C'était la première fois

J’étais petite fille, aux longs cheveux tout roux,
Quand je vis mettre bas dans l’épaisse litière
La vache Josépha, que Papé à genoux
Aidait, en surveillant d’un regard la chatière.

Il ne voulait pas voir, où toujours il s’assied,
La grosse chatte noire, aux yeux de noctiluque,
Venir tourner en rond autour de son trépied
Et il se retournait à s’en casser la nuque.

De l’étable éclairée, une odeur animale
Me prenait à la gorge et mes yeux en pleuraient.
C’est alors que Papé, sans craindre d’être sale,
Entra dans l’orifice où le petit sortait.

Exhortant de la voix, coudes sur son cuissard,
Les efforts de la bête et sans faire de pause,
Il tirait sur le veau et moi, bien à l’écart,
Je fixais étonnée les mamelles aux pis roses.

Bouchonné, réchauffé, le veau téta sa mère
En lui donnant des coups où se mêlait l’envie.
Papé se releva et remplit un grand verre
Dans lequel il lampa une blanche eau de vie.