je briserais d’un cri suprême
Un vers frêle comme une fleur.
Si pour nous il existe un monde
Où s’enchaînent de meilleurs jours,
Que sa face ne soit pas ronde,
Mais s'étende toujours, toujours-
Et que la beauté, désapprise
Par un continuel oubli,
Par une incessante surprise
Nous fasse un bonheur accompli.
Oublier, renaître, et jouir
De la nouveauté, fleur des choses,
Que l’âge fait évanouir.
Je resaluerais la lumière,
Mais je déplierais lentement
Mon âme vierge et ma paupière
Pour savourer l’étonnement ;
Et je devinerais moi-même
Les secrets que nous apprenons ;
J’irais seul aux êtres que j’aime
Et je leur donnerais des noms ;
Émerveillé des bleus abîmes
Où le vrai Dieu semble endormi,
Je cacherais mes pleurs sublimes
Dans des vers sonnant l’infini ;
Et pour toi, mon premier poème,
Ô mon aimée, ô ma douleur,
Je briserais d’un cri suprême
Un vers frêle comme une fleur.
Si pour nous il existe un monde
Où s’enchaînent de meilleurs jours,
Que sa face ne soit pas ronde,
Mais s'étende toujours, toujours-
Et que la beauté, désapprise
Par un continuel oubli,
Par une incessante surprise
Nous fasse un bonheur accompli.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
L’Imagination
J'imagine ! Ainsi je puis faire
Un ange sous mon front mortel !
Et qui peut dire en quoi diffère
L'être imaginé du réel ?
O mon intime Galatée,
Qui fais vivre en moi mon amour,
Par quelle terre es-tu portée ?
De quel soleil prends-tu le jour ?
L'air calme autour de moi repose,
Et cependant j'entends ta voix,
Je te baise, la bouche close,
Et, les yeux fermés, je te vois.
De quelle impalpable substance
Dans mon âme te formes-tu,
Toi qui n'as pas la consistance
D'une bulle au bout d'un fétu ?
Forme pâle et surnaturelle,
Quel désir intense faut-il
Pour que la trempe corporelle
Fixe ton élément subtil,
Pour que ta beauté sorte et passe
Du ciel idéal au soleil,
Parmi les choses de l'espace
Qui subsistent dans mon sommeil ?
Tu n'es jamais consolidée
Comme les formes du dehors...
Bien heureux les fous dont l'idée
Prend le solide éclat des corps !
Dans l'air ils font passer leurs songes
Par une fixe et sombre foi ;
Leurs yeux mêmes croient leurs mensonges :
Ils sont plus créateurs que moi !
Un ange sous mon front mortel !
Et qui peut dire en quoi diffère
L'être imaginé du réel ?
O mon intime Galatée,
Qui fais vivre en moi mon amour,
Par quelle terre es-tu portée ?
De quel soleil prends-tu le jour ?
L'air calme autour de moi repose,
Et cependant j'entends ta voix,
Je te baise, la bouche close,
Et, les yeux fermés, je te vois.
De quelle impalpable substance
Dans mon âme te formes-tu,
Toi qui n'as pas la consistance
D'une bulle au bout d'un fétu ?
Forme pâle et surnaturelle,
Quel désir intense faut-il
Pour que la trempe corporelle
Fixe ton élément subtil,
Pour que ta beauté sorte et passe
Du ciel idéal au soleil,
Parmi les choses de l'espace
Qui subsistent dans mon sommeil ?
Tu n'es jamais consolidée
Comme les formes du dehors...
Bien heureux les fous dont l'idée
Prend le solide éclat des corps !
Dans l'air ils font passer leurs songes
Par une fixe et sombre foi ;
Leurs yeux mêmes croient leurs mensonges :
Ils sont plus créateurs que moi !
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
À l’hirondelle
Toi qui peux monter solitaire
Au ciel, sans gravir les sommets,
Et dans les vallons de la terre
Descendre sans tomber jamais ;
Toi qui, sans te pencher au fleuve
Où nous ne puisons qu’à genoux,
Peux aller boire avant qu’il pleuve
Au nuage trop haut pour nous ;
Toi qui pars au déclin des roses
Et reviens au nid printanier,
Fidèle aux deux meilleures choses,
L’indépendance et le foyer ;
Comme toi mon âme s’élève
Et tout à coup rase le sol,
Et suit avec l’aile du rêve
Les beaux méandres de ton vol.
