Le Mur ( en hommage à Hassan Idkaroum)

Mes chers amis,je vous propose avec grande émotion ce poème en hommage à mon ami Hassan Idkaroum,détenu politique durant les années de plomb au Maroc. Il est resté en prison... dix ans!
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Le Mur

Je me rappelle avec douleur
Seul, la nuit, je pleure
Seule la mer m'apaise
Calme mes crises
Et éteint mes braises
Je me rappelle avec amertume
Seul, la nuit, je fume
En silence je me consume
Et s'éteint ma flamme
Je me rappelle avec aigreur
Seul, la nuit, j'ai peur
Mes larmes coulent
Comme des torrents
Je vois les démons
Je souffre atrocement
Au fin fond de mon tréfonds
Tout mon être devient brûlant
Fièvre, cauchemars, hallucinations
Seul, je déserte le présent
Et la cacophonie des vivants
Seule la mer me comprend
M'accueille chaleureusement
Me berce tendrement
Me chantant sa chanson
Doucement!
Seul, je marche
Je respire la mer
Profondément
Je souris
Je prie
J'implore le Tout Puissant
D'accorder son pardon
A mes tortionnaires
Et à tous les monstres de la terre
Point de haine dans mon cœur
Point de rancœur
Mais je n'ai pas oublié
Je ne peux oublier
Je n'oublierai jamais
Ah, si je pouvais oublier!
Déchirure
Viol de la chair
De l'âme et du cœur
Brûlure!
Cette nuit printanière
Il faisait tellement bon
Que chantait le grillon
Les étoiles du firmament
Scintillaient joyeusement
Les êtres et les choses
Sommeillaient paisiblement
Soudainement
Ils firent irruption
Comme des démons
Suspendirent le temps
Et confisquèrent l'espace
Vautours, hyènes, rapaces
Ils sévirent de longues années
Années misère
Années terreur
Années dictature
Années exploitation
Années répression
Années trahison
Années délation
Années déportation
Années détention
Années exécution
Années de plomb!
Les amoureux de la liberté
De la justice et de la paix
Ces jeunes militants
Insurgés et révoltés
Croyant fermement
Au changement
Se trouvaient en prison
Sans chef d'accusation
Sans procès, sans jugement
Ou disparaissaient tout simplement!
Je me rappelle avec affliction
Les monstres fouillèrent minutieusement
Tous les recoins de la maison
Prirent mes livres et documents
Firent pleurer ma mère
Effrayèrent mes petits frères
Cris, pleurs, hurlements
Plaintes, prières, supplications
De grâce, laissez-moi mon enfant!
Les monstres n'avaient pas de cœur
Ils m'entraînèrent violemment
A peine vêtu de sous-vêtements
Ne me donnant même pas le temps
De m'habiller décemment!
Ils me mirent les menottes
M'écrasèrent de leurs bottes
Comme un vulgaire délinquant
Me bandèrent les yeux
Me jetèrent dans un camion militaire
Roulèrent sur une route infinie
Vers une destination inconnue
je savais
Tout était déjà fini!
Je me rappelle encore
Comme si c'était hier
Ils me laissèrent tout nu
Toute la nuit
Dans une geôle austère
Sinistre, froide, obscure
A l'aube
Deux gorilles entrèrent
Ils n'apportaient pas l'aurore
Ils apportaient la mort!
Ils commencèrent l'interrogatoire
Avec tous les arts de la torture
Dont ils excellèrent!
Mes tortionnaires m'accablèrent
De questions mystérieuses
D'accusations dangereuses
Exigèrent des réponses précises
Des noms, des lieux, des dates
Je n'avais aucune réponse
Enragés par mon silence
Irrités par mon insolence
Ils se mirent en transe
Devinrent des animaux carnivores
Et me dévorèrent
Crachats, intimidation, jurons
Sang, douleur, blessures
Sueur, morsures, brûlures
Urine, puanteur, torture
Étouffement, écartèlement
Étourdissement, engourdissement
Vomissement, évanouissement
Froid, soif, faim
Isolement, réclusion
Durant dix ans!
Dix ans de silence
Dix ans d'absence
Dix ans d'endurance
Dix ans de souffrance!
Parler avec le mur
Lui raconter ma vie
Pour rester en vie
Écrire sur le mur
Avec mon sang
Sculpter le mur
Avec mes ongles
Dessiner sur le mur
Des yeux, des sourires
Des seins, des vagins
Des cuisses, des derrières
Des mains, des figures
Des rivières, des mers
Des lumières, des chimères
Ausculter le mur
Écouter les battements de son cœur
Épouser le mur
Disparaître dans le mur
Voir au-delà du mur
Pour partir ailleurs
Ne jamais revenir
Surgir des ténèbres
Épier le moindre bruit
Pour surprendre la vie
Attendre
Défier le temps
Rêver
Braver la folie
Frôler la mort
Revoir le jour
Ressusciter
Ressusciter
Ressusciter!
Dignité violée
Humanité volée
Jeunesse ravie
Mutilé à vie
Jamais je n'oublierai
Jamais je ne guérirai
Estropié je resterai
Marqué à vie!
Seul, je survis
Point de haine dans mon cœur
Point de rancœur
J'implore le Tout Puissant
D'accorder son absolution
A mes tortionnaires
Et à tous les monstres de la terre!
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Agadir, le 1/5/2011

