Contes Russes
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Contes Russes
Alionoucka et son petit frère Ivan
Il était une fois un vieux et sa vieille, ils avaient une grande fille prénommée Alionouchka et un petit garçon - Ivan.
Mais voici que le vieux et sa vieille viennent à mourir. Alionouchka et le petit Ivan restent seuls au monde.
Comment
vivre? Il faut trouver un travail. Alionouchka prend le petit frère par
la main, et les voilà qui marchent sur la route très longue, dans la
plaine très vaste - au bout de quelque temps le petit Ivan veut boire.
- Soeurette Alionouchka, dit-il, j'ai soif !
- Patiente, frérot, nous serons bientôt au puits.
Ils
marchent, donc, ils marchent, or le soleil est haut dans le ciel, le
puits est loin, la chaleur - cuisante, la peau - transpirante. Mais
qu'est-ce là, sur la route? Un joli sabot de vache, et plein d'eau !
- Sœurette Alionouchka, je m'en vais boire à ce sabot.
- N'en fais rien, frérot, tu vas te changer en un petit veau.
Ivan se fait une raison et ils poursuivent leur chemin.
Or
le soleil est haut dans le ciel, le puits est loin, la chaleur -
cuisante, la peau -transpirante. Et qu'est-ce là encore sur la route?
Un joli sabot de cheval, et plein d'eau!
- Sœurette Alionouchka, je m'en vais boire à ce sabot.
- N'en fais rien, frérot, tu vas te changer en un petit poulain.
Il pousse un gros soupir, Ivan, et ils poursuivent leur chemin.
Ils
marchent, ils marchent, or le soleil est haut dans le ciel, le puits
est loin, la chaleur - cuisante, la peau - transpirante. Mais qu'est-ce
là, pour la troisième fois, sur la route? Un joli sabot de bique, et
plein d'eau !
Le petit Ivan dit :
- Sœurette Alionouchka, je n'en puis plus, donne que je me désaltère à ce sabot.
- N'en fais rien, frérot, tu vas te changer en petit biquet.
Mais Ivan ne l'écoute plus, il boit l'eau du sabot de bique.
n la boit et il se change en biquet !
Quand à présent Alionouchka hèle son frérot, c'est un petit biquet tout blanc qui accourt à la place d'Ivan!
Et
de pleurer, Alionouchka, à chaudes larmes, de s'asseoir à l'ombre d'une
meule et de pleurer encore, tandis que le gentil biquet gambade et muse
autour d'elle.
Passe à ce moment sur la route un riche marchand en voiture. Il demande :
-
Qu'est-ce donc qui tant te fait pleurer, ma jolie ? Alionouchka lui
fait le récit du malheur qui la frappe. Le marchand rétorque :
- Pardi, marie-moi. Je te vêtirai d'or et d'argent, et le biquet blanc restera auprès de nous.
Alionouchka réfléchit, et ayant réfléchi elle accepte de marier le marchand.
Alors
ils se mettent en ménage, et le petit biquet avec eux, il partage même
l'écuelle de la grande sœur pour le manger et pour le boire.
Un
jour cependant le marchand s'est absenté de chez lui. D'où sort-elle,
je ne sais, mais c'est le moment que choisit une méchante sorcière pour
venir faire un tour par là. Elle s'arrête sous la fenêtre d'Alionouchka
et l'entreprend avec tout plein de mots aimables, allons nous baigner à
la rivière, dit-elle.
Et Alionouchka y va.
Au bord de la rivière, la sorcière se jette sur elle, lui attache la pierre au cou et la pousse dans l'eau profonde!
Après
quoi elle se change en Alionouchka, elle passe sa jolie robe et elle
s'en vient en sa maison. Nul ne devine que c'est la sorcière. Le
marchand, à son retour, pas plus que les autres.
Seul le petit
biquet est au courant de tout. Grand est son chagrin, il ne boit plus
rien ni ne mange, matin et soir il va et vient au bord de la rivière et
il appelle :
- Alionouchka, sœurette!
Remonte du fond de l'eau, remonte vite !
La sorcière qui apprend la chose, aussitôt presse le mari de le tuer ce biquet, tu entends, dit-elle, tu vas me le tuer!
Le
marchand, il a pitié du petit biquet, il l'aime bien. Mais la sorcière
tant le presse et insiste qu'à la fin, que faire, il se rend :
- Allez ! Mais c'est toi qui fais ça...
Et la sorcière commande d'allumer de grands feux, de chauffer les marmites de bonne fonte, d'affûter les coutelas de bon acier.
Le biquet a tout compris - ses heures sont comptées, aussi parle-t-il ainsi à son père adoptif :
- Laisse-moi, avant de mourir, descendre à la rivière, boire de son eau, m'en rincer les tripettes...
- Pourquoi pas ? Va.
Il court vite à la rivière, le petit biquet, il s'arrête au bord de l'eau, il appelle d'une voix à fendre l'âme :
- Alionouchka, sœurette!
Remonte du fond de l'eau, remonte vite !
Les grands feux sont allumés,
Les marmites de bonne fonte mises à chauffer,
Les coutelas de bon acier affûtés
Ils veulent me tuer !
Lui répond Alionouchka du fond de la rivière :
- Hélas, Ivan mon frérot,
Trop lourde la pierre qui me tient au fond de l'eau,
L'algue agile entrave mes jambes,
Le sable jaune emprisonne ma poitrine...
Or la sorcière est déjà à la recherche du biquet et ne le trouvant pas, elle dépêche le domestique :
- Va et m'amène le biquet, lui ordonne-t-elle.
Le
domestique descend à la rivière, et que voit-il ? Le biquet qui va et
vient au bord de l'eau et qui appelle d'une voix à fendre l'âme :
- Alionouchka, sœurette !
Remonte du fond de l'eau, remonte vite !
Les grands feux sont allumés,
Les marmites de bonne fonte mises à chauffer,
Les coutelas de bon acier affûtés
-Ils veulent me tuer !
Et on lui répond du fond de la rivière :
- Hélas, Ivan mon frérot,
Trop lourde la pierre qui me tient au fond de l'eau,
L'algue agile entrave mes jambes,
Le sable jaune emprisonne ma poitrine...
Le
domestique court vite à la maison, rapporter au marchand ce qu'il a vu
et entendu à la rivière. Les gens se rassemblent en hâte, ils y
courent, ils lancent leurs grands filets de soie et remontent
Alionouchka du fond de l'eau. Ils détachent la pierre à son cou, ils
plongent l'infortunée dans l'eau de source, ils lui mettent sa plus
jolie robe. Et Alionouchka revenue à la vie est encore plus belle
qu'avant!
Et le biquet, si grande est sa joie qu'il fait trois fois la cabriole et redevient le petit garçon Ivan comme devant.
Quant à la méchante sorcière, on l'attache à la queue d'un cheval et on la lâche dans la plaine très vaste, bon voyage !
Il était une fois un vieux et sa vieille, ils avaient une grande fille prénommée Alionouchka et un petit garçon - Ivan.
Mais voici que le vieux et sa vieille viennent à mourir. Alionouchka et le petit Ivan restent seuls au monde.
Comment
vivre? Il faut trouver un travail. Alionouchka prend le petit frère par
la main, et les voilà qui marchent sur la route très longue, dans la
plaine très vaste - au bout de quelque temps le petit Ivan veut boire.
- Soeurette Alionouchka, dit-il, j'ai soif !
- Patiente, frérot, nous serons bientôt au puits.
Ils
marchent, donc, ils marchent, or le soleil est haut dans le ciel, le
puits est loin, la chaleur - cuisante, la peau - transpirante. Mais
qu'est-ce là, sur la route? Un joli sabot de vache, et plein d'eau !
- Sœurette Alionouchka, je m'en vais boire à ce sabot.
- N'en fais rien, frérot, tu vas te changer en un petit veau.
Ivan se fait une raison et ils poursuivent leur chemin.
Or
le soleil est haut dans le ciel, le puits est loin, la chaleur -
cuisante, la peau -transpirante. Et qu'est-ce là encore sur la route?
Un joli sabot de cheval, et plein d'eau!
- Sœurette Alionouchka, je m'en vais boire à ce sabot.
- N'en fais rien, frérot, tu vas te changer en un petit poulain.
Il pousse un gros soupir, Ivan, et ils poursuivent leur chemin.
Ils
marchent, ils marchent, or le soleil est haut dans le ciel, le puits
est loin, la chaleur - cuisante, la peau - transpirante. Mais qu'est-ce
là, pour la troisième fois, sur la route? Un joli sabot de bique, et
plein d'eau !
Le petit Ivan dit :
- Sœurette Alionouchka, je n'en puis plus, donne que je me désaltère à ce sabot.
- N'en fais rien, frérot, tu vas te changer en petit biquet.
Mais Ivan ne l'écoute plus, il boit l'eau du sabot de bique.
n la boit et il se change en biquet !
Quand à présent Alionouchka hèle son frérot, c'est un petit biquet tout blanc qui accourt à la place d'Ivan!
Et
de pleurer, Alionouchka, à chaudes larmes, de s'asseoir à l'ombre d'une
meule et de pleurer encore, tandis que le gentil biquet gambade et muse
autour d'elle.
Passe à ce moment sur la route un riche marchand en voiture. Il demande :
-
Qu'est-ce donc qui tant te fait pleurer, ma jolie ? Alionouchka lui
fait le récit du malheur qui la frappe. Le marchand rétorque :
- Pardi, marie-moi. Je te vêtirai d'or et d'argent, et le biquet blanc restera auprès de nous.
Alionouchka réfléchit, et ayant réfléchi elle accepte de marier le marchand.
Alors
ils se mettent en ménage, et le petit biquet avec eux, il partage même
l'écuelle de la grande sœur pour le manger et pour le boire.
Un
jour cependant le marchand s'est absenté de chez lui. D'où sort-elle,
je ne sais, mais c'est le moment que choisit une méchante sorcière pour
venir faire un tour par là. Elle s'arrête sous la fenêtre d'Alionouchka
et l'entreprend avec tout plein de mots aimables, allons nous baigner à
la rivière, dit-elle.
Et Alionouchka y va.
Au bord de la rivière, la sorcière se jette sur elle, lui attache la pierre au cou et la pousse dans l'eau profonde!
Après
quoi elle se change en Alionouchka, elle passe sa jolie robe et elle
s'en vient en sa maison. Nul ne devine que c'est la sorcière. Le
marchand, à son retour, pas plus que les autres.
Seul le petit
biquet est au courant de tout. Grand est son chagrin, il ne boit plus
rien ni ne mange, matin et soir il va et vient au bord de la rivière et
il appelle :
- Alionouchka, sœurette!
Remonte du fond de l'eau, remonte vite !
La sorcière qui apprend la chose, aussitôt presse le mari de le tuer ce biquet, tu entends, dit-elle, tu vas me le tuer!
Le
marchand, il a pitié du petit biquet, il l'aime bien. Mais la sorcière
tant le presse et insiste qu'à la fin, que faire, il se rend :
- Allez ! Mais c'est toi qui fais ça...
Et la sorcière commande d'allumer de grands feux, de chauffer les marmites de bonne fonte, d'affûter les coutelas de bon acier.
Le biquet a tout compris - ses heures sont comptées, aussi parle-t-il ainsi à son père adoptif :
- Laisse-moi, avant de mourir, descendre à la rivière, boire de son eau, m'en rincer les tripettes...
- Pourquoi pas ? Va.
Il court vite à la rivière, le petit biquet, il s'arrête au bord de l'eau, il appelle d'une voix à fendre l'âme :
- Alionouchka, sœurette!
Remonte du fond de l'eau, remonte vite !
Les grands feux sont allumés,
Les marmites de bonne fonte mises à chauffer,
Les coutelas de bon acier affûtés
Ils veulent me tuer !
Lui répond Alionouchka du fond de la rivière :
- Hélas, Ivan mon frérot,
Trop lourde la pierre qui me tient au fond de l'eau,
L'algue agile entrave mes jambes,
Le sable jaune emprisonne ma poitrine...
Or la sorcière est déjà à la recherche du biquet et ne le trouvant pas, elle dépêche le domestique :
- Va et m'amène le biquet, lui ordonne-t-elle.
Le
domestique descend à la rivière, et que voit-il ? Le biquet qui va et
vient au bord de l'eau et qui appelle d'une voix à fendre l'âme :
- Alionouchka, sœurette !
Remonte du fond de l'eau, remonte vite !
Les grands feux sont allumés,
Les marmites de bonne fonte mises à chauffer,
Les coutelas de bon acier affûtés
-Ils veulent me tuer !
Et on lui répond du fond de la rivière :
- Hélas, Ivan mon frérot,
Trop lourde la pierre qui me tient au fond de l'eau,
L'algue agile entrave mes jambes,
Le sable jaune emprisonne ma poitrine...
Le
domestique court vite à la maison, rapporter au marchand ce qu'il a vu
et entendu à la rivière. Les gens se rassemblent en hâte, ils y
courent, ils lancent leurs grands filets de soie et remontent
Alionouchka du fond de l'eau. Ils détachent la pierre à son cou, ils
plongent l'infortunée dans l'eau de source, ils lui mettent sa plus
jolie robe. Et Alionouchka revenue à la vie est encore plus belle
qu'avant!
Et le biquet, si grande est sa joie qu'il fait trois fois la cabriole et redevient le petit garçon Ivan comme devant.
Quant à la méchante sorcière, on l'attache à la queue d'un cheval et on la lâche dans la plaine très vaste, bon voyage !
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
Re: Contes Russes
De par la volonté du brochet
Il était une fois un vieil homme oui avait trois fils. Les deux aînés
étaient intelligents, mais le troisième était un sot: on l'appelait
Emilien-le-bon-à-rien. Les deux aînés travaillaient, Emilien, lui,
restait toute la journée allongée sur le poêle à ne rien faire. Un
jour, ses deux frères s'en allèrent à la foire. Leurs femmes appelèrent
Emilien:
- Emilien, va chercher de l'eau. Mais il leur répondit du haut de son poêle : - Je n'en ai pas envie...
- Emilien, tu ferais mieux d'y aller, sinon tes frères ne te rapporteront rien de la foire.
- Bon, d'accord, j'y vais.
Emilien
descendit de son poêle, enfila ses bottes, s'habilla, prit des seaux et
une hache et s'en alla à la rivière. Là il creusa un trou dans la
glace, y plongea les seaux, les posa, puis il regarda dans le trou.
Tout à coup il aperçut un brochet. D'un seul geste il l'attrapa: - J'en
ferai une bonne soupe ! Mais soudain le brochet se mit à parler:
- Emilien, rejette-moi à l'eau, je te rendrai service.
Mais Emilien se mit à rire :
-Comment
peux-tu me rendre service... Non, je vais t'emporter chez moi et je
dirai à mes belles-sœurs de te faire cuire. Et nous mangerons une bonne
soupe de poisson.
A nouveau le brochet se mit à le supplier:
- Emilien, Emilien, rejette-moi à l'eau, je ferai tout ce que tu voudras.
- D'accord, mais prouve-moi d'abord que tu ne cherches pas à me tromper, alors je te relâcherai.
Alors le brochet lui demanda: - Emilien, Emilien, dis-moi ce que tu désires.
- Je veux que mes seaux s'en aillent tous seuls à la maison, sans que l'eau se renverse...
Et le brochet de lui répondre : - Souviens-toi de mes paroles, lorsque tu voudras quelque chose, il te suffira de répéter:
«De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir.»
Et
Emilien répète: - De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon
plaisir, mes seaux, retournez tout seuls à la maison...
A peine
eut-il prononcé ces mots que les seaux remontèrent tous seuls sur la
berge. Emilien remit le brochet à l'eau et suivit ses seaux. Les seaux
traversèrent le village et les gens s'étonnèrent. Quant à Emilien, il
marchait derrière eux en riant... Les seaux rentrèrent tous seuls dans
l'isba et s'installèrent sur le banc; quant à Emilien, il s'allongea à
nouveau sur son poêle.
Au bout de quelque temps, ses belles-sœurs lui dirent:
- Emilien, pourquoi restes-tu couché? Tu ferais mieux d'aller couper du bois.
- Je n'en ai pas envie...
- Si tu ne va pas couper du bois, tes frères ne te rapporteront rien de la foire.
Cela ne disait rien à Emilien de descendre de son poêle. Mais il se souvint alors du brochet et prononça à mi-voix:
-
De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, que ma
hache aille couper du bois et que les bûches rentrent toutes seules
dans l'isba et se placent dans le poêle...
La hache bondit de sous
le banc et s'en alla dans la cour où elle se mit à couper du bois.
Quant aux bûches, elles s'en revinrent toutes seules dans l'isba et se
placèrent dans le poêle. Au bout de quelque temps, les belles-sœurs
d'Emilien lui dirent à nouveau:
- Emilien, nous n'avons plus de bois, va en chercher dans la forêt.
Mais lui leur répondit du haut de son poêle : - Et vous alors ?
- Quoi, et nous?... Est-ce notre travail d'aller chercher du bois dans la forêt?
- Je n'en ai pas envie, moi...
- Eh bien, tu n'aurais pas de cadeau.
Rien
à faire. Emilien dut descendre de son poêle. Il enfila ses bottes,
s'habilla, prit la hache et une corde, sortit dans la cour et
s'installa sur son traîneau :
- Allons, les femmes, ouvrez le portail ! Mais ses belles-sœurs lui répondirent :
- Eh ! Tu deviens fou ! Te voilà assis dans ton traîneau sans même avoir attelé le cheval.
- Je n'ai pas besoin de cheval.
Les belles-sœurs ouvrirent donc le portail et Emilien prononça à mi-voix :
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, mon traîneau, va-t'en dans la forêt...
Le traîneau partit tout seul si vite, si vite, qu'un cheval n'aurait pu le rattraper.
Pour
se rendre dans la forêt, il fallait traverser la ville. Là le traîneau
renversa beaucoup de monde. Les gens se mirent à crier: «Retenez-le,
attrapez-le!» Mais Emilien accéléra l'allure. Il arriva enfin dans la
forêt:
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon
plaisir, que ma hache coupe du bois bien sec, que les bûches se rangent
d'elles-mêmes dans le traîneau et qu'elles se ficellent toutes seules...
La
hache se mit à couper du bois bien sec, quant aux bûches, elles
s'installèrent d'elles-mêmes dans le traîneau et se ficelèrent toutes
seules avec la corde. Puis Emilien ordonna à la hache de lui tailler un
bon bâton si gros, si lourd qu'on ait peine à le soulever. Puis il
s'assit sur le chargement de bois:
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, mon traîneau, retourne à la maison...
Et
le traîneau se dirigea vers la maison d'Emilien. Emilien traversa à
nouveau la ville où il avait renversé beaucoup de monde en passant,
mais là, on l'attendait déjà. Les gens se saisirent d'Emilien et se
mirent à l'injurier et à le battre. Emilien vit bien que les choses
allaient mal tourner et prononça à mi-voix :
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, mon bâton, frotte-leur les côtes...
Le
bâton bondit et se mit à frapper. Les gens se dispersèrent; Emilien,
lui, s'en revint à la maison et s'installa à nouveau sur le poêle. Au
bout de quelque temps le roi entendit parler des agissements d'Emilien,
et il ordonna à un officier d'aller le chercher et de le ramener au
palais. L'officier arriva, entra dans l'isba où vivait Emilien et
demanda:
- C'est toi Emilien-le-bon-à rien? Et lui, de son poêle :
- Qu'est-ce qu'il te faut?
- Dépêche-toi de t'habiller, je t'emmène chez le roi.
- Je n'en ai pas envie, moi... L'officier se mit en colère et le gifla. Emilien dit alors à mi-voix :
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, va, mon bâton, frotte-lui les côtes...
Le
bâton bondit et se mit à frapper l'officier. Celui-ci eut beaucoup de
mal à se sauver. Le roi s'étonna de ce que son officier n'ait pu avoir
raison d'Emilien et il lui envoya son plus grand dignitaire :
- Amène-moi Emilien-le-bon-à-rien, sinon je te ferai trancher la tête.
Le dignitaire acheta des raisins secs, des pruneaux, des pains d'épice,
et il s'en alla vers l'isba où habitait Emilien. Il entra et demanda
aux jeunes femmes ce que préférait Emilien.
- Emilien aime bien
qu'on lui parle gentiment, qu'on lui promette de splendides vêtements,
alors il fait tout ce qu'on lui demande.
Le grand dignitaire donna les raisins secs, les pruneaux et les pains d'épice à Emilien et lui dit :
-Emilien, pourquoi restes-tu allongé sur ton poêle? Allons trouver le roi.
- Mais je suis installé bien au chaud...
- Emilien, chez le roi on te nourrira bien, on te donnera à boire. Allons, viens avec moi.
- Je n'en ai pas envie, moi...
- Emilien, le roi t'offrira des vêtements splendides, une toque en fourrure et des bottes.
Emilien réfléchit longuement, puis répondit:
- Bon, d'accord, pars devant, moi, je te suivrai.
Le général s'en alla. Emilien resta encore quelque temps allongé, puis il dit:
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, va, mon poêle, allons chez le roi...
On
entendit alors un énorme craquement, le toit trembla, un mur s'abattit
et le poêle sortit dans la rue et prit la route vers le palais du
roi.Le roi, qui regardait par la fenêtre, s'étonna:
- Quel est donc ce phénomène ? Le grand dignitaire lui répondit :
- C'est Emilien qui vient te voir, monté sur son poêle. Le roi sortit sur le perron :
- Qu'est-ce donc, Emilien, on se plaint beaucoup de toi? Tu as renversé beaucoup de monde.
- Et pourquoi se sont-ils jetés sous mon traîneau?
Au
même instant la fille du roi, la princesse Marie, se mit à sa fenêtre
et regarda Emilien. Emilien l'aperçut et prononça à mi-voix:
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, que la fille du roi tombe amoureuse de moi...
Et il dit encore :
- Mon poêle, retourne à la maison...
Le
poêle fit demi-tour et s'en retourna. Il rentra dans l'isba et se remit
à sa place. Et Emilien restait toujours allongé. Au palais du roi, ce
n'étaient que cris et larmes. La princesse Marie se languissait
d'Emilien, elle ne pouvait vivre sans lui. Elle demanda à son père
qu'il la donne pour épouse à Emilien. Le roi, fort affligé, ordonna à
son grand dignitaire:
- Allons, ramène-moi Emilien mort ou vif, ou je te ferai trancher la tête.
Le
grand dignitaire acheta des vins délicieux et des mets divers. Il alla
trouver Emilien et le régala. Emilien but, mangea et, ivre, alla se
coucher. Mais le grand dignitaire l'installa dans un chariot et le
conduisit chez le roi.Le roi ordonna alors qu'on apporte un grand
tonneau cerclé de fer. On y installa Emilien et la princesse Marie. Le
tonneau fut scellé et jeté à la mer. Au bout d'un certain temps Emilien
s'éveilla. Il se retrouva dans l'obscurité et fort à l'étroit :
- Où suis-je donc? On lui répond:
- Quel malheur, quel désespoir, cher Emilien ! On nous a enfermé dans un tonneau qu'on a jeté à la mer.
- Mais qui es-tu, toi?
- Je suis la princesse Marie. Emilien dit alors:
-
De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, que des
vents violents amènent le tonneau sur un beau rivage couvert de sable
doré...
Des vents violents se mirent à souffler. La mer s'agita. Le
tonneau fut jeté sur un rivage couvert de sable doré. Emilien et la
princesse Marie sortirent du tonneau.
-Mon cher Emilien, où allons-nous vivre? Il faudrait que tu construises une petite isba.
- Je n'en ai pas envie, moi...
Alors la princesse le supplia, le supplia et Emilien finit par s'écrier :
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, qu'un palais de pierre au toit doré se construise ...
A
peine eut-il prononcé ces mots qu'apparut un palais de pierre au toit
doré. Le palais était entouré d'un jardin plein de fleurs où chantaient
des oiseaux. La princesse Marie et Emilien entrèrent dans le palais et
se mirent à la fenêtre.
- Mon cher Emilien, ne pourrais-tu donc devenir un beau jeune homme?
Emilien ne réfléchit pas longtemps:
-
De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, que je
devienne un beau jeune homme, le plus beau qui existe. Et Emilien
devint si beau, si beau... qu'on ne peut ni le dire, ni le décrire. Le
roi justement était à la chasse. Soudain, il aperçut un palais là où
auparavant il n'y avait rien.
- Quel est le malappris qui, sans ma permission, a osé construire un palais sur mes terres?
Et
il envoya demander à qui appartenait ce palais. Les envoyés accoururent
près de la fenêtre et demandèrent à qui appartenait ce palais. Emilien
leur répliqua:
- Dites au roi qu'il vienne me rendre visite, et je lui répondrai moi-même.
Le
roi vint donc lui rendre visite. Emilien l'accueillit, le fit entrer
dans le palais et l'installa à table. Ils se mirent à festoyer. Le roi
mangea, but et s'étonna:
- Qui es-tu donc, brave jeune homme ?
-Te
souviens-tu d'Emilien-le-bon-à-rien? J'étais venu chez toi, monté sur
mon poêle, et toi, tu as ordonné qu'on m'enferme dans un tonneau avec
ta fille, et tu nous as fait jeter à la mer. C'est moi, Emilien. Si je
veux, je peux incendier et dévaster tout ton royaume. Le roi fut fort
effrayé et se mit à demander pardon :
- Epouse ma fille, Emilien, prends mon royaume, mais ne me fais pas mourir !
On
organisa alors un festin magnifique. Emilien épousa la princesse Marie
et gouverna le pays. Voici la fin de mon récit. Qui l'a écouté a bien
fait.
Il était une fois un vieil homme oui avait trois fils. Les deux aînés
étaient intelligents, mais le troisième était un sot: on l'appelait
Emilien-le-bon-à-rien. Les deux aînés travaillaient, Emilien, lui,
restait toute la journée allongée sur le poêle à ne rien faire. Un
jour, ses deux frères s'en allèrent à la foire. Leurs femmes appelèrent
Emilien:
- Emilien, va chercher de l'eau. Mais il leur répondit du haut de son poêle : - Je n'en ai pas envie...
- Emilien, tu ferais mieux d'y aller, sinon tes frères ne te rapporteront rien de la foire.
- Bon, d'accord, j'y vais.
Emilien
descendit de son poêle, enfila ses bottes, s'habilla, prit des seaux et
une hache et s'en alla à la rivière. Là il creusa un trou dans la
glace, y plongea les seaux, les posa, puis il regarda dans le trou.
Tout à coup il aperçut un brochet. D'un seul geste il l'attrapa: - J'en
ferai une bonne soupe ! Mais soudain le brochet se mit à parler:
- Emilien, rejette-moi à l'eau, je te rendrai service.
Mais Emilien se mit à rire :
-Comment
peux-tu me rendre service... Non, je vais t'emporter chez moi et je
dirai à mes belles-sœurs de te faire cuire. Et nous mangerons une bonne
soupe de poisson.
A nouveau le brochet se mit à le supplier:
- Emilien, Emilien, rejette-moi à l'eau, je ferai tout ce que tu voudras.
- D'accord, mais prouve-moi d'abord que tu ne cherches pas à me tromper, alors je te relâcherai.
Alors le brochet lui demanda: - Emilien, Emilien, dis-moi ce que tu désires.
- Je veux que mes seaux s'en aillent tous seuls à la maison, sans que l'eau se renverse...
Et le brochet de lui répondre : - Souviens-toi de mes paroles, lorsque tu voudras quelque chose, il te suffira de répéter:
«De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir.»
Et
Emilien répète: - De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon
plaisir, mes seaux, retournez tout seuls à la maison...
A peine
eut-il prononcé ces mots que les seaux remontèrent tous seuls sur la
berge. Emilien remit le brochet à l'eau et suivit ses seaux. Les seaux
traversèrent le village et les gens s'étonnèrent. Quant à Emilien, il
marchait derrière eux en riant... Les seaux rentrèrent tous seuls dans
l'isba et s'installèrent sur le banc; quant à Emilien, il s'allongea à
nouveau sur son poêle.
Au bout de quelque temps, ses belles-sœurs lui dirent:
- Emilien, pourquoi restes-tu couché? Tu ferais mieux d'aller couper du bois.
- Je n'en ai pas envie...
- Si tu ne va pas couper du bois, tes frères ne te rapporteront rien de la foire.
Cela ne disait rien à Emilien de descendre de son poêle. Mais il se souvint alors du brochet et prononça à mi-voix:
-
De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, que ma
hache aille couper du bois et que les bûches rentrent toutes seules
dans l'isba et se placent dans le poêle...
La hache bondit de sous
le banc et s'en alla dans la cour où elle se mit à couper du bois.
Quant aux bûches, elles s'en revinrent toutes seules dans l'isba et se
placèrent dans le poêle. Au bout de quelque temps, les belles-sœurs
d'Emilien lui dirent à nouveau:
- Emilien, nous n'avons plus de bois, va en chercher dans la forêt.
Mais lui leur répondit du haut de son poêle : - Et vous alors ?
- Quoi, et nous?... Est-ce notre travail d'aller chercher du bois dans la forêt?
- Je n'en ai pas envie, moi...
- Eh bien, tu n'aurais pas de cadeau.
Rien
à faire. Emilien dut descendre de son poêle. Il enfila ses bottes,
s'habilla, prit la hache et une corde, sortit dans la cour et
s'installa sur son traîneau :
- Allons, les femmes, ouvrez le portail ! Mais ses belles-sœurs lui répondirent :
- Eh ! Tu deviens fou ! Te voilà assis dans ton traîneau sans même avoir attelé le cheval.
- Je n'ai pas besoin de cheval.
Les belles-sœurs ouvrirent donc le portail et Emilien prononça à mi-voix :
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, mon traîneau, va-t'en dans la forêt...
Le traîneau partit tout seul si vite, si vite, qu'un cheval n'aurait pu le rattraper.
Pour
se rendre dans la forêt, il fallait traverser la ville. Là le traîneau
renversa beaucoup de monde. Les gens se mirent à crier: «Retenez-le,
attrapez-le!» Mais Emilien accéléra l'allure. Il arriva enfin dans la
forêt:
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon
plaisir, que ma hache coupe du bois bien sec, que les bûches se rangent
d'elles-mêmes dans le traîneau et qu'elles se ficellent toutes seules...
La
hache se mit à couper du bois bien sec, quant aux bûches, elles
s'installèrent d'elles-mêmes dans le traîneau et se ficelèrent toutes
seules avec la corde. Puis Emilien ordonna à la hache de lui tailler un
bon bâton si gros, si lourd qu'on ait peine à le soulever. Puis il
s'assit sur le chargement de bois:
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, mon traîneau, retourne à la maison...
Et
le traîneau se dirigea vers la maison d'Emilien. Emilien traversa à
nouveau la ville où il avait renversé beaucoup de monde en passant,
mais là, on l'attendait déjà. Les gens se saisirent d'Emilien et se
mirent à l'injurier et à le battre. Emilien vit bien que les choses
allaient mal tourner et prononça à mi-voix :
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, mon bâton, frotte-leur les côtes...
Le
bâton bondit et se mit à frapper. Les gens se dispersèrent; Emilien,
lui, s'en revint à la maison et s'installa à nouveau sur le poêle. Au
bout de quelque temps le roi entendit parler des agissements d'Emilien,
et il ordonna à un officier d'aller le chercher et de le ramener au
palais. L'officier arriva, entra dans l'isba où vivait Emilien et
demanda:
- C'est toi Emilien-le-bon-à rien? Et lui, de son poêle :
- Qu'est-ce qu'il te faut?
- Dépêche-toi de t'habiller, je t'emmène chez le roi.
- Je n'en ai pas envie, moi... L'officier se mit en colère et le gifla. Emilien dit alors à mi-voix :
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, va, mon bâton, frotte-lui les côtes...
Le
bâton bondit et se mit à frapper l'officier. Celui-ci eut beaucoup de
mal à se sauver. Le roi s'étonna de ce que son officier n'ait pu avoir
raison d'Emilien et il lui envoya son plus grand dignitaire :
- Amène-moi Emilien-le-bon-à-rien, sinon je te ferai trancher la tête.
Le dignitaire acheta des raisins secs, des pruneaux, des pains d'épice,
et il s'en alla vers l'isba où habitait Emilien. Il entra et demanda
aux jeunes femmes ce que préférait Emilien.
- Emilien aime bien
qu'on lui parle gentiment, qu'on lui promette de splendides vêtements,
alors il fait tout ce qu'on lui demande.
Le grand dignitaire donna les raisins secs, les pruneaux et les pains d'épice à Emilien et lui dit :
-Emilien, pourquoi restes-tu allongé sur ton poêle? Allons trouver le roi.