S’il lui faut aussi des voyages,
Il lui faut son nid chaque jour ;
Elle a tes deux besoins sauvages :
Libre vie, immuable amour.
Au ciel, sans gravir les sommets,
Et dans les vallons de la terre
Descendre sans tomber jamais ;
Toi qui, sans te pencher au fleuve
Où nous ne puisons qu’à genoux,
Peux aller boire avant qu’il pleuve
Au nuage trop haut pour nous ;
Toi qui pars au déclin des roses
Et reviens au nid printanier,
Fidèle aux deux meilleures choses,
L’indépendance et le foyer ;
Comme toi mon âme s’élève
Et tout à coup rase le sol,
Et suit avec l’aile du rêve
Les beaux méandres de ton vol.
S’il lui faut aussi des voyages,
Il lui faut son nid chaque jour ;
Elle a tes deux besoins sauvages :
Libre vie, immuable amour.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Les Berceaux
Après le départ des oiseaux,
Les nids abandonnés pourrissent.
Que sont devenus nos berceaux ?
De leur bois les vers se nourrissent.
Le mien traîne au fond des greniers,
L'oubli morne et lent le dévore ;
Je l'embrasserais volontiers,
Car mon enfance y rit encore.
C'est là que j'avais nuit et jour,
Pour ciel de lit, des yeux de mère
Où mon âme épelait l'amour
Et ma prunelle la lumière.
Sur le coeur d'amis sûrs et bons,
Femmes sans tache, sur le vôtre,
C'est un berceau que nous rêvons
Sous une forme ou sous une autre.
Cet instinct de vivre blottis
Dure encore à l'âge où nous sommes ;
Pourquoi donc, si tôt trop petits,
Berceaux, trahissez-vous les hommes ?
Les nids abandonnés pourrissent.
Que sont devenus nos berceaux ?
De leur bois les vers se nourrissent.
Le mien traîne au fond des greniers,
L'oubli morne et lent le dévore ;
Je l'embrasserais volontiers,
Car mon enfance y rit encore.
C'est là que j'avais nuit et jour,
Pour ciel de lit, des yeux de mère
Où mon âme épelait l'amour
Et ma prunelle la lumière.
Sur le coeur d'amis sûrs et bons,
Femmes sans tache, sur le vôtre,
C'est un berceau que nous rêvons
Sous une forme ou sous une autre.
Cet instinct de vivre blottis
Dure encore à l'âge où nous sommes ;
Pourquoi donc, si tôt trop petits,
Berceaux, trahissez-vous les hommes ?
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Comme alors
Quand j'étais tout enfant, ma bouche
Ignorait un langage appris :
Du fond de mon étroite couche
J'appelais les soins par des cris ;
Ma peine était la peur cruelle
De perdre un jouet dans mes draps,
Et ma convoitise était celle
Qui supplie en tendant les bras.
Maintenant que sans être aidées
Mes lèvres parlent couramment,
J'ai moins de signes que d'idées :
On a changé mon bégaiement.
Et maintenant que les caresses
Ne me bercent plus quand je dors,
J'ai d'inexprimables tendresses,
Et je tends les bras comme alors.
Ignorait un langage appris :
Du fond de mon étroite couche
J'appelais les soins par des cris ;
Ma peine était la peur cruelle
De perdre un jouet dans mes draps,
Et ma convoitise était celle
Qui supplie en tendant les bras.
Maintenant que sans être aidées
Mes lèvres parlent couramment,
J'ai moins de signes que d'idées :
On a changé mon bégaiement.
Et maintenant que les caresses
Ne me bercent plus quand je dors,
J'ai d'inexprimables tendresses,
Et je tends les bras comme alors.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
La Mémoire
I
O Mémoire, qui joins à l'heure
La chaîne des temps révolus,
Je t'admire, étrange demeure
Des formes qui n'existent plus !