Personne en vient rendre hommage à cet homme?

si
on lit
on revient relire
la page est tournée d'un temps dit de plombe
le présent se veut de réconciliation...

hommage noble de ta part mostafa
bravo et merci du partage.

firdaws a écrit:si
on lit
on revient relire
la page est tournée d'un temps dit de plombe
le présent se veut de réconciliation...

Tout à fait de votre avis!
Merci pour votre commentaire!
Ce poème ne se veut nullement demande de retour en arrière,ce n'est qu'un hommage à un homme qui a souffert comme plusieurs pour ce présent de réconciliation dont nous jouissons.

un bon geste vis à vis d'un être qui a su donner de lui pour son pays
merci poète pour le partage-hommage

sarah a écrit:hommage noble de ta part mostafa
bravo et merci du partage.

Merci pour ta lecture,très chère!
:orage:

les plus émouvants poèmes sont
ceux-là qu'après leur lecture et relecture
on ne trouve jamais les mots justes
pour exprimer vivement les émotions retenues
alors, on laisse faire à sa guise le silence

bibi 2011

je salue de tout coeur cet hommage bien mérité

Rita-kazem a écrit:un bon geste vis à vis d'un être qui a su donner de lui pour son pays
merci poète pour le partage-hommage

Merci pour ta lecture et ton soutien! :orage:

bibi a écrit:les plus émouvants poèmes sont
ceux-là qu'après leur lecture et relecture
on ne trouve jamais les mots justes
pour exprimer vivement les émotions retenues
alors, on laisse faire à sa guise le silence

bibi 2011

je salue de tout coeur cet hommage bien mérité

Le silence parle mieux que les mots,mon frère!Merci pour ta lecture et ton commentaire! :orage:

Je pense au silence qui étouffe les larmes. je pense aux larmes qui tuent le silence. Seul. Isolé. abandonné.

Eschyle a écrit:Je pense au silence qui étouffe les larmes. je pense aux larmes qui tuent le silence. Seul. Isolé. abandonné.

Merci pour votre lecture et votre commentaire! :orage:

C'est avec beaucoup d'émotion que je viens de lire cet bel hommage.
cher poète pour ce .


BTT

un beau texte hommage..merci tout simplement pour ce partage.

Les pensées de l'auteur vont aux martyrs de la violence,
A l'indifférence de la majorité du monde
Devant les promoteurs de l'intolérance
Qui se réjouissent en faisant la ronde......

BIR TAM TAM a écrit:C'est avec beaucoup d'émotion que je viens de lire cet bel hommage.
cher poète pour ce .


BTT

Merci pour tes mots qui me réchauffent le cœur!

hommage aux âmes nobles
merci pour ce texte touchant.

souhayla assad a écrit:un beau texte hommage..merci tout simplement pour ce partage.

Merci pour la lecture et le commentaire!

eric bourgeois a écrit:Les pensées de l'auteur vont aux martyrs de la violence,
A l'indifférence de la majorité du monde
Devant les promoteurs de l'intolérance
Qui se réjouissent en faisant la ronde......

Je m'excuse pour le retard,mon cher:J'avais d'autres chats à fouetter même si je n'aime fouetter personne!
Mille mercis pour votre commentaire humaniste et altruiste!

Othman-Miftahi a écrit:hommage aux âmes nobles
merci pour ce texte touchant.

Merci pour ton soutien et ton humanisme!
:orage: