Poèmes animaux
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Poèmes animaux
Châtiment d’un chat renversé
Blanc cassé sur le goudron
Sang en éclat de haine
Rouge comme ultime rempart d’une vie
écourtée par une roue broyant l’évidence
Nous l’avons déplacé des yeux du monde
Au versant de cette aventure qu’il ne connaîtra plus
Un regard triste de tendresse
Parfumait notre repas de midi sans volupté
Une seconde a suffi
Interminable
Animal désavoué par la civilisation
Gravure de sève vermeille
Épitaphe
Sybille Rembard
Blanc cassé sur le goudron
Sang en éclat de haine
Rouge comme ultime rempart d’une vie
écourtée par une roue broyant l’évidence
Nous l’avons déplacé des yeux du monde
Au versant de cette aventure qu’il ne connaîtra plus
Un regard triste de tendresse
Parfumait notre repas de midi sans volupté
Une seconde a suffi
Interminable
Animal désavoué par la civilisation
Gravure de sève vermeille
Épitaphe
Sybille Rembard
Dernière édition par muriel le Mer 7 Avr - 22:48, édité 1 fois
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Comme un Chevreuil
Comme un Chevreuil, quand le printemps détruit
L’oiseux cristal de la morne gelée,
Pour mieux brouter l’herbette emmiellée
Hors de son bois avec l’Aube s’enfuit,
Et seul, et sûr, loin de chien et de bruit,
Or sur un mont, or dans une vallée,
Or près d’une onde à l’écart recelée,
Libre folâtre où son pied le conduit :
De rets ni d’arc sa liberté n’a crainte,
Sinon alors que sa vie est atteinte,
D’un trait meurtrier empourpré de son sang :
Ainsi j’allais sans espoir de dommage,
Le jour qu’un oeil sur l’avril de mon âge
Tira d’un coup mille traits dans mon flanc.
Pierre de Ronsard, Les amours de Cassandre
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
L’abeille
Quand l’abeille, au printemps, confiante et charmée,
Sort de la ruche et prend son vol au sein des airs,
Tout l’invite et lui rit sur sa route embaumée.
L’églantier berce au vent ses boutons entr’ouverts ;
La clochette des prés incline avec tendresse
Sous le regard du jour son front pâle et léger.
L’abeille cède émue au désir qui la presse ;
Ella aperçoit un lis et descend s’y plonger.
Une fleur est pour elle une mer de délices.
Dans son enchantement, du fond de cent calices.
Elle sort trébuchant sous une poudre d’or.
Son fardeau l’alourdit, mais elle vole encor.
Une rose est là-bas qui s’ouvre et la convie ;
Sur ce sein parfumé tandis qu’elle s’oublie,
Le soleil s’est voilé. Poussé par l’aquilon,
Un orage prochain menace le vallon.
Le tonnerre a grondé. Mais dans sa quête ardente
L’abeille n’entend rien, ne voit rien, l’imprudente !
Sur les buissons en fleur l’eau fond de toute part ;
Pour regagner la ruche il est déjà trop tard.
La rose si fragile, et que l’ouragan brise,
Referme pour toujours son calice odorant ;
La rose est une tombe, et l’abeille surprise
Dans un dernier parfum s’enivre en expirant.
Qui dira les destins dont sa mort est l’image ?
Ah ! combien parmi nous d’artistes inconnus,
Partis dans leur espoir par un jour sans nuage,
Des champs qu’ils parcouraient ne sont pas revenus !
Une ivresse sacrée aveuglait leur courage ;
Au gré de leurs désirs, sans craindre les autans,
Ils butinaient au loin sur la foi du printemps.
Quel retour glorieux l’avenir leur apprête !
A ces mille trésors épàrs sur leur chemin
L’amour divin de l’art les guide et les arrête :
Tout est fleur aujourd’hui, tout sera miel demain.
Ils revenaient déjà vers la ruche immortelle ;
Un vent du ciel soufflait, prêt à les soulever.
Au milieu des parfums la Mort brise leur aile ;
Chargés comme l’abeille, ils périssent comme elle
Sur le butin doré qu’ils n’ont pas pu sauver.
Louise Ackermann, Contes et poésies
Sort de la ruche et prend son vol au sein des airs,
Tout l’invite et lui rit sur sa route embaumée.
L’églantier berce au vent ses boutons entr’ouverts ;
La clochette des prés incline avec tendresse
Sous le regard du jour son front pâle et léger.
L’abeille cède émue au désir qui la presse ;
Ella aperçoit un lis et descend s’y plonger.
Une fleur est pour elle une mer de délices.
Dans son enchantement, du fond de cent calices.
Elle sort trébuchant sous une poudre d’or.
Son fardeau l’alourdit, mais elle vole encor.
Une rose est là-bas qui s’ouvre et la convie ;
Sur ce sein parfumé tandis qu’elle s’oublie,
Le soleil s’est voilé. Poussé par l’aquilon,
Un orage prochain menace le vallon.
Le tonnerre a grondé. Mais dans sa quête ardente
L’abeille n’entend rien, ne voit rien, l’imprudente !
Sur les buissons en fleur l’eau fond de toute part ;
Pour regagner la ruche il est déjà trop tard.
La rose si fragile, et que l’ouragan brise,
Referme pour toujours son calice odorant ;
La rose est une tombe, et l’abeille surprise
Dans un dernier parfum s’enivre en expirant.
Qui dira les destins dont sa mort est l’image ?
Ah ! combien parmi nous d’artistes inconnus,
Partis dans leur espoir par un jour sans nuage,
Des champs qu’ils parcouraient ne sont pas revenus !
Une ivresse sacrée aveuglait leur courage ;
Au gré de leurs désirs, sans craindre les autans,
Ils butinaient au loin sur la foi du printemps.
Quel retour glorieux l’avenir leur apprête !
A ces mille trésors épàrs sur leur chemin
L’amour divin de l’art les guide et les arrête :
Tout est fleur aujourd’hui, tout sera miel demain.
Ils revenaient déjà vers la ruche immortelle ;
Un vent du ciel soufflait, prêt à les soulever.
Au milieu des parfums la Mort brise leur aile ;
Chargés comme l’abeille, ils périssent comme elle
Sur le butin doré qu’ils n’ont pas pu sauver.
Louise Ackermann, Contes et poésies
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Re: Poèmes animaux
L’oiseleur
L’oiseleur Amour se promène
Lorsque les coteaux sont fleuris,
Fouillant les buissons et la plaine ;
Et chaque soir sa cage est pleine
Des petits oiseaux qu’il a pris.
Aussitôt que la nuit s’efface
Il vient, tend avec soin son fil,
Jette la glu de place en place,
Puis sème, pour cacher la trace,
Quelques brins d’avoine ou de mil.
Il s’embusque au coin d’une haie,
Se couche aux berges des ruisseaux,
Glisse en rampant sous la futaie,
De crainte que son pied n’effraie
Les rapides petits oiseaux.
Sous le et la pervenche
L’enfant rusé cache ses rets,
Ou bien sous l’aubépine blanche
Où tombent, comme une avalanche,
Linots, pinsons, chardonnerets.
Parfois d’une souple baguette
D’osier vert ou de romarin
Il fait un piège, et puis il guette
Les petits oiseaux en goguette
Qui viennent becqueter son grain.
Étourdi, joyeux et rapide,
Bientôt approche un oiselet :
Il regarde d’un air candide,
S’enhardit, goûte au grain perfide,
Et se prend la patte au filet.
Et l’oiseleur Amour l’emmène
Loin des coteaux frais et fleuris,
Loin des buissons et de la plaine,
Et chaque soir sa cage est pleine
Des petits oiseaux qu’il a pris.
Guy de Maupassant, Des vers
L’oiseleur Amour se promène
Lorsque les coteaux sont fleuris,
Fouillant les buissons et la plaine ;
Et chaque soir sa cage est pleine
Des petits oiseaux qu’il a pris.
Aussitôt que la nuit s’efface
Il vient, tend avec soin son fil,
Jette la glu de place en place,
Puis sème, pour cacher la trace,
Quelques brins d’avoine ou de mil.
Il s’embusque au coin d’une haie,
Se couche aux berges des ruisseaux,
Glisse en rampant sous la futaie,
De crainte que son pied n’effraie
Les rapides petits oiseaux.
Sous le et la pervenche
L’enfant rusé cache ses rets,
Ou bien sous l’aubépine blanche
Où tombent, comme une avalanche,
Linots, pinsons, chardonnerets.