En vain tombèrent les grands hommes
Aux fronts pensifs ou belliqueux :
Ils se lèvent quand tu les nommes,
Et nous conversons avec eux ;
Et, si tu permets ce colloque
Avec les plus altiers esprits,
Tu permets aussi qu'on évoque
Les coeurs humbles qu'on a chéris.
Le présent n'est qu'un feu de joie
Qui s'écroule à peine amassé,
Mais tu peux faire qu'il flamboie
Des mille fêtes du passé ;
Le présent n'est qu'un cri d'angoisse
Qui s'éteint à peine poussé,
Mais tu peux faire qu'il s'accroisse
Ce tous les sanglots du passé ;
L'être des morts n'est plus visible,
Mais tu donnes au trépassé
Une vie incompréhensible,
Présent que tu fais d'un passé !
Quelle existence ai-je rendue
A mon père en me souvenant ?
Quelle est donc en moi l'étendue
Où s'agite ce revenant ?
Un sort différent nous sépare :
Comment peux-tu nous réunir,
A travers le mur qui nous barre
Le passé comme l'avenir ?
Qui des deux force la barrière ?
Me rejoint-il, ou vais-je à lui ?
Je ne peux pas vivre en arrière,
Il ne peut revivre aujourd'hui !
II
O souvenir, l'âme renonce,
Effrayée, à te concevoir ;
Mais, jusqu'où ton regard s'enfonce,
Au chaos des ans j'irai voirj
Parmi les gisantes ruines,
Les bibles au feuillet noirci,
Je m'instruirai des origines,
Des pas que j'ai faits jusqu'ici.
Devant moi la vie inquiète
Marche en levant sa lampe d'or,
Et j'avance en tournant la tête
Le long d'un sombre corridor.
D'où vient cette folle ? où va-t-elle ?
Son tremblant et pâle flambeau
N'éclaire ma route éternelle
Que du berceau vide au tombeau.
Mais j'étais autrefois ! Mon être
Ne peut commencer ni finir.
Ce que j'étais avant de naître,
N'en sais-tu rien, ô souvenir ?
Rassemble bien toutes tes forces
Et demande aux âges confus
Combien j'ai dépouillé d'écorces
Et combien de soleils j'ai vusl
Ah ! tu t'obstines à te taireI
Ton oeil rêveur, clos à demi,
Ne suit point par delà la terre
Ma racine dans l'infini.
Cherchant en vain mes destinées,
Mon origine qui me fuit,
De la chaîne de mes années
Je sens les deux bouts dans la nuit.
L'histoire, passante oublieuse,
Ne m'a pas appris d'où je sors,
Et la terre silencieuse
N'a jamais dit où vont les morts.
O Mémoire, qui joins à l'heure
La chaîne des temps révolus,
Je t'admire, étrange demeure
Des formes qui n'existent plus !
En vain tombèrent les grands hommes
Aux fronts pensifs ou belliqueux :
Ils se lèvent quand tu les nommes,
Et nous conversons avec eux ;
Et, si tu permets ce colloque
Avec les plus altiers esprits,
Tu permets aussi qu'on évoque
Les coeurs humbles qu'on a chéris.
Le présent n'est qu'un feu de joie
Qui s'écroule à peine amassé,
Mais tu peux faire qu'il flamboie
Des mille fêtes du passé ;
Le présent n'est qu'un cri d'angoisse
Qui s'éteint à peine poussé,
Mais tu peux faire qu'il s'accroisse
Ce tous les sanglots du passé ;
L'être des morts n'est plus visible,
Mais tu donnes au trépassé
Une vie incompréhensible,
Présent que tu fais d'un passé !
Quelle existence ai-je rendue
A mon père en me souvenant ?
Quelle est donc en moi l'étendue
Où s'agite ce revenant ?
Un sort différent nous sépare :
Comment peux-tu nous réunir,
A travers le mur qui nous barre
Le passé comme l'avenir ?
Qui des deux force la barrière ?
Me rejoint-il, ou vais-je à lui ?
Je ne peux pas vivre en arrière,
Il ne peut revivre aujourd'hui !