- Mais je suis installé bien au chaud...
- Emilien, chez le roi on te nourrira bien, on te donnera à boire. Allons, viens avec moi.
- Je n'en ai pas envie, moi...
- Emilien, le roi t'offrira des vêtements splendides, une toque en fourrure et des bottes.
Emilien réfléchit longuement, puis répondit:
- Bon, d'accord, pars devant, moi, je te suivrai.
Le général s'en alla. Emilien resta encore quelque temps allongé, puis il dit:
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, va, mon poêle, allons chez le roi...
On
entendit alors un énorme craquement, le toit trembla, un mur s'abattit
et le poêle sortit dans la rue et prit la route vers le palais du
roi.Le roi, qui regardait par la fenêtre, s'étonna:
- Quel est donc ce phénomène ? Le grand dignitaire lui répondit :
- C'est Emilien qui vient te voir, monté sur son poêle. Le roi sortit sur le perron :
- Qu'est-ce donc, Emilien, on se plaint beaucoup de toi? Tu as renversé beaucoup de monde.
- Et pourquoi se sont-ils jetés sous mon traîneau?
Au
même instant la fille du roi, la princesse Marie, se mit à sa fenêtre
et regarda Emilien. Emilien l'aperçut et prononça à mi-voix:
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, que la fille du roi tombe amoureuse de moi...
Et il dit encore :
- Mon poêle, retourne à la maison...
Le
poêle fit demi-tour et s'en retourna. Il rentra dans l'isba et se remit
à sa place. Et Emilien restait toujours allongé. Au palais du roi, ce
n'étaient que cris et larmes. La princesse Marie se languissait
d'Emilien, elle ne pouvait vivre sans lui. Elle demanda à son père
qu'il la donne pour épouse à Emilien. Le roi, fort affligé, ordonna à
son grand dignitaire:
- Allons, ramène-moi Emilien mort ou vif, ou je te ferai trancher la tête.
Le
grand dignitaire acheta des vins délicieux et des mets divers. Il alla
trouver Emilien et le régala. Emilien but, mangea et, ivre, alla se
coucher. Mais le grand dignitaire l'installa dans un chariot et le
conduisit chez le roi.Le roi ordonna alors qu'on apporte un grand
tonneau cerclé de fer. On y installa Emilien et la princesse Marie. Le
tonneau fut scellé et jeté à la mer. Au bout d'un certain temps Emilien
s'éveilla. Il se retrouva dans l'obscurité et fort à l'étroit :
- Où suis-je donc? On lui répond:
- Quel malheur, quel désespoir, cher Emilien ! On nous a enfermé dans un tonneau qu'on a jeté à la mer.
- Mais qui es-tu, toi?
- Je suis la princesse Marie. Emilien dit alors:
-
De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, que des
vents violents amènent le tonneau sur un beau rivage couvert de sable
doré...
Des vents violents se mirent à souffler. La mer s'agita. Le
tonneau fut jeté sur un rivage couvert de sable doré. Emilien et la
princesse Marie sortirent du tonneau.
-Mon cher Emilien, où allons-nous vivre? Il faudrait que tu construises une petite isba.
- Je n'en ai pas envie, moi...
Alors la princesse le supplia, le supplia et Emilien finit par s'écrier :
- De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, qu'un palais de pierre au toit doré se construise ...
A
peine eut-il prononcé ces mots qu'apparut un palais de pierre au toit
doré. Le palais était entouré d'un jardin plein de fleurs où chantaient
des oiseaux. La princesse Marie et Emilien entrèrent dans le palais et
se mirent à la fenêtre.
- Mon cher Emilien, ne pourrais-tu donc devenir un beau jeune homme?
Emilien ne réfléchit pas longtemps:
-
De par la volonté de messire Brochet et selon mon bon plaisir, que je
devienne un beau jeune homme, le plus beau qui existe. Et Emilien
devint si beau, si beau... qu'on ne peut ni le dire, ni le décrire. Le
roi justement était à la chasse. Soudain, il aperçut un palais là où
auparavant il n'y avait rien.
- Quel est le malappris qui, sans ma permission, a osé construire un palais sur mes terres?
Et
il envoya demander à qui appartenait ce palais. Les envoyés accoururent
près de la fenêtre et demandèrent à qui appartenait ce palais. Emilien
leur répliqua:
- Dites au roi qu'il vienne me rendre visite, et je lui répondrai moi-même.
Le
roi vint donc lui rendre visite. Emilien l'accueillit, le fit entrer
dans le palais et l'installa à table. Ils se mirent à festoyer. Le roi
mangea, but et s'étonna:
- Qui es-tu donc, brave jeune homme ?
-Te
souviens-tu d'Emilien-le-bon-à-rien? J'étais venu chez toi, monté sur
mon poêle, et toi, tu as ordonné qu'on m'enferme dans un tonneau avec
ta fille, et tu nous as fait jeter à la mer. C'est moi, Emilien. Si je
veux, je peux incendier et dévaster tout ton royaume. Le roi fut fort
effrayé et se mit à demander pardon :
- Epouse ma fille, Emilien, prends mon royaume, mais ne me fais pas mourir !
On
organisa alors un festin magnifique. Emilien épousa la princesse Marie
et gouverna le pays. Voici la fin de mon récit. Qui l'a écouté a bien
fait.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
D’où viennent les esprits
D’où viennent les esprits
D’où viennent les esprits
Les
anges vivaient au ciel, auprès de Dieu. Ils étaient nombreux et
l’accord régnait entre eux. Puis une dispute naquit entre Dieu et les
anges. Dieu les précipita alors du ciel. En tombant sur terre, chacun prit une forme différente, selon sa nouvelle demeure. L’un tomba dans une forêt, et devint un esprit des bois.
Un autre arriva dans un bain et se transforma en esprit du bain.
Un autre encore atterrit sur une maison et devint un esprit domestique.
Dans les moulins apparurent les esprit meuniers, tandis que les granges et les greniers furent peuplés d’esprits des granges.
Dans l’eau se multiplièrent les diables d’eau.
Enfin, un d’entre eux tomba dans un tonneau de bière préparé par une bonne femme, et devint l’esprit de la bière.
D’où viennent les esprits
Les
anges vivaient au ciel, auprès de Dieu. Ils étaient nombreux et
l’accord régnait entre eux. Puis une dispute naquit entre Dieu et les
anges. Dieu les précipita alors du ciel. En tombant sur terre, chacun prit une forme différente, selon sa nouvelle demeure. L’un tomba dans une forêt, et devint un esprit des bois.
Un autre arriva dans un bain et se transforma en esprit du bain.
Un autre encore atterrit sur une maison et devint un esprit domestique.
Dans les moulins apparurent les esprit meuniers, tandis que les granges et les greniers furent peuplés d’esprits des granges.
Dans l’eau se multiplièrent les diables d’eau.
Enfin, un d’entre eux tomba dans un tonneau de bière préparé par une bonne femme, et devint l’esprit de la bière.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
L'oiseau de feu
L'oiseau de feu
dans
un certain pays, dans un certain royaume vivait le tsar Démian avec ses
trois fils : Piotr, Vassili et Ivan. Ce tsar possédait un jardin comme
on n'en trouverait pas de pareil au monde, plein de fleurs rares et
d'arbres précieux. Le plus précieux de tous était un pommier qui
donnait des pommes d'or. Le tsar prenait grand soin de ce pommier, en
comptait les pommes chaque soir, les recomptait chaque matin. Et il
s'aperçut que la nuit quelqu'un saccageait son jardin : le soir une
belle pomme sur la branche mûrit, et au matin, ni vu ni connu, elle a
disparu ! Les gardiens n'y pouvaient rien et le tsar en perdait le
boire et le manger, la paix et le sommeil. Un jour, il appela ses fils :
-
Ça ne peut plus durer ! A celui de vous qui découvrira et prendra notre
voleur je laisserai la moitié du royaume de mon vivant et, à ma mort,
il l'aura tout entier. Les fils ont juré d'attraper le voleur et c'est
Piotr-tsarévitch qui le premier monta-lagarde. Il fit le tour du
jardin, se coucha sur le gazon, tomba dans un sommeil profond. Quand il
se réveilla, plusieurs pommes d'or manquaient.
Dès son réveil, le tsar appela Piotr:
- M'apportes-tu une bonne nouvelle, fils ? As-tu vu le voleur ?
- Non, père ! Et pourtant, j'ai veillé toute la nuit, fouillé les taillis. Je me demande où ces pommes sont passées !
La nuit suivante, ce fut le tour de Vassili. Il regarda sous les
buissons, s'assit sur le gazon, tomba dans un sommeil profond. Au
matin, d'autres pommes d'or manquaient.
- Alors, fils, as-tu vu le voleur ? - lui demanda le tsar.
- Non, père ! J'ai guetté de mon mieux, n'ai pas fermé les yeux, n'ai vu personne. Je n'y comprends rien !
La nuit d'après, Ivan-tsarévitch prit la garde. De peur de s'endormir,
il marchait sans arrêt; si le sommeil venait, si la fatigue le prenait,
il se débarbouillait avec la rosée, reprenait sa veillée. Sur les
minuit, il aperçut une grande lueur qui s'approchait du jardin et,
bientôt, on y vit clair comme en plein jour : l'oiseau de Feu, perché
sur le pommier, picorait les pommes d'or. Ivan-tsarévitch se glissa en
catimini, saisit l'oiseau par la queue. Mais l'oiseau de Feu se
débattit si bien qu'il s'échappa, ne laissant qu'une plume dans la main
du tsarévitch.
Au matin;
Ivan-tsarévitch raconta à son père quel voleur saccageait leur jardin
et lui montra la plume de l'oiseau de Feu. Le tsar se réjouit, retrouva
sommeil et appétit, d'autant plus que l'oiseau ne revint plus voler ses
pommes d'or. Mais à regarder la plume, l'oiseau de Feu tout entier lui
faisait envie, le tsar y pensait jour et nuit. Et il finit par appeler
ses fils :
- Pourquoi n'iriez-vous pas courir le monde, chercher cet
oiseau de Feu ? Autrement, un de ces jours, il reviendra voler nos
pommes !
Les deux aînés ont obéi. Ils ont sellé leurs coursiers
rapides, revêtu leurs armures solides et sont partis à l'aventure.
Mais, vu son jeune âge, le tsar garda près de lui Ivan-tsarévitch.
Celui-ci en fut tellement marri, il supplia tant son père que le tsar
finit par le laisser partir à son tour.
Un conte est vite dit, les
choses se font plus lentement. Ivan-tsarévitch chevaucha longtemps et
arriva à une croisée de chemins. Là, sur une borne de pierre, il était
écrit : «Celui qui ira tout droit, aura froid et faim; celui qui
prendra à droite, restera sain et sauf, mais perdra son cheval; et
celui qui ira à gauche sera tué, mais son cheval vivra.» Réflexion
faite, Ivan-tsarévitch prit le chemin de droite pour ne point perdre la
vie. Il chemina ainsi trois jours durant et parvint à une grande et
sombre forêt. Soudain, un loup gris bondit à sa rencontre. Le
tsarévitch n'eut même pas le temps de dégainer son glaive, que le loup
égorgeait son cheval et disparaissait dans les fourrés. Que faire sans
cheval? Ivan-tsarévitch poursuivit sa route à pied, mais au bout de
trois jours il n'en pouvait plus de faim et de fatigue. Accablé, il
s'était laissé tomber sur une souche quand un grand loup gris sortit
des bois :
- Te voilà bien triste, Ivan-tsarévitch, - dit le loup.- Pourquoi as-tu les mains lasses, la tête basse, l'échiné courbée ?
- Comment ne pas me désoler ? Que ferai-je sans mon cheval ?
- C'est toi qui as choisi ce chemin, de quoi te plains-tu? Mais j'ai pitié de toi. Dis-moi où tu vas, ce que tu cherches ?
- Le tsar Démian, mon père, m'a envoyé chercher l'oiseau de Feu qui volait les pommes d'or de son jardin.
-
Mais sur ton cheval tu n'y serais jamais arrivé ! Moi seul je sais où
niche l'oiseau de Feu, moi seul peux t'aider à le dénicher. Et en
échange de ta monture, je vais te servir fidèlement, en toute droiture
! Monte sur mon dos et agrippe-toi bien. Ivan-tsarévitch obéit et le
loup gris fila comme le vent. Le loup court, d'un bond passe les monts,
d'une foulée franchit les vallées, des pattes devorent l'espace, de la
queue efface la trace. Le tsarévitch n'a qu'à se cramponner ! Devant un grand mur blanc le loup s'arrêta et dit :
-
Escalade ce mur. Derrière il y a un jardin, dans ce jardin une cage
d'or, dans la cage l'oiseau de Feu. La garde dort. Prends l'oiseau mais
ne touche pas à la cage, sinon un malheur t'arrivera !
Ivan-tsarévitch
se glissa dans le jardin et vat l'oiseau de Feu dans sa cage. Il print
l'oiseau et allait partir quand il se dit : «Comment emporter l'oiseau
sans cage ? Je ne peux pas le mettre dans ma poche, quand même ! Et
puis la cage est belle, toute ornée de pierreries...» II oublia ce que
le loup avait dit et saisit la cage. Aussitôt ce ne fut que carillons
et sonneries: de la cage d'or des fils secrets partaient, avec grelots
et clochettes, crécelles et claquettes. Les gardiens se sont réveillés,
d'Ivan-tsarévitch se sont emparés, devant leur tsar Afrone l'ont amené.
- Qui es-tu ? cria le tsar très en colère. De quelle terre native, de quel père le fils ?
-
Je m'appelle Ivan-tsarévitch et le tsar Démian est mon père. Ton oiseau
de Feu s'est fait coutume de venir grappiller nos pommes d'or. Alors
mon père m'a envoyé le chercher, l'attraper.
Le tsar Afrone hocha la tête avec reproche :
-
Ah, Ivan-tsarévitch ! Tu serais venu me trouver honnêtement que je te
l'aurais donné, mon oiseau de Feu, ou bien je l'aurais échangé contre
autre chose. Alors que maintenant le monde entier va savoir
qu'Ivan-tsarévitch n'est qu'un voleur!... Enfin, passe pour cette fois.
Écoute, si tu me rends service, je te pardonnerai et te donnerai même
l'oiseau de Feu. Mais avant, tu vas aller par-delà vingt-neuf terres,
dans le trentième royaume, chez le tsar Koussman et me ramener son
cheval à la crinière d'or. Ivan-tsarévitch, tout penaud, alla retrouver
le loup gris et lui dit ses malheurs. Le loup n'était pas content !
- Pourquoi ne m'as-tu pas écouté, tsarévitch ? Pourquoi as-tu pris la cage ? Je t'avais pourtant dit de ne pas y toucher.
- Pardonne-moi, s'il te plaît ! Je suis en faute, c'est vrai.
- Bon, bon, n'en parlons plus ! Monte sur mon dos et cramponne-toi bien. On va aller chez le tsar Koussman.
Ivan-tsarévitch monta sur le dos du loup qui partit comme le vent.
Le loup gris court, d'un bond passe les monts, d'une foulée franchit
les vallées, des pattes devorent l'espace, de la queue efface la trace.
En peu de temps ils arrivèrent chez le tsar Koussman, devant ses
écuries de pierre blanche. Le loup dit au tsarévitch :
- Les
gardiens sont endormis. Va chercher le cheval à la crinière d'or mais
ne touche pas à sa bride, sinon un autre malheur t'arrivera !
Ivan-tsarévitch se glissa dans l'écurie, prit le cheval par sa crinière
d'or et allait partir quand il vit une bride d'or pendue au mur et se
dit : «Comment mener un cheval sans bride ? Et celle-là est si belle
!...» Mais dès qu'il la toucha, ce ne fut que carillons et sonnailles.
La garde se réveilla, d'Ivan-tsarévitch s'empara, devant le tsar
Koussman l'amena. Le tsar cria, très en colère :
- Qui es-tu? De quelle terre native, de quel père le fils ? Et comment oses-tu toucher à mon cheval ?
Le tsar Démian est mon père, Ivan-tsarévitch est mon nom.
-
Ah, Ivan-tsarévitch ! Il fallait venir me trouver honnêtement, par
respect pour ton père je t'aurais donné mon cheval. Et maintenant toute
la terre saura que le tsarévitch n'est qu'un voleur de chevaux, ce sera
du joli... ! Enfin, je veux bien te pardonner et, même te faire cadeau
du cheval à la crinière d'or. Mais va d'abord à vingt-neuf terres
d'ici, dans le trentième royaume et ramène-moi la fille du tsar Dalmat,
la princesse Hélène-la Belle !
Ivan-tsarévitch, pleurant de honte, alla raconter au loup ses malheurs. Le loup lui fit d'amers reproches :
-
Pourquoi ne m'as-tu pas écouté ? Pourquoi as-tu touché à la bride ? Je
me donne du mal pour te servir et tu ne fais que tout gâcher !
- Pardonne-moi, je t'en prie ! J'ai encore fauté, c'est vrai.
- Bon, bon ! Quand le vin est tiré il faut le boire. Monte sur mon dos, on s'en va chercher la princesse Hélène-la Belle.
Et le loup gris partit comme le vent. D'un bond il passe les monts,
d'une foulée franchit les vallées, des pattes devorent l'espace, de la
queue efface la trace. En peu de temps ils arrivèrent chez le tsar
Dalmat, devant un grand jardin aux grilles d'or. Le loup dit :
- Cette fois, tsarévitch, je vais moi-même chercher la princesse ! Toi, tu vas m'attendre dans ce bois, sous le chêne vert.
Le
loup gris sauta par-dessus les grilles d'or et se tapit dans les
buissons. Vers le soir, Hélène-la Belle sortit se promener avec ses
nourrices-suivantes, ses fidèles servantes. Comme elle se penchait pour
cueillir une fleur, le loup bondit, la jeta sur son dos et s'enfuit.
Sous le chêne vert il retrouva le tsarévitch :
- Monte vite, cria le loup, on va nous poursuivre !
Ivan-tsarévitch
monta sur le dos du loup, prit la princesse dans ses bras et le loup
gris fila comme le vent. Chez le tsar Dalmat, pendant ce temps, les
nourrices-suivantes, fidèles servantes, criaient et piaillaient si bien
que personne ne comprenait rien. Quand on démêla l'affaire, quand on
organisa la poursuite, le loup gris était déjà loin !
De peur,
Hélène-la-Belle s'était évanouie. En reprenant connaissance, elle vit
qu'un jeune et beau prince la tenait dans ses bras. Et à ce premier
regard, à ce premier coup d'oeil ils s'aimèrent. Si bien qu'en
approchant du royaume du tsar Koussman Ivan-tsarévitch pleurait à
chaudes larmes. Le loup lui demanda :
- Pourquoi pleures-tu, tsarévitch? Quel chagrin est le tien?
- Ah, loup gris ! J'aime Hélène-la Belle de tout mon cœur. Comment la donnerais-je au tsar Koussman ?
Le loup gris les regarda, en eut pitié. Et il dit :
-
Puisque j'ai promis de te servir fidèlement, je tiendrai parole. Je
vais me transformer en Hélène-la Belle et tu me remettras au tsar
Koussman. La princesse t'attendra dans ce bois et dès que tu auras le
cheval à la crinière d'or tu viendras la prendre. Partez tous deux, je
vous rattraperai un peu plus tard.
Le loup gris frappa le sol, se
changea en Hélène-la Belle et Ivan-tsarévitch le mena chez le tsar
Koussman. Celui-ci, tout heureux, remit au tsarévitch le cheval avec sa
bride par-dessus le marché et remercia encore pour le service rendu !
Ivan-tsarévitch s'en alla en hâte rejoindre la vraie princesse et ils
se mirent en route. Pendant ce
temps, le tsar Koussman célébrait ses noces. Sur les tables de chêne,
sur des nappes blanches on servait des mets fins, de vieux hydromels et
vins. Les invités criaient : «Vive la mariée !» Le tsar voulut
embrasser sa jeune épouse, mais au lieu de ses douces lèvres rencontra
le rude poil d'un loup ! Le tsar hurla, l'assistance s'affola.
Profitant du tumulte, le loup gris sauta par la fenêtre - et autant
chercher le vent dans les champs !
Le loup rattrapa vite Ivan-tsarévitch et lui dit :
- Monte sur mon dos, laisse le cheval à la princesse ! En arrivant au royaume du tsar Afrone, le loup demanda :
- Tu as l'air bien triste, Ivan-tsarévitch ? Qu'as-tu donc ?
-
Je songe au cheval à la crinière d'or et j'ai gros cœur de l'échanger
contre l'oiseau de Feu. Mais si je ne lui donne pas le cheval, le tsar
va me déshonorer à la ronde !
- Allons, ne te chagrine pas ! Je vais
encore t'aider. Je me changerai en cheval à la crinière d'or, c'est moi
que tu remettras au tsar Afrone. Et la princesse avec le vrai cheval
t'attendra dans ce bois.
Le loup frappa le sol, se changea en cheval
à la crinière d'or et Ivan-tsarévitch le mena chez le tsar Afrone. En
les voyant, le tsar se réjouit, au-devant du tsarévitch sortit, dans
son palais le conduisit. Il lui donna l'oiseau de Feu et sa cage
par-dessus le marché, l'invita même à rester quelque temps, mais
Ivan-tsarévitch avait hâte de rejoindre Hélène-la Belle. Il la retrouva
dans le bois et, montés tous deux sur le cheval à la crinière d'or,
tenant la cage avec l'oiseau de Feu, ils se mirent en chemin.
Pendant
ce temps, le tsar Afrone voulut essayer son cheval et s'en fut à la
chasse avec ses chasseurs, ses piqueurs, ses rabatteurs. Par les bois
ils passèrent, un renard dans son gîte forcèrent, sur ses traces
s'élancèrent. Le cheval à la crinière d'or galopa vite, distança toute
la suite. Alors le cheval buta, le tsar chuta, plongea dans la boue, la
tête la première. Et au lieu du cheval à la crinière d'or, c'est un
loup gris qui se sauva à toutes jambes ! Le temps de relever le tsar,
de le nettoyer, le loup avait disparu. Il rejoignit Ivan-tsarévitch et
le prit sur son dos. En arrivant au lieu de leur première rencontre, le
loup gris dit :
- C'est ici que j'ai égorgé ton cheval, Ivan-tsarévitch, c'est ici que je vais te quitter. Je ne suis plus ton serviteur !
Ivan-tsarévitch
par trois fois salua le loup gris jusqu'à terre, par trois fois le
remercia et lui dit adieu. Mais le loup répondit :
- Ne me dis pas adieu, tsarévitch, dis-moi à bientôt ! Dans peu de temps d'ici tu , auras encore besoin de moi.
A
part soi, Ivan-tsarévitch pensait : «Quel besoin aurai-je du loup gris
? J'ai tout ce que je désire !...» II monta avec la princesse sur le
cheval à la crinière d'or et tenant la cage de l'oiseau de Feu se mit
en route vers le royaume de son père.
Un conte se dit vite, le
chemin se fait lentement. Peu avant d'arriver chez le tsar Démian, il
fallut s'arrêter pour prendre du repos. Ivan-tsarévitch et Hélène-la
Belle à l'orée du bois s'installaient, sur l'herbe s'allongeaient, bien
vite s'endormaient. C'est alors que les deux frères aînés du tsarévitch
vinrent à passer par là. Piotr-tsarévitch et Vassili-tsarévitch s'en
retournaient chez leur père les mains vides, le cœur déçu. En voyant
Ivan-tsarévitch entre une belle princesse, un cheval à crinière d'or et
la cage d'or avec l'oiseau de Feu dedans, la rage-jalousie les prit :
-
Notre frère nous avait déjà humiliés en rapportant une plume de
l'oiseau de Feu, et voilà qu'il ramène l'oiseau tout entier, vivant !
Et il a encore d'autres merveilles avec lui... De quoi aurons-nous
l'air, nous, ses aînés ? Il faut lui apprendre ce qu'il en coûte de
toujours se mettre en avant !
Et les voilà qui tirent leurs glaives,
qui coupent la tête d'Ivan-tsarévitch endormi. Hélène-la Belle se
réveille, voit son bien-aimé décapité, se met à crier, à sangloter.
Mais Piotr-tsarévitch appuya la pointe du glaive sur son cœur : Tu es
entre nos mains, lui dit-il. Nous allons te ramener chez le tsar notre
père et tu diras que c'est nous qui t'avons conquise. Toi, et le cheval
à la crinière d'or, et l'oiseau de Feu. Fais serment de parler ainsi,
sinon je te tue ! Hélène-la Belle avait peur de mourir, elle jura tout
ce que les autres voulaient. Alors les deux frères tirèrent au sort
pour savoir qui l'aurait. C'est à Piotr-tsarévitch qu'elle échut et
Vassili-tsarévitch eut le cheval à la crinière d'or pour sa part. Et
emportant l'oiseau de Feu, tous trois prirent le chemin du palais du
tsar Démian.
Ivan-tsarévitch gisait mort dans la plaine et, déjà,
les corbeaux tournaient autour de lui. C'est alors que le loup gris
sortit des bois et, tapi dans l'herbe, guetta les corbeaux. Quand un
corbeau avec ses petits corbillats se posa sur le corps du tsarévitch,
le loup bondit et saisit un corbillat. Le père corbeau le supplia de
lâcher son petit. Le loup répondit :
- Ton corbillat, je le
laisserai partir. Mais, avant, il faut que tu voles par delà vingt-neuf
pays, dans le trentième royaume et que tu m'en rapportes une fiole
d'eau vive et une fiole d'eau morte. Jusqu'à ton retour, ton petit
restera avec moi.
Le corbeau partit à tire-d'aile. On ne sait au
bout de combien de jours, on ignore au bout de combien de temps il
revint avec les deux fioles pleines. Le loup prit alors le corbillat et
le déchira en deux. Puis il rassembla les deux moitiés et les aspergea
d'eau morte - le corps de l'oiseau se ressouda. Le loup l'aspergea
d'eau vive - le corbillat s'ébroua et s'envola. Le loup gris remit la
tête d'Ivan-tsarévitch sur ses épaules et l'aspergea d'eau morte. Le
corps se ressouda aussitôt. Il l'aspergea d'eau vive et Ivan-tsarévitch
bâilla, s'étira et dit:
- Oh, que j'ai dormi longtemps !
- Tu dis
vrai, Ivan-tsarévitch ! Et sans moi tu dormirais encore. Sache que tes
frères t'ont tué pour s'emparer d'Hélène-la Belle, du cheval à la
crinière d'or, de l'oiseau de Feu. Monte vite sur mon dos, je vais te
mener chez ton père. Parce que, aujourd'hui même, ton frère
Piotr-tsarévitch doit se marier avec Hélène-la Belle !
Ivan-tsarévitch
monta sur son dos et le loup gris l'emporta comme le vent jusqu'aux
portes de la capitale du tsar Démian. Arrivés là, le loup gris dit :
- A présent, Ivan-tsarévitch, disons-nous adieu à tout jamais. Va vite, dépêche-toi de rentrer à la maison !
Et
le loup gris disparut. Ivan-tsarévitch rentra dans la ville. Il vit les
maisons de feuillages ornées, les rues où les oriflammes flottaient,
les gens en habits de fête, toute la cité en liesse. Comme il demandait
le pourquoi de ces réjouissances, on lui répondit :
- Aujourd'hui le
fils aîné du tsar épouse la princesse Hélène-la Belle ! Ivan-tsarévitch
pressa le pas. Aux abords du palais, un garde le reconnut et courut en
hâte annoncer l'heureuse nouvelle au tsar son père. Mais le tsarévitch
fut plus rapide que le garde. Le premier dans la salle il entra, à ses
frères félons se montra. En le voyant, Piotr-tsarévitch fut pétrifié de
stupeur, Vassili-tsarévitch manqua mourir de peur. Et pendant ce temps,
Hélène-la Belle de table se levait, vers Ivan-tsarévitch venait, par la
le prenait, devant le tsar Démian l'amenait :
- Voici celui qui m'a conquise, voici mon seul véritable promis-fiancé !
En
apprenant la vérité, le tsar Démian entra dans une grande colère et
chassa ses deux fils aînés hors de sa vue. On célébra en grande pompe
le mariage d'Ivan-tsarévitch et d'Hélène-la Belle et ils vécurent tous
sans tracas ni peines, gardant cœur en joie et maison pleine.
dans
un certain pays, dans un certain royaume vivait le tsar Démian avec ses
trois fils : Piotr, Vassili et Ivan. Ce tsar possédait un jardin comme
on n'en trouverait pas de pareil au monde, plein de fleurs rares et
d'arbres précieux. Le plus précieux de tous était un pommier qui
donnait des pommes d'or. Le tsar prenait grand soin de ce pommier, en
comptait les pommes chaque soir, les recomptait chaque matin. Et il
s'aperçut que la nuit quelqu'un saccageait son jardin : le soir une
belle pomme sur la branche mûrit, et au matin, ni vu ni connu, elle a
disparu ! Les gardiens n'y pouvaient rien et le tsar en perdait le
boire et le manger, la paix et le sommeil. Un jour, il appela ses fils :
-
Ça ne peut plus durer ! A celui de vous qui découvrira et prendra notre
voleur je laisserai la moitié du royaume de mon vivant et, à ma mort,
il l'aura tout entier. Les fils ont juré d'attraper le voleur et c'est
Piotr-tsarévitch qui le premier monta-lagarde. Il fit le tour du
jardin, se coucha sur le gazon, tomba dans un sommeil profond. Quand il
se réveilla, plusieurs pommes d'or manquaient.
Dès son réveil, le tsar appela Piotr:
- M'apportes-tu une bonne nouvelle, fils ? As-tu vu le voleur ?
- Non, père ! Et pourtant, j'ai veillé toute la nuit, fouillé les taillis. Je me demande où ces pommes sont passées !
La nuit suivante, ce fut le tour de Vassili. Il regarda sous les
buissons, s'assit sur le gazon, tomba dans un sommeil profond. Au
matin, d'autres pommes d'or manquaient.
- Alors, fils, as-tu vu le voleur ? - lui demanda le tsar.
- Non, père ! J'ai guetté de mon mieux, n'ai pas fermé les yeux, n'ai vu personne. Je n'y comprends rien !
La nuit d'après, Ivan-tsarévitch prit la garde. De peur de s'endormir,
il marchait sans arrêt; si le sommeil venait, si la fatigue le prenait,
il se débarbouillait avec la rosée, reprenait sa veillée. Sur les
minuit, il aperçut une grande lueur qui s'approchait du jardin et,
bientôt, on y vit clair comme en plein jour : l'oiseau de Feu, perché
sur le pommier, picorait les pommes d'or. Ivan-tsarévitch se glissa en
catimini, saisit l'oiseau par la queue. Mais l'oiseau de Feu se
débattit si bien qu'il s'échappa, ne laissant qu'une plume dans la main
du tsarévitch.
Au matin;
Ivan-tsarévitch raconta à son père quel voleur saccageait leur jardin
et lui montra la plume de l'oiseau de Feu. Le tsar se réjouit, retrouva
sommeil et appétit, d'autant plus que l'oiseau ne revint plus voler ses
pommes d'or. Mais à regarder la plume, l'oiseau de Feu tout entier lui
faisait envie, le tsar y pensait jour et nuit. Et il finit par appeler
ses fils :
- Pourquoi n'iriez-vous pas courir le monde, chercher cet
oiseau de Feu ? Autrement, un de ces jours, il reviendra voler nos
pommes !
Les deux aînés ont obéi. Ils ont sellé leurs coursiers
rapides, revêtu leurs armures solides et sont partis à l'aventure.
Mais, vu son jeune âge, le tsar garda près de lui Ivan-tsarévitch.
Celui-ci en fut tellement marri, il supplia tant son père que le tsar
finit par le laisser partir à son tour.
Un conte est vite dit, les
choses se font plus lentement. Ivan-tsarévitch chevaucha longtemps et
arriva à une croisée de chemins. Là, sur une borne de pierre, il était
écrit : «Celui qui ira tout droit, aura froid et faim; celui qui
prendra à droite, restera sain et sauf, mais perdra son cheval; et
celui qui ira à gauche sera tué, mais son cheval vivra.» Réflexion
faite, Ivan-tsarévitch prit le chemin de droite pour ne point perdre la
vie. Il chemina ainsi trois jours durant et parvint à une grande et
sombre forêt. Soudain, un loup gris bondit à sa rencontre. Le
tsarévitch n'eut même pas le temps de dégainer son glaive, que le loup
égorgeait son cheval et disparaissait dans les fourrés. Que faire sans
cheval? Ivan-tsarévitch poursuivit sa route à pied, mais au bout de
trois jours il n'en pouvait plus de faim et de fatigue. Accablé, il
s'était laissé tomber sur une souche quand un grand loup gris sortit
des bois :
- Te voilà bien triste, Ivan-tsarévitch, - dit le loup.- Pourquoi as-tu les mains lasses, la tête basse, l'échiné courbée ?