Parfois d’une souple baguette
D’osier vert ou de romarin
Il fait un piège, et puis il guette
Les petits oiseaux en goguette
Qui viennent becqueter son grain.
Étourdi, joyeux et rapide,
Bientôt approche un oiselet :
Il regarde d’un air candide,
S’enhardit, goûte au grain perfide,
Et se prend la patte au filet.
Et l’oiseleur Amour l’emmène
Loin des coteaux frais et fleuris,
Loin des buissons et de la plaine,
Et chaque soir sa cage est pleine
Des petits oiseaux qu’il a pris.
Guy de Maupassant, Des vers
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
L’oiseau
Mais lors voici qu’un oiseau chante,
Dans une pauvre cage en bois,
Mais lors voici qu’un oiseau chante
Sur une ville et tous ses toits,
Et qu’il dit qu’on le voit le monde
Et sur la mer la pluie tomber,
Et des voiles s’en aller rondes,
Sur l’eau si loin qu’on peut aller.
Puis voix dans l’air plus haut montée,
Alors voici que l’oiseau dit
Que tout l’hiver s’en est allé
Et qu’on voit l’herbe qui verdit,
Et sur les chemins la poussière
Déjà, et les bêtes aussi,
Et toits fumant dans la lumière
Que l’on dirait qu’il est midi,
Et puis encore sa voix montée,
Que l’air est d’or et resplendit,
Et puis le bleu du ciel touché
Qu’il est ouvert le paradis.
Max Elskamp, Huit chansons reverdies
Dans une pauvre cage en bois,
Mais lors voici qu’un oiseau chante
Sur une ville et tous ses toits,
Et qu’il dit qu’on le voit le monde
Et sur la mer la pluie tomber,
Et des voiles s’en aller rondes,
Sur l’eau si loin qu’on peut aller.
Puis voix dans l’air plus haut montée,
Alors voici que l’oiseau dit
Que tout l’hiver s’en est allé
Et qu’on voit l’herbe qui verdit,
Et sur les chemins la poussière
Déjà, et les bêtes aussi,
Et toits fumant dans la lumière
Que l’on dirait qu’il est midi,
Et puis encore sa voix montée,
Que l’air est d’or et resplendit,
Et puis le bleu du ciel touché
Qu’il est ouvert le paradis.
Max Elskamp, Huit chansons reverdies
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
La Chèvre du Tibet
Les poils de cette chèvre et même
Ceux d’or pour qui prit tant de peine
Jason, ne valent rien au prix
Des cheveux dont je suis épris.
Guillaume Apollinaire
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
La Cour du Lion
Sa Majesté Lionne un jour voulut connaître
De quelles nations le Ciel l’avait fait maître.
Il manda donc par députés
Ses vassaux de toute nature,
Envoyant de tous les côtés
Une circulaire écriture,
Avec son sceau. L’écrit portait
Qu’un mois durant le Roi tiendrait
Cour plénière, dont l’ouverture
Devait être un fort grand festin,
Suivi des tours de Fagotin.
Par ce trait de magnificence
Le Prince à ses sujets étalait sa puissance.
En son Louvre il les invita.
Quel Louvre ! un vrai charnier, dont l’odeur se porta
D’abord au nez des gens. L’Ours boucha sa narine :
Il se fût bien passé de faire cette mine,
Sa grimace déplut. Le Monarque irrité
L’envoya chez Pluton faire le dégoûté.
Le Singe approuva fort cette sévérité,
Et flatteur excessif il loua la colère
Et la griffe du Prince, et l’antre, et cette odeur :
Il n’était ambre, il n’était fleur,
Qui ne fût ail au prix. Sa sotte flatterie
Eut un mauvais succès, et fut encore punie.
Ce Monseigneur du Lion-là
Fut parent de Caligula.
Le Renard étant proche : Or çà, lui dit le Sire,
Que sens-tu ? dis-le-moi : parle sans déguiser.
L’autre aussitôt de s’excuser,
Alléguant un grand rhume : il ne pouvait que dire
Sans odorat ; bref, il s’en tire.
Ceci vous sert d’enseignement :
Ne soyez à la cour, si vous voulez y plaire,
Ni fade adulateur, ni parleur trop sincère,
Et tâchez quelquefois de répondre en Normand.
Jean de La Fontaine
De quelles nations le Ciel l’avait fait maître.
Il manda donc par députés
Ses vassaux de toute nature,
Envoyant de tous les côtés
Une circulaire écriture,
Avec son sceau. L’écrit portait
Qu’un mois durant le Roi tiendrait
Cour plénière, dont l’ouverture
Devait être un fort grand festin,
Suivi des tours de Fagotin.
Par ce trait de magnificence
Le Prince à ses sujets étalait sa puissance.
En son Louvre il les invita.
Quel Louvre ! un vrai charnier, dont l’odeur se porta
D’abord au nez des gens. L’Ours boucha sa narine :
Il se fût bien passé de faire cette mine,
Sa grimace déplut. Le Monarque irrité
L’envoya chez Pluton faire le dégoûté.
Le Singe approuva fort cette sévérité,
Et flatteur excessif il loua la colère
Et la griffe du Prince, et l’antre, et cette odeur :
Il n’était ambre, il n’était fleur,
Qui ne fût ail au prix. Sa sotte flatterie
Eut un mauvais succès, et fut encore punie.
Ce Monseigneur du Lion-là
Fut parent de Caligula.
Le Renard étant proche : Or çà, lui dit le Sire,
Que sens-tu ? dis-le-moi : parle sans déguiser.
L’autre aussitôt de s’excuser,
Alléguant un grand rhume : il ne pouvait que dire
Sans odorat ; bref, il s’en tire.
Ceci vous sert d’enseignement :
Ne soyez à la cour, si vous voulez y plaire,
Ni fade adulateur, ni parleur trop sincère,
Et tâchez quelquefois de répondre en Normand.
Jean de La Fontaine
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
La mort des oiseaux
Le soir, au coin du feu, j’ai pensé bien des fois,
A la mort d’un oiseau, quelque part, dans les bois,
Pendant les tristes jours de l’hiver monotone
Les pauvres nids déserts, les nids qu’on abandonne,
Se balancent au vent sur le ciel gris de fer.
Oh ! comme les oiseaux doivent mourir l’hiver !
Pourtant lorsque viendra le temps des violettes,
Nous ne trouverons pas leurs délicats squelettes.
Dans le gazon d’avril où nous irons courir.
Est-ce que ” les oiseaux se cachent pour mourir ? ”
François Coppée
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Le Bengali et le Rossignol
LE BENGALI
Il était né dans la rizière
Qui borde l’étang de Saint-Paul.
Heureux, il vivait de lumière,
De chant libre et de libre vol.
Poète ailé de la savane,
Du jour épiant les lueurs,
Il disait l’aube diaphane,
Bercé sur la fataque en fleurs.
Il hantait les gérofleries
Aux belles grappes de corail
Et, parmi les touffes fleuries,
Lustrait au soleil son poitrail.
Il allait plongeant son bec rose,
Au gré de son caprice errant,
Dans le fruit blond de la jam-rose,
Dans l’onde fraîche du torrent.
A midi, sous l’asile agreste
Du ravin au vent tiède et doux,
Ivre d’aise, il faisait la sieste
Au bruit de l’eau sous les bambous.
Puis dans quelque source discrète,
Bleu bassin sous l’ombrage épars,
Baignant sa gorge violette,
Il courait sur les nénuphars.
Quand l’astre au bord de mers s’incline,
Empourprant l’horizon vermeil,
Il descendait de la colline
Pour voir se coucher le soleil ;
Et sur le palmier de la grève,
Et devant l’orbe radieux,
Au vent du large qui se lève,
Du jour il chantait les adieux ;
Et la nuit magnifique et douce
D’étoiles remplissant l’éther,
Il regagnait son lit de mousse
Sous les touffes du vétiver.
C’est là que l’oiseleur cupide,
Le guettant dans l’obscurité,
Ferma sur lui sa main rapide
Et lui ravit la liberté.
Dès lors il subit l’esclavage.
Un marin, chez nous étranger,
L’emmena de son doux rivage
Sur mer avec lui voyager.
C’est ainsi qu’il connut la France.
Quand il y vint, le jeune Été,
Vêtu d’azur et d’espérance,
Resplendissait dans sa beauté.
Partout, sur les monts, dans la plaine,
Brillait un ciel oriental :
L’exilé de l’île africaine
Se crut sous un climat natal.
Mais vint l’automne aux froides brumes,
La neige au loin blanchissant l’air ;
Il sentit courir sous ses plumes
Les âpres frissons de l’hiver.
Rêvant à l’île maternelle
Aux nuits tièdes comme les jours,
Il mit sa tête sous son aile,
Et s’endormit, et pour toujours !
C’était un enfant des rizières,
Des champs de canne et de maïs :
En proie aux bises meurtrières,
Il mourut plein de son pays.
LE ROSSIGNOL
Il est né, lui, sous un chêne,
Dans un buisson de frais lilas :
Le bruit de la source prochaine,
Le souffle embaumé de la plaine
Ont bercé ses premiers ébats.
La nature à son brun corsage
Refusa les riches couleurs ;
Modeste et fauve est son plumage ;
Mais il est roi par son ramage,
Roi du peuple ailé des chanteurs.
Du printemps c’est lui le poète.
L’hiver a-t-il fini son cours,
Heureux de vivre et l’âme en fête,
A la forêt longtemps muette
Il dit le réveil des beaux jours.
Ce n’est pas l’ardente lumière
Qu’il veut sous des cieux azurés,
Mais cette clarté printanière
Que verse en mai sur la clairière
L’aube rose ou les soirs dorés.
Ce n’est pas le torrent sauvage
Qui parle à son instinct chanteur,
Mais le ruisseau qui sous l’ombrage
Mêle au murmure du feuillage
Son onde au rythme inspirateur.
Quand le de ses clochettes
Blanchit l’herbe sous les grands bois,
Caché dans les branches discrètes,
Il remplit leurs vertes retraites
Des éclats vibrants de sa voix.
Quand de l’azur crépusculaire
Le soir, à pas silencieux,
Descend et couvre au loin la terre,
Il chante l’ombre et son mystère,
Il chante la beauté des cieux !
Quand d’astres d’or l’air s’illumine,
Beaux lys au ciel épanouis,
Allant du chêne à l’aubépine,
Il charme de sa voix divine
Le silence étoilé des nuits.
Telle il vivait sa vie heureuse,
Oublieux des jours inconstants ;
Et son âme mélodieuse
Versait l’ivresse radieuse
Qui déborde en elle au printemps.
Printemps et bonheur, rien ne dure.
O loi fatale ! après l’été,
L’hiver à la bise âpre et dure ;
Une cage au lieu de verdure !
Des fers au lieu de liberté !
Un fils de mon île bénie,
Poète errant, esprit ,
Voyant la muette agonie
De ce grand maître en harmonie,
Eut pitié du chanteur captif.
Il l’emmena sur nos rivages,
Dans l’île aux monts bleus, au beau ciel,
Rêvant pour lui, sur d’autres plages,
De libres chants sous des feuillages
Que baigne un soleil éternel.
Peut-être voulait-il encore
Doter nos monts, doter nos bois,
Nos soirs de lune et notre aurore,
De ce barde au gosier sonore
Et des merveilles de sa voix.
Quand cet enfant du Nord prit terre
Chez nous, par la vague apporté,
Sur notre rive hospitalière,
Avec sa voix et la lumière
Il retrouva la liberté.
Ouvrant son aile délivrée
Et fendant l’air, le prisonnier,
L’œil ébloui, l’âme enivrée,
Vint cacher sa fuite égarée
Dans les branches d’un citronnier ;
Du citronnier de la ravine,
Où la Source aux rochers boisés
Étend sa nappe cristalline :
Frais Éden fait de paix divine,
D’ombre et de rayons tamisés.
Autour de lui tout est silence,
Onde et fraîcheur, brise et clarté :
Ravi, soudain au ciel il lance,
Avec son chant de délivrance,
Son hymne à l’hospitalité.
Il dit la molle quiétude
Des bois, l’air suave et léger,
Et l’astre dans sa plénitude,
Et cette ombreuse solitude,
Si douce aux yeux de l’étranger.
Il chante les eaux diaphanes
Où le ciel aime à se mirer ;
Il chante… et l’oiseau des savanes
Se tait, blotti dans les lianes,
Pour mieux l’entendre et l’admirer.
Hélas ! sous ce climat de flamme,
Éperdu, d’accord en accord
De sa fièvre épuisant la gamme,
Dans sa voix exhalant son âme,
Parmi les fleurs il tomba mort !
Il était né sous le grand chêne,
Dans un buisson de frais lilas.
Le flot des jours au loin l’entraîne.
La mort, dans une île africaine,
Noir vautour, l’attendait, hélas !
Près de la Source aux blocs de lave
Repose en paix, roi des chanteurs !
Dans ce lieu sauvage et suave,
Toi qui ne sus pas être esclave,
Repose libre au sein des fleurs !
Instinct natal ! ô loi première !
Que cher à tout être à l’endroit
Où s’ouvrit au jour sa paupière !
Le rossignol meurt de lumière,
Le bengali mouru
Auguste Lacaussade, Les Automnales
Il était né dans la rizière
Qui borde l’étang de Saint-Paul.
Heureux, il vivait de lumière,
De chant libre et de libre vol.
Poète ailé de la savane,
Du jour épiant les lueurs,
Il disait l’aube diaphane,
Bercé sur la fataque en fleurs.
Il hantait les gérofleries
Aux belles grappes de corail
Et, parmi les touffes fleuries,
Lustrait au soleil son poitrail.
Il allait plongeant son bec rose,
Au gré de son caprice errant,
Dans le fruit blond de la jam-rose,
Dans l’onde fraîche du torrent.
A midi, sous l’asile agreste
Du ravin au vent tiède et doux,
Ivre d’aise, il faisait la sieste
Au bruit de l’eau sous les bambous.
Puis dans quelque source discrète,
Bleu bassin sous l’ombrage épars,
Baignant sa gorge violette,
Il courait sur les nénuphars.
Quand l’astre au bord de mers s’incline,
Empourprant l’horizon vermeil,
Il descendait de la colline
Pour voir se coucher le soleil ;
Et sur le palmier de la grève,
Et devant l’orbe radieux,
Au vent du large qui se lève,
Du jour il chantait les adieux ;
Et la nuit magnifique et douce
D’étoiles remplissant l’éther,
Il regagnait son lit de mousse
Sous les touffes du vétiver.
C’est là que l’oiseleur cupide,
Le guettant dans l’obscurité,
Ferma sur lui sa main rapide
Et lui ravit la liberté.
Dès lors il subit l’esclavage.
Un marin, chez nous étranger,
L’emmena de son doux rivage
Sur mer avec lui voyager.
C’est ainsi qu’il connut la France.
Quand il y vint, le jeune Été,
Vêtu d’azur et d’espérance,
Resplendissait dans sa beauté.
Partout, sur les monts, dans la plaine,
Brillait un ciel oriental :
L’exilé de l’île africaine
Se crut sous un climat natal.
Mais vint l’automne aux froides brumes,
La neige au loin blanchissant l’air ;
Il sentit courir sous ses plumes
Les âpres frissons de l’hiver.
Rêvant à l’île maternelle
Aux nuits tièdes comme les jours,
Il mit sa tête sous son aile,
Et s’endormit, et pour toujours !
C’était un enfant des rizières,
Des champs de canne et de maïs :
En proie aux bises meurtrières,
Il mourut plein de son pays.
LE ROSSIGNOL
Il est né, lui, sous un chêne,
Dans un buisson de frais lilas :
Le bruit de la source prochaine,
Le souffle embaumé de la plaine
Ont bercé ses premiers ébats.
La nature à son brun corsage
Refusa les riches couleurs ;
Modeste et fauve est son plumage ;
Mais il est roi par son ramage,
Roi du peuple ailé des chanteurs.
Du printemps c’est lui le poète.
L’hiver a-t-il fini son cours,
Heureux de vivre et l’âme en fête,
A la forêt longtemps muette
Il dit le réveil des beaux jours.
Ce n’est pas l’ardente lumière
Qu’il veut sous des cieux azurés,
Mais cette clarté printanière
Que verse en mai sur la clairière
L’aube rose ou les soirs dorés.
Ce n’est pas le torrent sauvage
Qui parle à son instinct chanteur,
Mais le ruisseau qui sous l’ombrage
Mêle au murmure du feuillage
Son onde au rythme inspirateur.
Quand le de ses clochettes
Blanchit l’herbe sous les grands bois,
Caché dans les branches discrètes,
Il remplit leurs vertes retraites
Des éclats vibrants de sa voix.
Quand de l’azur crépusculaire
Le soir, à pas silencieux,
Descend et couvre au loin la terre,
Il chante l’ombre et son mystère,
Il chante la beauté des cieux !
Quand d’astres d’or l’air s’illumine,
Beaux lys au ciel épanouis,
Allant du chêne à l’aubépine,
Il charme de sa voix divine
Le silence étoilé des nuits.
Telle il vivait sa vie heureuse,
Oublieux des jours inconstants ;
Et son âme mélodieuse
Versait l’ivresse radieuse
Qui déborde en elle au printemps.
Printemps et bonheur, rien ne dure.
O loi fatale ! après l’été,
L’hiver à la bise âpre et dure ;
Une cage au lieu de verdure !
Des fers au lieu de liberté !
Un fils de mon île bénie,
Poète errant, esprit ,
Voyant la muette agonie
De ce grand maître en harmonie,
Eut pitié du chanteur captif.
Il l’emmena sur nos rivages,
Dans l’île aux monts bleus, au beau ciel,
Rêvant pour lui, sur d’autres plages,
De libres chants sous des feuillages
Que baigne un soleil éternel.
Peut-être voulait-il encore
Doter nos monts, doter nos bois,
Nos soirs de lune et notre aurore,
De ce barde au gosier sonore
Et des merveilles de sa voix.
Quand cet enfant du Nord prit terre
Chez nous, par la vague apporté,
Sur notre rive hospitalière,
Avec sa voix et la lumière
Il retrouva la liberté.
Ouvrant son aile délivrée
Et fendant l’air, le prisonnier,
L’œil ébloui, l’âme enivrée,
Vint cacher sa fuite égarée
Dans les branches d’un citronnier ;
Du citronnier de la ravine,
Où la Source aux rochers boisés
Étend sa nappe cristalline :
Frais Éden fait de paix divine,
D’ombre et de rayons tamisés.
Autour de lui tout est silence,
Onde et fraîcheur, brise et clarté :
Ravi, soudain au ciel il lance,
Avec son chant de délivrance,
Son hymne à l’hospitalité.
Il dit la molle quiétude
Des bois, l’air suave et léger,
Et l’astre dans sa plénitude,
Et cette ombreuse solitude,
Si douce aux yeux de l’étranger.
Il chante les eaux diaphanes
Où le ciel aime à se mirer ;
Il chante… et l’oiseau des savanes
Se tait, blotti dans les lianes,
Pour mieux l’entendre et l’admirer.
Hélas ! sous ce climat de flamme,
Éperdu, d’accord en accord
De sa fièvre épuisant la gamme,
Dans sa voix exhalant son âme,
Parmi les fleurs il tomba mort !
Il était né sous le grand chêne,
Dans un buisson de frais lilas.
Le flot des jours au loin l’entraîne.
La mort, dans une île africaine,
Noir vautour, l’attendait, hélas !
Près de la Source aux blocs de lave
Repose en paix, roi des chanteurs !
Dans ce lieu sauvage et suave,
Toi qui ne sus pas être esclave,
Repose libre au sein des fleurs !
Instinct natal ! ô loi première !
Que cher à tout être à l’endroit
Où s’ouvrit au jour sa paupière !
Le rossignol meurt de lumière,
Le bengali mouru
Auguste Lacaussade, Les Automnales
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Le Coche et la Mouche
Dans un chemin montant, sablonneux, malaisé,
Et de tous les côtés au Soleil exposé,
Six forts chevaux tiraient un Coche.
Femmes, Moine, Vieillards, tout était descendu.
L’attelage suait, soufflait, était rendu.
Une Mouche survient, et des chevaux s’approche ;
Prétend les animer par son bourdonnement ;
Pique l’un, pique l’autre, et pense à tout moment
Qu’elle fait aller la machine,
S’assied sur le timon, sur le nez du Cocher ;
Aussitôt que le char chemine,
Et qu’elle voit les gens marcher,
Elle s’en attribue uniquement la gloire ;
Va, vient, fait l’empressée ; il semble que ce soit
Un Sergent de bataille allant en chaque endroit
Faire avancer ses gens, et hâter la victoire.
La Mouche en ce commun besoin
Se plaint qu’elle agit seule, et qu’elle a tout le soin ;
Qu’aucun n’aide aux chevaux à se tirer d’affaire.
Le Moine disait son Bréviaire ;
Il prenait bien son temps ! Une femme chantait ;
C’était bien de chansons qu’alors il s’agissait !
Dame Mouche s’en va chanter à leurs oreilles,
Et fait cent sottises pareilles.
Après bien du travail, le Coche arrive au haut.
Respirons maintenant, dit la Mouche aussitôt :
J’ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine.
Çà, Messieurs les Chevaux, payez-moi de ma peine.
Ainsi certaines gens, faisant les empressés,
S’introduisent dans les affaires :
Ils font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être chassés.
Jean de La Fontaine
Et de tous les côtés au Soleil exposé,
Six forts chevaux tiraient un Coche.
Femmes, Moine, Vieillards, tout était descendu.
L’attelage suait, soufflait, était rendu.
Une Mouche survient, et des chevaux s’approche ;
Prétend les animer par son bourdonnement ;
Pique l’un, pique l’autre, et pense à tout moment
Qu’elle fait aller la machine,
S’assied sur le timon, sur le nez du Cocher ;
Aussitôt que le char chemine,
Et qu’elle voit les gens marcher,
Elle s’en attribue uniquement la gloire ;
Va, vient, fait l’empressée ; il semble que ce soit
Un Sergent de bataille allant en chaque endroit
Faire avancer ses gens, et hâter la victoire.
La Mouche en ce commun besoin
Se plaint qu’elle agit seule, et qu’elle a tout le soin ;
Qu’aucun n’aide aux chevaux à se tirer d’affaire.
Le Moine disait son Bréviaire ;
Il prenait bien son temps ! Une femme chantait ;
C’était bien de chansons qu’alors il s’agissait !
Dame Mouche s’en va chanter à leurs oreilles,
Et fait cent sottises pareilles.
Après bien du travail, le Coche arrive au haut.
Respirons maintenant, dit la Mouche aussitôt :
J’ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine.
Çà, Messieurs les Chevaux, payez-moi de ma peine.
Ainsi certaines gens, faisant les empressés,
S’introduisent dans les affaires :
Ils font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être chassés.
Jean de La Fontaine
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Le Dromadaire
Avec ses quatre dromadaires
Don Pedro d’Alfaroubeira
Courut le monde et l’admira.
Il fit ce que je voudrais faire
Si j’avais quatre dromadaires.
Guillaume Apollinaire
Don Pedro d’Alfaroubeira
Courut le monde et l’admira.
Il fit ce que je voudrais faire
Si j’avais quatre dromadaires.
Guillaume Apollinaire
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Le lézard
Sur les ruines de Rome.
Un jour, seul dans le Colisée,
Ruine de l’orgueil romain,
Sur l’herbe de sang arrosée
Je m’assis, Tacite à la main.
Je lisais les crimes de Rome,
Et l’empire à l’encan vendu,
Et, pour élever un seul homme,
L’univers si bas descendu.
Je voyais la plèbe idolâtre,
Saluant les triomphateurs,
Baigner ses yeux sur le théâtre
Dans le sang des gladiateurs.
Sur la muraille qui l’incruste,
Je recomposais lentement
Les lettres du nom de l’Auguste
Qui dédia le monument.
J’en épelais le premier signe :
Mais, déconcertant mes regards,
Un lézard dormait sur la ligne
Où brillait le nom des Césars.
Seul héritier des sept collines,
Seul habitant de ces débris,
Il remplaçait sous ces ruines
Le grand flot des peuples taris.
Sorti des fentes des murailles,
Il venait, de froid engourdi,
Réchauffer ses vertes écailles
Au contact du bronze attiédi.
Consul, César, maître du monde,
Pontife, Auguste, égal aux dieux,
L’ombre de ce reptile immonde
Éclipsait ta gloire à mes yeux !
La nature a son ironie
Le livre échappa de ma main.
Ô Tacite, tout ton génie
Raille moins fort l’orgueil humain !
Alphonse de Lamartine
Un jour, seul dans le Colisée,
Ruine de l’orgueil romain,
Sur l’herbe de sang arrosée
Je m’assis, Tacite à la main.
Je lisais les crimes de Rome,
Et l’empire à l’encan vendu,
Et, pour élever un seul homme,
L’univers si bas descendu.
Je voyais la plèbe idolâtre,
Saluant les triomphateurs,
Baigner ses yeux sur le théâtre
Dans le sang des gladiateurs.
Sur la muraille qui l’incruste,
Je recomposais lentement
Les lettres du nom de l’Auguste
Qui dédia le monument.
J’en épelais le premier signe :
Mais, déconcertant mes regards,
Un lézard dormait sur la ligne
Où brillait le nom des Césars.
Seul héritier des sept collines,
Seul habitant de ces débris,
Il remplaçait sous ces ruines
Le grand flot des peuples taris.
Sorti des fentes des murailles,
Il venait, de froid engourdi,
Réchauffer ses vertes écailles
Au contact du bronze attiédi.
Consul, César, maître du monde,
Pontife, Auguste, égal aux dieux,
L’ombre de ce reptile immonde
Éclipsait ta gloire à mes yeux !
La nature a son ironie
Le livre échappa de ma main.
Ô Tacite, tout ton génie
Raille moins fort l’orgueil humain !
Alphonse de Lamartine
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Le Lièvre
Ne soit pas lascif et peureux
Comme le lièvre et l’amoureux.
Mais que toujours ton cerveau soit
La hase pleine qui conçoit.
Guillaume Apollinaire
Comme le lièvre et l’amoureux.
Mais que toujours ton cerveau soit
La hase pleine qui conçoit.
Guillaume Apollinaire
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Le Lion amoureux
À Mademoiselle de Sévigné
Sévigné, de qui les attraits
Servent aux grâces de modèle,
Et qui naquîtes toute belle,
À votre indifférence près,
Pourriez-vous être favorable
Aux jeux innocents d’une Fable,
Et voir, sans vous épouvanter,
Un Lion qu’Amour sut dompter ?
Amour est un étrange maître.
Heureux qui peut ne le connaître
Que par récit, lui ni ses coups !
Quand on en parle devant vous,
Si la vérité vous offense,
La Fable au moins se peut souffrir :
Celle-ci prend bien l’assurance
De venir à vos pieds s’offrir,
Par zèle et par reconnaissance.
Du temps que les bêtes parlaient,
Les Lions, entre autres, voulaient
Être admis dans notre alliance.
Pourquoi non ? Puisque leur engeance
Valait la nôtre en ce temps-là,
Ayant courage, intelligence,
Et belle hure outre cela.
Voici comment il en alla.
Un Lion de haut parentage,
En passant par un certain pré,
Rencontra Bergère à son gré :
Il la demande en mariage.
Le père aurait fort souhaité
Quelque gendre un peu moins terrible.
La donner lui semblait bien dur ;
La refuser n’était pas sûr ;
Même un refus eût fait, possible,
Qu’on eût vu quelque beau matin
Un mariage clandestin.
Car outre qu’en toute manière
La belle était pour les gens fiers,
Fille se coiffe volontiers
D’amoureux à longue crinière.
Le Père donc ouvertement
N’osant renvoyer notre amant,
Lui dit : Ma fille est délicate ;
Vos griffes la pourront blesser
Quand vous voudrez la caresser.
Permettez donc qu’à chaque patte
On vous les rogne, et pour les dents
Qu’on vous les lime en même temps.
Vos baisers en seront moins rudes,
Et pour vous plus délicieux ;
Car ma fille y répondra mieux,
Étant sans ces inquiétudes.
Le Lion consent à cela,
Tant son âme était aveuglée !
Sans dents ni griffes le voilà,
Comme place démantelée.
On lâche sur lui quelques chiens :
Il fit fort peu de résistance.
Amour, amour, quand tu nous tiens,
On peut bien dire : Adieu prudence.
Jean de La Fontaine
Sévigné, de qui les attraits
Servent aux grâces de modèle,
Et qui naquîtes toute belle,
À votre indifférence près,
Pourriez-vous être favorable
Aux jeux innocents d’une Fable,
Et voir, sans vous épouvanter,
Un Lion qu’Amour sut dompter ?
Amour est un étrange maître.
Heureux qui peut ne le connaître
Que par récit, lui ni ses coups !
Quand on en parle devant vous,
Si la vérité vous offense,
La Fable au moins se peut souffrir :
Celle-ci prend bien l’assurance
De venir à vos pieds s’offrir,
Par zèle et par reconnaissance.
Du temps que les bêtes parlaient,
Les Lions, entre autres, voulaient
Être admis dans notre alliance.
Pourquoi non ? Puisque leur engeance
Valait la nôtre en ce temps-là,
Ayant courage, intelligence,
Et belle hure outre cela.
Voici comment il en alla.
Un Lion de haut parentage,
En passant par un certain pré,
Rencontra Bergère à son gré :
Il la demande en mariage.
Le père aurait fort souhaité
Quelque gendre un peu moins terrible.
La donner lui semblait bien dur ;
La refuser n’était pas sûr ;
Même un refus eût fait, possible,
Qu’on eût vu quelque beau matin
Un mariage clandestin.
Car outre qu’en toute manière
La belle était pour les gens fiers,
Fille se coiffe volontiers
D’amoureux à longue crinière.
Le Père donc ouvertement
N’osant renvoyer notre amant,
Lui dit : Ma fille est délicate ;
Vos griffes la pourront blesser
Quand vous voudrez la caresser.
Permettez donc qu’à chaque patte
On vous les rogne, et pour les dents
Qu’on vous les lime en même temps.
Vos baisers en seront moins rudes,
Et pour vous plus délicieux ;
Car ma fille y répondra mieux,
Étant sans ces inquiétudes.
Le Lion consent à cela,
Tant son âme était aveuglée !
Sans dents ni griffes le voilà,
Comme place démantelée.
On lâche sur lui quelques chiens :
Il fit fort peu de résistance.
Amour, amour, quand tu nous tiens,
On peut bien dire : Adieu prudence.
Jean de La Fontaine
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Les oies sauvages
Tout est muet, l’oiseau ne jette plus ses cris.
La morne plaine est blanche au loin sous le ciel gris.
Seuls, les grands corbeaux noirs, qui vont cherchant leurs proies,
Fouillent du bec la neige et tachent sa pâleur.
Voilà qu’à l’horizon s’élève une clameur ;
Elle approche, elle vient, c’est la tribu des oies.
Ainsi qu’un trait lancé, toutes, le cou tendu,
Allant toujours plus vite, en leur vol éperdu,
Passent, fouettant le vent de leur aile sifflante.
Le guide qui conduit ces pèlerins des airs
Delà les océans, les bois et les déserts,
Comme pour exciter leur allure trop lente,
De moment en moment jette son cri perçant.
Comme un double ruban la caravane ondoie,
Bruit étrangement, et par le ciel déploie
Son grand triangle ailé qui va s’élargissant.
Mais leurs frères captifs répandus dans la plaine,
Engourdis par le froid, cheminent gravement.
Un enfant en haillons en sifflant les promène,
Comme de lourds vaisseaux balancés lentement.
Ils entendent le cri de la tribu qui passe,
Ils érigent leur tête ; et regardant s’enfuir
Les libres voyageurs au travers de l’espace,
Les captifs tout à coup se lèvent pour partir.
Ils agitent en vain leurs ailes impuissantes,
Et, dressés sur leurs pieds, sentent confusément,
A cet appel errant se lever grandissantes
La liberté première au fond du coeur dormant,
La fièvre de l’espace et des tièdes rivages.
Dans les champs pleins de neige ils courent effarés,
Et jetant par le ciel des cris désespérés
Ils répondent longtemps à leurs frères sauvages.
Guy de Maupassant, Des vers
La morne plaine est blanche au loin sous le ciel gris.
Seuls, les grands corbeaux noirs, qui vont cherchant leurs proies,
Fouillent du bec la neige et tachent sa pâleur.
Voilà qu’à l’horizon s’élève une clameur ;
Elle approche, elle vient, c’est la tribu des oies.
Ainsi qu’un trait lancé, toutes, le cou tendu,
Allant toujours plus vite, en leur vol éperdu,
Passent, fouettant le vent de leur aile sifflante.
Le guide qui conduit ces pèlerins des airs
Delà les océans, les bois et les déserts,
Comme pour exciter leur allure trop lente,
De moment en moment jette son cri perçant.
Comme un double ruban la caravane ondoie,
Bruit étrangement, et par le ciel déploie
Son grand triangle ailé qui va s’élargissant.
Mais leurs frères captifs répandus dans la plaine,
Engourdis par le froid, cheminent gravement.
Un enfant en haillons en sifflant les promène,
Comme de lourds vaisseaux balancés lentement.
Ils entendent le cri de la tribu qui passe,
Ils érigent leur tête ; et regardant s’enfuir
Les libres voyageurs au travers de l’espace,
Les captifs tout à coup se lèvent pour partir.
Ils agitent en vain leurs ailes impuissantes,
Et, dressés sur leurs pieds, sentent confusément,
A cet appel errant se lever grandissantes
La liberté première au fond du coeur dormant,
La fièvre de l’espace et des tièdes rivages.
Dans les champs pleins de neige ils courent effarés,
Et jetant par le ciel des cris désespérés
Ils répondent longtemps à leurs frères sauvages.
Guy de Maupassant, Des vers
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Licorne de la liberté
Licorne de la Liberté
animal au coeur sublime
ouvre moi les portes de la Vérité
Licorne de la Vérité
animal au souffle de Vie
laisse mon exil devenir oubli
Quand deviendrons nous purs ?
Quand deviendrons nous beaux ?
Quand est-ce que l’Idéal que nous avions voulu
transformera cette eau
que nous n’avons jamais bue ?
Licorne, tu es la source
Licorne, tu es le jeu
Licorne, tu es l’équilibre
J’irai marcher dans la forêt
J’irai tout droit vers la cascade
Je te retrouverai là bas
fixant l’éternité en flamme
Winston Perez, 1986
animal au coeur sublime
ouvre moi les portes de la Vérité
Licorne de la Vérité
animal au souffle de Vie
laisse mon exil devenir oubli
Quand deviendrons nous purs ?
Quand deviendrons nous beaux ?
Quand est-ce que l’Idéal que nous avions voulu
transformera cette eau
que nous n’avons jamais bue ?
Licorne, tu es la source
Licorne, tu es le jeu
Licorne, tu es l’équilibre
J’irai marcher dans la forêt
J’irai tout droit vers la cascade
Je te retrouverai là bas
fixant l’éternité en flamme
Winston Perez, 1986
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
Sonnet pour un Cheval
Quelques pas, un saut et il s’élève au Firmament
Merveilleux être de lumière divine
Fils élu de cette Nature Sublîme
Alchimie organique des quatres éléments
Cheval tu es le Feu qui fait brûler le vent
Le souffle d’Air de la Beauté Parfaite
L’animal de la Terre au profil d’Athlète
qui comme l’Eau, coule au gré du Temps
Pégase de la Nuit je suis Bellaphoron
Pur Sang inaccessible et Roi comme le Lion
Cheval tu tiens dans ton coeur le monde
Etalon de légende, passion céleste de Chine
Puissant comme Perceval, Hercule ou bien Odin
Tu es l’Universel, tu propages le Bien
Winston Perez, 2009
Merveilleux être de lumière divine
Fils élu de cette Nature Sublîme
Alchimie organique des quatres éléments
Cheval tu es le Feu qui fait brûler le vent
Le souffle d’Air de la Beauté Parfaite
L’animal de la Terre au profil d’Athlète
qui comme l’Eau, coule au gré du Temps
Pégase de la Nuit je suis Bellaphoron
Pur Sang inaccessible et Roi comme le Lion
Cheval tu tiens dans ton coeur le monde
Etalon de légende, passion céleste de Chine
Puissant comme Perceval, Hercule ou bien Odin
Tu es l’Universel, tu propages le Bien
Winston Perez, 2009
Valerie-M-kaya- Nombre de messages : 875
Date d'inscription : 21/03/2010
la mort d'un lion
Charles-Marie LECONTE DE LISLE
La mort d'un lion
Étant un vieux chasseur altéré de grand air
Et du sang noir des boeufs, il avait l'habitude
De contempler de haut les plaines et la mer,
Et de rugir en paix, libre en sa solitude.
Aussi, comme un damné qui rôde dans l'enfer,
Pour l'inepte plaisir de cette multitude
Il allait et venait dans sa cage de fer,
Heurtant les deux cloisons avec sa tête rude.
L'horrible sort, enfin, ne devant plus changer,
Il cessa brusquement de boire et de manger,
Et la mort emporta son âme vagabonde.
Ô coeur toujours en proie à la rébellion,
Qui tournes, haletant, dans la cage du monde,
Lâche, que ne fais-tu comme a fait ce lion ?
La mort d'un lion
Étant un vieux chasseur altéré de grand air
Et du sang noir des boeufs, il avait l'habitude
De contempler de haut les plaines et la mer,
Et de rugir en paix, libre en sa solitude.
Aussi, comme un damné qui rôde dans l'enfer,
Pour l'inepte plaisir de cette multitude
Il allait et venait dans sa cage de fer,
Heurtant les deux cloisons avec sa tête rude.
L'horrible sort, enfin, ne devant plus changer,
Il cessa brusquement de boire et de manger,
Et la mort emporta son âme vagabonde.
Ô coeur toujours en proie à la rébellion,
Qui tournes, haletant, dans la cage du monde,
Lâche, que ne fais-tu comme a fait ce lion ?
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
les éléphants
Les éléphants
Le sable rouge est comme une mer sans limite,
Et qui flambe, muette, affaissée en son lit.
Une ondulation immobile remplit
L'horizon aux vapeurs de cuivre où l'homme habite.
Nulle vie et nul bruit. Tous les lions repus
Dorment au fond de l'antre éloigné de cent lieues,
Et la girafe boit dans les fontaines bleues,
Là-bas, sous les dattiers des panthères connus.
Pas un oiseau ne passe en fouettant de son aile
L'air épais, où circule un immense soleil.
Parfois quelque boa, chauffé dans son sommeil,
Fait onduler son dos dont l'écaille étincelle.
Tel l'espace enflammé brûle sous les cieux clairs.
Mais, tandis que tout dort aux mornes solitudes,
Lés éléphants rugueux, voyageurs lents et rudes
Vont au pays natal à travers les déserts.
D'un point de l'horizon, comme des masses brunes,
Ils viennent, soulevant la poussière, et l'on voit,
Pour ne point dévier du chemin le plus droit,
Sous leur pied large et sûr crouler au loin les dunes.
Celui qui tient la tête est un vieux chef. Son corps
Est gercé comme un tronc que le temps ronge et mine
Sa tête est comme un roc, et l'arc de son échine
Se voûte puissamment à ses moindres efforts.
Sans ralentir jamais et sans hâter sa marche,
Il guide au but certain ses compagnons poudreux ;
Et, creusant par derrière un sillon sablonneux,
Les pèlerins massifs suivent leur patriarche.
L'oreille en éventail, la trompe entre les dents,
Ils cheminent, l'oeil clos. Leur ventre bat et fume,
Et leur sueur dans l'air embrasé monte en brume ;
Et bourdonnent autour mille insectes ardents.
Mais qu'importent la soif et la mouche vorace,
Et le soleil cuisant leur dos noir et plissé ?
Ils rêvent en marchant du pays délaissé,
Des forêts de figuiers où s'abrita leur race.
Ils reverront le fleuve échappé des grands monts,
Où nage en mugissant l'hippopotame énorme,
Où, blanchis par la Lune et projetant leur forme,
Ils descendaient pour boire en écrasant les joncs.
Aussi, pleins de courage et de lenteur, ils passent
Comme une ligne noire, au sable illimité ;
Et le désert reprend son immobilité
Quand les lourds voyageurs à l'horizon s'effacent.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
Re: Poèmes animaux
Les oiseaux de proie
Je m'étais assis sur la cime antique
Et la vierge neige, en face des Dieux ;
Je voyais monter dans l'air pacifique
La procession des Morts glorieux.
La Terre exhalait le divin cantique
Que n'écoute plus le siècle oublieux,
Et la chaîne d'or du Zeus homérique
D'anneaux en anneaux l'unissait aux cieux.
Mais, ô Passions, noirs oiseaux de proie,
Vous avez troublé mon rêve et ma joie :
Je tombe du ciel, et n'en puis mourir !
Vos ongles sanglants ont dans mes chairs vives
Enfoncé l'angoisse avec le désir,
Et vous m'avez dit : - Il faut que tu vives
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
les elfes
Charles-Marie LECONTE DE LISLE
Les elfes
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Du sentier des bois aux daims familier,
Sur un noir cheval, sort un chevalier.
Son éperon d'or brille en la nuit brune ;
Et, quand il traverse un ravon de lune,
On voit resplendir, d'un reflet changeant,
Sur sa chevelure un casque d'argent.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Ils l'entourent tous d'un essaim léger
Qui dans l'air muet semble voltiger.
- Hardi chevalier, par la nuit sereine,
Où vas-tu si tard ? dit la jeune Reine.
De mauvais esprits hantent les forêts
Viens danser plutôt sur les gazons frais.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
- Non ! ma fiancée aux yeux clairs et doux
M'attend, et demain nous serons époux.
