Guillaume APOLLINAIRE
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Guillaume APOLLINAIRE
La Jolie rousse
Me voici devant tous un homme plein de sens
Connaissant la vie et de la mort ce qu'un vivant peut connaître
Ayant éprouvé les douleurs et les joies de l'amour
Ayant su quelquefois imposer ses idées
Connaissant plusieurs langages
Ayant pas mal voyagé
Ayant vu la guerre dans l'Artillerie et l'lnfanterie
Blessé à la tête trépané sous le chloroforme
Ayant perdu ses meilleurs amis dans l'effroyable lutte
Je sais d'ancien et de nouveau autant qu'un homme seul pourrait des deux savoir
Et sans m'inquiéter aujourd'hui de cette guerre
Entre nous et pour nous mes amis
Je juge cette longue querelle de la tradition et de l'invention
Me voici devant tous un homme plein de sens
Connaissant la vie et de la mort ce qu'un vivant peut connaître
Ayant éprouvé les douleurs et les joies de l'amour
Ayant su quelquefois imposer ses idées
Connaissant plusieurs langages
Ayant pas mal voyagé
Ayant vu la guerre dans l'Artillerie et l'lnfanterie
Blessé à la tête trépané sous le chloroforme
Ayant perdu ses meilleurs amis dans l'effroyable lutte
Je sais d'ancien et de nouveau autant qu'un homme seul pourrait des deux savoir
Et sans m'inquiéter aujourd'hui de cette guerre
Entre nous et pour nous mes amis
Je juge cette longue querelle de la tradition et de l'invention
Iness- Nombre de messages : 834
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: Guillaume APOLLINAIRE
Marizibill
Dans la Haute-Rue à Cologne
Elle allait et venait le soir
Offerte à tous en tout mignonne
Puis buvait lasse des trottoirs
Très tard dans les brasseries borgnesElle se mettait sur la paille
Pour un maquereau roux et rose
C'était un juif il sentait l'ail
Et l'avait venant de Formose
Tirée d'un bordel de ChangaïJe connais des gens de toutes sortes
Ils n'égalent pas leurs destins
Indécis comme feuilles mortes
Leurs yeux sont des feux mal éteints
Leurs coeurs bougent comme leurs portesGuillaume Apollinaire
Iness- Nombre de messages : 834
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: Guillaume APOLLINAIRE
le pond mirabeau
Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Et nos amours
Faut-il qu'il m'en souvienne
La joie venait toujours après la peine.
Et nos amours
Faut-il qu'il m'en souvienne
La joie venait toujours après la peine.
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
Les jours s'en vont je demeure
Les mains dans les mains restons face à face
Tandis que sous
Le pont de nos bras passe
Des éternels regards l'onde si lasse
Tandis que sous
Le pont de nos bras passe
Des éternels regards l'onde si lasse
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
Les jours s'en vont je demeure
L'amour s'en va comme cette eau courante
L'amour s'en va
Comme la vie est lente
Et comme l'Espérance est violente
L'amour s'en va
Comme la vie est lente
Et comme l'Espérance est violente
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
Les jours s'en vont je demeure
Passent les jours et passent les semaines
Ni temps passé
Ni les amours reviennent
Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Ni temps passé
Ni les amours reviennent
Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
Les jours s'en vont je demeure
Iness- Nombre de messages : 834
Date d'inscription : 18/02/2010
nuit rhénane
Nuit rhénane
Mon verre est plein d'un vin trembleur comme une flamme
Écoutez la chanson lente d'un batelier
Qui raconte avoir vu sous la lune sept femmes
Tordre leurs cheveux verts et longs jusqu'à leurs piedsDebout chantez plus haut en dansant une ronde
Que je n'entende plus le chant du batelier
Et mettez près de moi toutes les filles blondes
Au regard immobile aux nattes repliéesLe Rhin le Rhin est ivre où les vignes se mirent
Tout l'or des nuits tombe en tremblant s'y refléter
La voix chante toujours à en râle-mourir
Ces fées aux cheveux verts qui incantent l'été
Mon verre s'est brisé comme un éclat de rireGuillaume Apollinaire
Iness- Nombre de messages : 834
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: Guillaume APOLLINAIRE
Les villes sont pleines d'amour et de douleur
Deux plantes dont la mort est la commune fleur
Les villes que j'ai vues vivaient comme des folles
Et vomissaient le soir le soleil des journées
Les villes chaque nuit [ceignant] une auréole
Feignaient d'être soleil tant qu'il n'était point né
Villes chair de ma vie j'aime vos nuits solaires
J'ai promené mon cœur par vos soirs blancs et froids
Et libre jusqu'au jour j'ai foulé sans colère
Les ombres projetées par les statues des rois
Les meurt-de-faim les sans-le-sou voyaient la lune
Étalée dans le ciel comme un œuf sur le plat
Les becs de gaz pissaient leur flamme au clair de lune
Les croque-morts avec des bocks tintaient des glas
Ô maisons dans la nuit Ô lits pleins de râles
De la mort des amants du bonheur des époux
Punaise au ciel du lit simulant une étoile
Et la bête à deux dos qui se tâtait le pouls
Au clair nul des bougies tombaient vaille que vaille
Des faux cols sur des flots de jupes mal brossées
Des couples d'ombres célébraient leurs accordailles
À mes yeux de dehors dans les rez-de-chaussée
La ville aux feux de nuit semblait un archipel
Des femmes demandaient l'amour et la dulie
Mais à mes yeux de mâle horreur je me rappelle
Les passantes du soir n'étaient jamais jolies
Puis le jour revenait mais parfois sans soleil
Dresser les maisons côte à côte au bord des rues
Où s'égarent nos vies aux autres vies pareilles
Les vies traînant leur ombre en passant dans la rue
Intercalées dans l'an c'étaient des journées veuves
Les vendredis sanglants et lents d'enterrements
Des blancs et des tout noirs venus des cieux qui pleurent
Quand la femme du diable a battu son amant
Le jour s'arrondissait le bon œuvre de pierre
Les remparts entouraient les murs et les maisons
La gloire des statues les croix des cimetières
La rumeur des hommes en oraison
L'oraison innombrable de la vie qui se grise
Qui veut vivre et mourir dans l'amour et l'effroi
Les usines sont plus hautes que les églises
Et les villes le jour ce sont des soleils froids
Les statues endormies qui rêvent toutes blanches
Dont la soif de mourir jamais ne s'étanche
Les statues blêmies
Des amours souriants et gelés
Sous la neige qui tombe
Songent aux tombes
D'amours morts
Enterrés sur un lit de roses et de verveines
En quelque Cythère lointaine
Il somnole en leur marbre un vague souvenir
D'Hellas endormie
Sous la Séléné d'or
Ô mon âme
Que jamais ne t'étreigne
Le froid des Paros
Sous les soleils d'avril
Les guêpes et les mouches
Ont trompetté leur haine
J'ai la tristesse d'être à la merci d'instincts
Les vers visqueux me guettent
Avec le froid des pluies
Sous terre mon cadavre verdi
Sera ma vie lointaine
Et rien
Un corps décomposé
Fleurissant en fleurs tôt fanées
Fleurs des fiancés
Des trépassés
C'est le destin des hommes
Des hommes qu'on oublie
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Deux plantes dont la mort est la commune fleur
Les villes que j'ai vues vivaient comme des folles
Et vomissaient le soir le soleil des journées
Les villes chaque nuit [ceignant] une auréole
Feignaient d'être soleil tant qu'il n'était point né
Villes chair de ma vie j'aime vos nuits solaires
J'ai promené mon cœur par vos soirs blancs et froids
Et libre jusqu'au jour j'ai foulé sans colère
Les ombres projetées par les statues des rois
Les meurt-de-faim les sans-le-sou voyaient la lune
Étalée dans le ciel comme un œuf sur le plat
Les becs de gaz pissaient leur flamme au clair de lune
Les croque-morts avec des bocks tintaient des glas
Ô maisons dans la nuit Ô lits pleins de râles
De la mort des amants du bonheur des époux
Punaise au ciel du lit simulant une étoile
Et la bête à deux dos qui se tâtait le pouls
Au clair nul des bougies tombaient vaille que vaille