II
O souvenir, l'âme renonce,
Effrayée, à te concevoir ;
Mais, jusqu'où ton regard s'enfonce,
Au chaos des ans j'irai voirj
Parmi les gisantes ruines,
Les bibles au feuillet noirci,
Je m'instruirai des origines,
Des pas que j'ai faits jusqu'ici.
Devant moi la vie inquiète
Marche en levant sa lampe d'or,
Et j'avance en tournant la tête
Le long d'un sombre corridor.
D'où vient cette folle ? où va-t-elle ?
Son tremblant et pâle flambeau
N'éclaire ma route éternelle
Que du berceau vide au tombeau.
Mais j'étais autrefois ! Mon être
Ne peut commencer ni finir.
Ce que j'étais avant de naître,
N'en sais-tu rien, ô souvenir ?
Rassemble bien toutes tes forces
Et demande aux âges confus
Combien j'ai dépouillé d'écorces
Et combien de soleils j'ai vusl
Ah ! tu t'obstines à te taireI
Ton oeil rêveur, clos à demi,
Ne suit point par delà la terre
Ma racine dans l'infini.
Cherchant en vain mes destinées,
Mon origine qui me fuit,
De la chaîne de mes années
Je sens les deux bouts dans la nuit.
L'histoire, passante oublieuse,
Ne m'a pas appris d'où je sors,
Et la terre silencieuse
N'a jamais dit où vont les morts.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Ici-bas
Ici-bas tous les lilas meurent,
Tous les chants des oiseaux sont courts ;
Je rêve aux étés qui demeurent
Toujours-
Ici-bas les lèvres effleurent
Sans rien laisser de leur velours ;
Je rêve aux baisers qui demeurent
Toujours-
Ici-bas tous les hommes pleurent
Leurs amitiés ou leurs amours ;
Je rêve aux couples qui demeurent
Toujours-
Tous les chants des oiseaux sont courts ;
Je rêve aux étés qui demeurent
Toujours-
Ici-bas les lèvres effleurent
Sans rien laisser de leur velours ;
Je rêve aux baisers qui demeurent
Toujours-
Ici-bas tous les hommes pleurent
Leurs amitiés ou leurs amours ;
Je rêve aux couples qui demeurent
Toujours-
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Pensée perdue
Elle est si douce, la pensée,
Qu'il faut, pour en sentir l'attrait,
D'une vision commencée
S'éveiller tout à coup distrait.
Le coeur dépouillé la réclame ;
Il ne la fait point revenir,
Et cependant elle est dans l'âme,
Et l'on mourrait pour la finir.
A quoi pensais-je tout à l'heure ?
A quel beau songe évanoui
Dois-je les larmes que je pleure ?
Il m'a laissé tout ébloui.
Et ce bonheur d'une seconde,
Nul effort ne me l'a rendu ;
Je n'ai goûté de joie au monde
Qu'en rêve, et mon rêve est perdu.
Qu'il faut, pour en sentir l'attrait,
D'une vision commencée
S'éveiller tout à coup distrait.
Le coeur dépouillé la réclame ;
Il ne la fait point revenir,
Et cependant elle est dans l'âme,
Et l'on mourrait pour la finir.
A quoi pensais-je tout à l'heure ?
A quel beau songe évanoui
Dois-je les larmes que je pleure ?
Il m'a laissé tout ébloui.
Et ce bonheur d'une seconde,
Nul effort ne me l'a rendu ;
Je n'ai goûté de joie au monde
Qu'en rêve, et mon rêve est perdu.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
un songe
A Jules Guiffrey.
J'étais, j'entrais au tombeau
Où mes aïeux rêvent ensemble.
Ils ont dit : « La nuit lourde tremble ;
Est-ce l'approche d'un flambeau,
« Le signal de la nouvelle ère
Qu'attend notre éternel ennui ?
- Non, c'est l'enfant, a dit mon père :
Je vous avais parlé de lui.
« Il était au berceau; j'ignore
S'il nous vient jeune ou chargé d'ans.
Mes cheveux sont tout blonds encore,
Les tiens, mon fils, peut-être blancs
« - Non, père, au combat de la vie
Bientôt je suis tombé vaincu,
L'âme pourtant inassouvie :
Je meurs et je n'ai pas vécu.