Laissez-moi passer, Elfes des prairies,
Qui foulez en rond les mousses fleuries ;
Ne m'attardez pas loin de mon amour,
Car voici déjà les lueurs du jour.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
- Reste, chevalier. Je te donnerai
L'opale magique et l'anneau doré,
Et, ce qui vaut mieux que gloire et fortune,
Ma robe filée au clair de la lune.
- Non ! dit-il. - Va donc ! - Et de son doigt blanc
Elle touche au coeur le guerrier tremblant.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Et sous l'éperon le noir cheval part.
Il court, il bondit et va sans retard ;
Mais le chevalier frissonne et se penche ;
Il voit sur la route une forme blanche
Qui marche sans bruit et lui tend les bras :
- Elfe, esprit, démon, ne m'arrête pas !
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Ne m'arrête pas, fantôme odieux !
Je vais épouser ma belle aux doux yeux.
- Ô mon cher époux, la tombe éternelle
Sera notre lit de noce, dit-elle.
Je suis morte ! - Et lui, la voyant ainsi,
D'angoisse et d'amour tombe mort aussi.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Les elfes
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Du sentier des bois aux daims familier,
Sur un noir cheval, sort un chevalier.
Son éperon d'or brille en la nuit brune ;
Et, quand il traverse un ravon de lune,
On voit resplendir, d'un reflet changeant,
Sur sa chevelure un casque d'argent.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Ils l'entourent tous d'un essaim léger
Qui dans l'air muet semble voltiger.
- Hardi chevalier, par la nuit sereine,
Où vas-tu si tard ? dit la jeune Reine.
De mauvais esprits hantent les forêts
Viens danser plutôt sur les gazons frais.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
- Non ! ma fiancée aux yeux clairs et doux
M'attend, et demain nous serons époux.
Laissez-moi passer, Elfes des prairies,
Qui foulez en rond les mousses fleuries ;
Ne m'attardez pas loin de mon amour,
Car voici déjà les lueurs du jour.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
- Reste, chevalier. Je te donnerai
L'opale magique et l'anneau doré,
Et, ce qui vaut mieux que gloire et fortune,
Ma robe filée au clair de la lune.
- Non ! dit-il. - Va donc ! - Et de son doigt blanc
Elle touche au coeur le guerrier tremblant.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Et sous l'éperon le noir cheval part.
Il court, il bondit et va sans retard ;
Mais le chevalier frissonne et se penche ;
Il voit sur la route une forme blanche
Qui marche sans bruit et lui tend les bras :
- Elfe, esprit, démon, ne m'arrête pas !
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Ne m'arrête pas, fantôme odieux !
Je vais épouser ma belle aux doux yeux.
- Ô mon cher époux, la tombe éternelle
Sera notre lit de noce, dit-elle.
Je suis morte ! - Et lui, la voyant ainsi,
D'angoisse et d'amour tombe mort aussi.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
yassine- Nombre de messages : 713
Date d'inscription : 21/03/2010
Le faisan doré
Auguste ANGELLIER
Le faisan doré
Quand le Faisan doré courtise sa femelle,
Et fait, pour
l'éblouir, la roue, il étincelle
De feux plus chatoyants qu'un oiseau de
vitrail.
Dressant sa huppe d'or, hérissant son camail
Couleur d'aube et
zébré de rayures d'ébène,
Gonflant suri plastron rouge ardent, il se
promène,
Chaque aile soulevée, en hautaines allures ;
Son plumage
s'emplit de lueurs, les marbrures
De son col vert bronzé, l'ourlet d'or de
ses pennes,
L'incarnat de son dos, les splendeurs incertaines
De sa
queue où des grains serrés de vermillon
Sont alternés avec des traits noirs
sur un fond
De riche, somptueuse et lucide améthyste,
Tout s'allume,
tout luit...
... Et, sur ces yeux muant de claires pierreries
S'unissant, se brisant en des joailleries
Que sertissent le bronze et
l'acier, et l'argent,
Court encore un frisson d'or mobile et changeant,
Qui naît, s'étale, fuit, se rétrécit, tressaille,
Éclate, glisse, meurt,
coule, ondule, s'écaille,
S'écarte en lacis d'or, en plaques d'or s'éploie,
Palpite, s'alanguit, se disperse, poudroie,
Et d'un insaisissable et
féerique réseau
Enveloppe le corps enflammé de l'oiseau.
Le faisan doré
Quand le Faisan doré courtise sa femelle,
Et fait, pour
l'éblouir, la roue, il étincelle
De feux plus chatoyants qu'un oiseau de
vitrail.
Dressant sa huppe d'or, hérissant son camail
Couleur d'aube et
zébré de rayures d'ébène,
Gonflant suri plastron rouge ardent, il se
promène,
Chaque aile soulevée, en hautaines allures ;
Son plumage
s'emplit de lueurs, les marbrures
De son col vert bronzé, l'ourlet d'or de
ses pennes,
L'incarnat de son dos, les splendeurs incertaines
De sa
queue où des grains serrés de vermillon
Sont alternés avec des traits noirs
sur un fond
De riche, somptueuse et lucide améthyste,
Tout s'allume,
tout luit...
... Et, sur ces yeux muant de claires pierreries
S'unissant, se brisant en des joailleries
Que sertissent le bronze et
l'acier, et l'argent,
Court encore un frisson d'or mobile et changeant,
Qui naît, s'étale, fuit, se rétrécit, tressaille,
Éclate, glisse, meurt,
coule, ondule, s'écaille,
S'écarte en lacis d'or, en plaques d'or s'éploie,
Palpite, s'alanguit, se disperse, poudroie,
Et d'un insaisissable et
féerique réseau
Enveloppe le corps enflammé de l'oiseau.
marie la rebelle- Nombre de messages : 1328
Date d'inscription : 11/07/2008
L'Hirondelle et les petits Oiseaux
Une hirondelle en ses voyages
Avait beaucoup appris. Quiconque a beaucoup vu
Peut avoir beaucoup retenu.
Celle-ci prévoyait jusqu'aux moindres orages,
Et devant qu'ils fussent éclos,
Les annonçait aux matelots.
Il arriva qu'au temps que la chanvre se sème,
Elle vit un manant en couvrir maints sillons.
" Ceci ne me plaît pas, dit-elle aux oisillons :
Je vous plains ; car pour moi, dans ce péril extrême,
Je saurai m'éloigner, ou vivre en quelque coin.
Voyez-vous cette main qui par les airs chemine ?
Un jour viendra, qui n'est pas loin,
Que ce qu'elle répand sera votre ruine.
De là naîtront engins à vous envelopper,
Et lacets pour vous attraper,
Enfin mainte et mainte machine
Qui causera dans la saison
Votre mort ou votre prison :
Gare la cage ou le chaudron !
C'est pourquoi, leur dit l'hirondelle,
Mangez ce grain ; et croyez-moi. "
Les oiseaux se moquèrent d'elle :
Ils trouvaient aux champs trop de quoi.
Quand la chènevière fut verte,
L'hirondelle leur dit : " Arrachez brin à brin
Ce qu'a produit ce maudit grain,
Ou soyez sûrs de votre perte.
- Prophète de malheur, babillarde, dit-on,
Le bel emploi que tu nous donnes !
Il nous faudrait mille personnes
Pour éplucher tout ce canton. "
La chanvre étant tout à faire crue,
L'hirondelle ajouta : " Ceci ne va pas bien ;
Mauvaise graine est tôt venue.
Mais puisque jusqu'ici l'on ne m'a crue en rien,
Dès que vous verrez que la terre
Sera couverte, et qu'à leurs blés
Les gens n'étant plus occupés
Feront aux oisillons la guerre ;
Quand reginglettes et réseaux
Attraperont petits oiseaux,
Ne volez plus de place en place,
Demeurez au logis, ou changez de climat :
Imitez le canard, la grue, et la bécasse.
Mais vous n'êtes pas en état
De passer, comme nous, les déserts et les ondes,
Ni d'aller chercher d'autres mondes ;
C'est pourquoi vous n'avez qu'un parti qui soit sûr,
C'est de vous renfermer aux trous de quelque mur. "
Les oisillons, las de l'entendre,
Se mirent à jaser aussi confusément
Que faisaient les Troyens quand la pauvre Cassandre
Ouvrait la bouche seulement.
Il en prit aux uns comme aux autres :
Maint oisillon se vit esclave retenu.
Nous n'écoutons d'instincts que ceux qui sont les nôtres,
Et ne croyons le mal que quand il est venu.
[ ]
Poèmes de Jean de La Fontaine
Avait beaucoup appris. Quiconque a beaucoup vu
Peut avoir beaucoup retenu.