- Comment ne pas me désoler ? Que ferai-je sans mon cheval ?
- C'est toi qui as choisi ce chemin, de quoi te plains-tu? Mais j'ai pitié de toi. Dis-moi où tu vas, ce que tu cherches ?
- Le tsar Démian, mon père, m'a envoyé chercher l'oiseau de Feu qui volait les pommes d'or de son jardin.
-
Mais sur ton cheval tu n'y serais jamais arrivé ! Moi seul je sais où
niche l'oiseau de Feu, moi seul peux t'aider à le dénicher. Et en
échange de ta monture, je vais te servir fidèlement, en toute droiture
! Monte sur mon dos et agrippe-toi bien. Ivan-tsarévitch obéit et le
loup gris fila comme le vent. Le loup court, d'un bond passe les monts,
d'une foulée franchit les vallées, des pattes devorent l'espace, de la
queue efface la trace. Le tsarévitch n'a qu'à se cramponner ! Devant un grand mur blanc le loup s'arrêta et dit :
-
Escalade ce mur. Derrière il y a un jardin, dans ce jardin une cage
d'or, dans la cage l'oiseau de Feu. La garde dort. Prends l'oiseau mais
ne touche pas à la cage, sinon un malheur t'arrivera !
Ivan-tsarévitch
se glissa dans le jardin et vat l'oiseau de Feu dans sa cage. Il print
l'oiseau et allait partir quand il se dit : «Comment emporter l'oiseau
sans cage ? Je ne peux pas le mettre dans ma poche, quand même ! Et
puis la cage est belle, toute ornée de pierreries...» II oublia ce que
le loup avait dit et saisit la cage. Aussitôt ce ne fut que carillons
et sonneries: de la cage d'or des fils secrets partaient, avec grelots
et clochettes, crécelles et claquettes. Les gardiens se sont réveillés,
d'Ivan-tsarévitch se sont emparés, devant leur tsar Afrone l'ont amené.
- Qui es-tu ? cria le tsar très en colère. De quelle terre native, de quel père le fils ?
-
Je m'appelle Ivan-tsarévitch et le tsar Démian est mon père. Ton oiseau
de Feu s'est fait coutume de venir grappiller nos pommes d'or. Alors
mon père m'a envoyé le chercher, l'attraper.
Le tsar Afrone hocha la tête avec reproche :
-
Ah, Ivan-tsarévitch ! Tu serais venu me trouver honnêtement que je te
l'aurais donné, mon oiseau de Feu, ou bien je l'aurais échangé contre
autre chose. Alors que maintenant le monde entier va savoir
qu'Ivan-tsarévitch n'est qu'un voleur!... Enfin, passe pour cette fois.
Écoute, si tu me rends service, je te pardonnerai et te donnerai même
l'oiseau de Feu. Mais avant, tu vas aller par-delà vingt-neuf terres,
dans le trentième royaume, chez le tsar Koussman et me ramener son
cheval à la crinière d'or. Ivan-tsarévitch, tout penaud, alla retrouver
le loup gris et lui dit ses malheurs. Le loup n'était pas content !
- Pourquoi ne m'as-tu pas écouté, tsarévitch ? Pourquoi as-tu pris la cage ? Je t'avais pourtant dit de ne pas y toucher.
- Pardonne-moi, s'il te plaît ! Je suis en faute, c'est vrai.
- Bon, bon, n'en parlons plus ! Monte sur mon dos et cramponne-toi bien. On va aller chez le tsar Koussman.
Ivan-tsarévitch monta sur le dos du loup qui partit comme le vent.
Le loup gris court, d'un bond passe les monts, d'une foulée franchit
les vallées, des pattes devorent l'espace, de la queue efface la trace.
En peu de temps ils arrivèrent chez le tsar Koussman, devant ses
écuries de pierre blanche. Le loup dit au tsarévitch :
- Les
gardiens sont endormis. Va chercher le cheval à la crinière d'or mais
ne touche pas à sa bride, sinon un autre malheur t'arrivera !
Ivan-tsarévitch se glissa dans l'écurie, prit le cheval par sa crinière
d'or et allait partir quand il vit une bride d'or pendue au mur et se
dit : «Comment mener un cheval sans bride ? Et celle-là est si belle
!...» Mais dès qu'il la toucha, ce ne fut que carillons et sonnailles.
La garde se réveilla, d'Ivan-tsarévitch s'empara, devant le tsar
Koussman l'amena. Le tsar cria, très en colère :
- Qui es-tu? De quelle terre native, de quel père le fils ? Et comment oses-tu toucher à mon cheval ?
Le tsar Démian est mon père, Ivan-tsarévitch est mon nom.
-
Ah, Ivan-tsarévitch ! Il fallait venir me trouver honnêtement, par
respect pour ton père je t'aurais donné mon cheval. Et maintenant toute
la terre saura que le tsarévitch n'est qu'un voleur de chevaux, ce sera
du joli... ! Enfin, je veux bien te pardonner et, même te faire cadeau
du cheval à la crinière d'or. Mais va d'abord à vingt-neuf terres
d'ici, dans le trentième royaume et ramène-moi la fille du tsar Dalmat,
la princesse Hélène-la Belle !
Ivan-tsarévitch, pleurant de honte, alla raconter au loup ses malheurs. Le loup lui fit d'amers reproches :
-
Pourquoi ne m'as-tu pas écouté ? Pourquoi as-tu touché à la bride ? Je
me donne du mal pour te servir et tu ne fais que tout gâcher !
- Pardonne-moi, je t'en prie ! J'ai encore fauté, c'est vrai.
- Bon, bon ! Quand le vin est tiré il faut le boire. Monte sur mon dos, on s'en va chercher la princesse Hélène-la Belle.
Et le loup gris partit comme le vent. D'un bond il passe les monts,
d'une foulée franchit les vallées, des pattes devorent l'espace, de la
queue efface la trace. En peu de temps ils arrivèrent chez le tsar
Dalmat, devant un grand jardin aux grilles d'or. Le loup dit :
- Cette fois, tsarévitch, je vais moi-même chercher la princesse ! Toi, tu vas m'attendre dans ce bois, sous le chêne vert.
Le
loup gris sauta par-dessus les grilles d'or et se tapit dans les
buissons. Vers le soir, Hélène-la Belle sortit se promener avec ses
nourrices-suivantes, ses fidèles servantes. Comme elle se penchait pour
cueillir une fleur, le loup bondit, la jeta sur son dos et s'enfuit.
Sous le chêne vert il retrouva le tsarévitch :
- Monte vite, cria le loup, on va nous poursuivre !
Ivan-tsarévitch
monta sur le dos du loup, prit la princesse dans ses bras et le loup
gris fila comme le vent. Chez le tsar Dalmat, pendant ce temps, les
nourrices-suivantes, fidèles servantes, criaient et piaillaient si bien
que personne ne comprenait rien. Quand on démêla l'affaire, quand on
organisa la poursuite, le loup gris était déjà loin !
De peur,
Hélène-la-Belle s'était évanouie. En reprenant connaissance, elle vit
qu'un jeune et beau prince la tenait dans ses bras. Et à ce premier
regard, à ce premier coup d'oeil ils s'aimèrent. Si bien qu'en
approchant du royaume du tsar Koussman Ivan-tsarévitch pleurait à
chaudes larmes. Le loup lui demanda :
- Pourquoi pleures-tu, tsarévitch? Quel chagrin est le tien?
- Ah, loup gris ! J'aime Hélène-la Belle de tout mon cœur. Comment la donnerais-je au tsar Koussman ?
Le loup gris les regarda, en eut pitié. Et il dit :
-
Puisque j'ai promis de te servir fidèlement, je tiendrai parole. Je
vais me transformer en Hélène-la Belle et tu me remettras au tsar
Koussman. La princesse t'attendra dans ce bois et dès que tu auras le
cheval à la crinière d'or tu viendras la prendre. Partez tous deux, je
vous rattraperai un peu plus tard.
Le loup gris frappa le sol, se
changea en Hélène-la Belle et Ivan-tsarévitch le mena chez le tsar
Koussman. Celui-ci, tout heureux, remit au tsarévitch le cheval avec sa
bride par-dessus le marché et remercia encore pour le service rendu !
Ivan-tsarévitch s'en alla en hâte rejoindre la vraie princesse et ils
se mirent en route. Pendant ce
temps, le tsar Koussman célébrait ses noces. Sur les tables de chêne,
sur des nappes blanches on servait des mets fins, de vieux hydromels et
vins. Les invités criaient : «Vive la mariée !» Le tsar voulut
embrasser sa jeune épouse, mais au lieu de ses douces lèvres rencontra
le rude poil d'un loup ! Le tsar hurla, l'assistance s'affola.
Profitant du tumulte, le loup gris sauta par la fenêtre - et autant
chercher le vent dans les champs !
Le loup rattrapa vite Ivan-tsarévitch et lui dit :
- Monte sur mon dos, laisse le cheval à la princesse ! En arrivant au royaume du tsar Afrone, le loup demanda :
- Tu as l'air bien triste, Ivan-tsarévitch ? Qu'as-tu donc ?
-
Je songe au cheval à la crinière d'or et j'ai gros cœur de l'échanger
contre l'oiseau de Feu. Mais si je ne lui donne pas le cheval, le tsar
va me déshonorer à la ronde !
- Allons, ne te chagrine pas ! Je vais
encore t'aider. Je me changerai en cheval à la crinière d'or, c'est moi
que tu remettras au tsar Afrone. Et la princesse avec le vrai cheval
t'attendra dans ce bois.
Le loup frappa le sol, se changea en cheval
à la crinière d'or et Ivan-tsarévitch le mena chez le tsar Afrone. En
les voyant, le tsar se réjouit, au-devant du tsarévitch sortit, dans
son palais le conduisit. Il lui donna l'oiseau de Feu et sa cage
par-dessus le marché, l'invita même à rester quelque temps, mais
Ivan-tsarévitch avait hâte de rejoindre Hélène-la Belle. Il la retrouva
dans le bois et, montés tous deux sur le cheval à la crinière d'or,
tenant la cage avec l'oiseau de Feu, ils se mirent en chemin.
Pendant
ce temps, le tsar Afrone voulut essayer son cheval et s'en fut à la
chasse avec ses chasseurs, ses piqueurs, ses rabatteurs. Par les bois
ils passèrent, un renard dans son gîte forcèrent, sur ses traces
s'élancèrent. Le cheval à la crinière d'or galopa vite, distança toute
la suite. Alors le cheval buta, le tsar chuta, plongea dans la boue, la
tête la première. Et au lieu du cheval à la crinière d'or, c'est un
loup gris qui se sauva à toutes jambes ! Le temps de relever le tsar,
de le nettoyer, le loup avait disparu. Il rejoignit Ivan-tsarévitch et
le prit sur son dos. En arrivant au lieu de leur première rencontre, le
loup gris dit :
- C'est ici que j'ai égorgé ton cheval, Ivan-tsarévitch, c'est ici que je vais te quitter. Je ne suis plus ton serviteur !
Ivan-tsarévitch
par trois fois salua le loup gris jusqu'à terre, par trois fois le
remercia et lui dit adieu. Mais le loup répondit :
- Ne me dis pas adieu, tsarévitch, dis-moi à bientôt ! Dans peu de temps d'ici tu , auras encore besoin de moi.
A
part soi, Ivan-tsarévitch pensait : «Quel besoin aurai-je du loup gris
? J'ai tout ce que je désire !...» II monta avec la princesse sur le
cheval à la crinière d'or et tenant la cage de l'oiseau de Feu se mit
en route vers le royaume de son père.
Un conte se dit vite, le
chemin se fait lentement. Peu avant d'arriver chez le tsar Démian, il
fallut s'arrêter pour prendre du repos. Ivan-tsarévitch et Hélène-la
Belle à l'orée du bois s'installaient, sur l'herbe s'allongeaient, bien
vite s'endormaient. C'est alors que les deux frères aînés du tsarévitch
vinrent à passer par là. Piotr-tsarévitch et Vassili-tsarévitch s'en
retournaient chez leur père les mains vides, le cœur déçu. En voyant
Ivan-tsarévitch entre une belle princesse, un cheval à crinière d'or et
la cage d'or avec l'oiseau de Feu dedans, la rage-jalousie les prit :
-
Notre frère nous avait déjà humiliés en rapportant une plume de
l'oiseau de Feu, et voilà qu'il ramène l'oiseau tout entier, vivant !
Et il a encore d'autres merveilles avec lui... De quoi aurons-nous
l'air, nous, ses aînés ? Il faut lui apprendre ce qu'il en coûte de
toujours se mettre en avant !
Et les voilà qui tirent leurs glaives,
qui coupent la tête d'Ivan-tsarévitch endormi. Hélène-la Belle se
réveille, voit son bien-aimé décapité, se met à crier, à sangloter.
Mais Piotr-tsarévitch appuya la pointe du glaive sur son cœur : Tu es
entre nos mains, lui dit-il. Nous allons te ramener chez le tsar notre
père et tu diras que c'est nous qui t'avons conquise. Toi, et le cheval
à la crinière d'or, et l'oiseau de Feu. Fais serment de parler ainsi,
sinon je te tue ! Hélène-la Belle avait peur de mourir, elle jura tout
ce que les autres voulaient. Alors les deux frères tirèrent au sort
pour savoir qui l'aurait. C'est à Piotr-tsarévitch qu'elle échut et
Vassili-tsarévitch eut le cheval à la crinière d'or pour sa part. Et
emportant l'oiseau de Feu, tous trois prirent le chemin du palais du
tsar Démian.
Ivan-tsarévitch gisait mort dans la plaine et, déjà,
les corbeaux tournaient autour de lui. C'est alors que le loup gris
sortit des bois et, tapi dans l'herbe, guetta les corbeaux. Quand un
corbeau avec ses petits corbillats se posa sur le corps du tsarévitch,
le loup bondit et saisit un corbillat. Le père corbeau le supplia de
lâcher son petit. Le loup répondit :
- Ton corbillat, je le
laisserai partir. Mais, avant, il faut que tu voles par delà vingt-neuf
pays, dans le trentième royaume et que tu m'en rapportes une fiole
d'eau vive et une fiole d'eau morte. Jusqu'à ton retour, ton petit
restera avec moi.
Le corbeau partit à tire-d'aile. On ne sait au
bout de combien de jours, on ignore au bout de combien de temps il
revint avec les deux fioles pleines. Le loup prit alors le corbillat et
le déchira en deux. Puis il rassembla les deux moitiés et les aspergea
d'eau morte - le corps de l'oiseau se ressouda. Le loup l'aspergea
d'eau vive - le corbillat s'ébroua et s'envola. Le loup gris remit la
tête d'Ivan-tsarévitch sur ses épaules et l'aspergea d'eau morte. Le
corps se ressouda aussitôt. Il l'aspergea d'eau vive et Ivan-tsarévitch
bâilla, s'étira et dit:
- Oh, que j'ai dormi longtemps !
- Tu dis
vrai, Ivan-tsarévitch ! Et sans moi tu dormirais encore. Sache que tes
frères t'ont tué pour s'emparer d'Hélène-la Belle, du cheval à la
crinière d'or, de l'oiseau de Feu. Monte vite sur mon dos, je vais te
mener chez ton père. Parce que, aujourd'hui même, ton frère
Piotr-tsarévitch doit se marier avec Hélène-la Belle !
Ivan-tsarévitch
monta sur son dos et le loup gris l'emporta comme le vent jusqu'aux
portes de la capitale du tsar Démian. Arrivés là, le loup gris dit :
- A présent, Ivan-tsarévitch, disons-nous adieu à tout jamais. Va vite, dépêche-toi de rentrer à la maison !
Et
le loup gris disparut. Ivan-tsarévitch rentra dans la ville. Il vit les
maisons de feuillages ornées, les rues où les oriflammes flottaient,
les gens en habits de fête, toute la cité en liesse. Comme il demandait
le pourquoi de ces réjouissances, on lui répondit :
- Aujourd'hui le
fils aîné du tsar épouse la princesse Hélène-la Belle ! Ivan-tsarévitch
pressa le pas. Aux abords du palais, un garde le reconnut et courut en
hâte annoncer l'heureuse nouvelle au tsar son père. Mais le tsarévitch
fut plus rapide que le garde. Le premier dans la salle il entra, à ses
frères félons se montra. En le voyant, Piotr-tsarévitch fut pétrifié de
stupeur, Vassili-tsarévitch manqua mourir de peur. Et pendant ce temps,
Hélène-la Belle de table se levait, vers Ivan-tsarévitch venait, par la
le prenait, devant le tsar Démian l'amenait :
- Voici celui qui m'a conquise, voici mon seul véritable promis-fiancé !
En
apprenant la vérité, le tsar Démian entra dans une grande colère et
chassa ses deux fils aînés hors de sa vue. On célébra en grande pompe
le mariage d'Ivan-tsarévitch et d'Hélène-la Belle et ils vécurent tous
sans tracas ni peines, gardant cœur en joie et maison pleine.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
La fée des bois
La fée des bois
Il
était une fois, une jeune fille qui vivait seule avec sa mère dans une
pauvre ferme. Elles n'avaient que deux chèvres et chaque matin, la
fillette les emmenait dans une clairière des bois pour qu’elles y
broutent. Pour toute nourriture, la fillette n'avait qu'un morceau de
pain et pendant que ses bêtes paissaient, elle devait filer le lin pour
ne pas perdre de temps à rêver. La vie était bien difficile mais la
petite Maria était une enfant heureuse qui chantait et dansait sur le
chemin. Elle chantait toute la journée en travaillant et rapportait le
soir à sa mère un fuseau rempli de fil de lin.
Un jour, alors qu’elle était à filer et chanter une femme magnifique sortit de la forêt :
- Aimes-tu danser Maria ? lui demanda-t-elle.
- Je pourrais danser tout au long du jour !
- Viens donc avec moi et je t’apprendrai...
Les
oiseaux de la forêt se mirent alors à chanter sur les accords que
soufflait le vent dans les branches... Elles dansèrent, dansèrent,
dansèrent ; mais quand le soleil se coucha Maria réalisa que son fuseau
n’était qu’à moitié rempli...
- Es-tu malade, lui demanda sa mère ?
- Je te promets de remplir le fuseau demain...
Le lendemain, sur le chemin, elle ne dansait ni ne chantait plus.
- Aujourd’hui il n’est pas question que j’accompagne cette drôle de femme, s’était-elle promis !
Elle
fila toute la matinée, mais lorsque le soleil darda sur elle ses rayons
au zénith, la dame apparu pour l’inviter à nouveau :
- Je ne peux pas, répondit la fillette, j’ai beaucoup de travail.
- Ne t’inquiète donc pas pour ça...
Et elles dansèrent, dansèrent, dansèrent...
A la tombée du jour Maria s’effondra en larmes voyant que son fuseau n’était pas plus avancé que la veille.
Alors
la femme murmura quelques paroles et en un clignement d’œil tout fut
comme si Maria avait travaillé durant la journée toute entière.
- Tisse mais jamais ne jure, lui dit-elle en tendant le fuseau. N’oublie pas, tisse mais jamais ne jure...
Le
lendemain la petite chantait et dansait à nouveau tout en cheminant
avec ses deux chèvres vers la clairière. A midi la femme vint et les
oiseaux chantèrent, le vent souffla les accords...
Et elles dansèrent, dansèrent, dansèrent...
Le soir, Maria reçut un petit coffret de bois.
- Ne regarde pas ce qui est à l’intérieur avant d’être rentrée chez toi...
Mais
bien sûr, en cours de route Maria ouvrit la boite et la trouva pleine
de glands de chênes. De dépit, elle en jeta une poignée sur le sol et
rentra chez elle.
Sa mère l’attendait sur le pas de la porte :
-
Où as tu trouvé le fuseau d’hier ? J’ai tissé toute la matinée mais
j’avais beau tirer sur le fil, la pelote ne désemplissait pas ! J’ai
fini par jurer et voilà que tout à coup le fuseau a disparu... Il y a
derrière ceci quelque sorcellerie !
Maria fut donc bien obligée de tout avouer à sa mère. La danse, la femme merveilleuse...
-
Tu as rencontré la fée des bois, dit sa mère. Elle vient parfois danser
avec les jeunes filles. Par contre, si elle rencontre un homme elle
l’entraîne au plus profond de la forêt et on ne le revoit jamais...
Maria lui montra le coffret et lorsqu’elles l’ouvrirent elles constatèrent que les glands restant étaient en or...
- Heureusement que tu n’as pas tout jeté !
Le
lendemain, la mère et la fille allèrent à l’endroit où Maria avait jeté
les glands. Mais elles ne découvrirent rien d’autre que trois nouveaux
splendides chênes qui avaient poussé là pendant la nuit. Ces trois
chênes que l’on peut toujours voir non loin de là...
Maria ne
rencontra plus jamais la fée des bois. Sa mère acheta une nouvelle
ferme et la jeune fille continua à danser et chanter tout au long des
jours.
Il
était une fois, une jeune fille qui vivait seule avec sa mère dans une
pauvre ferme. Elles n'avaient que deux chèvres et chaque matin, la
fillette les emmenait dans une clairière des bois pour qu’elles y
broutent. Pour toute nourriture, la fillette n'avait qu'un morceau de
pain et pendant que ses bêtes paissaient, elle devait filer le lin pour
ne pas perdre de temps à rêver. La vie était bien difficile mais la
petite Maria était une enfant heureuse qui chantait et dansait sur le
chemin. Elle chantait toute la journée en travaillant et rapportait le
soir à sa mère un fuseau rempli de fil de lin.
Un jour, alors qu’elle était à filer et chanter une femme magnifique sortit de la forêt :
- Aimes-tu danser Maria ? lui demanda-t-elle.
- Je pourrais danser tout au long du jour !
- Viens donc avec moi et je t’apprendrai...
Les
oiseaux de la forêt se mirent alors à chanter sur les accords que
soufflait le vent dans les branches... Elles dansèrent, dansèrent,
dansèrent ; mais quand le soleil se coucha Maria réalisa que son fuseau
n’était qu’à moitié rempli...
- Es-tu malade, lui demanda sa mère ?
- Je te promets de remplir le fuseau demain...
Le lendemain, sur le chemin, elle ne dansait ni ne chantait plus.
- Aujourd’hui il n’est pas question que j’accompagne cette drôle de femme, s’était-elle promis !
Elle
fila toute la matinée, mais lorsque le soleil darda sur elle ses rayons
au zénith, la dame apparu pour l’inviter à nouveau :
- Je ne peux pas, répondit la fillette, j’ai beaucoup de travail.
- Ne t’inquiète donc pas pour ça...
Et elles dansèrent, dansèrent, dansèrent...
A la tombée du jour Maria s’effondra en larmes voyant que son fuseau n’était pas plus avancé que la veille.
Alors
la femme murmura quelques paroles et en un clignement d’œil tout fut
comme si Maria avait travaillé durant la journée toute entière.
- Tisse mais jamais ne jure, lui dit-elle en tendant le fuseau. N’oublie pas, tisse mais jamais ne jure...
Le
lendemain la petite chantait et dansait à nouveau tout en cheminant
avec ses deux chèvres vers la clairière. A midi la femme vint et les
oiseaux chantèrent, le vent souffla les accords...
Et elles dansèrent, dansèrent, dansèrent...
Le soir, Maria reçut un petit coffret de bois.
- Ne regarde pas ce qui est à l’intérieur avant d’être rentrée chez toi...
Mais
bien sûr, en cours de route Maria ouvrit la boite et la trouva pleine
de glands de chênes. De dépit, elle en jeta une poignée sur le sol et
rentra chez elle.
Sa mère l’attendait sur le pas de la porte :
-
Où as tu trouvé le fuseau d’hier ? J’ai tissé toute la matinée mais
j’avais beau tirer sur le fil, la pelote ne désemplissait pas ! J’ai
fini par jurer et voilà que tout à coup le fuseau a disparu... Il y a
derrière ceci quelque sorcellerie !
Maria fut donc bien obligée de tout avouer à sa mère. La danse, la femme merveilleuse...
-
Tu as rencontré la fée des bois, dit sa mère. Elle vient parfois danser
avec les jeunes filles. Par contre, si elle rencontre un homme elle
l’entraîne au plus profond de la forêt et on ne le revoit jamais...
Maria lui montra le coffret et lorsqu’elles l’ouvrirent elles constatèrent que les glands restant étaient en or...
- Heureusement que tu n’as pas tout jeté !
Le
lendemain, la mère et la fille allèrent à l’endroit où Maria avait jeté
les glands. Mais elles ne découvrirent rien d’autre que trois nouveaux
splendides chênes qui avaient poussé là pendant la nuit. Ces trois
chênes que l’on peut toujours voir non loin de là...
Maria ne
rencontra plus jamais la fée des bois. Sa mère acheta une nouvelle
ferme et la jeune fille continua à danser et chanter tout au long des
jours.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
La sœur Alionouchka
La sœur Alionouchka
Il
y avait deux orphelins qui s'en allaient par les champs et les prés,
par la longue route, par la vaste terre. Leurs parents étaient morts,
les laissant tout seuls. La grande sœur Alionouchka et son petit frère
Ivanouchka sont partis courir le monde au hasard-l'aventure.
Le soleil est haut, le puits est loin, la chaleur est cruelle, la sueur ruisselle. Ivanouchka a bien soif.
- Patiente, petit frère, dit Alionouchka. On va arriver au puits.
Mais avant d'y arriver, ils voient un étang. Au bord, les vaches sont en train de paître. Ivanouchka dit :
- Alionouchka, ma sœur, je vais boire de l'eau de cet étang.
- Ne bois pas, petit frère. Tu deviendrais un petit veau.
Ivanouchka
a obéi et ils ont poursuivi leur chemin. Mais le soleil est haut, le j
est loin, la chaleur cruelle, la sueur ruisselle. Au bord de la rivière
des chevaux pais; Ivanouchka dit :
- Alionouchka, ma sœur, j'ai soif! Je vais boire dans la rivière.
- Ne bois pas, petit frère, tu deviendrais petit poulain.
Ivanouchka
a soupiré, s'est laissé emmener. Mais le soleil est haut, le puits est
li la chaleur cruelle, la sueur ruisselle. Au bord d'un lac des chèvres
broutent. Ivanouchka dit :
- Alionouchka, ma sœur, je n'y tiens plus ! Je vais boire là.
- Ne bois pas, petit frère, tu deviendrais petit chevreau.
Mais cette fois Ivanouchka n'a pas écouté sa sœur. Il a bu de l'eau du lac et aussi il est devenu un petit chevreau.
Alionouchka
s'est assise dans l'herbe à pleurer des larmes amères ; le chevreau
auto d'elle gambade, bêle. Mais pleurer n'est pas remède au malheur.
Alionouchka a noué cou du chevreau sa ceinture de soie et l'a emmené
comme ça avec elle.
Un jour le chevreau gambadait en liberté, il est entré dans les jardins du tsar.
Alionouchka voulait le rattraper et l'a suivi. Les serviteurs du tsar
l'ont vue, ils ont couru dire à leur maître qu'il y avait un chevreau
dans ses jardins et avec le chevreau une jeune fille si belle que ça ne
peut se raconter. Le tsar a voulu voir cette beauté, il a dit aux
serviteurs de lui amener la jeune fille et son chevreau. Et il se mit à
demander : qui ils sont, où il vont, d'où ils viennent ? Alionouchka ne
lui a rien caché :
- Quand nos père et mère sont morts, mon frère
Ivanouchka et moi, nous somme partis à l'aventure. Ivanouchka avait
soif, il a bu de l'eau du lac où des chèvres broutaient Et il est
devenu chevreau
Plus le tsar l'écoute, plus il la regarde. Plus il la regarde et plus il la trouve belle. bien qu'à la fin il lui dit :
- Accepte-moi pour mari ! Tu seras vêtue d'or, coiffée d'argent. Et le chèvre vivra avec nous dans le contentement et la joie.
Alionouchka
n'a pas dit non. Un tsar, ça n'attend pas après les bières-vins pou
donner un festin ! On a vite célébré la noce et les voilà vivant tous
trois ensemble, chevreau dans les jardins trottine, mange et boit avec
le tsar et la tsarine. Et ils sont tellement heureux, qu'à les voir les
braves gens se réjouissent, les méchants sont malades d'envie.
Mais
un jour que le tsar était à la chasse, une méchante sorcière est venue
trouve Alionouchka. Par des paroles trompeuses elle l'a attirée au bord
de la mer, par traîtrise elle l'a jetée à l'eau avec une pierre au cou.
Puis la sorcière en Alionouchka
s'est changée comme elle s'est vêtue-parée, dans le palais s'est
installée. Tout le monde s'y est mépris même le tsar n'a rien remarqué.
Seulement dans les jardins les fleurs se sont fanées, arbres ont séché,
l'herbe s'est flétrie. Et le chevreau qui savait la vérité ne mangeait
plu ne buvait plus, restait au bord de la mer bleue à pleurer, à se
désoler. De le voir comme ça, la sorcière écumait de rage. Et elle
s'est mise à harceler le tsar :
- Fais tuer ce chevreau ! Il m'agace, il m'insupporte, je ne veux plus le voir !
Le
tsar n'en revenait pas - sa femme qui aimait tant le chevreau, voilà
qu'elle veut sa mort?... Mais à force d'insister, la sorcière a fini
par lui arracher la permission de tuer chevreau.
Celui-ci, le pauvre ! avait tout compris. Il a demandé au tsar :
- Laisse-moi aller au bord de la mer bleue, barboter dans l'eau, laver mes petits bots.
Le tsar a permis. Et le chevreau a couru sur le rivage, il a appelé en pleurant :
Alionouchka, ma chère sœur ! Viens du fond de l'eau à mon secours !
Les grands feux ardents sont allumés,
Les grandes marmites sont préparées,
Les grands coutelas sont affûtés,
On s'apprête à me couper le cou !Mais du fond de l'eau sa sœur lui répond :Ah, Ivanouchka, frère chéri
La pierre pesante me retient au fond,
Les herbes marines entravent mes pieds,
Le serpent cruel a mangé mon cœur !
Le chevreau s'en est allé en sanglotant.Vers la mi-journée il a encore demandé au tsar :- Laisse-moi aller au bord de la mer bleue, barboter dans l'eau, laver mes petits sabots.
Le tsar a permis. Et le chevreau est retourné sur le rivage, il a appelé sa sœur en pleurant :Alionouchka, ma chère sœur !
Viens du fond de l'eau à mon secours !
Les grands feux ardents sont allumés,
Les grandes marmites sont préparées,
Les grands coutelas sont affûtés,
On s'apprête à me couper le cou !Et du fond de l'eau Alionouchka répond :Ah, Ivanouchka, frère chéri !
La pierre pesante me retient au fond,
Les herbes marines entravent mes pieds,
Le serpent cruel a mangé mon cœur !Le chevreau est revenu à la maison en pleurant. Et le soir venu, il a de nouveau• demandé au tsar :- Laisse-moi aller au bord de la mer, barboter dans l'eau, laver mes sabots.
Le
tsar a permis. Mais il s'est dit en lui-même : «Pourquoi ce chevreau
court-il to le temps au bord de la mer ?» et il l'a suivi sans se faire
voir. Le chevreau s'est approché des vagues, a crié en pleurant :Alionouchka, ma chère sœur !
Viens du fond de l'eau à mon secours !
Les grands feux ardents sont allumés,
Les grandes marmites sont préparées,
Les grands coutelas sont affûtés,
On s'apprête à me couper le cou !Et le tsar a entendu une voix qui répondait du fond des eaux :Ah, Ivanouchka, frère chéri !
La pierre pesante me retient au fond,
Les herbes marines entravent mes pieds,
Le serpent cruel a mangé mon cœur !Mais le chevreau appelait encore et encore d'une voix déchirante. Et tout à coup, Alionouchka est apparue dans les vagues.
Le
tsar s'est précipité. Il a saisi Alionouchka, il l'a tirée des eaux
profondes, il a [irradié la pierre qu'elle avait au cou. Et alors, elle
lui a raconté tout ce qui s'était passé. Vous imaginez leur joie à tous
les trois ! A force de gambader, le chevreau a fait trois lis la
culbute - et à la troisième culbute il est redevenu le petit garçon
Ivanouchka. Et quand le tsar, la tsarine et le petit frère sont rentrés
à la maison, ils ont vu les jardins refleuris, l'herbe reverdie, les
fleurs épanouies.
La sorcière, le tsar l'a fait brûler sur les mêmes
feux qu'elle préparait pour le chevreau cendres ont été jetées au vent,
pour que le souvenir en soit à jamais perdu. Et le tsar avec
Alionouchka et le petit frère Ivanouchka ont vécu tout le reste de :
vie sans souci ni peine, dans la bonne entente et la joie.
Il
y avait deux orphelins qui s'en allaient par les champs et les prés,
par la longue route, par la vaste terre. Leurs parents étaient morts,
les laissant tout seuls. La grande sœur Alionouchka et son petit frère
Ivanouchka sont partis courir le monde au hasard-l'aventure.
Le soleil est haut, le puits est loin, la chaleur est cruelle, la sueur ruisselle. Ivanouchka a bien soif.
- Patiente, petit frère, dit Alionouchka. On va arriver au puits.
Mais avant d'y arriver, ils voient un étang. Au bord, les vaches sont en train de paître. Ivanouchka dit :
- Alionouchka, ma sœur, je vais boire de l'eau de cet étang.
- Ne bois pas, petit frère. Tu deviendrais un petit veau.
Ivanouchka
a obéi et ils ont poursuivi leur chemin. Mais le soleil est haut, le j
est loin, la chaleur cruelle, la sueur ruisselle. Au bord de la rivière
des chevaux pais; Ivanouchka dit :
- Alionouchka, ma sœur, j'ai soif! Je vais boire dans la rivière.
- Ne bois pas, petit frère, tu deviendrais petit poulain.
Ivanouchka
a soupiré, s'est laissé emmener. Mais le soleil est haut, le puits est
li la chaleur cruelle, la sueur ruisselle. Au bord d'un lac des chèvres
broutent. Ivanouchka dit :
- Alionouchka, ma sœur, je n'y tiens plus ! Je vais boire là.
- Ne bois pas, petit frère, tu deviendrais petit chevreau.
Mais cette fois Ivanouchka n'a pas écouté sa sœur. Il a bu de l'eau du lac et aussi il est devenu un petit chevreau.
Alionouchka
s'est assise dans l'herbe à pleurer des larmes amères ; le chevreau
auto d'elle gambade, bêle. Mais pleurer n'est pas remède au malheur.
Alionouchka a noué cou du chevreau sa ceinture de soie et l'a emmené
comme ça avec elle.
Un jour le chevreau gambadait en liberté, il est entré dans les jardins du tsar.
Alionouchka voulait le rattraper et l'a suivi. Les serviteurs du tsar
l'ont vue, ils ont couru dire à leur maître qu'il y avait un chevreau
dans ses jardins et avec le chevreau une jeune fille si belle que ça ne
peut se raconter. Le tsar a voulu voir cette beauté, il a dit aux
serviteurs de lui amener la jeune fille et son chevreau. Et il se mit à
demander : qui ils sont, où il vont, d'où ils viennent ? Alionouchka ne
lui a rien caché :
- Quand nos père et mère sont morts, mon frère
Ivanouchka et moi, nous somme partis à l'aventure. Ivanouchka avait
soif, il a bu de l'eau du lac où des chèvres broutaient Et il est
devenu chevreau
Plus le tsar l'écoute, plus il la regarde. Plus il la regarde et plus il la trouve belle. bien qu'à la fin il lui dit :
- Accepte-moi pour mari ! Tu seras vêtue d'or, coiffée d'argent. Et le chèvre vivra avec nous dans le contentement et la joie.
Alionouchka
n'a pas dit non. Un tsar, ça n'attend pas après les bières-vins pou
donner un festin ! On a vite célébré la noce et les voilà vivant tous
trois ensemble, chevreau dans les jardins trottine, mange et boit avec
le tsar et la tsarine. Et ils sont tellement heureux, qu'à les voir les
braves gens se réjouissent, les méchants sont malades d'envie.
Mais
un jour que le tsar était à la chasse, une méchante sorcière est venue
trouve Alionouchka. Par des paroles trompeuses elle l'a attirée au bord
de la mer, par traîtrise elle l'a jetée à l'eau avec une pierre au cou.
Puis la sorcière en Alionouchka
s'est changée comme elle s'est vêtue-parée, dans le palais s'est
installée. Tout le monde s'y est mépris même le tsar n'a rien remarqué.
Seulement dans les jardins les fleurs se sont fanées, arbres ont séché,
l'herbe s'est flétrie. Et le chevreau qui savait la vérité ne mangeait
plu ne buvait plus, restait au bord de la mer bleue à pleurer, à se
désoler. De le voir comme ça, la sorcière écumait de rage. Et elle
s'est mise à harceler le tsar :
- Fais tuer ce chevreau ! Il m'agace, il m'insupporte, je ne veux plus le voir !
Le
tsar n'en revenait pas - sa femme qui aimait tant le chevreau, voilà
qu'elle veut sa mort?... Mais à force d'insister, la sorcière a fini
par lui arracher la permission de tuer chevreau.
Celui-ci, le pauvre ! avait tout compris. Il a demandé au tsar :
- Laisse-moi aller au bord de la mer bleue, barboter dans l'eau, laver mes petits bots.
Le tsar a permis. Et le chevreau a couru sur le rivage, il a appelé en pleurant :
Alionouchka, ma chère sœur ! Viens du fond de l'eau à mon secours !
Les grands feux ardents sont allumés,
Les grandes marmites sont préparées,
Les grands coutelas sont affûtés,
On s'apprête à me couper le cou !Mais du fond de l'eau sa sœur lui répond :Ah, Ivanouchka, frère chéri
La pierre pesante me retient au fond,
Les herbes marines entravent mes pieds,
Le serpent cruel a mangé mon cœur !
Le chevreau s'en est allé en sanglotant.Vers la mi-journée il a encore demandé au tsar :- Laisse-moi aller au bord de la mer bleue, barboter dans l'eau, laver mes petits sabots.
Le tsar a permis. Et le chevreau est retourné sur le rivage, il a appelé sa sœur en pleurant :Alionouchka, ma chère sœur !
Viens du fond de l'eau à mon secours !
Les grands feux ardents sont allumés,
Les grandes marmites sont préparées,
Les grands coutelas sont affûtés,
On s'apprête à me couper le cou !Et du fond de l'eau Alionouchka répond :Ah, Ivanouchka, frère chéri !
La pierre pesante me retient au fond,
Les herbes marines entravent mes pieds,
Le serpent cruel a mangé mon cœur !Le chevreau est revenu à la maison en pleurant. Et le soir venu, il a de nouveau• demandé au tsar :- Laisse-moi aller au bord de la mer, barboter dans l'eau, laver mes sabots.
Le
tsar a permis. Mais il s'est dit en lui-même : «Pourquoi ce chevreau
court-il to le temps au bord de la mer ?» et il l'a suivi sans se faire
voir. Le chevreau s'est approché des vagues, a crié en pleurant :Alionouchka, ma chère sœur !
Viens du fond de l'eau à mon secours !
Les grands feux ardents sont allumés,
Les grandes marmites sont préparées,
Les grands coutelas sont affûtés,
On s'apprête à me couper le cou !Et le tsar a entendu une voix qui répondait du fond des eaux :Ah, Ivanouchka, frère chéri !
La pierre pesante me retient au fond,
Les herbes marines entravent mes pieds,
Le serpent cruel a mangé mon cœur !Mais le chevreau appelait encore et encore d'une voix déchirante. Et tout à coup, Alionouchka est apparue dans les vagues.
Le
tsar s'est précipité. Il a saisi Alionouchka, il l'a tirée des eaux
profondes, il a [irradié la pierre qu'elle avait au cou. Et alors, elle
lui a raconté tout ce qui s'était passé. Vous imaginez leur joie à tous
les trois ! A force de gambader, le chevreau a fait trois lis la
culbute - et à la troisième culbute il est redevenu le petit garçon
Ivanouchka. Et quand le tsar, la tsarine et le petit frère sont rentrés
à la maison, ils ont vu les jardins refleuris, l'herbe reverdie, les
fleurs épanouies.
La sorcière, le tsar l'a fait brûler sur les mêmes
feux qu'elle préparait pour le chevreau cendres ont été jetées au vent,
pour que le souvenir en soit à jamais perdu. Et le tsar avec
Alionouchka et le petit frère Ivanouchka ont vécu tout le reste de :
vie sans souci ni peine, dans la bonne entente et la joie.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
Le père Gel
Le père Gel
Ce
sont choses qui arrivent dans l'existence - ce vieil homme-là vivait
avec sa seconde épouse. Lui avait sa fille, elle - la sienne.
Vivre
avec la marâtre, chacun sait ce que c'est : tu te mets en quatre pour
lui agréer - battue, tu flanches une petite fois - battue tout pareil.
Tandis que sa fille à elle, on lui passe tout, et quoi qu'elle fasse on
lui tapote la tête, on lui donne du "bien, ma mignonne"...
La
belle-fille n'arrêtait pas : donner à boire et à manger aux bêtes,
apporter le bois et l'eau, chauffer le poêle, balayer l'isba - et tout
cela bien avant le jour ! Rien à faire, jamais la mégère n'était
satisfaite, ce n'était pas ça, c'était mauvais.
Le vent, il lui
arrive de faire du vacarme, puis il s'apaise. La vieille mégère, non.
Quand elle s'en prend à quelqu'un, c'est pour longtemps. Tellement qu'à
la fin elle se met en tête de rayer la belle-fille du nombre des
vivants !
- Emmène-la, crie-t-elle à son vieux, conduis-la où ça
te chante, je ne veux plus la voir ! Tiens, dans la forêt conduis-la,
puisqu'il gèle à pierre fendre!
Le vieil homme en est tout marri,
il verse d'amères larmes, mais que peut-il faire là-contre ? Cette
femme-là est un démon. Il attelle donc le cheval.
- Monte dans le traîneau, ma fille chérie...
Arrivé dans la forêt, il la dépose dans la neige, au pied d'un grand sapin, et l'abandonne à son sort.
Assise
sous le sapin, la jeune fille grelotte et frissonne. Et soudain elle
entend comment le père Gel fait craquer les arbres alentour, comment il
passe de sapin en sapin en sautillant, en crachotant, il est bientôt
dans le sapin sous lequel la jeune fille est assise, de là-haut il
s'enquiert
- As-tu chaud, ma fille?
- J'ai chaud, petit-père Gel, j'ai chaud, merci.
Le père Gel descend alors de quelques branches, en crépitant, en crachotant plus fort :
- As-tu chaud, ma fille? As-tu chaud, ma belle?
- J'ai chaud, petit-père Gel, j'ai très chaud, merci.
Il descend encore plus bas, le père Gel, en crépitant, en crachotant de plus belle :
- As-tu chaud, ma fille ? As-tu chaud, ma belle ? As-tu chaud, ma mignonne ?
Déjà la jeune fille sent son corps s'engourdir, elle remue la langue avec peine :
- Hou-là, comme j'ai chaud, gentil père Gel...
Alors le père Gel a pitié de la pauvrette, alors il l'emmitoufle de ses douces fourrures, il la réchauffe de ses duvets épais.
A la maison, la marâtre prend déjà ses dispositions pour les funérailles. Et tout en cuisant les crêpes, elle crie au mari :
- Va, vieil hibou, ramène ta fille, nous lallons conduire au cimetière maintenant!
Le
vieux reprend le chemin de la forêt, et quand il est rendu au grand
sapin, que voit-il ? Sa fille est là, indemne et bien vivante, ses yeux
pétillent de bonheur, ses joues sont rosés, elle porte une fourrure de
zibeline, et de l'or, et de l'argent, et il y a devant elle un plein
coffre de riches présents !
Grande est la joie du vieil homme ; il
charge la marchandise dans le traîneau, il y installe sa chère fille et
il reprend le chemin de la maison.
La mégère, là-bas, est toujours à ses crêpes. Et sous la table, il y a le chiot de la maison qui clabaude :
-
Vouah, vouah! La fille du vieux revient toute d'or et d'argent parée,
celle de la vieille ne trouve pas à se marier... La vieille lui jette
une crêpe :
- Aboie moi comme il faut ! Dis : "La fille de la vieille trouvera riche mari, celle du vieux, on en ramène les abattis..."
Le cabot mange sa crêpe et recommence :
- Vouah, vouah! La fille du vieux revient toute d'or et d'argent parée, celle de la vieille ne trouve pas à se marier...
La vieille a beau, une fois, lui jeter sa crêpe, une autre fois, la battre, la bestiole continue sa chanson.
Et
puis, grince le portail, s'ouvre la porte, et entre dans l'isba la
belle-fille parée d'or et d'argent, elle en resplendit toute ! Les
ouvriers à sa suite apportent un coffre pesant, haut comme ça ! Les
bras lui en tombent, à la vieille, à ce spectacle.
- Attelle vivement un autre cheval, vieil hibou! Conduis ma fille, conduis-la dans la forêt et laisse-la au même endroit !
Le
vieux installe sa belle-fille dans le traîneau, il la dépose dans la
neige au même endroit, au pied du grand sapin, et il s'en retourne chez
lui.
Assise dans la congère, claque des dents la fille de la mégère :
Et
déjà le père Gel crépite dans le sous-bois, déjà il va sautillant
d'arbre en arbre, crachotant et de l'œil la fille de la vieille
surveillant :
- As-tu chaud, ma fille ? s'enquiert-il. Et la fille de répondre:
-
Hou, je suis transie ! Vas-tu cesser de grincer et crépiter comme ça,
père Gel ! Le père Gel descend de quelques branches, il crépite, il
crachote plus fort
- As-tu chaud, ma fille ? As-tu chaud, ma belle ?
- Hou-là, mes mains, mes pieds sont des glaçons ! Veux-tu bien t en aller, père Gel !
Mais le père Gel descend toujours plus bas, il sévit de plus belle, il crépite et crache encore plus fort
- As-tu chaud, ma fille ? As-tu chaud, ma belle ?
- Hou-là-là, tu m'as complètement glacée! Mais file donc loin d'ici, je te dis, disparais, maudit père Gel !
Là il se fâche pour de bon, le père Gel, et il souffle un tel froid que la fille de la vieille en passe de vie à trépas.
De grand matin, la vieille bouscule son vieux :
- Attelle donc vite, vieil hibou, va chercher la fille, ramène-la moi toute parée d'or et d'argent !
D y va, le vieux. Or sous la table, le cabot recommence son antienne :
- Vouah, vouah ! A la fille du vieux pléthore de maris, à celle de la vieille un sac pour ses abattis!
La vieille, de lui jeter tout un gâteau au chou :
- Est-ce que tu m'aboies comme il faut ? Dis : "La fille de la vieille revient toute d'or et d'argent parée..."
Mais le cabot ne veut rien savoir :
- Vouah, vouah ! répète-t-il. La fille de la vieille dans un sac avec ses abattis est ramenée...
Grince le portail, la vieille y court, accueillir sa fille adorée. Elle soulève la bâche : dans le traîneau sa fille est morte.
Il faut l’entendre donner de la voix, la vieille, mais c’est trop tard Ce
sont choses qui arrivent dans l'existence - ce vieil homme-là vivait
avec sa seconde épouse. Lui avait sa fille, elle - la sienne. Vivre
avec la marâtre, chacun sait ce que c'est : tu te mets en quatre pour
lui agréer - battue, tu flanches une petite fois - battue tout pareil.
Tandis que sa fille à elle, on lui passe tout, et quoi qu'elle fasse on
lui tapote la tête, on lui donne du "bien, ma mignonne"... La
belle-fille n'arrêtait pas : donner à boire et à manger aux bêtes,
apporter le bois et l'eau, chauffer le poêle, balayer l'isba - et tout
cela bien avant le jour ! Rien à faire, jamais la mégère n'était
satisfaite, ce n'était pas ça, c'était mauvais. Le vent, il lui arrive
de faire du vacarme, puis il s'apaise. La vieille mégère, non. Quand
elle s'en prend à quelqu'un, c'est pour longtemps. Tellement qu'à la
fin elle se met en tête de rayer la belle-fille du nombre des vivants !
- Emmène-la, crie-t-elle à son vieux, conduis-la où ça te chante, je ne
veux plus la voir ! Tiens, dans la forêt conduis-la, puisqu'il gèle à
pierre fendre! Le vieil homme en est tout marri, il verse d'amères
larmes, mais que peut-il faire là-contre ? Cette femme-là est un démon.
Il attelle donc le cheval. - Monte dans le traîneau, ma fille chérie...
Arrivé dans la forêt, il la dépose dans la neige, au pied d'un grand
sapin, et l'abandonne à son sort. Assise sous le sapin, la jeune fille
grelotte et frissonne. Et soudain elle entend comment le père Gel fait
craquer les arbres alentour, comment il passe de sapin en sapin en
sautillant, en crachotant, il est bientôt dans le sapin sous lequel la
jeune fille est assise, de là-haut il s'enquiert - As-tu chaud, ma
fille? - J'ai chaud, petit-père Gel, j'ai chaud, merci. Le père Gel
descend alors de quelques branches, en crépitant, en crachotant plus
fort : - As-tu chaud, ma fille? As-tu chaud, ma belle? - J'ai chaud,
petit-père Gel, j'ai très chaud, merci. Il descend encore plus bas, le
père Gel, en crépitant, en crachotant de plus belle : - As-tu chaud, ma
fille ? As-tu chaud, ma belle ? As-tu chaud, ma mignonne ? Déjà la
jeune fille sent son corps s'engourdir, elle remue la langue avec peine
: - Hou-là, comme j'ai chaud, gentil père Gel... Alors le père Gel a
pitié de la pauvrette, alors il l'emmitoufle de ses douces fourrures,
il la réchauffe de ses duvets épais. A la maison, la marâtre prend déjà
ses dispositions pour les funérailles. Et tout en cuisant les crêpes,
elle crie au mari : - Va, vieil hibou, ramène ta fille, nous lallons
conduire au cimetière maintenant! Le vieux reprend le chemin de la
forêt, et quand il est rendu au grand sapin, que voit-il ? Sa fille est
là, indemne et bien vivante, ses yeux pétillent de bonheur, ses joues
sont rosés, elle porte une fourrure de zibeline, et de l'or, et de
l'argent, et il y a devant elle un plein coffre de riches présents !
Grande est la joie du vieil homme ; il charge la marchandise dans le
traîneau, il y installe sa chère fille et il reprend le chemin de la
maison. La mégère, là-bas, est toujours à ses crêpes. Et sous la table,
il y a le chiot de la maison qui clabaude : - Vouah, vouah! La fille du
vieux revient toute d'or et d'argent parée, celle de la vieille ne
trouve pas à se marier... La vieille lui jette une crêpe : - Aboie moi
comme il faut ! Dis : "La fille de la vieille trouvera riche mari,
celle du vieux, on en ramène les abattis..." Le cabot mange sa crêpe et
recommence : - Vouah, vouah! La fille du vieux revient toute d'or et
d'argent parée, celle de la vieille ne trouve pas à se marier... La
vieille a beau, une fois, lui jeter sa crêpe, une autre fois, la
battre, la bestiole continue sa chanson. Et puis, grince le portail,
s'ouvre la porte, et entre dans l'isba la belle-fille parée d'or et
d'argent, elle en resplendit toute ! Les ouvriers à sa suite apportent
un coffre pesant, haut comme ça ! Les bras lui en tombent, à la
vieille, à ce spectacle. - Attelle vivement un autre cheval, vieil
hibou! Conduis ma fille, conduis-la dans la forêt et laisse-la au même
endroit ! Le vieux installe sa belle-fille dans le traîneau, il la
dépose dans la neige au même endroit, au pied du grand sapin, et il
s'en retourne chez lui. Assise dans la congère, claque des dents la
fille de la mégère : Et déjà le père Gel crépite dans le sous-bois,
déjà il va sautillant d'arbre en arbre, crachotant et de l'œil la fille
de la vieille surveillant : - As-tu chaud, ma fille ? s'enquiert-il. Et
la fille de répondre: - Hou, je suis transie ! Vas-tu cesser de grincer
et crépiter comme ça, père Gel ! Le père Gel descend de quelques
branches, il crépite, il crachote plus fort - As-tu chaud, ma fille ?
As-tu chaud, ma belle ? - Hou-là, mes mains, mes pieds sont des glaçons
! Veux-tu bien t en aller, père Gel ! Mais le père Gel descend toujours
plus bas, il sévit de plus belle, il crépite et crache encore plus fort
- As-tu chaud, ma fille ? As-tu chaud, ma belle ? - Hou-là-là, tu m'as
complètement glacée! Mais file donc loin d'ici, je te dis, disparais,
maudit père Gel ! Là il se fâche pour de bon, le père Gel, et il
souffle un tel froid que la fille de la vieille en passe de vie à
trépas. De grand matin, la vieille bouscule son vieux : - Attelle donc
vite, vieil hibou, va chercher la fille, ramène-la moi toute parée d'or
et d'argent ! D y va, le vieux. Or sous la table, le cabot recommence
son antienne : - Vouah, vouah ! A la fille du vieux pléthore de maris,
à celle de la vieille un sac pour ses abattis! La vieille, de lui jeter
tout un gâteau au chou : - Est-ce que tu m'aboies comme il faut ? Dis :
"La fille de la vieille revient toute d'or et d'argent parée..." Mais
le cabot ne veut rien savoir : - Vouah, vouah ! répète-t-il. La fille
de la vieille dans un sac avec ses abattis est ramenée... Grince le
portail, la vieille y court, accueillir sa fille adorée. Elle soulève
la bâche : dans le traîneau sa fille est morte. Il faut l’entendre
donner de la voix, la vieille, mais c’est trop tard
Ce
sont choses qui arrivent dans l'existence - ce vieil homme-là vivait
avec sa seconde épouse. Lui avait sa fille, elle - la sienne.
Vivre
avec la marâtre, chacun sait ce que c'est : tu te mets en quatre pour
lui agréer - battue, tu flanches une petite fois - battue tout pareil.
Tandis que sa fille à elle, on lui passe tout, et quoi qu'elle fasse on
lui tapote la tête, on lui donne du "bien, ma mignonne"...
La
belle-fille n'arrêtait pas : donner à boire et à manger aux bêtes,
apporter le bois et l'eau, chauffer le poêle, balayer l'isba - et tout
cela bien avant le jour ! Rien à faire, jamais la mégère n'était
satisfaite, ce n'était pas ça, c'était mauvais.
Le vent, il lui
arrive de faire du vacarme, puis il s'apaise. La vieille mégère, non.
Quand elle s'en prend à quelqu'un, c'est pour longtemps. Tellement qu'à
la fin elle se met en tête de rayer la belle-fille du nombre des
vivants !
- Emmène-la, crie-t-elle à son vieux, conduis-la où ça
te chante, je ne veux plus la voir ! Tiens, dans la forêt conduis-la,
puisqu'il gèle à pierre fendre!
Le vieil homme en est tout marri,
il verse d'amères larmes, mais que peut-il faire là-contre ? Cette
femme-là est un démon. Il attelle donc le cheval.
- Monte dans le traîneau, ma fille chérie...
Arrivé dans la forêt, il la dépose dans la neige, au pied d'un grand sapin, et l'abandonne à son sort.
Assise
sous le sapin, la jeune fille grelotte et frissonne. Et soudain elle
entend comment le père Gel fait craquer les arbres alentour, comment il
passe de sapin en sapin en sautillant, en crachotant, il est bientôt
dans le sapin sous lequel la jeune fille est assise, de là-haut il
s'enquiert
- As-tu chaud, ma fille?
- J'ai chaud, petit-père Gel, j'ai chaud, merci.
Le père Gel descend alors de quelques branches, en crépitant, en crachotant plus fort :
- As-tu chaud, ma fille? As-tu chaud, ma belle?
- J'ai chaud, petit-père Gel, j'ai très chaud, merci.
Il descend encore plus bas, le père Gel, en crépitant, en crachotant de plus belle :
- As-tu chaud, ma fille ? As-tu chaud, ma belle ? As-tu chaud, ma mignonne ?
Déjà la jeune fille sent son corps s'engourdir, elle remue la langue avec peine :
- Hou-là, comme j'ai chaud, gentil père Gel...
Alors le père Gel a pitié de la pauvrette, alors il l'emmitoufle de ses douces fourrures, il la réchauffe de ses duvets épais.
A la maison, la marâtre prend déjà ses dispositions pour les funérailles. Et tout en cuisant les crêpes, elle crie au mari :
- Va, vieil hibou, ramène ta fille, nous lallons conduire au cimetière maintenant!
Le
vieux reprend le chemin de la forêt, et quand il est rendu au grand
sapin, que voit-il ? Sa fille est là, indemne et bien vivante, ses yeux
pétillent de bonheur, ses joues sont rosés, elle porte une fourrure de
zibeline, et de l'or, et de l'argent, et il y a devant elle un plein
coffre de riches présents !
Grande est la joie du vieil homme ; il
charge la marchandise dans le traîneau, il y installe sa chère fille et
il reprend le chemin de la maison.
La mégère, là-bas, est toujours à ses crêpes. Et sous la table, il y a le chiot de la maison qui clabaude :
-
Vouah, vouah! La fille du vieux revient toute d'or et d'argent parée,
celle de la vieille ne trouve pas à se marier... La vieille lui jette
une crêpe :
- Aboie moi comme il faut ! Dis : "La fille de la vieille trouvera riche mari, celle du vieux, on en ramène les abattis..."
Le cabot mange sa crêpe et recommence :
- Vouah, vouah! La fille du vieux revient toute d'or et d'argent parée, celle de la vieille ne trouve pas à se marier...
La vieille a beau, une fois, lui jeter sa crêpe, une autre fois, la battre, la bestiole continue sa chanson.
Et
puis, grince le portail, s'ouvre la porte, et entre dans l'isba la
belle-fille parée d'or et d'argent, elle en resplendit toute ! Les
ouvriers à sa suite apportent un coffre pesant, haut comme ça ! Les
bras lui en tombent, à la vieille, à ce spectacle.
- Attelle vivement un autre cheval, vieil hibou! Conduis ma fille, conduis-la dans la forêt et laisse-la au même endroit !
Le
vieux installe sa belle-fille dans le traîneau, il la dépose dans la
neige au même endroit, au pied du grand sapin, et il s'en retourne chez
lui.
Assise dans la congère, claque des dents la fille de la mégère :
Et
déjà le père Gel crépite dans le sous-bois, déjà il va sautillant
d'arbre en arbre, crachotant et de l'œil la fille de la vieille
surveillant :
- As-tu chaud, ma fille ? s'enquiert-il. Et la fille de répondre:
-
Hou, je suis transie ! Vas-tu cesser de grincer et crépiter comme ça,
père Gel ! Le père Gel descend de quelques branches, il crépite, il
crachote plus fort
- As-tu chaud, ma fille ? As-tu chaud, ma belle ?
- Hou-là, mes mains, mes pieds sont des glaçons ! Veux-tu bien t en aller, père Gel !
Mais le père Gel descend toujours plus bas, il sévit de plus belle, il crépite et crache encore plus fort
- As-tu chaud, ma fille ? As-tu chaud, ma belle ?
- Hou-là-là, tu m'as complètement glacée! Mais file donc loin d'ici, je te dis, disparais, maudit père Gel !
Là il se fâche pour de bon, le père Gel, et il souffle un tel froid que la fille de la vieille en passe de vie à trépas.
De grand matin, la vieille bouscule son vieux :
- Attelle donc vite, vieil hibou, va chercher la fille, ramène-la moi toute parée d'or et d'argent !
D y va, le vieux. Or sous la table, le cabot recommence son antienne :
- Vouah, vouah ! A la fille du vieux pléthore de maris, à celle de la vieille un sac pour ses abattis!
La vieille, de lui jeter tout un gâteau au chou :
- Est-ce que tu m'aboies comme il faut ? Dis : "La fille de la vieille revient toute d'or et d'argent parée..."
Mais le cabot ne veut rien savoir :
- Vouah, vouah ! répète-t-il. La fille de la vieille dans un sac avec ses abattis est ramenée...
Grince le portail, la vieille y court, accueillir sa fille adorée. Elle soulève la bâche : dans le traîneau sa fille est morte.
Il faut l’entendre donner de la voix, la vieille, mais c’est trop tard Ce
sont choses qui arrivent dans l'existence - ce vieil homme-là vivait
avec sa seconde épouse. Lui avait sa fille, elle - la sienne. Vivre
avec la marâtre, chacun sait ce que c'est : tu te mets en quatre pour
lui agréer - battue, tu flanches une petite fois - battue tout pareil.
Tandis que sa fille à elle, on lui passe tout, et quoi qu'elle fasse on
lui tapote la tête, on lui donne du "bien, ma mignonne"... La
belle-fille n'arrêtait pas : donner à boire et à manger aux bêtes,
apporter le bois et l'eau, chauffer le poêle, balayer l'isba - et tout
cela bien avant le jour ! Rien à faire, jamais la mégère n'était
satisfaite, ce n'était pas ça, c'était mauvais. Le vent, il lui arrive
de faire du vacarme, puis il s'apaise. La vieille mégère, non. Quand
elle s'en prend à quelqu'un, c'est pour longtemps. Tellement qu'à la
fin elle se met en tête de rayer la belle-fille du nombre des vivants !
- Emmène-la, crie-t-elle à son vieux, conduis-la où ça te chante, je ne
veux plus la voir ! Tiens, dans la forêt conduis-la, puisqu'il gèle à
pierre fendre! Le vieil homme en est tout marri, il verse d'amères
larmes, mais que peut-il faire là-contre ? Cette femme-là est un démon.
Il attelle donc le cheval. - Monte dans le traîneau, ma fille chérie...
Arrivé dans la forêt, il la dépose dans la neige, au pied d'un grand
sapin, et l'abandonne à son sort. Assise sous le sapin, la jeune fille
grelotte et frissonne. Et soudain elle entend comment le père Gel fait
craquer les arbres alentour, comment il passe de sapin en sapin en
sautillant, en crachotant, il est bientôt dans le sapin sous lequel la
jeune fille est assise, de là-haut il s'enquiert - As-tu chaud, ma
fille? - J'ai chaud, petit-père Gel, j'ai chaud, merci. Le père Gel
descend alors de quelques branches, en crépitant, en crachotant plus
fort : - As-tu chaud, ma fille? As-tu chaud, ma belle? - J'ai chaud,
petit-père Gel, j'ai très chaud, merci. Il descend encore plus bas, le
père Gel, en crépitant, en crachotant de plus belle : - As-tu chaud, ma
fille ? As-tu chaud, ma belle ? As-tu chaud, ma mignonne ? Déjà la
jeune fille sent son corps s'engourdir, elle remue la langue avec peine
: - Hou-là, comme j'ai chaud, gentil père Gel... Alors le père Gel a
pitié de la pauvrette, alors il l'emmitoufle de ses douces fourrures,
il la réchauffe de ses duvets épais. A la maison, la marâtre prend déjà
ses dispositions pour les funérailles. Et tout en cuisant les crêpes,
elle crie au mari : - Va, vieil hibou, ramène ta fille, nous lallons
conduire au cimetière maintenant! Le vieux reprend le chemin de la
forêt, et quand il est rendu au grand sapin, que voit-il ? Sa fille est
là, indemne et bien vivante, ses yeux pétillent de bonheur, ses joues
sont rosés, elle porte une fourrure de zibeline, et de l'or, et de
l'argent, et il y a devant elle un plein coffre de riches présents !
Grande est la joie du vieil homme ; il charge la marchandise dans le
traîneau, il y installe sa chère fille et il reprend le chemin de la
maison. La mégère, là-bas, est toujours à ses crêpes. Et sous la table,
il y a le chiot de la maison qui clabaude : - Vouah, vouah! La fille du
vieux revient toute d'or et d'argent parée, celle de la vieille ne
trouve pas à se marier... La vieille lui jette une crêpe : - Aboie moi
comme il faut ! Dis : "La fille de la vieille trouvera riche mari,
celle du vieux, on en ramène les abattis..." Le cabot mange sa crêpe et
recommence : - Vouah, vouah! La fille du vieux revient toute d'or et
d'argent parée, celle de la vieille ne trouve pas à se marier... La
vieille a beau, une fois, lui jeter sa crêpe, une autre fois, la
battre, la bestiole continue sa chanson. Et puis, grince le portail,
s'ouvre la porte, et entre dans l'isba la belle-fille parée d'or et
d'argent, elle en resplendit toute ! Les ouvriers à sa suite apportent
un coffre pesant, haut comme ça ! Les bras lui en tombent, à la
vieille, à ce spectacle. - Attelle vivement un autre cheval, vieil
hibou! Conduis ma fille, conduis-la dans la forêt et laisse-la au même
endroit ! Le vieux installe sa belle-fille dans le traîneau, il la
dépose dans la neige au même endroit, au pied du grand sapin, et il
s'en retourne chez lui. Assise dans la congère, claque des dents la
fille de la mégère : Et déjà le père Gel crépite dans le sous-bois,
déjà il va sautillant d'arbre en arbre, crachotant et de l'œil la fille
de la vieille surveillant : - As-tu chaud, ma fille ? s'enquiert-il. Et
la fille de répondre: - Hou, je suis transie ! Vas-tu cesser de grincer
et crépiter comme ça, père Gel ! Le père Gel descend de quelques
branches, il crépite, il crachote plus fort - As-tu chaud, ma fille ?
As-tu chaud, ma belle ? - Hou-là, mes mains, mes pieds sont des glaçons
! Veux-tu bien t en aller, père Gel ! Mais le père Gel descend toujours
plus bas, il sévit de plus belle, il crépite et crache encore plus fort
- As-tu chaud, ma fille ? As-tu chaud, ma belle ? - Hou-là-là, tu m'as
complètement glacée! Mais file donc loin d'ici, je te dis, disparais,
maudit père Gel ! Là il se fâche pour de bon, le père Gel, et il
souffle un tel froid que la fille de la vieille en passe de vie à
trépas. De grand matin, la vieille bouscule son vieux : - Attelle donc
vite, vieil hibou, va chercher la fille, ramène-la moi toute parée d'or
et d'argent ! D y va, le vieux. Or sous la table, le cabot recommence
son antienne : - Vouah, vouah ! A la fille du vieux pléthore de maris,
à celle de la vieille un sac pour ses abattis! La vieille, de lui jeter
tout un gâteau au chou : - Est-ce que tu m'aboies comme il faut ? Dis :
"La fille de la vieille revient toute d'or et d'argent parée..." Mais
le cabot ne veut rien savoir : - Vouah, vouah ! répète-t-il. La fille
de la vieille dans un sac avec ses abattis est ramenée... Grince le
portail, la vieille y court, accueillir sa fille adorée. Elle soulève
la bâche : dans le traîneau sa fille est morte. Il faut l’entendre
donner de la voix, la vieille, mais c’est trop tard
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
Maria Morevna
Maria Morevna
Dans
un pays vivait Ivan-tsarévitch. Avant de mourir, ses parents lui ont
bien recommandé de ne pas faire obstacle au mariage de ses trois sœurs
: «Accepte les premiers épouseurs qui se présenteront». Et
Ivan-tsarévitch le promit. Un jour il se promenait avec ses sœurs dans
le jardin. Soudain, le ciel devint noir, le vent se leva en tempête.
- Rentrons vite, mes sœurs, - dit Ivan-tsarévitch.
Ils
étaient à peine revenus à la maison que le tonnerre gronda, la , le
plafond s'ouvrit et un faucon vola dans la pièce. Il frappa le sol,
devint un beau et jeune preux et dit :
- Bonjour à toi, Ivan-tsarévitch! Je venais en hôte, j'arrive en quémandeur -demander en mariage ta sœur Daria-tsarévna.
- Ma sœur est libre de son choix, - répondit le tsarévitch. - Si elle y consent, je n'ai rien contre.
Daria-tsarévna
consentit à épouser le faucon. Ils se marièrent et il l'emmena dans son
royaume. Jours après heures, mois après semaines une année passa.
Ivan-tsarévitch se promeit dans le jardin avec ses deux sœurs, quand,
soudain, le ciel devint noir, l'orage menaça.
- Rentrons vite à la maison, - dit Ivan-tsarévitch.
Ils
étaient à peine rentrés que le tonnerre gronda, la foudre tomba, le
plafond s'ouvrit et un aigle vola dans la pièce. Il frappa le sol,
devint un beau et jeune preux et dit : - Bonjour, Ivan-tsarévitch ! Je
venais en hôte, j'arrive en quémandeur -- demander a sœur Olga-tsarévna
en mariage. - Si tu plais à ma sœur, je ne dis rien contre. Épouse-la.
L'aigle épousa Olga-tsarévna et l'emporta dans son pays.
Au bout
d'une autre année, Ivan-tsarévitch se promenait dans le jardin avec sa
plus jeune sœur quand un orage terrible éclata. A peine à la maison,
voilà le tonnerre qui gronde, la foudre qui tombe, le plafond qui
s'ouvre. Un corbeau vole dans la pièce, frappe le sol, devient un jeune
preux, un fier cavalier. Les deux autres étaient beaux, mais lui, il
est magnifique ! Et il dit :
- Bonjour à toi, tsarévitch ! Je venais en hôte, j'arrive en quémandeur - donne-moi ta sœur Anna-tsarévna en mariage.
-
Si elle veut de toi, je n'y mets pas obstacle. Mariez-vous !
Anna-tsarévna épousa le corbeau et le suivit dans son pays. Resté seul,
Ivan-tsarévitch finit par s'ennuyer. Il se dit : - Je vais voir où mes
sœurs habitent, comment elles vivent. Il chemina longtemps et arriva à
un champ de bataille. Toute une armée y tuée-massacrée. Ivan-tsarévitch
s'écria :- S'il y a ici âme qui vive qu'on me réponde ! Qui donc a
massacré toute cette grande armée ?
Il restait un homme vivant qui lui répondit :
-
C'est Maria Morevna, beauté altière, qui a massacré notre valeureuse
armée ! Ivan-tsarévitch poursuivit sa route. A l'orée d'un bois, il vit
des tentes blanches-dressées, de toits d'or parées. Maria Morevna,
beauté altière, d'une tente sortit, vint à sa rencontre, le prit par la
main :
- Quel bon vent t'amène, tsarévitch ? Est-ce de bon vouloir que tu cours le monde, ou bien contraint et forcé ?
- Les vaillants par contrainte ne se dérangent, - lui répondit Ivan-tsarévitch.
- Alors, puisque rien ne te presse, viens te reposer sous mes blanches tentes.
Le tsarévitch ne demandait pas mieux. Il passa deux nuits chez Maria
Morevna, il lui a plu et ils se sont mariés. Et Maria Morevna, beauté
altière, emmena Ivan-tsarévitch dans son royaume. A quelque temps de
là, Maria Morevna voulut partir en guerre. Elle laissait
Ivan-tsarévitch prendre soin de la maison et lui dit :
- Va partout, aie l'œil à tout. Mais n'entre pas dans le réduit que voici, n'y jette même pas un regard !
Mais, sitôt sa femme partie, Ivan-tsarévitch courut voir ce qu'il y
avait dans le réduit. Et il vit Kochtchéï-l'lmmortel, carcasse sans
chair, corps sans âme qui pendait là sur douze poutres, attaché par
douze chaînes. Kochtchéï supplia le tsarévitch :
- Aie pitié, donne-moi à boire ! Voilà dix ans que je n'ai eu une goutte d'eau ! J'en ai la gorge sèche, la langue rèche.
Ivan-tsarévitch eut pitié de lui, apporta un plein seau d'eau. Kochtchéï le but d'une haleine, demanda encore :
- Ce n'est pas assez pour étancher une soif de dix années !
Ivan-tsarévitch
lui donna un autre seau plein. Kochtchéï le but et en redemanda. Et
sitôt le troisième seau avalé, toute sa force lui revint. Il tira sur
ses chaînes, brisa les douze d'un coup.
- Merci, Ivan-tsarévitch, cria-t-il. Dis maintenant adieu à Maria Morevna, plus jamais tu ne la reverras !
En
tornade par la fenêtre s'envola, sur la route Maria Morevna rattrapa,
la saisit et dans son antre l'emporta. Ivan-tsarévitch pleura
amèrement, puis se mit en route : «Quoi qu'il advienne, je retrouverai
Maria Morevna !» II chemina un jour, puis deux. A l'aube du troisième
il vit un beau palais. Devant le palais un chêne se dressait, sur le
chêne un faucon perchait. En voyant Ivan-tsarévitch, le faucon vint
frapper le sol, devint un beau et jeune preux et s'exclama :
- Mon cher beau-frère, quelle joie de te voir enfin !
Là-dessus
Daria-tsarévna accourut, au cou de son frère se jeta, des nouvelles lui
demanda, toute sa vie lui raconta. Ivan-tsarévitch vécut trois jours
chez eux, puis s'excusa :
Je ne peux rester davantage. Il me faut aller chercher Maria Morevna, beauté altière, mon épouse bien-aimée.
- Ce ne sera point facile, dit le faucon. Laisse-nous ta cuillère d'argent, en cas. On pensera à toi en la regardant.
Le
tsarévitch laissa sa cuillère et reprit la route.Il chemina un jour,
puis deux. A l'aube du troisième il vit un palais encore plus beau.
Devant le palais un chêne, sur le chêne un aigle. L'aigle vint frapper
le sol, devint un jeune preux et cria :
- Olga-tsarévna, réveille-toi ! Notre cher frère est arrivé !
Olga-tsarévna
accourut, au cou de son frère se jeta, des nouvelles lui demanda, toute
sa vie lui raconta. Ivan-tsarévitch passa trois jours chez eux, au
quatrième s'excusa :
- Il me faut aller chercher Maria Morevna, ma belle épouse !
- La tâche est difficile, dit l'aigle. Laisse-nous ta fourchette d'argent, en cas. Nous penserons à toi en la regardant.
Ivan-tsarévitch
laissa sa fourchette et repartit. Il chemina un jour et deux. A l'aube
du troisième il vit un palais plus magnifique que les autres. Il y
avait un chêne devant le palais, sur le chêne un corbeau. Le corbeau
frappa le sol, devint un beau et jeune preux et s'écria :
- Anna-tsarévna, viens vite ! Notre cher frère est là !
Elle
accourut, au cou de son frère se jeta, des nouvelles lui demanda, toute
sa vie lui raconta. Après trois jours passés chez eux, Ivan-tsarévitch
voulut repartir : Je dois aller chercher mon épouse, Maria Morevna.
- Ce sera bien difficile, dit le corbeau. Laisse-nous, en cas, ta tabatière d'argent. On pensera à toi en la regardant.
Ivan-tsarévitch
laissa sa tabatière et se remit en route. Il chemina tant qu'il finit
par arriver jusqu'à Maria Morevna. En voyant son doux ami elle tomba
dans ses bras, toute pleurante :
- Ah, que ne m'as-tu écoutée,
Ivan-tsarévitch ! Pourquoi es-tu entré dans le réduit, pourquoi as-tu
laissé partir Kochtchéï-l'Immortel ?...
- Pardonne-moi, ne remue pas
le fer dans la plaie, oublie les fautes passées ! Sauvons-nous vite,
tant que Kochtchéï n'est pas là.
Il prit Maria Morevna sur son cheval et s'enfuit au galop.
De
ce temps, Kochtchéï était à la chasse. Le soir venu, comme des taillis
il débuche, sous lui son cheval trébuche. Kochtchéï dit :
- Qu'as-tu à broncher, vieille carne ? Sens-tu quelque méfait qui se trame ?
- Ivan-tsarévitch est venu, - répond le cheval. - Il a enlevé Maria Morevna.
- Peut-on les rattraper ?
-
On peut semer du blé, attendre qu'il pousse, le moissonner, le moudre,
cuire cinq fournées de pain, le manger et se mettre en chemin. Même
comme ça on serait encore à temps !
Kochtchéï eut vite fait de rattraper Ivan-tsarévitch. Il dit :
- Passe pour cette fois ! Tu m'as donné à boire, alors je te pardonne. Mais ne t'avise pas de recommencer !
Il
saisit Maria Morevna, beauté altière, et s'en fut. Ivan-tsarévitch
s'assit sur une pierre, versant des larmes amères. Après avoir pleuré
tout son soûl, il retourna chez Maria Morevna :
-Viens ! Partons vite, tant que Kochtchéï n'est pas là ! J'ai bien peur, Ivan-tsarévitch ! Il va nous rattraper.
-Tant pis ! Ce sera toujours une heure de prise, une heure que nous aurons passée ensemble tous les deux.
Ils partirent. Le soir venu, au retour de la chasse, Kochtchéï des taillis débuche, sous lui son cheval trébuche :
- Pourquoi bronches-tu, vieille carne ? Sens-tu un méfait qui se trame ?
- Ivan-tsarévitch est venu, il a emporté Maria Morevna.
- Et on peut les rattraper ?
-
On peut semer de l'orge, la voir pousser, la moissonner, brasser de la
bière, en boire tout son soûl et dormir là-dessus. En partant au
réveil, on serait encore à temps !
En peu de temps Kochtchéï rattrapa les fuyards. Il cria :
-Une fois encore je te pardonne, mais n'attends plus de grâce, je te couperai en morceaux !
Kochtchéï
emporta Maria Morevna, beauté altière. Et Ivan-tsarévitch resta là, à
pleurer. Puis, n'en pouvant plus de peine, il retourna voir sa femme :
Viens ! Fuyons tant que Kochtchéï n'est pas là.
- Mais il va nous rattraper, Ivan-tsarévitch. Il va te couper en morceaux !
- Peu m'importe ! Je ne peux pas vivre sans toi.
Le soir, Kochtchéï revient de la chasse, des taillis débuche, sous lui son cheval trébuche.
-Qu'as-tu à broncher, vieille carne? Sens-tu le méfait qui se trame ?
- Ivan-tsarévitch est venu enlever Maria Morevna.
Kochtchéï
rattrapa les fugitifs. Il coupa Ivan-tsarévitch en morceaux, les mit
dans un tonneau goudronné, de fer cerclé, d'airain encloué et jeta le
tonneau dans la mer. Puis il emporta chez lui Maria Morevna. A ce jour,
à cette heure, à cet instant les objets d'argent qu'Ivan-tsarévitch
avait laissés chez ses beaux-frères ont subitement noirci. Le faucon,
l'aigle et le corbeau en prirent alarme - II est sûrement arrivé
malheur à Ivan-tsarévitch !
L'aigle vit le tonneau dans la mer,
plongea et le tira sur le rivage, pendant que le corbeau et le faucon
s'envolaient chercher de l'eau morte et de l'eau vive. Une fois de
retour, ils lavèrent les morceaux, les arrangèrent comme il convient.
Le corbeau les aspergea d'eau morte - le corps se ressouda. Le faucon
l'aspergea d'eau vive - - Ivan-tsarévitch bâilla et dit :
- Que j'ai dormi longtemps !
- Sans nous, tu dormirais encore ! Il faut que tu viennes maintenant chez nous, te reposer, reprendre des forces.
- Non, mes frères chéris ! Je retourne chercher ma femme.
Et il y retourna. Mais cette fois il dit à Maria Morevna :
- Tâche de savoir où Kochtchéï s'est procuré un si bon cheval !
Maria Morevna, beauté altière, guetta le moment propice, posa des questions subreptices, tira de Kochtchéï toute la vérité :
-
A vingt-neuf pays d'ici, dans le trentième royaume, par-delà un fleuve
de feu vit Baba-Yaga, vieille sorcière. Elle a une jument qui en une
journée fait trois fois le tour du monde ! Et elle a encore beaucoup
d'autres bonnes cavales. Je les ai gardées trois jours durant, n'en ai
pas perdu une seule. Et en récompense, Baba-Yaga m'a donné un poulain.
- Mais comment as-tu fait pour traverser le fleuve de feu ?
-
J'ai un mouchoir magique - par trois fois à droite on l'agite et un
pont s'élève, si haut que les flammes ne peuvent l'atteindre.
Maria
Morevna répéta tout à Ivan-tsarévitch et lui remit le mouchoir qu'elle
avait volé à Kochtchéï. Ivan-tsarévitch traversa le fleuve de feu et
partit chez Baba-Yaga. Il marcha longtemps, sans manger, sans boire. Et
il avait grand-faim quand il vit un oiseau des Iles avec ses petits.
«Ça tombe bien, se dit le tsarévitch, je m'en vais manger un de ces
oisillons !» Mais l'oiseau lui dit :- Ne touche pas à mes petits,
tsarévitch ! Bientôt je te serai de grand secours. Il obéit. Peu après,
il vit un essaim d'abeilles :
- Je vais prendre leur miel, apaiser ma faim !
- N'y touche pas, tsarévitch, lui dit la reine des abeilles. D'ici peu je te serai de grand secours.
Il
obéit et poursuivit sa route. Et il rencontra une lionne avec son
lionceau. Ivan tsarévitch avait si faim que la tête lui tournait : « Je
vais manger ce lionceau ! » se dit-i mais la lionne le supplia :
- N'en fais rien ! D'ici peu je te serai de grand secours.
Ivan-tsarévitch
serra sa ceinture et poursuivit à jeun son chemin. Bientôt il vit la
maison de Baba-Yaga : de douze perches entourée, sur onze perches des
têtes coupées, 1 douzième vacante.
- Bonjour, grand-mère, dit le tsarévitch en entrant.
- Bonjour, tsarévitch ! Viens-tu de plein gré ou par besoin ?
- De plein gré je viens te servir, gagner le poulain dont j'ai besoin.
-
Pourquoi pas ? Chez moi, le service n'est pas d'un an ni d'un mois,
mais juste de trois jours. Garde bien mes juments et tu auras ton
poulain. Mais que tu m'en égares une seule, et ta tête ira compléter la
douzaine sur mes perches ! C'est bien d'accord?
Ivan-tsarévitch dit
: «D'accord !» Baba-Yaga lui donna à manger, puis l'envoya faire paître
ses cavales. A peine dans les prés, les cavales se sont égaillées de
tous côtés, pas moyen de les rattraper. Le tsarévitch l'essaya bien,
n'arriva à rien, s'assit et se mit à pleurer. A force de pleurer il
s'endormit. C'est l'oiseau des Iles qui le réveilla au soleil couchant :
-
Rentre vite, tsarévitch ! Les cavales sont déjà à l'écurie. En
arrivant, Ivan-tsarévitch entendit Baba-Yaga qui criait : — Pourquoi
êtes-vous toutes rentrées, rosses empotées?
- Le moyen de faire
autrement? - répondaient les cavales. - Du monde entier sont venus des
oiseaux, ils voulaient nous crever les yeux !
- Puisque c'est comme ça, demain sauvez-vous dans la forêt. Le lendemain, - Baba-Yaga menaça encore Ivan-tsarévitch :
- Qu'une jument me manque et c'est ta tête qui m'en répondra !
A
peine dans les prés, les cavales se sont égaillées, dans la forêt
épaisse se sont cachées, pas moyen de les retrouver. Ivan-tsarévitch
chercha bien, ne trouva rien, se mit à pleurer et s'endormit. Au
coucher du soleil la lionne vint le réveiller : Rentre à la maison,
tsarévitch ! Les cavales y sont déjà.
A la maison, Baba-Yaga pleine de rage menait grand tapage :
- Pourquoi êtes-vous toutes revenues, sales rosses ?
- Comment faire ? Du monde entier des bêtes féroces sont arrivées, nous ont attaquées, voulaient nous dévorer !
- Si c'est comme ça, demain vous irez plonger dans la mer !
- Le lendemain, sitôt dans les prés, les cavales se sont égaillées, dans la mer bleue ont
- Puisque c'est comme ça, demain sauvez-vous dans la forêt. Le lendemain, Baba-Yaga menaça encore Ivan-tsarévitch :
- Qu'une jument me manque et c'est ta tête qui m'en répondra !
A
peine dans les prés, les cavales se sont égaillées, dans la forêt
épaisse se sont cachées, pas moyen de les retrouver. Ivan-tsarévitch
chercha bien, ne trouva rien, se mit à pleurer et s'endormit. Au
coucher du soleil la lionne vint le réveiller : Rentre à la maison,
tsarévitch ! Les cavales y sont déjà.
A la maison, Baba-Yaga pleine de rage menait grand tapage :
- Pourquoi êtes-vous toutes revenues, sales rosses ?
- Comment faire ? Du monde entier des bêtes féroces sont arrivées, nous ont attaquées, voulaient nous dévorer !
- Si c'est comme ça, demain vous irez plonger dans la mer !
Le
lendemain, sitôt dans les prés, les cavales se sont égaillées, dans la
mer bleue ont plongé ! Ivan-tsarévitch n'essaya même pas de les suivre.
Il se mit à pleurer et s'endormit. C'est une abeille qui le réveilla au
coucher du soleil :
- Les cavales sont toutes à l'écurie,
tsarévitch. Mais en rentrant, ne te fais pas voir de Baba-Yaga. Juste à
minuit, va dans l'écurie. Là, dans un coin caché, dans du crottin
couché il y a un poulain galeux. Emmène-le et sauve-toi de la maison !
Ivan-tsarévitch se glissa dans la maison et entendit Baba-Yaga mener grand tapage, tancer ses cavales qui lui répondaient :
-
Le moyen de ne pas rentrer ? Du monde entier des abeilles sont venues
nous piquer-attaquer ! Nous avons les naseaux en sang, les oreilles à
vif !
A minuit sonnant,
Ivan-tsarévitch prit le poulain galeux et courut au fleuve de feu. Il
agita son mouchoir à droite, un pont s'éleva. Le tsarévitch traversa,
puis agita le mouchoir à gauche, mais deux fois seulement. Le pont est
resté, mais tout fin-fragile, juste une apparence. Le matin, Baba-Yaga
ne retrouva pas son poulain galeux, et furieuse, se lança à la
poursuite du tsarévitch. Baba-Yaga se dépêche, ne prend ni cheval ni
calèche, dans un mortier de fer trotte, du pilon l'asticote, du balai
efface la trace. Elle monta sur le pont pour traverser le fleuve de
feu, mais le pont se rompit. Baba-Yaga tomba dans le fleuve - et ce fut
sa fin.
Ivan-tsarévitch mena son poulain dans les prés verts, les
herbages gras. Et, vite, le poulain se fit beau coursier. Alors
Ivan-tsarévitch revint chez Maria Morevna. Elle tomba dans ses bras :
- Je te croyais mort ! Comment t'en es-tu sorti ?
- C'est arrivé comme ci et comme ça... Mais partons vite ! J'ai peur, Ivan-tsarévitch. Kochtchéï va nous rattraper !
- Ne crains rien, j'ai un cheval qui vole !
Le
soir, Kochtchéï revient de la chasse, des taillis débuche, sous lui son
cheval trébuche. - Tu bronches, vieille carne ? Sens-tu le méfait qui
se trame ?
- Ivan-tsarévitch est revenu. Il a emporté Maria Morevna.
- Et pouvons-nous les rattraper ?
- Je n'en sais rien. Cette fois, le cheval du tsarévitch est fils de ma mère, mon jeune frère. Mais on peut toujours essayer.
Kochtchéï
galopa à toute allure. Il eut du mal cette fois, mais il finit quand
même par rejoindre les fuyards. Kochtchéï sauta à terre, leva son
cimeterre pour couper Ivan-tsarévitch en menus morceaux. Mais le cheval
du tsarévitch sur lui-même tourna, d'une grande ruade l'assomma. Et
Ivan-tsarévitch acheva Kochtchéï d'un bon coup de sa masse d'armes.
Puis il brûla son corps et jeta les cendres au vent.
Maria Morevna,
beauté altière, prit le cheval de Kochtchéï, Ivan-tsarévitch le sien et
ils s'en allèrent, sans se presser, chez le corbeau, puis chez l'aigle
et le faucon. Partout ce n'était que fêtes, grande joie et liesse. Et
ses beaux-frères disaient :
- Ah, Ivan-tsarévitch ! On n'espérait
plus te revoir. Mais en voyant ta femme, on comprend le mal que tu t'es
donné. De beauté pareille, il n'en existe pas sur toute la terre !
Après
avoir festoyé joyeusement, Ivan-tsarévitch et Maria Morevna, beauté
altière, s'en sont retournés dans leur royaume. Et ils y ont vécu sans
soucis ni tourments, buvant de l'hydromel vieux, mangeant du pain blanc.
Dans
un pays vivait Ivan-tsarévitch. Avant de mourir, ses parents lui ont
bien recommandé de ne pas faire obstacle au mariage de ses trois sœurs
: «Accepte les premiers épouseurs qui se présenteront». Et
Ivan-tsarévitch le promit. Un jour il se promenait avec ses sœurs dans
le jardin. Soudain, le ciel devint noir, le vent se leva en tempête.
- Rentrons vite, mes sœurs, - dit Ivan-tsarévitch.
Ils
étaient à peine revenus à la maison que le tonnerre gronda, la , le
plafond s'ouvrit et un faucon vola dans la pièce. Il frappa le sol,
devint un beau et jeune preux et dit :
- Bonjour à toi, Ivan-tsarévitch! Je venais en hôte, j'arrive en quémandeur -demander en mariage ta sœur Daria-tsarévna.
- Ma sœur est libre de son choix, - répondit le tsarévitch. - Si elle y consent, je n'ai rien contre.
Daria-tsarévna
consentit à épouser le faucon. Ils se marièrent et il l'emmena dans son
royaume. Jours après heures, mois après semaines une année passa.
Ivan-tsarévitch se promeit dans le jardin avec ses deux sœurs, quand,
soudain, le ciel devint noir, l'orage menaça.
- Rentrons vite à la maison, - dit Ivan-tsarévitch.
Ils
étaient à peine rentrés que le tonnerre gronda, la foudre tomba, le
plafond s'ouvrit et un aigle vola dans la pièce. Il frappa le sol,
devint un beau et jeune preux et dit : - Bonjour, Ivan-tsarévitch ! Je
venais en hôte, j'arrive en quémandeur -- demander a sœur Olga-tsarévna
en mariage. - Si tu plais à ma sœur, je ne dis rien contre. Épouse-la.
L'aigle épousa Olga-tsarévna et l'emporta dans son pays.
Au bout
d'une autre année, Ivan-tsarévitch se promenait dans le jardin avec sa
plus jeune sœur quand un orage terrible éclata. A peine à la maison,
voilà le tonnerre qui gronde, la foudre qui tombe, le plafond qui
s'ouvre. Un corbeau vole dans la pièce, frappe le sol, devient un jeune
preux, un fier cavalier. Les deux autres étaient beaux, mais lui, il
est magnifique ! Et il dit :
- Bonjour à toi, tsarévitch ! Je venais en hôte, j'arrive en quémandeur - donne-moi ta sœur Anna-tsarévna en mariage.
-
Si elle veut de toi, je n'y mets pas obstacle. Mariez-vous !
Anna-tsarévna épousa le corbeau et le suivit dans son pays. Resté seul,
Ivan-tsarévitch finit par s'ennuyer. Il se dit : - Je vais voir où mes
sœurs habitent, comment elles vivent. Il chemina longtemps et arriva à
un champ de bataille. Toute une armée y tuée-massacrée. Ivan-tsarévitch
s'écria :- S'il y a ici âme qui vive qu'on me réponde ! Qui donc a
massacré toute cette grande armée ?
Il restait un homme vivant qui lui répondit :
-
C'est Maria Morevna, beauté altière, qui a massacré notre valeureuse
armée ! Ivan-tsarévitch poursuivit sa route. A l'orée d'un bois, il vit
des tentes blanches-dressées, de toits d'or parées. Maria Morevna,
beauté altière, d'une tente sortit, vint à sa rencontre, le prit par la
main :
- Quel bon vent t'amène, tsarévitch ? Est-ce de bon vouloir que tu cours le monde, ou bien contraint et forcé ?
- Les vaillants par contrainte ne se dérangent, - lui répondit Ivan-tsarévitch.
- Alors, puisque rien ne te presse, viens te reposer sous mes blanches tentes.
Le tsarévitch ne demandait pas mieux. Il passa deux nuits chez Maria
Morevna, il lui a plu et ils se sont mariés. Et Maria Morevna, beauté
altière, emmena Ivan-tsarévitch dans son royaume. A quelque temps de
là, Maria Morevna voulut partir en guerre. Elle laissait
Ivan-tsarévitch prendre soin de la maison et lui dit :
- Va partout, aie l'œil à tout. Mais n'entre pas dans le réduit que voici, n'y jette même pas un regard !
Mais, sitôt sa femme partie, Ivan-tsarévitch courut voir ce qu'il y
avait dans le réduit. Et il vit Kochtchéï-l'lmmortel, carcasse sans
chair, corps sans âme qui pendait là sur douze poutres, attaché par
douze chaînes. Kochtchéï supplia le tsarévitch :
- Aie pitié, donne-moi à boire ! Voilà dix ans que je n'ai eu une goutte d'eau ! J'en ai la gorge sèche, la langue rèche.
Ivan-tsarévitch eut pitié de lui, apporta un plein seau d'eau. Kochtchéï le but d'une haleine, demanda encore :
- Ce n'est pas assez pour étancher une soif de dix années !
Ivan-tsarévitch
lui donna un autre seau plein. Kochtchéï le but et en redemanda. Et
sitôt le troisième seau avalé, toute sa force lui revint. Il tira sur
ses chaînes, brisa les douze d'un coup.
- Merci, Ivan-tsarévitch, cria-t-il. Dis maintenant adieu à Maria Morevna, plus jamais tu ne la reverras !
En
tornade par la fenêtre s'envola, sur la route Maria Morevna rattrapa,
la saisit et dans son antre l'emporta. Ivan-tsarévitch pleura
amèrement, puis se mit en route : «Quoi qu'il advienne, je retrouverai
Maria Morevna !» II chemina un jour, puis deux. A l'aube du troisième
il vit un beau palais. Devant le palais un chêne se dressait, sur le
chêne un faucon perchait. En voyant Ivan-tsarévitch, le faucon vint
frapper le sol, devint un beau et jeune preux et s'exclama :
- Mon cher beau-frère, quelle joie de te voir enfin !
Là-dessus
Daria-tsarévna accourut, au cou de son frère se jeta, des nouvelles lui
demanda, toute sa vie lui raconta. Ivan-tsarévitch vécut trois jours
chez eux, puis s'excusa :
Je ne peux rester davantage. Il me faut aller chercher Maria Morevna, beauté altière, mon épouse bien-aimée.
- Ce ne sera point facile, dit le faucon. Laisse-nous ta cuillère d'argent, en cas. On pensera à toi en la regardant.
Le
tsarévitch laissa sa cuillère et reprit la route.Il chemina un jour,
puis deux. A l'aube du troisième il vit un palais encore plus beau.
Devant le palais un chêne, sur le chêne un aigle. L'aigle vint frapper
le sol, devint un jeune preux et cria :
- Olga-tsarévna, réveille-toi ! Notre cher frère est arrivé !
Olga-tsarévna
accourut, au cou de son frère se jeta, des nouvelles lui demanda, toute
sa vie lui raconta. Ivan-tsarévitch passa trois jours chez eux, au
quatrième s'excusa :
- Il me faut aller chercher Maria Morevna, ma belle épouse !
- La tâche est difficile, dit l'aigle. Laisse-nous ta fourchette d'argent, en cas. Nous penserons à toi en la regardant.
Ivan-tsarévitch
laissa sa fourchette et repartit. Il chemina un jour et deux. A l'aube
du troisième il vit un palais plus magnifique que les autres. Il y
avait un chêne devant le palais, sur le chêne un corbeau. Le corbeau
frappa le sol, devint un beau et jeune preux et s'écria :
- Anna-tsarévna, viens vite ! Notre cher frère est là !
Elle
accourut, au cou de son frère se jeta, des nouvelles lui demanda, toute
sa vie lui raconta. Après trois jours passés chez eux, Ivan-tsarévitch
voulut repartir : Je dois aller chercher mon épouse, Maria Morevna.
- Ce sera bien difficile, dit le corbeau. Laisse-nous, en cas, ta tabatière d'argent. On pensera à toi en la regardant.
Ivan-tsarévitch
laissa sa tabatière et se remit en route. Il chemina tant qu'il finit
par arriver jusqu'à Maria Morevna. En voyant son doux ami elle tomba
dans ses bras, toute pleurante :
- Ah, que ne m'as-tu écoutée,
Ivan-tsarévitch ! Pourquoi es-tu entré dans le réduit, pourquoi as-tu
laissé partir Kochtchéï-l'Immortel ?...
- Pardonne-moi, ne remue pas
le fer dans la plaie, oublie les fautes passées ! Sauvons-nous vite,
tant que Kochtchéï n'est pas là.
Il prit Maria Morevna sur son cheval et s'enfuit au galop.
De
ce temps, Kochtchéï était à la chasse. Le soir venu, comme des taillis
il débuche, sous lui son cheval trébuche. Kochtchéï dit :
- Qu'as-tu à broncher, vieille carne ? Sens-tu quelque méfait qui se trame ?
- Ivan-tsarévitch est venu, - répond le cheval. - Il a enlevé Maria Morevna.
- Peut-on les rattraper ?
-
On peut semer du blé, attendre qu'il pousse, le moissonner, le moudre,
cuire cinq fournées de pain, le manger et se mettre en chemin. Même
comme ça on serait encore à temps !