« - J'attendais près de moi ta mère :
Je l'entends gémir au-dessus !
Ses pleurs ont tant mouillé la pierre
Que mes lèvres les ont reçus.
« Nous fûmes unis peu d'années
Après de bien longues amours ;
Toutes ses grâces sont fanées...
Je la reconnaîtrai toujours.
« Ma fille a connu mon visage :
S'en souvient-elle ? Elle a changé.
Parle-moi de son mariage
Et des petits-enfants que j'ai.
« - Un seul vous est né. - Mais toi-même,
N'as-tu pas de famille aussi ?
Quand on meurt jeune, c'est qu'on aime :
Qui vas-tu regretter ici ?
« - J'ai laissé ma soeur et ma mère
Et les beaux livres que j'ai lus ;
Vous n'avez pas de bru, mon père ;
On m'a blessé, je n'aime plus.
« - De tes aïeux compte le nombre :
Va baiser leurs fronts inconnus,
Et viens faire ton lit dans l'ombre
A côté des derniers venus.
« Ne pleure pas; dors dans l'argile
En espérant le grand réveil.
- O père, qu'il est difficile
De ne plus penser au soleil ! »
J'étais, j'entrais au tombeau
Où mes aïeux rêvent ensemble.
Ils ont dit : « La nuit lourde tremble ;
Est-ce l'approche d'un flambeau,
« Le signal de la nouvelle ère
Qu'attend notre éternel ennui ?
- Non, c'est l'enfant, a dit mon père :
Je vous avais parlé de lui.
« Il était au berceau; j'ignore
S'il nous vient jeune ou chargé d'ans.
Mes cheveux sont tout blonds encore,
Les tiens, mon fils, peut-être blancs
« - Non, père, au combat de la vie
Bientôt je suis tombé vaincu,
L'âme pourtant inassouvie :
Je meurs et je n'ai pas vécu.
« - J'attendais près de moi ta mère :
Je l'entends gémir au-dessus !
Ses pleurs ont tant mouillé la pierre
Que mes lèvres les ont reçus.
« Nous fûmes unis peu d'années
Après de bien longues amours ;
Toutes ses grâces sont fanées...
Je la reconnaîtrai toujours.
« Ma fille a connu mon visage :
S'en souvient-elle ? Elle a changé.
Parle-moi de son mariage
Et des petits-enfants que j'ai.
« - Un seul vous est né. - Mais toi-même,
N'as-tu pas de famille aussi ?
Quand on meurt jeune, c'est qu'on aime :
Qui vas-tu regretter ici ?
« - J'ai laissé ma soeur et ma mère
Et les beaux livres que j'ai lus ;
Vous n'avez pas de bru, mon père ;
On m'a blessé, je n'aime plus.
« - De tes aïeux compte le nombre :
Va baiser leurs fronts inconnus,
Et viens faire ton lit dans l'ombre
A côté des derniers venus.
« Ne pleure pas; dors dans l'argile
En espérant le grand réveil.
- O père, qu'il est difficile
De ne plus penser au soleil ! »
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
Les Yeux
À Francisque Gerbault.
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Des yeux sans nombre ont vu l’aurore ;
Ils dorment au fond des tombeaux,
Et le soleil se lève encore.
Les nuits, plus douces que les jours,
Ont enchanté des yeux sans nombre ;
Les étoiles brillent toujours,
Et les yeux se sont remplis d’ombre.
Oh ! qu'ils aient perdu leur regard,
Non, non, cela n’est pas possible !
Ils se sont tournés quelque part
Vers ce qu’on nomme l’invisible ;
Et comme les astres penchants
Nous quittent, mais au ciel demeurent,
Les prunelles ont leurs couchants,
Mais il n’est pas vrai qu’elles meurent.
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Ouverts à quelque immense aurore,
De l’autre côté des tombeaux
Les yeux qu’on ferme voient encore.
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Des yeux sans nombre ont vu l’aurore ;
Ils dorment au fond des tombeaux,
Et le soleil se lève encore.