Celle-ci prévoyait jusqu'aux moindres orages,
Et devant qu'ils fussent éclos,
Les annonçait aux matelots.
Il arriva qu'au temps que la chanvre se sème,
Elle vit un manant en couvrir maints sillons.
" Ceci ne me plaît pas, dit-elle aux oisillons :
Je vous plains ; car pour moi, dans ce péril extrême,
Je saurai m'éloigner, ou vivre en quelque coin.
Voyez-vous cette main qui par les airs chemine ?
Un jour viendra, qui n'est pas loin,
Que ce qu'elle répand sera votre ruine.
De là naîtront engins à vous envelopper,
Et lacets pour vous attraper,
Enfin mainte et mainte machine
Qui causera dans la saison
Votre mort ou votre prison :
Gare la cage ou le chaudron !
C'est pourquoi, leur dit l'hirondelle,
Mangez ce grain ; et croyez-moi. "
Les oiseaux se moquèrent d'elle :
Ils trouvaient aux champs trop de quoi.
Quand la chènevière fut verte,
L'hirondelle leur dit : " Arrachez brin à brin
Ce qu'a produit ce maudit grain,
Ou soyez sûrs de votre perte.
- Prophète de malheur, babillarde, dit-on,
Le bel emploi que tu nous donnes !
Il nous faudrait mille personnes
Pour éplucher tout ce canton. "
La chanvre étant tout à faire crue,
L'hirondelle ajouta : " Ceci ne va pas bien ;
Mauvaise graine est tôt venue.
Mais puisque jusqu'ici l'on ne m'a crue en rien,
Dès que vous verrez que la terre
Sera couverte, et qu'à leurs blés
Les gens n'étant plus occupés
Feront aux oisillons la guerre ;
Quand reginglettes et réseaux
Attraperont petits oiseaux,
Ne volez plus de place en place,
Demeurez au logis, ou changez de climat :
Imitez le canard, la grue, et la bécasse.
Mais vous n'êtes pas en état
De passer, comme nous, les déserts et les ondes,
Ni d'aller chercher d'autres mondes ;
C'est pourquoi vous n'avez qu'un parti qui soit sûr,
C'est de vous renfermer aux trous de quelque mur. "
Les oisillons, las de l'entendre,
Se mirent à jaser aussi confusément
Que faisaient les Troyens quand la pauvre Cassandre
Ouvrait la bouche seulement.
Il en prit aux uns comme aux autres :
Maint oisillon se vit esclave retenu.
Nous n'écoutons d'instincts que ceux qui sont les nôtres,
Et ne croyons le mal que quand il est venu.
[ ]
Poèmes de Jean de La Fontaine
Iness- Nombre de messages : 834
Date d'inscription : 18/02/2010
L' Aigle la Laie et la Chatte
L'aigle avait ses petits au haut d'un arbre creux,
La laie au pied, la chatte entre les deux,
Et sans s'incommoder, moyennant ce partage,
Mères et nourrissons faisaient leur tripotage.
La chatte détruisit par sa fourbe l'accord ;
Elle grimpa chez l'aigle, et lui dit : " Notre mort
(Au moins de nos enfants, car c'est tout un aux mères)
Ne tardera possible guères.
Voyez-vous à nos pieds fouir incessamment
Cette maudite laie, et creuser une mine ?
C'est pour déraciner le chêne assurément,
Et de nos nourrissons attirer la ruine :
L'arbre tombant, ils seront dévorés ;
Qu'ils s'en tiennent pour assurés.
S'il m'en restait un seul, j'adoucirais ma plainte. "
Au partir de ce lieu, qu'elle remplit de crainte,
La perfide descend tout droit
A l'endroit
Où la laie était en gésine.
"Ma bonne amie et ma voisine,
Lui dit-elle tout bas, je vous donne un avis :
L'aigle, si vous sortez, fondra sur vos petits.
Obligez-moi de n'en rien dire :
Son courroux tomberait sur moi. "
Dans cette autre famille ayant semé l'effroi,
La chatte en son trou se retire.
L'aigle n'ose sortir, ni pourvoir aux besoins
De ses petits ; la laie encore moins :
Sottes de ne pas voir que le plus grand des soins,
Ce doit être celui d'éviter la famine.
A demeurer chez soi l'une et l'autre s'obstine,
Pour secourir les siens dedans l'occasion ;
L'oiseau royal, en cas de mine ;
La laie, en cas d'irruption.
La faim détruisit tout ; il ne resta personne
De la gent marcassine et de la gent aiglonne
Qui n'allât de vie à trépas :
Grand renfort pour messieurs les chats.
Que ne sait point ourdir une langue traîtresse
Par sa pernicieuse adresse !
Des malheurs qui sont sortis
De la boîte de Pandore,
Celui qu'à meilleur droit tout l'univers abhorre,
C'est la fourbe, à mon avis.
[ ]
Poèmes de Jean de La Fontaine
La laie au pied, la chatte entre les deux,
Et sans s'incommoder, moyennant ce partage,
Mères et nourrissons faisaient leur tripotage.
La chatte détruisit par sa fourbe l'accord ;
Elle grimpa chez l'aigle, et lui dit : " Notre mort
(Au moins de nos enfants, car c'est tout un aux mères)
Ne tardera possible guères.
Voyez-vous à nos pieds fouir incessamment
Cette maudite laie, et creuser une mine ?
C'est pour déraciner le chêne assurément,
Et de nos nourrissons attirer la ruine :
L'arbre tombant, ils seront dévorés ;
Qu'ils s'en tiennent pour assurés.
S'il m'en restait un seul, j'adoucirais ma plainte. "
Au partir de ce lieu, qu'elle remplit de crainte,
La perfide descend tout droit
A l'endroit
Où la laie était en gésine.
"Ma bonne amie et ma voisine,
Lui dit-elle tout bas, je vous donne un avis :
L'aigle, si vous sortez, fondra sur vos petits.
Obligez-moi de n'en rien dire :
Son courroux tomberait sur moi. "
Dans cette autre famille ayant semé l'effroi,
La chatte en son trou se retire.
L'aigle n'ose sortir, ni pourvoir aux besoins
De ses petits ; la laie encore moins :
Sottes de ne pas voir que le plus grand des soins,
Ce doit être celui d'éviter la famine.
A demeurer chez soi l'une et l'autre s'obstine,
Pour secourir les siens dedans l'occasion ;
L'oiseau royal, en cas de mine ;
La laie, en cas d'irruption.
La faim détruisit tout ; il ne resta personne
De la gent marcassine et de la gent aiglonne
Qui n'allât de vie à trépas :
Grand renfort pour messieurs les chats.
Que ne sait point ourdir une langue traîtresse
Par sa pernicieuse adresse !
Des malheurs qui sont sortis
De la boîte de Pandore,
Celui qu'à meilleur droit tout l'univers abhorre,
C'est la fourbe, à mon avis.
[ ]
Poèmes de Jean de La Fontaine
Iness- Nombre de messages : 834
Date d'inscription : 18/02/2010
L' Ane et le petit Chien
Ne forçons point notre talent,
Nous ne ferions rien avec grâce :
Jamais un lourdaud, quoi qu'il fasse,
Ne saurait passer pour galant.
Peu de gens, que le ciel chérit et gratifie,
Ont le don d'agréer infus avec la vie.
C'est un point qu'il leur faut laisser,
Et ne pas ressembler à l'âne de la fable,
Qui pour se rendre plus aimable
Et plus cher à son maître, alla le caresser.
" Comment ? disait-il en son âme,
Ce chien, parce qu'il est mignon,
Vivra de pair à compagnon
Avec Monsieur, avec Madame ;
Et j'aurai des coups de bâton ?
Que fait-il ? il donne la patte ;
Puis aussitôt il est baisé :
S'il en faut faire autant afin que l'on me flatte,
Cela n'est pas bien malaisé. "
Dans cette admirable pensée,
Voyant son maître en joie, il s'en vient lourdement,
Lève une corne toute usée,
La lui porte au menton fort amoureusement,
Non sans accompagner, pour plus grand ornement,
De son chant gracieux cette action hardie.
" Oh ! oh ! quelle caresse !et quelle mélodie !
Dit le maître aussitôt. Holà, Martin-bâton ! "
Martin-bâton accourt : l'âne change de ton.
Ainsi finit la comédie.
[ L' Ane et le petit Chien ]
Poèmes de Jean de La Fontaine
Iness- Nombre de messages : 834
Date d'inscription : 18/02/2010
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