Kochtchéï eut vite fait de rattraper Ivan-tsarévitch. Il dit :
- Passe pour cette fois ! Tu m'as donné à boire, alors je te pardonne. Mais ne t'avise pas de recommencer !
Il
saisit Maria Morevna, beauté altière, et s'en fut. Ivan-tsarévitch
s'assit sur une pierre, versant des larmes amères. Après avoir pleuré
tout son soûl, il retourna chez Maria Morevna :
-Viens ! Partons vite, tant que Kochtchéï n'est pas là ! J'ai bien peur, Ivan-tsarévitch ! Il va nous rattraper.
-Tant pis ! Ce sera toujours une heure de prise, une heure que nous aurons passée ensemble tous les deux.
Ils partirent. Le soir venu, au retour de la chasse, Kochtchéï des taillis débuche, sous lui son cheval trébuche :
- Pourquoi bronches-tu, vieille carne ? Sens-tu un méfait qui se trame ?
- Ivan-tsarévitch est venu, il a emporté Maria Morevna.
- Et on peut les rattraper ?
-
On peut semer de l'orge, la voir pousser, la moissonner, brasser de la
bière, en boire tout son soûl et dormir là-dessus. En partant au
réveil, on serait encore à temps !
En peu de temps Kochtchéï rattrapa les fuyards. Il cria :
-Une fois encore je te pardonne, mais n'attends plus de grâce, je te couperai en morceaux !
Kochtchéï
emporta Maria Morevna, beauté altière. Et Ivan-tsarévitch resta là, à
pleurer. Puis, n'en pouvant plus de peine, il retourna voir sa femme :
Viens ! Fuyons tant que Kochtchéï n'est pas là.
- Mais il va nous rattraper, Ivan-tsarévitch. Il va te couper en morceaux !
- Peu m'importe ! Je ne peux pas vivre sans toi.
Le soir, Kochtchéï revient de la chasse, des taillis débuche, sous lui son cheval trébuche.
-Qu'as-tu à broncher, vieille carne? Sens-tu le méfait qui se trame ?
- Ivan-tsarévitch est venu enlever Maria Morevna.
Kochtchéï
rattrapa les fugitifs. Il coupa Ivan-tsarévitch en morceaux, les mit
dans un tonneau goudronné, de fer cerclé, d'airain encloué et jeta le
tonneau dans la mer. Puis il emporta chez lui Maria Morevna. A ce jour,
à cette heure, à cet instant les objets d'argent qu'Ivan-tsarévitch
avait laissés chez ses beaux-frères ont subitement noirci. Le faucon,
l'aigle et le corbeau en prirent alarme - II est sûrement arrivé
malheur à Ivan-tsarévitch !
L'aigle vit le tonneau dans la mer,
plongea et le tira sur le rivage, pendant que le corbeau et le faucon
s'envolaient chercher de l'eau morte et de l'eau vive. Une fois de
retour, ils lavèrent les morceaux, les arrangèrent comme il convient.
Le corbeau les aspergea d'eau morte - le corps se ressouda. Le faucon
l'aspergea d'eau vive - - Ivan-tsarévitch bâilla et dit :
- Que j'ai dormi longtemps !
- Sans nous, tu dormirais encore ! Il faut que tu viennes maintenant chez nous, te reposer, reprendre des forces.
- Non, mes frères chéris ! Je retourne chercher ma femme.
Et il y retourna. Mais cette fois il dit à Maria Morevna :
- Tâche de savoir où Kochtchéï s'est procuré un si bon cheval !
Maria Morevna, beauté altière, guetta le moment propice, posa des questions subreptices, tira de Kochtchéï toute la vérité :
-
A vingt-neuf pays d'ici, dans le trentième royaume, par-delà un fleuve
de feu vit Baba-Yaga, vieille sorcière. Elle a une jument qui en une
journée fait trois fois le tour du monde ! Et elle a encore beaucoup
d'autres bonnes cavales. Je les ai gardées trois jours durant, n'en ai
pas perdu une seule. Et en récompense, Baba-Yaga m'a donné un poulain.
- Mais comment as-tu fait pour traverser le fleuve de feu ?
-
J'ai un mouchoir magique - par trois fois à droite on l'agite et un
pont s'élève, si haut que les flammes ne peuvent l'atteindre.
Maria
Morevna répéta tout à Ivan-tsarévitch et lui remit le mouchoir qu'elle
avait volé à Kochtchéï. Ivan-tsarévitch traversa le fleuve de feu et
partit chez Baba-Yaga. Il marcha longtemps, sans manger, sans boire. Et
il avait grand-faim quand il vit un oiseau des Iles avec ses petits.
«Ça tombe bien, se dit le tsarévitch, je m'en vais manger un de ces
oisillons !» Mais l'oiseau lui dit :- Ne touche pas à mes petits,
tsarévitch ! Bientôt je te serai de grand secours. Il obéit. Peu après,
il vit un essaim d'abeilles :
- Je vais prendre leur miel, apaiser ma faim !
- N'y touche pas, tsarévitch, lui dit la reine des abeilles. D'ici peu je te serai de grand secours.
Il
obéit et poursuivit sa route. Et il rencontra une lionne avec son
lionceau. Ivan tsarévitch avait si faim que la tête lui tournait : « Je
vais manger ce lionceau ! » se dit-i mais la lionne le supplia :
- N'en fais rien ! D'ici peu je te serai de grand secours.
Ivan-tsarévitch
serra sa ceinture et poursuivit à jeun son chemin. Bientôt il vit la
maison de Baba-Yaga : de douze perches entourée, sur onze perches des
têtes coupées, 1 douzième vacante.
- Bonjour, grand-mère, dit le tsarévitch en entrant.
- Bonjour, tsarévitch ! Viens-tu de plein gré ou par besoin ?
- De plein gré je viens te servir, gagner le poulain dont j'ai besoin.
-
Pourquoi pas ? Chez moi, le service n'est pas d'un an ni d'un mois,
mais juste de trois jours. Garde bien mes juments et tu auras ton
poulain. Mais que tu m'en égares une seule, et ta tête ira compléter la
douzaine sur mes perches ! C'est bien d'accord?
Ivan-tsarévitch dit
: «D'accord !» Baba-Yaga lui donna à manger, puis l'envoya faire paître
ses cavales. A peine dans les prés, les cavales se sont égaillées de
tous côtés, pas moyen de les rattraper. Le tsarévitch l'essaya bien,
n'arriva à rien, s'assit et se mit à pleurer. A force de pleurer il
s'endormit. C'est l'oiseau des Iles qui le réveilla au soleil couchant :
-
Rentre vite, tsarévitch ! Les cavales sont déjà à l'écurie. En
arrivant, Ivan-tsarévitch entendit Baba-Yaga qui criait : — Pourquoi
êtes-vous toutes rentrées, rosses empotées?
- Le moyen de faire
autrement? - répondaient les cavales. - Du monde entier sont venus des
oiseaux, ils voulaient nous crever les yeux !
- Puisque c'est comme ça, demain sauvez-vous dans la forêt. Le lendemain, - Baba-Yaga menaça encore Ivan-tsarévitch :
- Qu'une jument me manque et c'est ta tête qui m'en répondra !
A
peine dans les prés, les cavales se sont égaillées, dans la forêt
épaisse se sont cachées, pas moyen de les retrouver. Ivan-tsarévitch
chercha bien, ne trouva rien, se mit à pleurer et s'endormit. Au
coucher du soleil la lionne vint le réveiller : Rentre à la maison,
tsarévitch ! Les cavales y sont déjà.
A la maison, Baba-Yaga pleine de rage menait grand tapage :
- Pourquoi êtes-vous toutes revenues, sales rosses ?
- Comment faire ? Du monde entier des bêtes féroces sont arrivées, nous ont attaquées, voulaient nous dévorer !
- Si c'est comme ça, demain vous irez plonger dans la mer !
- Le lendemain, sitôt dans les prés, les cavales se sont égaillées, dans la mer bleue ont
- Puisque c'est comme ça, demain sauvez-vous dans la forêt. Le lendemain, Baba-Yaga menaça encore Ivan-tsarévitch :
- Qu'une jument me manque et c'est ta tête qui m'en répondra !
A
peine dans les prés, les cavales se sont égaillées, dans la forêt
épaisse se sont cachées, pas moyen de les retrouver. Ivan-tsarévitch
chercha bien, ne trouva rien, se mit à pleurer et s'endormit. Au
coucher du soleil la lionne vint le réveiller : Rentre à la maison,
tsarévitch ! Les cavales y sont déjà.
A la maison, Baba-Yaga pleine de rage menait grand tapage :
- Pourquoi êtes-vous toutes revenues, sales rosses ?
- Comment faire ? Du monde entier des bêtes féroces sont arrivées, nous ont attaquées, voulaient nous dévorer !
- Si c'est comme ça, demain vous irez plonger dans la mer !
Le
lendemain, sitôt dans les prés, les cavales se sont égaillées, dans la
mer bleue ont plongé ! Ivan-tsarévitch n'essaya même pas de les suivre.
Il se mit à pleurer et s'endormit. C'est une abeille qui le réveilla au
coucher du soleil :
- Les cavales sont toutes à l'écurie,
tsarévitch. Mais en rentrant, ne te fais pas voir de Baba-Yaga. Juste à
minuit, va dans l'écurie. Là, dans un coin caché, dans du crottin
couché il y a un poulain galeux. Emmène-le et sauve-toi de la maison !
Ivan-tsarévitch se glissa dans la maison et entendit Baba-Yaga mener grand tapage, tancer ses cavales qui lui répondaient :
-
Le moyen de ne pas rentrer ? Du monde entier des abeilles sont venues
nous piquer-attaquer ! Nous avons les naseaux en sang, les oreilles à
vif !
A minuit sonnant,
Ivan-tsarévitch prit le poulain galeux et courut au fleuve de feu. Il
agita son mouchoir à droite, un pont s'éleva. Le tsarévitch traversa,
puis agita le mouchoir à gauche, mais deux fois seulement. Le pont est
resté, mais tout fin-fragile, juste une apparence. Le matin, Baba-Yaga
ne retrouva pas son poulain galeux, et furieuse, se lança à la
poursuite du tsarévitch. Baba-Yaga se dépêche, ne prend ni cheval ni
calèche, dans un mortier de fer trotte, du pilon l'asticote, du balai
efface la trace. Elle monta sur le pont pour traverser le fleuve de
feu, mais le pont se rompit. Baba-Yaga tomba dans le fleuve - et ce fut
sa fin.
Ivan-tsarévitch mena son poulain dans les prés verts, les
herbages gras. Et, vite, le poulain se fit beau coursier. Alors
Ivan-tsarévitch revint chez Maria Morevna. Elle tomba dans ses bras :
- Je te croyais mort ! Comment t'en es-tu sorti ?
- C'est arrivé comme ci et comme ça... Mais partons vite ! J'ai peur, Ivan-tsarévitch. Kochtchéï va nous rattraper !
- Ne crains rien, j'ai un cheval qui vole !
Le
soir, Kochtchéï revient de la chasse, des taillis débuche, sous lui son
cheval trébuche. - Tu bronches, vieille carne ? Sens-tu le méfait qui
se trame ?
- Ivan-tsarévitch est revenu. Il a emporté Maria Morevna.
- Et pouvons-nous les rattraper ?
- Je n'en sais rien. Cette fois, le cheval du tsarévitch est fils de ma mère, mon jeune frère. Mais on peut toujours essayer.
Kochtchéï
galopa à toute allure. Il eut du mal cette fois, mais il finit quand
même par rejoindre les fuyards. Kochtchéï sauta à terre, leva son
cimeterre pour couper Ivan-tsarévitch en menus morceaux. Mais le cheval
du tsarévitch sur lui-même tourna, d'une grande ruade l'assomma. Et
Ivan-tsarévitch acheva Kochtchéï d'un bon coup de sa masse d'armes.
Puis il brûla son corps et jeta les cendres au vent.
Maria Morevna,
beauté altière, prit le cheval de Kochtchéï, Ivan-tsarévitch le sien et
ils s'en allèrent, sans se presser, chez le corbeau, puis chez l'aigle
et le faucon. Partout ce n'était que fêtes, grande joie et liesse. Et
ses beaux-frères disaient :
- Ah, Ivan-tsarévitch ! On n'espérait
plus te revoir. Mais en voyant ta femme, on comprend le mal que tu t'es
donné. De beauté pareille, il n'en existe pas sur toute la terre !
Après
avoir festoyé joyeusement, Ivan-tsarévitch et Maria Morevna, beauté
altière, s'en sont retournés dans leur royaume. Et ils y ont vécu sans
soucis ni tourments, buvant de l'hydromel vieux, mangeant du pain blanc.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
Reine-grenouille
Reine-grenouille
En un certain royaume, en un certain État, vivaient un tsar et une tsarine
qui avaient trois fils, tous trois jeunes et si vaillants, si bien
faits que la plume se refuse à les dépeindre, la bouche à les conter!
Le plus jeune s'appelait prince Ivan. Lorsqu'ils furent en âge de se
marier, le roi les réunit et leur dit : «Mes fils bien-aimés, avant
d'être vieux, j'aimerais bien vous marier afin de pouvoir contempler
vos enfants, mes petits-fils et petites-filles.» Les trois fils
répondirent à leur père: «Qu'il en soit selon ta volonté, père,
donne-nous ta bénédiction. Qui désires-tu nous donner pour femmes?»
«Eh bien, voici, mes fils; prenez vos arcs, sortez en rase campagne et
tirez une flèche: là où la flèche tombera, votre destin vous attendra.»
Les fils du roi s'inclinèrent devant leur père; ils prirent chacun une
flèche, sortirent en rase campagne, puis tendirent leurs arcs et
tirèrent. La flèche de l'aîné tomba dans la cour d'un seigneur, et la
fille du seigneur la ramassa. La flèche du cadet tomba dans la vaste
cour d'un riche marchand, et la fille du marchand la ramassa.Quant au
benjamin, le prince Ivan, sa flèche s'éleva dans les airs et s'envola
pour aller atterrir nul ne savait où. Le prince Ivan dut marcher,
marcher et marcher pour retrouver sa flèche. Il arriva enfin près d'un
étang et que vit-il?.. Une grenouille qui tenait la flèche entre ses
pattes. Le prince Ivan lui dit:«Grenouille, grenouillette, rends-moi ma
flèche.» Mais la grenouille lui répondit: « Prends-moi pour épouse !»
«Tu n'y penses pas! Comment puis-je épouser une grenouille !»
«Crois-moi, tel est ton destin.» Le prince Ivan se désespéra. Mais que
faire? Il prit donc la grenouille et la ramena chez lui. Le roi
organisa trois festins magnifiques: il maria son fils aîné à la fille
du seigneur, il maria son fils cadet à la fille du marchand et il maria
le pauvre prince Ivan à la grenouille
Le roi, un jour, convoqua ses fils: «Je veux savoir laquelle de vos
femmes est la plus habile de ses doigts. Qu'elles me cousent une
chemise pour demain.» Les trois fils s'inclinèrent devant leur père et
s'en furent. Le prince Ivan revint chez lui, s'assit et se prit la tête
entre les mains.Et la grenouille sur le plancher de sauter et de lui
demander: «Pourquoi, prince Ivan, as-tu la tête basse? Aurais-tu donc
quelque chagrin?»
«Mon père ordonne que tu lui couses une chemise
pour demain.» La grenouille alors répondit: «Ne t'afflige pas, prince
Ivan, va plutôt dormir: la nuit porte conseil.» Le prince Ivan s'en
alla dormir, et la grenouille sauta d'un bond sur le perron; elle
rejeta sa peau de grenouille et se transforma en Vassilissa la Sage,
dont la beauté est bien plus grande que contes ou légendes ne peuvent
la décrire. Vassilissa la Sage frappa dans ses mains et s'écria: «Mes
nounous, hâtez-vous, préparez-vous! Cousez-moi pour demain matin une
chemise aussi belle que celle que porte mon père.»
Le lendemain
matin, le prince Ivan s'éveilla, vit la grenouille sur le plancher et
la chemise sur la table enveloppée dans une serviette. Comme il se
réjouit ! Il apporta la chemise à son père. Le roi était en train de
recevoir les présents que lui avaient apportés ses fils aînés. Le plus
âgé déplia sa chemise, le roi la regarda et déclara: « Cette chemise
est bonne à porter dans une isba enfumée !» Le fils cadet déplia sa
chemise, et le roi s'écria:
«Elle est bonne pour aller au bain ! »
Alors le prince Ivan déplia sa chemise, ornée de merveilleux dessins en
fils d'or et d'argent. Le tsar s'exclama en la voyant:
«Voilà une
chemise à porter les jours de fête!» En revenant chez eux, les deux
frères aînés se dirent tout étonnés: «Certes, nous avions bien tort de
nous moquer de l'épouse du prince Ivan; elle n'est pas simple
grenouille, mais véritable sorcière.» Le roi fit à nouveau appeler ses
fils: «Que vos épouses me cuisent du pain pour demain matin? Je veux
savoir quelle est celle qui cuisine le mieux.» Le prince Ivan baissa la
tête et revint chez lui. Alors la grenouille lui demanda: «Pourquoi
as-tu du chagrin?» Et Ivan répondit: «II te faut préparer un pain pour
le donner au roi demain.» «Ne t'afflige pas, prince Ivan, va plutôt
dormir, la nuit porte conseil.»
Quant aux épouses des deux frères,qui d'abord s'étaient tant moquées, elles envoyèrent une vieille
servante pour bien observer et venir leur raconter comment la
grenouille ferait cuire le pain. Mais la grenouille était rusée et elle
avait tout deviné! Elle pétrit la pâte, puis perça un trou en haut du
four et y jeta la pâte ! La vieille servante s'empressa de tout répéter
à ses maîtresses, et celles-ci aussitôt firent de même. La grenouille
d'un bond sauta sur le perron, redevint Vassilissa la Sage, puis dans
ses mains elle frappa: «Mes nounous, hâtez-vous, préparez-vous ! Faites
cuire pour demain un bon pain blanc, le pain blanc que je mangeais chez
mon père.» Lorsque le prince Ivan s'éveilla le lendemain matin, il
trouva sur la table un pain merveilleusement décoré: des arabesques
étaient incrustées, sur ses flancs et dessus se dressaient des villes
entourées de leurs remparts.
Comme il se réjouit! Il enveloppa le
pain dans une grande serviette et l'apporta à son père. Le roi était en
train de recevoir les pains que lui apportaient ses fils aînés. Mais
leurs épouses avaient mis la pâte au four comme le leur avait dit la
vieille servante et n'avaient ainsi obtenu qu'une horrible saleté
complètement brûlée. Le tsar prit le pain que lui tendait son fils
aîné, le regarda et le renvoya à l'office. Puis il prit le pain que lui
tendait son fils cadet, et le renvoya aussi à l'office. Mais lorsqu'il
vit le pain du prince Ivan, le roi s'écria: «Voilà un pain à manger les
jours de fête ! » Et le roi convia ses trois fils à venir le lendemain,
avec leurs épouses, assister à un festin. Une fois de plus le prince
Ivan s'en revint chez lui tout triste et la tête basse. Et la
grenouille sur le plancher de sauter et lui demander: «Pourquoi as-tu
du chagrin, prince Ivan, ton père t'aurait-il mal accueilli?»
«Grenouille, grenouillette, comment ne pas m'attrister? Mon père
ordonne que j'assiste demain avec toi à un festin, mais à qui oserai-je
te montrer?» La grenouille répondit:
«Ne t'afflige pas, prince
Ivan, rends-toi seul au festin, moi, je te rejoindrai plus tard.»
Lorsque tu entendras un grand bruit de tonnerre, ne t'effraie pas. Si
on t'interroge, réponds: «C'est ma grenouillette qui arrive dans sa
cassette.» Le prince Ivan alla donc seul au festin. Ses frères aînés
arrivèrent avec leurs épouses bien vêtues, fort parées, les joues et
les sourcils fardés. Ils rirent et se moquèrent du prince Ivan :
«Pourquoi donc es-tu venu sans ta femme? Tu aurais pu nous l'amener
dans un mouchoir! Où donc as-tu trouvé une telle beauté? Tu as dû
longtemps chercher de par tous les étangs!»
Le roi, ses fils, leurs
épouses et les invités s'assirent autour des tables de chêne couvertes
de nappes brodées, et tous se mirent à festoyer. Mais on entendit
soudain un grand bruit de tonnerre qui fit trembler tout le palais. Les
invités épouvantés se levèrent d'un bond, mais le prince Ivan les
rassura :«Ne craignez rien, chers invités; c'est ma grenouillette qui
arrive dans sa cassette.»Une calèche dorée, par six chevaux blancs-
traînée, vint s'arrêter aux portes du palais ; et voilà qu'en sortit
Vassilissa la Sage, vêtue d'une robe azurée ornée d'étoiles et portant
sur la tête un croissant de lune; sa beauté était bien plus grande que
ne peuvent la décrire contes ou légendes. Elle prit le prince Ivan par
la main et le mena vers les tables de chêne couvertes de nappes
brodées. Et tout le monde se remit à manger, à boire et à se réjouir.
Vassilissa la Sage prit un verre, but, puis versa le vin qui restait
dans sa manche gauche. Elle mangea un morceau de cygne et jeta les os
dans sa manche droite. Les épouses des fils aînés virent sa ruse et
l'imitèrent ! Après avoir bu et mangé, on se mit à danser. Vassilissa
la Sage prit le prince Ivan par la main et le conduisit au milieu de la
salle. Elle dansa, dansa, tourna, tourna, et tout le monde
s'émerveilla. Un geste de sa main gauche, et un lac apparut. Un geste
de sa main droite, des cygnes blancs nagèrent. Le roi, ses invités,
tous furent enchantés. Puis les épouses des fils aînés se mirent elles
aussi à danser: un geste de la main gauche, et le vin jaillit de leur
manche pour éclabousser les pauvres invités. Un geste de la main
droite, et de leur manche s'échappèrent les os; l'un d'eux atterrit en
plein dans l'œil du roi. Celui-ci, courroucé, chassa ses deux
belles-filles.Pendant ce temps, le prince Ivan s'en était allé
discrètement; chez lui, il retrouva la peau de grenouille et la brûla.
Une fois rentrée, Vassilissa la Sage se mit à chercher la peau de
grenouille, mais elle ne put la trouver. Affligée, désespérée, elle
s'assit sur un banc et déclara au prince Ivan : «Hélas, hélas, prince
Ivan, qu'as-tu fait! Si tu avais attendu encore trois jours, j'aurais
été à toi pour toujours, mais maintenant je dois te dire adieu. Pour me
retrouver il te faudra aller au-delà des mers et des terres, chez
Kochtchéi l'Immortel.» Vassilissa la Sage se transforma en un
gris et s'envola par la fenêtre. Le prince Ivan pleura longtemps, puis
il s'inclina vers le Nord, l'Occident, le Sud et l'Orient et partit
droit devant lui pour retrouver son épouse Vassilissa la Sage.
Alla-t-il loin, bien loin ou très près, marcha-t-il longtemps, bien
longtemps ou un bref moment... ses bottes étaient toutes usées, sa
tunique déchirée, sa toque rongée par les pluies.
Il rencontra
alors un petit vieux chargé d'ans. «Bonjour, brave jeune homme! Que
cherches-tu et où vas-tu?» Le prince Ivan lui raconta ses malheurs. Le
petit vieux lui dit alors: «Ah, prince Ivan, pourquoi as-tu brûlé la
peau de grenouille? Ce n'est pas toi qui la lui avais mise, ce n'était
pas à toi de l'ôter. Vassilissa la Sage est maligne, sa sagesse est
plus grande encore que celle de son père. Celui-ci s'en est vexé et il
l'a condamnée à être grenouille trois années durant. Qu'y faire! Prends
la pelote que voici et où elle roulera, hardiment suis-la.» Le prince
Ivan remercia le petit vieux et suivit la pelote. Et la pelote de
rouler, et le prince de marcher. En pleine campagne, il rencontra un
ours; il le visa et voulut le tuer. Mais l'ours soudain se mit à
parler: «Ne me tue pas, prince Ivan, je te serai utile un jour.» Le
prince Ivan eut pitié de l'ours et ne le tua pas. Il continua son
chemin. Soudain que vit-il?... Un canard sauvage qui volait vers lui.
Il le visa. Mais le canard se mit à parler et lui dit: «Ne me tue pas,
prince Ivan, je te serai utile un jour.» Le prince Ivan eut pitié du
canard sauvage et continua son chemin. Soudain voilà qu'accourut un
lièvre. Le prince Ivan s'apprête à lui décocher une flèche, mais le
lièvre se mit à parler et lui dit : «Ne me tue pas, prince Ivan, je te
serai utile un jour.» Ivan eut pitié du lièvre et continua son chemin.
Il arriva au bord de la mer bleue et vit un brochet sur le sable ;
celui-ci respirait à peine et lui dit : «Oh, prince Ivan, aie pitié de
moi, rejette-moi dans la mer bleue!»Il rejeta le brochet à la mer et
continua de marcher sur le rivage.
Longtemps, longtemps ou un bref
moment... La pelote continua de rouler et l'emmena dans une forêt. Là
se dressait une isba montée sur des pattes de poulet et qui ne cessait
de tourner. «Isba, petite isba, reprends ta place, celle qui t'a été
donnée: tourne le dos à la forêt et tourne vers moi ton entrée.» La
petite isba tourna le dos à la forêt et vers Ivan son entrée. Le prince
Ivan entra et que vit-il?... Sur le poêle, sur la neuvième brique,
était couchée la sorcière Baba-Yaga : ses énormes dents acérées
traînaient jusqu'au plancher, son nez crochu et démesuré montait
jusqu'au plafond ! «Que me veux-tu, bon jeune homme? Accomplis-tu un
haut fait, ou fuis-tu quelque méfait?»
«Eh là! La vieille,
donne-moi à boire, nourris-moi, prépare-moi un bain, et ensuite tu me
questionneras!» Baba-Yaga lui prépara un bain, lui donna à manger, puis
le mit au lit ; alors le prince Ivan lui raconta qu'il cherchait son
épouse Vassilissa la Sage.
«Je sais, je sais, dit Baba-Yaga , ton
épouse est chez Kochtchéi l'Immortel. La retrouver sera compliqué, tuer
Kochtchéi n'est pas chose aisée: sa mort est au bout d'une aiguille,
cette aiguille est dans un œuf, cet œuf est dans une cane, cette cane
est dans un lièvre, ce lièvre est dans un coffre de pierre, ce coffre
est sur un très haut chêne, et ce chêne, Kochtchéi l'Immortel le garde
comme la prunelle de ses yeux. »
Le prince Ivan passa la nuit chez
la sorcière Baba-Yaga ; le lendemain matin, elle lui expliqua où se
trouvait le grand chêne. Marcha-t-il longtemps, longtemps ou un bref
moment..., enfin le prince Ivan arriva en un lieu où il vit un grand
chêne qui murmurait dans le vent, et sur le chêne un coffre de pierre
fort difficile à atteindre. Soudain, venu l'on ne sait d'où, arriva un
ours qui déracina le grand chêne. Le coffre tomba et se brisa. Un
lièvre bondit du coffre et s'enfuit à toute allure. Un autre lièvre
bondit à sa poursuite, le rattrapa et le mit en pièces. Une cane sortit
du lièvre et s'envola haut, très haut dans le ciel. Mais un canard
sauvage s'élança et frappa la cane qui laissa alors tomber un œuf, et
l'œuf se perdit dans la mer bleue...
Le prince Ivan se mit à
pleurer amèrement: comment retrouver un œuf dans la mer! Mais un
brochet s'approchait du rivage, l'œuf entre les dents. Le prince Ivan
cassa l'œuf et en sortit l'aiguille dont il brisa la pointe. Il la
brisa, et Kochtchéi l'Immortel se démena et se débattit. Mais il eut
beau se démener, le prince Ivan parvint à ses fins. Ainsi mourut
Kochtchéi. Le prince Ivan pénétra dans le palais blanc de Kochtchéi.
Vassilissa la Sage accourut vers lui et embrassa ses lèvres de miel. Le
prince Ivan et Vassilissa la Sage s'en revinrent chez eux, où ils
vécurent longtemps et furent très heureux.
qui avaient trois fils, tous trois jeunes et si vaillants, si bien
faits que la plume se refuse à les dépeindre, la bouche à les conter!
Le plus jeune s'appelait prince Ivan. Lorsqu'ils furent en âge de se
marier, le roi les réunit et leur dit : «Mes fils bien-aimés, avant
d'être vieux, j'aimerais bien vous marier afin de pouvoir contempler
vos enfants, mes petits-fils et petites-filles.» Les trois fils
répondirent à leur père: «Qu'il en soit selon ta volonté, père,
donne-nous ta bénédiction. Qui désires-tu nous donner pour femmes?»
«Eh bien, voici, mes fils; prenez vos arcs, sortez en rase campagne et
tirez une flèche: là où la flèche tombera, votre destin vous attendra.»
Les fils du roi s'inclinèrent devant leur père; ils prirent chacun une
flèche, sortirent en rase campagne, puis tendirent leurs arcs et
tirèrent. La flèche de l'aîné tomba dans la cour d'un seigneur, et la
fille du seigneur la ramassa. La flèche du cadet tomba dans la vaste
cour d'un riche marchand, et la fille du marchand la ramassa.Quant au
benjamin, le prince Ivan, sa flèche s'éleva dans les airs et s'envola
pour aller atterrir nul ne savait où. Le prince Ivan dut marcher,
marcher et marcher pour retrouver sa flèche. Il arriva enfin près d'un
étang et que vit-il?.. Une grenouille qui tenait la flèche entre ses
pattes. Le prince Ivan lui dit:«Grenouille, grenouillette, rends-moi ma
flèche.» Mais la grenouille lui répondit: « Prends-moi pour épouse !»
«Tu n'y penses pas! Comment puis-je épouser une grenouille !»
«Crois-moi, tel est ton destin.» Le prince Ivan se désespéra. Mais que
faire? Il prit donc la grenouille et la ramena chez lui. Le roi
organisa trois festins magnifiques: il maria son fils aîné à la fille
du seigneur, il maria son fils cadet à la fille du marchand et il maria
le pauvre prince Ivan à la grenouille
Le roi, un jour, convoqua ses fils: «Je veux savoir laquelle de vos
femmes est la plus habile de ses doigts. Qu'elles me cousent une
chemise pour demain.» Les trois fils s'inclinèrent devant leur père et
s'en furent. Le prince Ivan revint chez lui, s'assit et se prit la tête
entre les mains.Et la grenouille sur le plancher de sauter et de lui
demander: «Pourquoi, prince Ivan, as-tu la tête basse? Aurais-tu donc
quelque chagrin?»
«Mon père ordonne que tu lui couses une chemise
pour demain.» La grenouille alors répondit: «Ne t'afflige pas, prince
Ivan, va plutôt dormir: la nuit porte conseil.» Le prince Ivan s'en
alla dormir, et la grenouille sauta d'un bond sur le perron; elle
rejeta sa peau de grenouille et se transforma en Vassilissa la Sage,
dont la beauté est bien plus grande que contes ou légendes ne peuvent
la décrire. Vassilissa la Sage frappa dans ses mains et s'écria: «Mes
nounous, hâtez-vous, préparez-vous! Cousez-moi pour demain matin une
chemise aussi belle que celle que porte mon père.»
Le lendemain
matin, le prince Ivan s'éveilla, vit la grenouille sur le plancher et
la chemise sur la table enveloppée dans une serviette. Comme il se
réjouit ! Il apporta la chemise à son père. Le roi était en train de
recevoir les présents que lui avaient apportés ses fils aînés. Le plus
âgé déplia sa chemise, le roi la regarda et déclara: « Cette chemise
est bonne à porter dans une isba enfumée !» Le fils cadet déplia sa
chemise, et le roi s'écria:
«Elle est bonne pour aller au bain ! »
Alors le prince Ivan déplia sa chemise, ornée de merveilleux dessins en
fils d'or et d'argent. Le tsar s'exclama en la voyant:
«Voilà une
chemise à porter les jours de fête!» En revenant chez eux, les deux
frères aînés se dirent tout étonnés: «Certes, nous avions bien tort de
nous moquer de l'épouse du prince Ivan; elle n'est pas simple
grenouille, mais véritable sorcière.» Le roi fit à nouveau appeler ses
fils: «Que vos épouses me cuisent du pain pour demain matin? Je veux
savoir quelle est celle qui cuisine le mieux.» Le prince Ivan baissa la
tête et revint chez lui. Alors la grenouille lui demanda: «Pourquoi
as-tu du chagrin?» Et Ivan répondit: «II te faut préparer un pain pour
le donner au roi demain.» «Ne t'afflige pas, prince Ivan, va plutôt
dormir, la nuit porte conseil.»