Les nuits, plus douces que les jours,
Ont enchanté des yeux sans nombre ;
Les étoiles brillent toujours,
Et les yeux se sont remplis d’ombre.
Oh ! qu'ils aient perdu leur regard,
Non, non, cela n’est pas possible !
Ils se sont tournés quelque part
Vers ce qu’on nomme l’invisible ;
Et comme les astres penchants
Nous quittent, mais au ciel demeurent,
Les prunelles ont leurs couchants,
Mais il n’est pas vrai qu’elles meurent.
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Ouverts à quelque immense aurore,
De l’autre côté des tombeaux
Les yeux qu’on ferme voient encore.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
L’Idéal
À Paul Sédille
La lune est grande, le ciel clair
Et plein d’astres, la terre est blême,
Et l’âme du monde est dans l’air.
Je rêve à l’étoile suprême,
À celle qu’on n’aperçoit pas,
Mais dont la lumière voyage
Et doit venir jusqu’ici-bas
Enchanter les yeux d’un autre âge.
Quand luira cette étoile, un jour,
La plus belle et la plus lointaine,
Dites-lui qu’elle eut mon amour,
Ô derniers de la race humaine !
La lune est grande, le ciel clair
Et plein d’astres, la terre est blême,
Et l’âme du monde est dans l’air.
Je rêve à l’étoile suprême,
À celle qu’on n’aperçoit pas,
Mais dont la lumière voyage
Et doit venir jusqu’ici-bas
Enchanter les yeux d’un autre âge.
Quand luira cette étoile, un jour,
La plus belle et la plus lointaine,
Dites-lui qu’elle eut mon amour,
Ô derniers de la race humaine !
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
La Forme
A Maurice de Foucault
Le soleil fut avant les yeux,
La terre fut avant les roses,
Le chaos avant toutes choses.
Ah ! que les éléments sont vieux
Sous leurs jeunes métamorphoses !
Toute jeunesse vient des morts :
C'est dans une funèbre pâte
Que, toujours, sans lenteur ni hâte,
Une main pétrit les beaux corps
Tandis qu'une autre main les gâte ;
Et le fond demeure pareil :
Que l'univers s'agite ou dorme,
Rien n'altère sa masse énorme ;
Ce qui périt, fleur ou soleil,
N'en est que la changeante forme.
Mais la forme, c'est le printemps :
Seule mouvante et seule belle,
Il n'est de nouveauté qu'en elle ;
C'est par les formes de vingt ans
Que rit la matière éternelle !
O vous, qui tenez enlacés
Les amoureux aux amoureuses,
Bras lisses, lèvres savoureuses,
Formes divines qui passez,
Désirables et douloureuses !
Vous ne laissez qu'un souvenir,
Un songe, une impalpable trace !
Si fortement qu'il vous embrasse,
L'Amour ne peut vous retenir :
Vous émigrez de race en race.
Époux des âmes, corps chéris,
Vous vous poussez, pareils aux fleuves ;
Vos grâces ne sont qu'un jour neuves,
Et les âmes sur vos débris
Gémissent, immortelles veuves.
Mais pourquoi vous donner ces pleurs ?
Les tombes, les saisons chagrines,
Entassent en vain des ruines
Sans briser le moule des fleurs,
Des fruits et des jeunes poitrines.
Pourquoi vous faire des adieux ?
Le même sang change d'artères,
Les filles ont les yeux des mères,
Et les fils le front des aïeux.
Non, vous n'êtes pas éphémères !
Vos modèles sont quelque part,
O formes que le temps dévore !
Plus pures vous brillez encore
Au paradis profond de l'art,
Où Platon pense et vous adore !
Le soleil fut avant les yeux,
La terre fut avant les roses,
Le chaos avant toutes choses.
Ah ! que les éléments sont vieux
Sous leurs jeunes métamorphoses !
Toute jeunesse vient des morts :
C'est dans une funèbre pâte
Que, toujours, sans lenteur ni hâte,
Une main pétrit les beaux corps
Tandis qu'une autre main les gâte ;
Et le fond demeure pareil :
Que l'univers s'agite ou dorme,
Rien n'altère sa masse énorme ;
Ce qui périt, fleur ou soleil,
N'en est que la changeante forme.
Mais la forme, c'est le printemps :
Seule mouvante et seule belle,
Il n'est de nouveauté qu'en elle ;
C'est par les formes de vingt ans
Que rit la matière éternelle !
O vous, qui tenez enlacés
Les amoureux aux amoureuses,
Bras lisses, lèvres savoureuses,
Formes divines qui passez,
Désirables et douloureuses !
Vous ne laissez qu'un souvenir,
Un songe, une impalpable trace !
Si fortement qu'il vous embrasse,
L'Amour ne peut vous retenir :
Vous émigrez de race en race.
Époux des âmes, corps chéris,
Vous vous poussez, pareils aux fleuves ;
Vos grâces ne sont qu'un jour neuves,
Et les âmes sur vos débris
Gémissent, immortelles veuves.
Mais pourquoi vous donner ces pleurs ?
Les tombes, les saisons chagrines,
Entassent en vain des ruines
Sans briser le moule des fleurs,
Des fruits et des jeunes poitrines.
Pourquoi vous faire des adieux ?
Le même sang change d'artères,
Les filles ont les yeux des mères,
Et les fils le front des aïeux.
Non, vous n'êtes pas éphémères !
Vos modèles sont quelque part,
O formes que le temps dévore !
Plus pures vous brillez encore
Au paradis profond de l'art,
Où Platon pense et vous adore !
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
La Malade
A Alfred Denaut
C'était au milieu de la nuit,
Une longue nuit de décembre ;
Le feu, qui s'éteignait sans bruit,
Rougissait par moments la chambre.
On distinguait des rideaux blancs,
Mais on n'entendait pas d'haleine ;
La veilleuse aux rayons tremblants
Languissait dans la porcelaine.
Et personne, hélas ! ne savait
Que l'enfant fût à l'agonie ;
De lassitude, à son chevet,
Sa mère s'était endormie.
Mais, pour la voir, tout bas, pieds nus,
Entr'ouvrant doucement la porte,
Ses petits frères sont venus...
Déjà la malade était morte.
Ils ont dit : « Est-ce qu'elle dort ?
Ses yeux sont fixes ; de sa bouche
Nul murmure animé ne sort ;
Sa main fait froid quand on la touché.
« Quel grand silence dans le lit !
Pas un pli des draps ne remue ;
L'alcôve effrayante s'emplit
D'une solitude inconnue.
« Notre mère est assise là ;
Elle est tranquille, elle sommeille :
Qu'allons-nous faire ? Laissons-la.
Que Dieu lui-même la réveille ! »
Et, sans regarder derrière eux,
Vite dans leurs lits ils rentrèrent :
Alors, se sentant malheureux,
Avec épouvante ils pleurèrent.
C'était au milieu de la nuit,
Une longue nuit de décembre ;
Le feu, qui s'éteignait sans bruit,
Rougissait par moments la chambre.
On distinguait des rideaux blancs,
Mais on n'entendait pas d'haleine ;
La veilleuse aux rayons tremblants
Languissait dans la porcelaine.
Et personne, hélas ! ne savait
Que l'enfant fût à l'agonie ;
De lassitude, à son chevet,
Sa mère s'était endormie.
Mais, pour la voir, tout bas, pieds nus,
Entr'ouvrant doucement la porte,
Ses petits frères sont venus...
Déjà la malade était morte.
Ils ont dit : « Est-ce qu'elle dort ?
Ses yeux sont fixes ; de sa bouche
Nul murmure animé ne sort ;
Sa main fait froid quand on la touché.
« Quel grand silence dans le lit !
Pas un pli des draps ne remue ;
L'alcôve effrayante s'emplit
D'une solitude inconnue.
« Notre mère est assise là ;
Elle est tranquille, elle sommeille :
Qu'allons-nous faire ? Laissons-la.
Que Dieu lui-même la réveille ! »
Et, sans regarder derrière eux,
Vite dans leurs lits ils rentrèrent :
Alors, se sentant malheureux,
Avec épouvante ils pleurèrent.
chadiya madihi- Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008
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