Quant aux épouses des deux frères,qui d'abord s'étaient tant moquées, elles envoyèrent une vieille
servante pour bien observer et venir leur raconter comment la
grenouille ferait cuire le pain. Mais la grenouille était rusée et elle
avait tout deviné! Elle pétrit la pâte, puis perça un trou en haut du
four et y jeta la pâte ! La vieille servante s'empressa de tout répéter
à ses maîtresses, et celles-ci aussitôt firent de même. La grenouille
d'un bond sauta sur le perron, redevint Vassilissa la Sage, puis dans
ses mains elle frappa: «Mes nounous, hâtez-vous, préparez-vous ! Faites
cuire pour demain un bon pain blanc, le pain blanc que je mangeais chez
mon père.» Lorsque le prince Ivan s'éveilla le lendemain matin, il
trouva sur la table un pain merveilleusement décoré: des arabesques
étaient incrustées, sur ses flancs et dessus se dressaient des villes
entourées de leurs remparts.
Comme il se réjouit! Il enveloppa le
pain dans une grande serviette et l'apporta à son père. Le roi était en
train de recevoir les pains que lui apportaient ses fils aînés. Mais
leurs épouses avaient mis la pâte au four comme le leur avait dit la
vieille servante et n'avaient ainsi obtenu qu'une horrible saleté
complètement brûlée. Le tsar prit le pain que lui tendait son fils
aîné, le regarda et le renvoya à l'office. Puis il prit le pain que lui
tendait son fils cadet, et le renvoya aussi à l'office. Mais lorsqu'il
vit le pain du prince Ivan, le roi s'écria: «Voilà un pain à manger les
jours de fête ! » Et le roi convia ses trois fils à venir le lendemain,
avec leurs épouses, assister à un festin. Une fois de plus le prince
Ivan s'en revint chez lui tout triste et la tête basse. Et la
grenouille sur le plancher de sauter et lui demander: «Pourquoi as-tu
du chagrin, prince Ivan, ton père t'aurait-il mal accueilli?»
«Grenouille, grenouillette, comment ne pas m'attrister? Mon père
ordonne que j'assiste demain avec toi à un festin, mais à qui oserai-je
te montrer?» La grenouille répondit:
«Ne t'afflige pas, prince
Ivan, rends-toi seul au festin, moi, je te rejoindrai plus tard.»
Lorsque tu entendras un grand bruit de tonnerre, ne t'effraie pas. Si
on t'interroge, réponds: «C'est ma grenouillette qui arrive dans sa
cassette.» Le prince Ivan alla donc seul au festin. Ses frères aînés
arrivèrent avec leurs épouses bien vêtues, fort parées, les joues et
les sourcils fardés. Ils rirent et se moquèrent du prince Ivan :
«Pourquoi donc es-tu venu sans ta femme? Tu aurais pu nous l'amener
dans un mouchoir! Où donc as-tu trouvé une telle beauté? Tu as dû
longtemps chercher de par tous les étangs!»
Le roi, ses fils, leurs
épouses et les invités s'assirent autour des tables de chêne couvertes
de nappes brodées, et tous se mirent à festoyer. Mais on entendit
soudain un grand bruit de tonnerre qui fit trembler tout le palais. Les
invités épouvantés se levèrent d'un bond, mais le prince Ivan les
rassura :«Ne craignez rien, chers invités; c'est ma grenouillette qui
arrive dans sa cassette.»Une calèche dorée, par six chevaux blancs-
traînée, vint s'arrêter aux portes du palais ; et voilà qu'en sortit
Vassilissa la Sage, vêtue d'une robe azurée ornée d'étoiles et portant
sur la tête un croissant de lune; sa beauté était bien plus grande que
ne peuvent la décrire contes ou légendes. Elle prit le prince Ivan par
la main et le mena vers les tables de chêne couvertes de nappes
brodées. Et tout le monde se remit à manger, à boire et à se réjouir.
Vassilissa la Sage prit un verre, but, puis versa le vin qui restait
dans sa manche gauche. Elle mangea un morceau de cygne et jeta les os
dans sa manche droite. Les épouses des fils aînés virent sa ruse et
l'imitèrent ! Après avoir bu et mangé, on se mit à danser. Vassilissa
la Sage prit le prince Ivan par la main et le conduisit au milieu de la
salle. Elle dansa, dansa, tourna, tourna, et tout le monde
s'émerveilla. Un geste de sa main gauche, et un lac apparut. Un geste
de sa main droite, des cygnes blancs nagèrent. Le roi, ses invités,
tous furent enchantés. Puis les épouses des fils aînés se mirent elles
aussi à danser: un geste de la main gauche, et le vin jaillit de leur
manche pour éclabousser les pauvres invités. Un geste de la main
droite, et de leur manche s'échappèrent les os; l'un d'eux atterrit en
plein dans l'œil du roi. Celui-ci, courroucé, chassa ses deux
belles-filles.Pendant ce temps, le prince Ivan s'en était allé
discrètement; chez lui, il retrouva la peau de grenouille et la brûla.
Une fois rentrée, Vassilissa la Sage se mit à chercher la peau de
grenouille, mais elle ne put la trouver. Affligée, désespérée, elle
s'assit sur un banc et déclara au prince Ivan : «Hélas, hélas, prince
Ivan, qu'as-tu fait! Si tu avais attendu encore trois jours, j'aurais
été à toi pour toujours, mais maintenant je dois te dire adieu. Pour me
retrouver il te faudra aller au-delà des mers et des terres, chez
Kochtchéi l'Immortel.» Vassilissa la Sage se transforma en un
gris et s'envola par la fenêtre. Le prince Ivan pleura longtemps, puis
il s'inclina vers le Nord, l'Occident, le Sud et l'Orient et partit
droit devant lui pour retrouver son épouse Vassilissa la Sage.
Alla-t-il loin, bien loin ou très près, marcha-t-il longtemps, bien
longtemps ou un bref moment... ses bottes étaient toutes usées, sa
tunique déchirée, sa toque rongée par les pluies.
Il rencontra
alors un petit vieux chargé d'ans. «Bonjour, brave jeune homme! Que
cherches-tu et où vas-tu?» Le prince Ivan lui raconta ses malheurs. Le
petit vieux lui dit alors: «Ah, prince Ivan, pourquoi as-tu brûlé la
peau de grenouille? Ce n'est pas toi qui la lui avais mise, ce n'était
pas à toi de l'ôter. Vassilissa la Sage est maligne, sa sagesse est
plus grande encore que celle de son père. Celui-ci s'en est vexé et il
l'a condamnée à être grenouille trois années durant. Qu'y faire! Prends
la pelote que voici et où elle roulera, hardiment suis-la.» Le prince
Ivan remercia le petit vieux et suivit la pelote. Et la pelote de
rouler, et le prince de marcher. En pleine campagne, il rencontra un
ours; il le visa et voulut le tuer. Mais l'ours soudain se mit à
parler: «Ne me tue pas, prince Ivan, je te serai utile un jour.» Le
prince Ivan eut pitié de l'ours et ne le tua pas. Il continua son
chemin. Soudain que vit-il?... Un canard sauvage qui volait vers lui.
Il le visa. Mais le canard se mit à parler et lui dit: «Ne me tue pas,
prince Ivan, je te serai utile un jour.» Le prince Ivan eut pitié du
canard sauvage et continua son chemin. Soudain voilà qu'accourut un
lièvre. Le prince Ivan s'apprête à lui décocher une flèche, mais le
lièvre se mit à parler et lui dit : «Ne me tue pas, prince Ivan, je te
serai utile un jour.» Ivan eut pitié du lièvre et continua son chemin.
Il arriva au bord de la mer bleue et vit un brochet sur le sable ;
celui-ci respirait à peine et lui dit : «Oh, prince Ivan, aie pitié de
moi, rejette-moi dans la mer bleue!»Il rejeta le brochet à la mer et
continua de marcher sur le rivage.
Longtemps, longtemps ou un bref
moment... La pelote continua de rouler et l'emmena dans une forêt. Là
se dressait une isba montée sur des pattes de poulet et qui ne cessait
de tourner. «Isba, petite isba, reprends ta place, celle qui t'a été
donnée: tourne le dos à la forêt et tourne vers moi ton entrée.» La
petite isba tourna le dos à la forêt et vers Ivan son entrée. Le prince
Ivan entra et que vit-il?... Sur le poêle, sur la neuvième brique,
était couchée la sorcière Baba-Yaga : ses énormes dents acérées
traînaient jusqu'au plancher, son nez crochu et démesuré montait
jusqu'au plafond ! «Que me veux-tu, bon jeune homme? Accomplis-tu un
haut fait, ou fuis-tu quelque méfait?»
«Eh là! La vieille,
donne-moi à boire, nourris-moi, prépare-moi un bain, et ensuite tu me
questionneras!» Baba-Yaga lui prépara un bain, lui donna à manger, puis
le mit au lit ; alors le prince Ivan lui raconta qu'il cherchait son
épouse Vassilissa la Sage.
«Je sais, je sais, dit Baba-Yaga , ton
épouse est chez Kochtchéi l'Immortel. La retrouver sera compliqué, tuer
Kochtchéi n'est pas chose aisée: sa mort est au bout d'une aiguille,
cette aiguille est dans un œuf, cet œuf est dans une cane, cette cane
est dans un lièvre, ce lièvre est dans un coffre de pierre, ce coffre
est sur un très haut chêne, et ce chêne, Kochtchéi l'Immortel le garde
comme la prunelle de ses yeux. »
Le prince Ivan passa la nuit chez
la sorcière Baba-Yaga ; le lendemain matin, elle lui expliqua où se
trouvait le grand chêne. Marcha-t-il longtemps, longtemps ou un bref
moment..., enfin le prince Ivan arriva en un lieu où il vit un grand
chêne qui murmurait dans le vent, et sur le chêne un coffre de pierre
fort difficile à atteindre. Soudain, venu l'on ne sait d'où, arriva un
ours qui déracina le grand chêne. Le coffre tomba et se brisa. Un
lièvre bondit du coffre et s'enfuit à toute allure. Un autre lièvre
bondit à sa poursuite, le rattrapa et le mit en pièces. Une cane sortit
du lièvre et s'envola haut, très haut dans le ciel. Mais un canard
sauvage s'élança et frappa la cane qui laissa alors tomber un œuf, et
l'œuf se perdit dans la mer bleue...
Le prince Ivan se mit à
pleurer amèrement: comment retrouver un œuf dans la mer! Mais un
brochet s'approchait du rivage, l'œuf entre les dents. Le prince Ivan
cassa l'œuf et en sortit l'aiguille dont il brisa la pointe. Il la
brisa, et Kochtchéi l'Immortel se démena et se débattit. Mais il eut
beau se démener, le prince Ivan parvint à ses fins. Ainsi mourut
Kochtchéi. Le prince Ivan pénétra dans le palais blanc de Kochtchéi.
Vassilissa la Sage accourut vers lui et embrassa ses lèvres de miel. Le
prince Ivan et Vassilissa la Sage s'en revinrent chez eux, où ils
vécurent longtemps et furent très heureux.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
Sivka-Bourka
Sivka-Bourka
Il
était une fois un vieux qui avait trois fils. Le troisième,
Ivan-l'Idiot, ne faisait rien et restait toute la journée assis sur le
poêle à renifler. Le père sentit venir la mort et dit: «Mes enfants,
quand je serai mort, venez sur ma tombe chacun votre tour trois nuits
de suite!» Il mourut et on le mit en terre. La première nuit tomba.
C'était au fils aîné d'aller le veiller mais, fut-ce la peur ou la
paresse, il hésita et dit au plus jeune; «Ivan, toi qui n'as rien à
faire, va donc sur la tombe de notre père et veille pour moi!» Ivan
s'équipa, gagna la tombe, s'y allongea. A minuit pile, la tombe
s'ouvre, le vieux sort et demande:
«Qui est là? Toi, mon fils aîné? — Non, père! C'est moi, Ivan!» Alors, le reconnaissant, le vieux dit:
«Pourquoi mon fils aîné n'est-il pas venu? — II m'a envoyé, père ! — Grand bien te fasse ! »
Et le vieux siffle d'une voix tonnante:Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Sivka-Bourka
court, la terre tremble, de ses yeux jaillissent les flammes, de ses
naseaux s'échappe la fumée. Le vieux prononce: «Tiens, mon fils, voici
un bon cheval! Et toi, Sivka-Bourka, sers mon fils comme tu m'as
servi!» Et le vieux se recoucha dans la tombe. Ivan flatta
Sivka-Bourka, le caressa, puis, le laissant aller, il retourna au logis
où ses frères l'assaillirent de questions:
«Alors, Ivan, ça s'est bien passé, cette nuit? — Mais, très, très bien, mes frères!»
La
deuxième nuit était arrivée. Le frère cadet ne voulait pas non plus
passer la nuit sur la tombe: «Ivan, va sur la tombe de notre père!
dit-il, passes-y la nuit à ma place!» Sans se faire prier, Ivan se
rendit jusqu'à la tombe, s'allongea, attendit minuit. A minuit, la
tombe s'ouvre, le père sort, dit:
«Est-ce toi, mon fils cadet? —
Non, répond l'idiot, c'est encore moi, père!» Le vieux se met à crier,
à siffler d'une voix tonnante: Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Cheval
bai court, de ses yeux jaillissent les flammes, de ses naseaux
s'échappe la fumée.«Cheval mage, sers mon fils comme tu m'as servi!»
Sur ces mots, le vieux dit adieu à son fils et se recoucha dans la
tombe. Ivan flatta Cheval mage, le caressa, puis, lui rendant la
liberté, il rentra au logis où les aînés, derechef' s'inquiétèrent:
«Alors, Ivan, cette nuit? — Tout va bien, tout va bien, mes frères!»
Le temps passa, les deux aînés travaillaient, Ivan, lui, ne faisait
rien. Un beau jour, sur la place publique, le tsar fit crier ceci: «La
main de la princesse sera accordée à celui qui réussira à décrocher son
portrait, suspendu au balcon de la maison royale!» Les frères aînés
résolurent d'aller voir qui décrocherait le portrait. Assis derrière le
poêle, Ivan passa la tête: «Frères, donnez-moi un cheval, que j'y aille
moi aussi!» Ceux-ci s'esclaffèrent: «Ah, ah, l'Idiot! Mais tu veux
faire rire le monde! Reste donc sur ton poêle! Qui a besoin de toi?»
Mais allez vous débarrasser d'Ivan! A bout de patience, les frères
dirent: «Bon, ça va, l'Idiot, on te laisse la rosse à trois jambes!»,
et ils partirent. A son tour, Ivan s'en fut à cheval par la vaste
plaine, par la steppe sans fin. Une fois là, il sauta à bas de la
rosse, l'égorgea, lui arracha la peau, qu'il suspendit à une haie, et
jeta la chair. Puis il cria, il siffla d'une voix tonnante: « Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Sivka-Bourka
court, sous ses sabots la terre tremble, de ses yeux jaillissent les
flammes, de ses naseaux s'échappe la fumée. Ivan entra par une oreille,
but et mangea, ressortit par l'autre, tout habillé et si beau, si
vaillant que ses frères eux-mêmes ne l'auraient reconnu. Il enfourcha
le cheval et galopa sus au portrait. Il y avait là un monde fou. On se
retourne sur le vaillant gaillard, on s'écarte. D'un bond, Ivan
traverse la place, d'un autre bond son cheval passe à une tête sous le
portrait. En un éclair il avait disparu. Ivan laissa le cheval, rentra
à pied à la maison et remonta sur son poêle. Les aînés ne tardèrent pas
à arriver. Les voilà qui racontent à leurs femmes: «Si vous saviez, les
femmes, quel vaillant gaillard s'est présenté, un fier luron comme
jamais il n'en fut! Il est passé à une tête du portrait et a filé comme
une flèche! Mais il reviendra...» La voix d'Ivan descend du poêle:
«Frères,
est-ce que ce n'était pas moi, par hasard? - Toi, ah, la bonne blague!
Toi qui n'es bon qu'à rester sur le poêle à te moucher le nez!»
A quelque temps de là, le tsar lança à nouveau le même appel; à
nouveau, les aînés s'équipèrent. Ivan dit: «Frères, donnez-moi un
cheval!» Eux de répondre: «Tu vas encore nous crever un cheval,
l'Idiot! Reste donc à la maison.» En vain. Ils ne purent se défaire de
lui et durent lui abandonner la jument bancale. Ivan la monta,
l'égorgea, suspendit sa peau a la haie et jeta la chair. Puis il cria,
il siffla d'une voix tonnante: Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Cheval
bai court, sous ses sabots la terre tremble, de ses yeux jaillissent
les flammes, de ses naseaux s'échappe la fumée. Ivan entra par
l'oreille droite, se changea, ressortit par l'oreille gauche tout beau
tout fringant, sauta en selle, courut bride abattue. Il passa à une
demi-tête du portrait et disparut dans l'instant. Alors, relâchant
Cheval bai, il rentra seul à la maison et reprit sa place sur le poêle.
A leur retour, les aînés annoncèrent: «Eh bien, les femmes, on l'a
revu, le vaillant gaillard, il est passé à une demi-tête du portrait,
cette fois!» La voix d'Ivan tomba:«Frères, est-ce que ce n'était pas
moi? — Allons, l'Idiot, ne te raconte pas d'histoires!»
Une troisième fois, on cria l'appel du tsar. Tandis que les frères s'apprêtaient, Ivan demanda:
«Donnez-moi un cheval, mes frères, je veux aller voir! — Oh, la paix, l'Idiot ! Tu nous esquintes tous nos chevaux ! »
Ils
eurent beau faire, ils ne purent lui échapper et lui cédèrent la rosse
efflanquée. Ivan la monta, l'égorgea, la jeta. Puis il cria, il siffla
d'une voix tonnante: Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Cheval
mage court, sous ses sabots la terre tremble, de ses yeux jaillissent
les flammes, de ses naseaux s'échappe la fumée. Ivan-1 Idiot entra par
une oreille, but et mangea, ressortit par l'autre et, tel un vaillant
gaillard, sauta en selle et démarra en trombe. Rapide comme le vent, il
atteignit le palais royal, sauta et, dans l'élan, décrocha portrait et
serviette brodée. En un éclair, il avait disparu. Laissant aller son
cheval, il rentra à pied à la maison, remonta sur le poêle et attendit
ses frères. Les voilà de retour: «Eh bien, les femmes! Cette fois,
c'est fait, le portrait, il l'a eu!» Caché derrière le tuyau du poêle,
Ivan dit: «Frères, est-ce que ce n'était pas moi? — Reste tranquille,
l'Idiot! Qu'est-ce que tu vas encore inventer?»
Peu de temps après, le tsar organisa un bal, il y convia tous les
boïars, les princes, les conseillers, les sénateurs, les marchands, les
bourgeois et les paysans. Les frères d'Ivan y allèrent et Ivan aussi.
Il chercha le poêle, se cala derrière le tuyau et resta là à regarder,
bouche bée. La princesse régala ses invités, à chacun elle offrit de la
bière et en profita pour regarder s'il n'en était pas un qui prit pour
s'essuyer sa serviette brodée, car celui-là serait à coup sûr son
fiancé. Mais non, personne ne tenait sa serviette. Quant à Ivan, elle
était passée devant lui sans le voir. Les invités s'en furent. Le
lendemain, le tsar donna un autre bal; cette fois encore, celui qui
avait décroché la serviette restait introuvable. «Comment se peut-il,
se prit-elle à songer, que mon fiancé ne soit pas là?» Soudain, jetant
un coup d'œil vers le tuyau du poêle, elle avisa Ivan, en loques,
couvert de suie, les cheveux en bataille. Elle lui versa un verre de
bière, le lui apporta. Les frères n'en revenaient pas: «Comment? Elle
offre à boire à l'Idiot?» Ivan but et, pour s'essuyer, il sortit la
serviette brodée. Toute joyeuse, la princesse le prit par la main, le
conduisit à son père et dit: «Père, voici mon fiancé!» Les frères en
reçurent comme un coup au cœur: «Elle prend pour fiancé l'Idiot! Elle a
perdu la raison!» Mais à quoi bon les discours? On les maria et on
festoya joyeusement. Et notre Ivan devint non plus Ivan mais
Ivan-gendre du tsar. Il se lava, s'habilla, devint un fier gaillard,
méconnaissable! C'est alors que les frères comprirent ce que signifiait
aller dormir sur la tombe de son père!
Il
était une fois un vieux qui avait trois fils. Le troisième,
Ivan-l'Idiot, ne faisait rien et restait toute la journée assis sur le
poêle à renifler. Le père sentit venir la mort et dit: «Mes enfants,
quand je serai mort, venez sur ma tombe chacun votre tour trois nuits
de suite!» Il mourut et on le mit en terre. La première nuit tomba.
C'était au fils aîné d'aller le veiller mais, fut-ce la peur ou la
paresse, il hésita et dit au plus jeune; «Ivan, toi qui n'as rien à
faire, va donc sur la tombe de notre père et veille pour moi!» Ivan
s'équipa, gagna la tombe, s'y allongea. A minuit pile, la tombe
s'ouvre, le vieux sort et demande:
«Qui est là? Toi, mon fils aîné? — Non, père! C'est moi, Ivan!» Alors, le reconnaissant, le vieux dit:
«Pourquoi mon fils aîné n'est-il pas venu? — II m'a envoyé, père ! — Grand bien te fasse ! »
Et le vieux siffle d'une voix tonnante:Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Sivka-Bourka
court, la terre tremble, de ses yeux jaillissent les flammes, de ses
naseaux s'échappe la fumée. Le vieux prononce: «Tiens, mon fils, voici
un bon cheval! Et toi, Sivka-Bourka, sers mon fils comme tu m'as
servi!» Et le vieux se recoucha dans la tombe. Ivan flatta
Sivka-Bourka, le caressa, puis, le laissant aller, il retourna au logis
où ses frères l'assaillirent de questions:
«Alors, Ivan, ça s'est bien passé, cette nuit? — Mais, très, très bien, mes frères!»
La
deuxième nuit était arrivée. Le frère cadet ne voulait pas non plus
passer la nuit sur la tombe: «Ivan, va sur la tombe de notre père!
dit-il, passes-y la nuit à ma place!» Sans se faire prier, Ivan se
rendit jusqu'à la tombe, s'allongea, attendit minuit. A minuit, la
tombe s'ouvre, le père sort, dit:
«Est-ce toi, mon fils cadet? —
Non, répond l'idiot, c'est encore moi, père!» Le vieux se met à crier,
à siffler d'une voix tonnante: Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Cheval
bai court, de ses yeux jaillissent les flammes, de ses naseaux
s'échappe la fumée.«Cheval mage, sers mon fils comme tu m'as servi!»
Sur ces mots, le vieux dit adieu à son fils et se recoucha dans la
tombe. Ivan flatta Cheval mage, le caressa, puis, lui rendant la
liberté, il rentra au logis où les aînés, derechef' s'inquiétèrent:
«Alors, Ivan, cette nuit? — Tout va bien, tout va bien, mes frères!»
Le temps passa, les deux aînés travaillaient, Ivan, lui, ne faisait
rien. Un beau jour, sur la place publique, le tsar fit crier ceci: «La
main de la princesse sera accordée à celui qui réussira à décrocher son
portrait, suspendu au balcon de la maison royale!» Les frères aînés
résolurent d'aller voir qui décrocherait le portrait. Assis derrière le
poêle, Ivan passa la tête: «Frères, donnez-moi un cheval, que j'y aille
moi aussi!» Ceux-ci s'esclaffèrent: «Ah, ah, l'Idiot! Mais tu veux
faire rire le monde! Reste donc sur ton poêle! Qui a besoin de toi?»
Mais allez vous débarrasser d'Ivan! A bout de patience, les frères
dirent: «Bon, ça va, l'Idiot, on te laisse la rosse à trois jambes!»,
et ils partirent. A son tour, Ivan s'en fut à cheval par la vaste
plaine, par la steppe sans fin. Une fois là, il sauta à bas de la
rosse, l'égorgea, lui arracha la peau, qu'il suspendit à une haie, et
jeta la chair. Puis il cria, il siffla d'une voix tonnante: « Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Sivka-Bourka
court, sous ses sabots la terre tremble, de ses yeux jaillissent les
flammes, de ses naseaux s'échappe la fumée. Ivan entra par une oreille,
but et mangea, ressortit par l'autre, tout habillé et si beau, si
vaillant que ses frères eux-mêmes ne l'auraient reconnu. Il enfourcha
le cheval et galopa sus au portrait. Il y avait là un monde fou. On se
retourne sur le vaillant gaillard, on s'écarte. D'un bond, Ivan
traverse la place, d'un autre bond son cheval passe à une tête sous le
portrait. En un éclair il avait disparu. Ivan laissa le cheval, rentra
à pied à la maison et remonta sur son poêle. Les aînés ne tardèrent pas
à arriver. Les voilà qui racontent à leurs femmes: «Si vous saviez, les
femmes, quel vaillant gaillard s'est présenté, un fier luron comme
jamais il n'en fut! Il est passé à une tête du portrait et a filé comme
une flèche! Mais il reviendra...» La voix d'Ivan descend du poêle:
«Frères,
est-ce que ce n'était pas moi, par hasard? - Toi, ah, la bonne blague!
Toi qui n'es bon qu'à rester sur le poêle à te moucher le nez!»
A quelque temps de là, le tsar lança à nouveau le même appel; à
nouveau, les aînés s'équipèrent. Ivan dit: «Frères, donnez-moi un
cheval!» Eux de répondre: «Tu vas encore nous crever un cheval,
l'Idiot! Reste donc à la maison.» En vain. Ils ne purent se défaire de
lui et durent lui abandonner la jument bancale. Ivan la monta,
l'égorgea, suspendit sa peau a la haie et jeta la chair. Puis il cria,
il siffla d'une voix tonnante: Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Cheval
bai court, sous ses sabots la terre tremble, de ses yeux jaillissent
les flammes, de ses naseaux s'échappe la fumée. Ivan entra par
l'oreille droite, se changea, ressortit par l'oreille gauche tout beau
tout fringant, sauta en selle, courut bride abattue. Il passa à une
demi-tête du portrait et disparut dans l'instant. Alors, relâchant
Cheval bai, il rentra seul à la maison et reprit sa place sur le poêle.
A leur retour, les aînés annoncèrent: «Eh bien, les femmes, on l'a
revu, le vaillant gaillard, il est passé à une demi-tête du portrait,
cette fois!» La voix d'Ivan tomba:«Frères, est-ce que ce n'était pas
moi? — Allons, l'Idiot, ne te raconte pas d'histoires!»
Une troisième fois, on cria l'appel du tsar. Tandis que les frères s'apprêtaient, Ivan demanda:
«Donnez-moi un cheval, mes frères, je veux aller voir! — Oh, la paix, l'Idiot ! Tu nous esquintes tous nos chevaux ! »
Ils
eurent beau faire, ils ne purent lui échapper et lui cédèrent la rosse
efflanquée. Ivan la monta, l'égorgea, la jeta. Puis il cria, il siffla
d'une voix tonnante: Cheval brun, cheval bai,
Coursier sage et avisé,
Surgis soudain devant moi,
Comme sur l'herbe la feuille des bois ! Cheval
mage court, sous ses sabots la terre tremble, de ses yeux jaillissent
les flammes, de ses naseaux s'échappe la fumée. Ivan-1 Idiot entra par
une oreille, but et mangea, ressortit par l'autre et, tel un vaillant
gaillard, sauta en selle et démarra en trombe. Rapide comme le vent, il
atteignit le palais royal, sauta et, dans l'élan, décrocha portrait et
serviette brodée. En un éclair, il avait disparu. Laissant aller son
cheval, il rentra à pied à la maison, remonta sur le poêle et attendit
ses frères. Les voilà de retour: «Eh bien, les femmes! Cette fois,
c'est fait, le portrait, il l'a eu!» Caché derrière le tuyau du poêle,
Ivan dit: «Frères, est-ce que ce n'était pas moi? — Reste tranquille,
l'Idiot! Qu'est-ce que tu vas encore inventer?»
Peu de temps après, le tsar organisa un bal, il y convia tous les
boïars, les princes, les conseillers, les sénateurs, les marchands, les
bourgeois et les paysans. Les frères d'Ivan y allèrent et Ivan aussi.
Il chercha le poêle, se cala derrière le tuyau et resta là à regarder,
bouche bée. La princesse régala ses invités, à chacun elle offrit de la
bière et en profita pour regarder s'il n'en était pas un qui prit pour
s'essuyer sa serviette brodée, car celui-là serait à coup sûr son
fiancé. Mais non, personne ne tenait sa serviette. Quant à Ivan, elle
était passée devant lui sans le voir. Les invités s'en furent. Le
lendemain, le tsar donna un autre bal; cette fois encore, celui qui
avait décroché la serviette restait introuvable. «Comment se peut-il,
se prit-elle à songer, que mon fiancé ne soit pas là?» Soudain, jetant
un coup d'œil vers le tuyau du poêle, elle avisa Ivan, en loques,
couvert de suie, les cheveux en bataille. Elle lui versa un verre de
bière, le lui apporta. Les frères n'en revenaient pas: «Comment? Elle
offre à boire à l'Idiot?» Ivan but et, pour s'essuyer, il sortit la
serviette brodée. Toute joyeuse, la princesse le prit par la main, le
conduisit à son père et dit: «Père, voici mon fiancé!» Les frères en
reçurent comme un coup au cœur: «Elle prend pour fiancé l'Idiot! Elle a
perdu la raison!» Mais à quoi bon les discours? On les maria et on
festoya joyeusement. Et notre Ivan devint non plus Ivan mais
Ivan-gendre du tsar. Il se lava, s'habilla, devint un fier gaillard,
méconnaissable! C'est alors que les frères comprirent ce que signifiait
aller dormir sur la tombe de son père!
yassine- Nombre de messages : 713
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Vassilisa la belle
Vassilisa la belle
il
était une fois un marchand qui avait une fille unique, Vassilisa la
Belle. Sa femme mourut alors que la petite allait sur ses huit ans.
Sentant approcher sa fin, la mère l'appela, prit une petite poupée
cachée sous ses draps et dit à Vassilisa :
- Écoute mes dernières
paroles, obéis à mes dernières volontés. Je te donne cette poupée avec
ma bénédiction maternelle. Garde-la, ne la montre à personne. Si tu est
dans la peine, si quelque mal t'advient, offre à manger à ta poupée et
demande-lui conseil. Elle t'aidera dans le malheur.
La femme du
marchand embrassa sa fille et mourut. Le veuf se désola comme il
convient, puis songea à se remarier. Il choisit une femme plus très
jeune, veuve comme lui, avec deux filles de l'âge de la sienne: une
bonne ménagère, s'est-il dit, et mère de famille avisée. Il l'épousa
donc. Mais la femme et ses filles étaient jalouses de Vassilisa. Elles
la tourmentaient, de besogne l'accablaient, pour que le vent et le
soleil la fassent noircir, que le travail la fasse dépérir. Mais
Vassilisa supportait tout sans se plaindre et devenait chaque jour plus
belle, chaque jour plus blanche et rosé, alors que la marâtre et ses
filles qui ne bougeaient pas, ne faisaient rien de leurs dix doigts,
maigrissaient de dépit, jaunissaient d'envie.
Ce qu'elles ne
savaient pas, c'est que sa poupée aidait Vassilisa. Le soir, quand tout
le monde s'endormait, la jeune fille s'enfermait dans son appentis,
servait à manger à sa poupée et lui racontait ses malheurs : - Petite
poupée, mange à ta faim, écoute mes peines-chagrins! Triste est la
maison de mon père, la méchante marâtre veut ma perte.
La poupée mangeait, puis elle consolait Vassilisa, la conseillait et,
au matin, faisait tout le travail à sa place. Vassilisa se repose à la
fraîcheur, cueille des fleurs et, pendant ce temps, l'eau est puisée,
les choux arrosés, le potager sarclé, le feu allumé. Et la jeune fille
choyait sa poupée, lui gardait les meilleurs morceaux. Plus Vassilisa
grandissait, plus elle embellissait et plus sa marâtre la haïssait. Un
jour le marchand dut partir en voyage pour longtemps. La marâtre s'en
alla habiter une maison à l'orée de la forêt. Dans cette forêt vivait
Baba-Yaga, la vieille sorcière. Elle ne laissait personne approcher de
son domaine et croquait les gens comme des poulets. Pour se débarasser
de Vassilisa, sa marâtre l'envoyait tout le temps dans la forêt -
chercher ceci, apporter cela. Mais la jeune fille revenait saine et
sauve, sa poupée la guidait, l'éloignait de la maison de Baba-Yaga.
L'automne vint.. Dehors, il faisait sombre, il pleuvait, le vent
hurlait, c’était déjà la fin de l’automne. Durant les longues soirées
les filles travaillaient : l'une à faire de la dentelle, l'autre à
tricoter des bas et Vassilisa à filer le lin. La marâtre leur donna la
tâche pour la nuit et se coucha, ne laissant qu'une chandelle allumée
pour les travailleuses. L'une de ses filles fit mine de moucher la
chandelle et l'éteignit, comme sans faire exprès. Et de s'exclamer :
-
Quel malheur ! L'ouvrage n'est pas terminé et il n'y a pas un tison
dans la maison. Il faut aller demander du feu à Baba-Yaga ! Qui va y
aller ?
- Pas moi, dit la dentellière. Avec mes épingles, j'y vois clair !
-
Ni moi, dit la tricoteuse. Mes aiguilles brillent, j'y vois bien. Et
toutes les deux s'en prirent à Vassilisa : - C'est à toi d'aller
chercher du feu chez Baba-Yaga !
Et elles la poussèrent hors de la pièce. Vassilisa courut à son appentis, servit le souper à la poupée, lui dit en pleurant :
- Petite poupée, mange à ta faim, écoute ma peine-chagrin ! On me dit d'aller chez Baba-Yaga. Elle va me dévorer !
-
Ne crains rien, lui répondit la poupée. Prends-moi avec toi et va
tranquillement où l'on t'envoie. Tant que je suis là, nul mal ne peut
t'arriver.
Vassilisa mit sa poupée dans sa poche et s'en alla dans
la forêt obscure, sur des sentes inconnues, sur des chemins perdus. La
forêt était épaisse, aucune étoile ne brillait dans les cieux, la lune
était cachée. Vassilisa cheminait depuis quelque temps quand un
cavalier la dépassa: tout blanc, de blanc vêtu et monté sur un cheval
blanc, harnaché de blanc. Aussitôt le ciel devint plus clair. Elle
poursuivit son chemin et vit un autre cavalier : tout rouge, vêtu de
rouge et monté sur un cheval rouge de rouge harnaché. Et le soleil se
leva. Ce n'est qu'au soir tombant que Vassilisa atteignit la clairière
où vivait Baba-Yaga. Sa maison d'ossements était faite, des crânes avec
des yeux ornaient le faîte, pour montants de portail des tibias
humains, pour loquets-ferrures des bras avec des mains, et en guise de
cadenas verrouillant la porte, une bouche avec des dents prêtes à
mordre.
La pauvre jeune fille tremblait comme une feuille en voyant
ça, quand un cavalier arriva : tout noir, de noir vêtu et monté sur un
cheval noir au noir harnais. Aussitôt la nuit tomba et s'allumèrent les
yeux des crânes, si bien qu'on y voyait comme en plein jour. Vassilisa
aurait bien voulu se sauver, mais la peur la clouait sur place. Tout à
coup il se fit grand bruit dans la forêt. Les branches craquaient, les
feuilles crissaient. Et déboucha dans la clairière Baba-Yaga, vieille
sorcière. Dans un mortier elle voyage, du pilon l'encourage, du balai
efface sa trace. Le mortier s'arrêta devant le portail, Baba-Yaga huma
l'air et s'écria :
- Ça sent la chair humaine par ici ! Montre-toi, qui que tu sois ! Toute tremblante, Vassilisa s'approcha en saluant bas :
- C'est moi, grand-mère. Les filles de ma marâtre m'ont envoyée chez toi, te demander du feu.
-
Oh, je les connais, dit Baba-Yaga. C'est bon, tu vas rester ici et me
servir. Si le travail est bien fait, je te donnerai du feu, autrement,
je te mangerai ! Baba-Yaga se tourna vers le portail et cria :
-
Déverrouillez-vous, cadenas résistants ! Large portail, ouvre-toi à
deux battants ! Le portail s'ouvrit et Baba-Yaga roula dans la cour en
sifflotant. Vassilisa la suivit. Et le portail se referma. Une fois
dans la maison, Baba-Yaga s'affala sur un banc et ordonna à Vassilisa :
- Que tout ce qui est au four et dans le garde-manger devant moi vienne se ranger ! Et dépêche-toi, j'ai faim !
Vassilisa
se mit à la servir. Pâtés et rôtis, salmis et confits, tartes et
tourtes, jambons et soupes. Elle tira du cellier piquette et
eau-de-vie, bières et vins à l'envies - de quoi boire-manger pour dix !
Baba-Yaga nettoya tous les plats, vida brocs et bouteilles jusqu'à la
dernière goutte. Elle ne laissa pour Vassilisa qu'un quignon de pain,
un peu de soupe et un bout de cochon rôti. Puis elle dit :
- Demain,
après mon départ, tu balayeras la cour, nettoieras la maison,
prépareras le dîner, rangeras le linge. Après ça, tu prendras dans la
huche un boisseau de blé que tu vas trier grain par grain. Et tâche que
tout soit bien fait, sinon je te mange ! Elle se coucha et se mit à
ronfler. Vassilisa servit à sa poupée les restes du souper de Baba-Yaga
et lui dit en pleurant :
- Petite poupée, mange à ta faim, écoute ma peine-chagrin ! Si je ne fais pas tout ce travail, Baba-Yaga va me manger !
- Ne crains rien, lui répondit la poupée. Va dormir tranquille, le soir voit tout en noir, mais le matin est plus malin !
Vassilisa se leva avant l'aube, mais Baba-Yaga était déjà debout.
Bientôt les yeux des crânes s'éteignirent. Passa le cavalier blanc et
le jour se leva. Baba-Yaga sortit dans la cour et siffla, aussitôt le
mortier vint se ranger devant elle, avec le pilon et le balai. Le
cavalier rouge passa et le soleil apparut. Baba-Yaga monta dans son
équipage et fila bon train. Dans un mortier voyage, du pilon
l'encourage, du balai efface sa trace!... Restée seule, Vassilisa fit
le tour de la maison en se demandant par quel bout commencer l'ouvrage,
quand elle vit que tout était déjà fait, la poupée triait les derniers
grains de blé. Vassilisa l'embrassa :
- Comment te remercier, ma
poupée chérie ! Tu m'a sauvé la vie. La poupée grimpa dans sa poche en
disant: - Tu n'as plus que le dîner à préparer. Puis repose-toi.
Au
soir tombant, Vassilisa mit la table. Bientôt le cavalier noir passa et
la nuit tor Les yeux des crânes s'étaient allumés, on entendit les
branches craquer, les feuilles cri: c'est Baba-Yaga qui arrivait.
Vassilisa sortit à sa rencontre.
- Le travail est-il fait, l'ouvrage
bien terminé ? demanda Baba-Yaga. Vois par toi-même, grand-mère,
répondit la jeune fille. Baba-Yaga inspecta tout, regarda partout sans
trouver rien à redire. Elle grogi « Bon, ça peut aller...» puis appela :
- Fidèles serviteurs, mes amis de cœur, venez moudre mon blé !
Alors trois paires de bras ont apparu, ont emporté le grain hors de la vue. Baba-Y dîna et se coucha en disant :
-
Demain, en plus de tout ce que tu as fait aujourd'hui, tu vas trier un
boisseau graines de pavot. De la terre s'y est mêlée, tâche qu'il n'en
reste pas trace, sinon je mange ! Elle se mit vite à ronfler. Vassilisa
servit sa poupée qui mangea et lui dit comme la veille : - Va dormir
tranquillement, tout sera fait. Le matin est le plus malin !
Le
lendemain, l'ouvrage fait en un tournemain, Vassilisa se reposa
tranquilleme. A son retour, Baba-Yaga inspecta tout, regarda dans tous
les recoins, ne trouva rien redire. Elle appela :
- Fidèles
serviteurs, mes amis de cœur, venez presser l'huile de mes graines de
pavot ! Trois paires de bras ont apparu, ont emporté les graines hors
de la vue. Baba-Yaga s'attabla pour dîner. Vassilisa la servait en
silence et la sorcière grommela :
- Pourquoi ne dis-tu rien ? Tu es là, comme une muette !
- C'est que je n'osais pas, grand-mère ! Mais si tu le permets, je voudrais bien demander quelque chose.
- Demande ! Mais toute question n'est pas bonne à poser. D'en savoir trop Iong, on vieillit trop vite !
Je voudrais que tu m'expliques ce que j'ai vu, grand-mère. En venant chez te un cavalier blanc m'a croisée. Qui est-il ?
- C'est mon jour clair, répondit Baba-Yaga.
- Après ça j'ai vu un cavalier tout rouge, qui est-ce ?
- C'est mon soleil ardent.
- Et puis j'ai vu un cavalier tout noir, qui est-ce ?
- C'est ma sombre nuit, répondit Baba-Yaga. Tous trois sont mes serviteur fidèles ! Tu veux savoir autre chose ?
Vassilisa
pensait aux trois paires de bras, mais n'en souffla mot. Baba-Yaga lui
dit - Eh bien, tu ne me poses plus de questions ?
- J'en sais bien suffisamment pour moi, grand-mère ! Tu l'as dit toi-même - à trop savoir, on vieillit vite.
-
C'est bien, - approuva Baba-Yaga. - Tu interroges sur ce que tu as vu
dehors, pas sur ce qui se passe dedans. J'entends laver mon linge en
famille, et les trop curieux, je les mange ! Et maintenant c'est mon
tour de te poser une question: comment arrives-tu à faire tout le
travail que je te donne ?
- La bénédiction maternelle me vient en aide, grand-mère.
-
C'est donc ça ? Eh bien, fille bénie, tu vas prendre la porte, et tout
de suite encore ! Je n'en veux pas, de bénis, chez moi !
Baba-Yaga
poussa la jeune fille dehors, mais avant de refermer le portail, elle
prit un crâne aux yeux ardents, le mit au bout d'un bâton qu'elle
fourra dans la main de Vassilisa : Voilà du feu pour les filles de ta
marâtre ! Après tout, c'est pour ça qu'elles t'avaient envoyée chez moi.
Vassilisa partit en courant dans la forêt. Les yeux du crâne
éclairaient son chemin et ne s'éteignirent qu'à l'aube. Elle chemina
toute la journée et, vers le soir, comme elle approchait de sa maison,
elle se dit : « Depuis le temps, elles ont sûrement trouvé du feu...»
et voulut jeter le crâne. Mais une voix en sortit :
- Ne me jette pas, porte-moi chez ta marâtre !
Vassilisa
obéit. En arrivant, elle fut bien étonnée de ne pas voir de lumière
dans la maison, plus étonnée encore de voir la marâtre et ses filles
l'accueillir avec grande joie. Depuis son départ, lui dit-on, pas moyen
d'avoir du feu dans la maison. Celui qu'on allume ne prend pas, celui
qu'on amène de chez les voisins s'éteint.
- Le tien se gardera mieux, peut-être, dit la marâtre.
Vassilisa
apporta le crâne dans la chambre. Aussitôt les yeux brûlants se sont
fixés sur la marâtre et ses filles, les suivant partout, les consumant.
En vain tentaient-elles de fuir ou de se cacher, les yeux les
poursuivaient et avant l'aube il n'en resta que cendres. Seule
Vassilisa n'avait aucun mal.
Au matin, Vassilisa enterra le crâne,
ferma la maison et s'en alla en ville où une vieille femme la
recueillit en attendant le retour de son père. Un jour, Vassilisa dit à
la vieille : - Je m'ennuie à ne rien faire. Achète-moi du beau lin, je
vais le filer, le temps me durera moins. La vieille lui apporta du lin
et Vassilisa se mit au travail. Entre ses doigts le fuseau danse-vire,
le fil s'étire, plus fin qu'un cheveu, plus solide qu'acier. Elle eut
vite fini de filer, voulut se mettre à tisser, mais aucun métier
n'était assez fin pour son fil. C'est encore sa poupée qui l'aida, qui
lui fabriqua un métier tel qu'on aurait pu tisser des toiles d'araignée
avec ! Vassilisa se remit à l'ouvrage et à la fin de l'hiver la toile
était tissée, si mince, si fine qu'on aurait pu la faire passer par le
chas d'une aiguille ! Au printemps on fit blanchir la toile sur le pré,
au chaud soleil, au vent frais. Et Vassilisa dit à la vieille femme :
Va au marché, grand-mère. Vends cette toile et garde l'argent. Mais la
vieille se récria :
- Tu n'y songes pas ! Une telle marchandise à la foire ne traîne, au marché ne se promène. Je vais la porter chez le tsar.
Devant le palais elle s'installait, sous les fenêtres allait-venait, tant que le tsar s'étor de la croisée l'appela :
- Que fais-tu là, bonne vieille ? Que veux-tu ?
- Je t'apporte une denrée rare, comme Votre Majesté n'est pas près d'en voir ! beau, du précieux à n'en pas croire les yeux !
Le tsar fit entrer la vieille et s'émerveilla de la toile : - Combien en demandes-tu, bonne vieille ?
-
Une toile pareille n'a pas de prix ! Nul ne peut l'acheter, le tsar
seul peut la porter. Alors, si Votre Majesté y consent, je te l'offre
en joli présent !
Le tsar remercia la vieille qui partit, chargée de
cadeaux. Le tsar donna la toile à ses tailleurs pour qu'ils lui en
fassent des chemises. Ces chemises, ils les coupèrent, mais pour ce qui
est de les coudre - rien à faire ! Ni taille ni lingères n'osaient
ouvrer une toile aussi fine. Le tsar, impatienté, envoya chercha
vieille femme :
- Puisque tu as su tisser la toile, tu sauras coudre mes chemises !
-
Cette toile ne sort pas de mes mains. Ma fille adoptive l'a
filée-tissée, tout y est passé. C'est son travail, son bel ouvrage!
- Eh bien, elle n'a qu'à coudre mes chemises ! Quand la vieille lui rapporta l'affaire, Vassilisa sourit :
Je me doutais bien que c'était travail pour mes mains !
Et
elle se mit à coudre. Dans ses doigts l'aiguille vole, un point à
l'autre se colle, la douzaine de chemises est prête en un rien de
temps. La vieille les emporta chez le tsar et Vassilisa qui avait son
idée, se baigna, se peigna, richement s'habilla, devant la fenêtre
s'installa. Peu après elle vit arriver un envoyé du tsar qui dit à la
vieille :
- Où est cette habile ouvrière-couturière ? Sa Majesté le tsar de ses yeux veut la voir, de ses mains veut la récompenser.
Vassilisa se rendit au palais. Et quand elle entra, quand le tsar la regarda il en tomba amoureux sur le champ :
- Je ne te laisserai pas partir, ma douce beauté ! Sois ma femme !
Le tsar prit par la main Vassilisa la ravissante beauté, la fit asseoir à ses côtés et on célébra leurs noces sans plus tarder.
Bientôt
le père de Vassilisa revint de voyage, il fut tout heureux du bonheur
de sa fille et resta vivre près d'elle. La vieille femme demeura aussi
avec eux. Et toute sa vie la tsarine Vassilisa porta sa poupée sur
elle, dans sa poche.
il
était une fois un marchand qui avait une fille unique, Vassilisa la
Belle. Sa femme mourut alors que la petite allait sur ses huit ans.
Sentant approcher sa fin, la mère l'appela, prit une petite poupée
cachée sous ses draps et dit à Vassilisa :
- Écoute mes dernières
paroles, obéis à mes dernières volontés. Je te donne cette poupée avec
ma bénédiction maternelle. Garde-la, ne la montre à personne. Si tu est
dans la peine, si quelque mal t'advient, offre à manger à ta poupée et
demande-lui conseil. Elle t'aidera dans le malheur.
La femme du
marchand embrassa sa fille et mourut. Le veuf se désola comme il
convient, puis songea à se remarier. Il choisit une femme plus très
jeune, veuve comme lui, avec deux filles de l'âge de la sienne: une
bonne ménagère, s'est-il dit, et mère de famille avisée. Il l'épousa
donc. Mais la femme et ses filles étaient jalouses de Vassilisa. Elles
la tourmentaient, de besogne l'accablaient, pour que le vent et le
soleil la fassent noircir, que le travail la fasse dépérir. Mais
Vassilisa supportait tout sans se plaindre et devenait chaque jour plus
belle, chaque jour plus blanche et rosé, alors que la marâtre et ses
filles qui ne bougeaient pas, ne faisaient rien de leurs dix doigts,
maigrissaient de dépit, jaunissaient d'envie.
Ce qu'elles ne
savaient pas, c'est que sa poupée aidait Vassilisa. Le soir, quand tout
le monde s'endormait, la jeune fille s'enfermait dans son appentis,
servait à manger à sa poupée et lui racontait ses malheurs : - Petite
poupée, mange à ta faim, écoute mes peines-chagrins! Triste est la
maison de mon père, la méchante marâtre veut ma perte.
La poupée mangeait, puis elle consolait Vassilisa, la conseillait et,
au matin, faisait tout le travail à sa place. Vassilisa se repose à la
fraîcheur, cueille des fleurs et, pendant ce temps, l'eau est puisée,
les choux arrosés, le potager sarclé, le feu allumé. Et la jeune fille
choyait sa poupée, lui gardait les meilleurs morceaux. Plus Vassilisa
grandissait, plus elle embellissait et plus sa marâtre la haïssait. Un
jour le marchand dut partir en voyage pour longtemps. La marâtre s'en
alla habiter une maison à l'orée de la forêt. Dans cette forêt vivait
Baba-Yaga, la vieille sorcière. Elle ne laissait personne approcher de
son domaine et croquait les gens comme des poulets. Pour se débarasser
de Vassilisa, sa marâtre l'envoyait tout le temps dans la forêt -
chercher ceci, apporter cela. Mais la jeune fille revenait saine et
sauve, sa poupée la guidait, l'éloignait de la maison de Baba-Yaga.
L'automne vint.. Dehors, il faisait sombre, il pleuvait, le vent
hurlait, c’était déjà la fin de l’automne. Durant les longues soirées
les filles travaillaient : l'une à faire de la dentelle, l'autre à
tricoter des bas et Vassilisa à filer le lin. La marâtre leur donna la
tâche pour la nuit et se coucha, ne laissant qu'une chandelle allumée
pour les travailleuses. L'une de ses filles fit mine de moucher la
chandelle et l'éteignit, comme sans faire exprès. Et de s'exclamer :
-
Quel malheur ! L'ouvrage n'est pas terminé et il n'y a pas un tison
dans la maison. Il faut aller demander du feu à Baba-Yaga ! Qui va y
aller ?
- Pas moi, dit la dentellière. Avec mes épingles, j'y vois clair !
-
Ni moi, dit la tricoteuse. Mes aiguilles brillent, j'y vois bien. Et
toutes les deux s'en prirent à Vassilisa : - C'est à toi d'aller
chercher du feu chez Baba-Yaga !
Et elles la poussèrent hors de la pièce. Vassilisa courut à son appentis, servit le souper à la poupée, lui dit en pleurant :
- Petite poupée, mange à ta faim, écoute ma peine-chagrin ! On me dit d'aller chez Baba-Yaga. Elle va me dévorer !
-
Ne crains rien, lui répondit la poupée. Prends-moi avec toi et va
tranquillement où l'on t'envoie. Tant que je suis là, nul mal ne peut
t'arriver.
Vassilisa mit sa poupée dans sa poche et s'en alla dans
la forêt obscure, sur des sentes inconnues, sur des chemins perdus. La
forêt était épaisse, aucune étoile ne brillait dans les cieux, la lune
était cachée. Vassilisa cheminait depuis quelque temps quand un
cavalier la dépassa: tout blanc, de blanc vêtu et monté sur un cheval
blanc, harnaché de blanc. Aussitôt le ciel devint plus clair. Elle
poursuivit son chemin et vit un autre cavalier : tout rouge, vêtu de
rouge et monté sur un cheval rouge de rouge harnaché. Et le soleil se
leva. Ce n'est qu'au soir tombant que Vassilisa atteignit la clairière
où vivait Baba-Yaga. Sa maison d'ossements était faite, des crânes avec
des yeux ornaient le faîte, pour montants de portail des tibias
humains, pour loquets-ferrures des bras avec des mains, et en guise de
cadenas verrouillant la porte, une bouche avec des dents prêtes à
mordre.
La pauvre jeune fille tremblait comme une feuille en voyant
ça, quand un cavalier arriva : tout noir, de noir vêtu et monté sur un
cheval noir au noir harnais. Aussitôt la nuit tomba et s'allumèrent les
yeux des crânes, si bien qu'on y voyait comme en plein jour. Vassilisa
aurait bien voulu se sauver, mais la peur la clouait sur place. Tout à
coup il se fit grand bruit dans la forêt. Les branches craquaient, les
feuilles crissaient. Et déboucha dans la clairière Baba-Yaga, vieille
sorcière. Dans un mortier elle voyage, du pilon l'encourage, du balai
efface sa trace. Le mortier s'arrêta devant le portail, Baba-Yaga huma
l'air et s'écria :
- Ça sent la chair humaine par ici ! Montre-toi, qui que tu sois ! Toute tremblante, Vassilisa s'approcha en saluant bas :
- C'est moi, grand-mère. Les filles de ma marâtre m'ont envoyée chez toi, te demander du feu.
-
Oh, je les connais, dit Baba-Yaga. C'est bon, tu vas rester ici et me
servir. Si le travail est bien fait, je te donnerai du feu, autrement,
je te mangerai ! Baba-Yaga se tourna vers le portail et cria :
-
Déverrouillez-vous, cadenas résistants ! Large portail, ouvre-toi à
deux battants ! Le portail s'ouvrit et Baba-Yaga roula dans la cour en
sifflotant. Vassilisa la suivit. Et le portail se referma. Une fois
dans la maison, Baba-Yaga s'affala sur un banc et ordonna à Vassilisa :
- Que tout ce qui est au four et dans le garde-manger devant moi vienne se ranger ! Et dépêche-toi, j'ai faim !
Vassilisa
se mit à la servir. Pâtés et rôtis, salmis et confits, tartes et
tourtes, jambons et soupes. Elle tira du cellier piquette et
eau-de-vie, bières et vins à l'envies - de quoi boire-manger pour dix !
Baba-Yaga nettoya tous les plats, vida brocs et bouteilles jusqu'à la
dernière goutte. Elle ne laissa pour Vassilisa qu'un quignon de pain,
un peu de soupe et un bout de cochon rôti. Puis elle dit :
- Demain,
après mon départ, tu balayeras la cour, nettoieras la maison,
prépareras le dîner, rangeras le linge. Après ça, tu prendras dans la
huche un boisseau de blé que tu vas trier grain par grain. Et tâche que
tout soit bien fait, sinon je te mange ! Elle se coucha et se mit à
ronfler. Vassilisa servit à sa poupée les restes du souper de Baba-Yaga
et lui dit en pleurant :
- Petite poupée, mange à ta faim, écoute ma peine-chagrin ! Si je ne fais pas tout ce travail, Baba-Yaga va me manger !
- Ne crains rien, lui répondit la poupée. Va dormir tranquille, le soir voit tout en noir, mais le matin est plus malin !
Vassilisa se leva avant l'aube, mais Baba-Yaga était déjà debout.
Bientôt les yeux des crânes s'éteignirent. Passa le cavalier blanc et
le jour se leva. Baba-Yaga sortit dans la cour et siffla, aussitôt le
mortier vint se ranger devant elle, avec le pilon et le balai. Le
cavalier rouge passa et le soleil apparut. Baba-Yaga monta dans son
équipage et fila bon train. Dans un mortier voyage, du pilon
l'encourage, du balai efface sa trace!... Restée seule, Vassilisa fit
le tour de la maison en se demandant par quel bout commencer l'ouvrage,
quand elle vit que tout était déjà fait, la poupée triait les derniers
grains de blé. Vassilisa l'embrassa :
- Comment te remercier, ma
poupée chérie ! Tu m'a sauvé la vie. La poupée grimpa dans sa poche en
disant: - Tu n'as plus que le dîner à préparer. Puis repose-toi.
Au
soir tombant, Vassilisa mit la table. Bientôt le cavalier noir passa et
la nuit tor Les yeux des crânes s'étaient allumés, on entendit les
branches craquer, les feuilles cri: c'est Baba-Yaga qui arrivait.
Vassilisa sortit à sa rencontre.
- Le travail est-il fait, l'ouvrage
bien terminé ? demanda Baba-Yaga. Vois par toi-même, grand-mère,
répondit la jeune fille. Baba-Yaga inspecta tout, regarda partout sans
trouver rien à redire. Elle grogi « Bon, ça peut aller...» puis appela :
- Fidèles serviteurs, mes amis de cœur, venez moudre mon blé !
Alors trois paires de bras ont apparu, ont emporté le grain hors de la vue. Baba-Y dîna et se coucha en disant :
-
Demain, en plus de tout ce que tu as fait aujourd'hui, tu vas trier un
boisseau graines de pavot. De la terre s'y est mêlée, tâche qu'il n'en
reste pas trace, sinon je mange ! Elle se mit vite à ronfler. Vassilisa
servit sa poupée qui mangea et lui dit comme la veille : - Va dormir
tranquillement, tout sera fait. Le matin est le plus malin !
Le
lendemain, l'ouvrage fait en un tournemain, Vassilisa se reposa
tranquilleme. A son retour, Baba-Yaga inspecta tout, regarda dans tous
les recoins, ne trouva rien redire. Elle appela :
- Fidèles
serviteurs, mes amis de cœur, venez presser l'huile de mes graines de
pavot ! Trois paires de bras ont apparu, ont emporté les graines hors
de la vue. Baba-Yaga s'attabla pour dîner. Vassilisa la servait en
silence et la sorcière grommela :
- Pourquoi ne dis-tu rien ? Tu es là, comme une muette !
- C'est que je n'osais pas, grand-mère ! Mais si tu le permets, je voudrais bien demander quelque chose.
- Demande ! Mais toute question n'est pas bonne à poser. D'en savoir trop Iong, on vieillit trop vite !
Je voudrais que tu m'expliques ce que j'ai vu, grand-mère. En venant chez te un cavalier blanc m'a croisée. Qui est-il ?
- C'est mon jour clair, répondit Baba-Yaga.
- Après ça j'ai vu un cavalier tout rouge, qui est-ce ?
- C'est mon soleil ardent.
- Et puis j'ai vu un cavalier tout noir, qui est-ce ?
- C'est ma sombre nuit, répondit Baba-Yaga. Tous trois sont mes serviteur fidèles ! Tu veux savoir autre chose ?
Vassilisa
pensait aux trois paires de bras, mais n'en souffla mot. Baba-Yaga lui
dit - Eh bien, tu ne me poses plus de questions ?
- J'en sais bien suffisamment pour moi, grand-mère ! Tu l'as dit toi-même - à trop savoir, on vieillit vite.
-
C'est bien, - approuva Baba-Yaga. - Tu interroges sur ce que tu as vu
dehors, pas sur ce qui se passe dedans. J'entends laver mon linge en
famille, et les trop curieux, je les mange ! Et maintenant c'est mon
tour de te poser une question: comment arrives-tu à faire tout le
travail que je te donne ?
- La bénédiction maternelle me vient en aide, grand-mère.
-
C'est donc ça ? Eh bien, fille bénie, tu vas prendre la porte, et tout
de suite encore ! Je n'en veux pas, de bénis, chez moi !
Baba-Yaga
poussa la jeune fille dehors, mais avant de refermer le portail, elle
prit un crâne aux yeux ardents, le mit au bout d'un bâton qu'elle
fourra dans la main de Vassilisa : Voilà du feu pour les filles de ta
marâtre ! Après tout, c'est pour ça qu'elles t'avaient envoyée chez moi.
Vassilisa partit en courant dans la forêt. Les yeux du crâne
éclairaient son chemin et ne s'éteignirent qu'à l'aube. Elle chemina
toute la journée et, vers le soir, comme elle approchait de sa maison,
elle se dit : « Depuis le temps, elles ont sûrement trouvé du feu...»
et voulut jeter le crâne. Mais une voix en sortit :
- Ne me jette pas, porte-moi chez ta marâtre !
Vassilisa
obéit. En arrivant, elle fut bien étonnée de ne pas voir de lumière
dans la maison, plus étonnée encore de voir la marâtre et ses filles
l'accueillir avec grande joie. Depuis son départ, lui dit-on, pas moyen
d'avoir du feu dans la maison. Celui qu'on allume ne prend pas, celui
qu'on amène de chez les voisins s'éteint.
- Le tien se gardera mieux, peut-être, dit la marâtre.
Vassilisa
apporta le crâne dans la chambre. Aussitôt les yeux brûlants se sont
fixés sur la marâtre et ses filles, les suivant partout, les consumant.
En vain tentaient-elles de fuir ou de se cacher, les yeux les
poursuivaient et avant l'aube il n'en resta que cendres. Seule
Vassilisa n'avait aucun mal.
Au matin, Vassilisa enterra le crâne,
ferma la maison et s'en alla en ville où une vieille femme la
recueillit en attendant le retour de son père. Un jour, Vassilisa dit à
la vieille : - Je m'ennuie à ne rien faire. Achète-moi du beau lin, je
vais le filer, le temps me durera moins. La vieille lui apporta du lin
et Vassilisa se mit au travail. Entre ses doigts le fuseau danse-vire,
le fil s'étire, plus fin qu'un cheveu, plus solide qu'acier. Elle eut
vite fini de filer, voulut se mettre à tisser, mais aucun métier
n'était assez fin pour son fil. C'est encore sa poupée qui l'aida, qui
lui fabriqua un métier tel qu'on aurait pu tisser des toiles d'araignée
avec ! Vassilisa se remit à l'ouvrage et à la fin de l'hiver la toile
était tissée, si mince, si fine qu'on aurait pu la faire passer par le
chas d'une aiguille ! Au printemps on fit blanchir la toile sur le pré,
au chaud soleil, au vent frais. Et Vassilisa dit à la vieille femme :
Va au marché, grand-mère. Vends cette toile et garde l'argent. Mais la
vieille se récria :
- Tu n'y songes pas ! Une telle marchandise à la foire ne traîne, au marché ne se promène. Je vais la porter chez le tsar.
Devant le palais elle s'installait, sous les fenêtres allait-venait, tant que le tsar s'étor de la croisée l'appela :
- Que fais-tu là, bonne vieille ? Que veux-tu ?
- Je t'apporte une denrée rare, comme Votre Majesté n'est pas près d'en voir ! beau, du précieux à n'en pas croire les yeux !
Le tsar fit entrer la vieille et s'émerveilla de la toile : - Combien en demandes-tu, bonne vieille ?
-
Une toile pareille n'a pas de prix ! Nul ne peut l'acheter, le tsar
seul peut la porter. Alors, si Votre Majesté y consent, je te l'offre
en joli présent !
Le tsar remercia la vieille qui partit, chargée de
cadeaux. Le tsar donna la toile à ses tailleurs pour qu'ils lui en
fassent des chemises. Ces chemises, ils les coupèrent, mais pour ce qui
est de les coudre - rien à faire ! Ni taille ni lingères n'osaient
ouvrer une toile aussi fine. Le tsar, impatienté, envoya chercha
vieille femme :
- Puisque tu as su tisser la toile, tu sauras coudre mes chemises !
-
Cette toile ne sort pas de mes mains. Ma fille adoptive l'a
filée-tissée, tout y est passé. C'est son travail, son bel ouvrage!
- Eh bien, elle n'a qu'à coudre mes chemises ! Quand la vieille lui rapporta l'affaire, Vassilisa sourit :
Je me doutais bien que c'était travail pour mes mains !
Et
elle se mit à coudre. Dans ses doigts l'aiguille vole, un point à
l'autre se colle, la douzaine de chemises est prête en un rien de
temps. La vieille les emporta chez le tsar et Vassilisa qui avait son
idée, se baigna, se peigna, richement s'habilla, devant la fenêtre
s'installa. Peu après elle vit arriver un envoyé du tsar qui dit à la
vieille :
- Où est cette habile ouvrière-couturière ? Sa Majesté le tsar de ses yeux veut la voir, de ses mains veut la récompenser.
Vassilisa se rendit au palais. Et quand elle entra, quand le tsar la regarda il en tomba amoureux sur le champ :
- Je ne te laisserai pas partir, ma douce beauté ! Sois ma femme !
Le tsar prit par la main Vassilisa la ravissante beauté, la fit asseoir à ses côtés et on célébra leurs noces sans plus tarder.
Bientôt
le père de Vassilisa revint de voyage, il fut tout heureux du bonheur
de sa fille et resta vivre près d'elle. La vieille femme demeura aussi
avec eux. Et toute sa vie la tsarine Vassilisa porta sa poupée sur
elle, dans sa poche.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
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