Des faux cols sur des flots de jupes mal brossées
Des couples d'ombres célébraient leurs accordailles
À mes yeux de dehors dans les rez-de-chaussée
La ville aux feux de nuit semblait un archipel
Des femmes demandaient l'amour et la dulie
Mais à mes yeux de mâle horreur je me rappelle
Les passantes du soir n'étaient jamais jolies
Puis le jour revenait mais parfois sans soleil
Dresser les maisons côte à côte au bord des rues
Où s'égarent nos vies aux autres vies pareilles
Les vies traînant leur ombre en passant dans la rue
Intercalées dans l'an c'étaient des journées veuves
Les vendredis sanglants et lents d'enterrements
Des blancs et des tout noirs venus des cieux qui pleurent
Quand la femme du diable a battu son amant
Le jour s'arrondissait le bon œuvre de pierre
Les remparts entouraient les murs et les maisons
La gloire des statues les croix des cimetières
La rumeur des hommes en oraison
L'oraison innombrable de la vie qui se grise
Qui veut vivre et mourir dans l'amour et l'effroi
Les usines sont plus hautes que les églises
Et les villes le jour ce sont des soleils froids
Les statues endormies qui rêvent toutes blanches
Dont la soif de mourir jamais ne s'étanche
Les statues blêmies
Des amours souriants et gelés
Sous la neige qui tombe
Songent aux tombes
D'amours morts
Enterrés sur un lit de roses et de verveines
En quelque Cythère lointaine
Il somnole en leur marbre un vague souvenir
D'Hellas endormie
Sous la Séléné d'or
Ô mon âme
Que jamais ne t'étreigne
Le froid des Paros
Sous les soleils d'avril
Les guêpes et les mouches
Ont trompetté leur haine
J'ai la tristesse d'être à la merci d'instincts
Les vers visqueux me guettent
Avec le froid des pluies
Sous terre mon cadavre verdi
Sera ma vie lointaine
Et rien
Un corps décomposé
Fleurissant en fleurs tôt fanées
Fleurs des fiancés
Des trépassés
C'est le destin des hommes
Des hommes qu'on oublie
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Re: Guillaume APOLLINAIRE
C'est le destin des hommes
Des hommes qu'on oublie
Guillaume
Oui
Léo Larguier soldat mystique ô brancardier
Les vers du caporal plaisent au brigadier
Ce secteur 114 est-ce Arras ou peut-être
La ferme Choléra sinon le bois Le Prêtre
Ici la fraise est rouge et les lilas sont morts
La couleuvre se love en la paille où je dors
Quand s'éveille la nuit la Champagne tonnante
La nuit quand les convois traînent leur rumeur lente
À travers la Champagne où tonnent nos canons
Et les flacons ambrés
Et si nous revenons
Dieu Que de souvenirs
Je suis gai pas malade
Et comme fut Ronsard le chef d'une brigade
Agent de liaison je suis bien aguerri
J'ai l'air mâle et fier j'ai même un peu maigri
Des braves fantassins je connais les tranchées
Où les Gloires de pourpre aux créneaux attachées
Attendent que nos bleus les violent enfin
Au nez de Rosalie épouse du biffin
Êtes-vous en Argonne ou dans le Labyrinthe
Moi je ne suis pas loin de Reims la ville sainte
Je vis dans un marais au fond d'un bois touffu
Ma hutte est en roseaux et ma table est un fût
Que j'ai trouvé naguère au bord du Bras de Vesle
Le rossignol garrule et l'Amour renouvelle
Cependant que l'obus rapace en miaulant
Abat le sapin noir ou le bouleau si blanc
Mais quand reverrons-nous une femme une chambre
Quand nous reverrons-nous Mais sera-ce en septembre
Adieu Léo Larguier ça barde en ce moment
105 et 305 le beau bombardement
Je songe au mois de mars à vous à la tour Magne
Où est mon chocolat Les rats ont tout croqué
Et j'ajoute mon cher style communiqué
Duel d'artillerie à minuit en Champagne
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Des hommes qu'on oublie
Guillaume
Oui
Léo Larguier soldat mystique ô brancardier
Les vers du caporal plaisent au brigadier
Ce secteur 114 est-ce Arras ou peut-être
La ferme Choléra sinon le bois Le Prêtre
Ici la fraise est rouge et les lilas sont morts
La couleuvre se love en la paille où je dors
Quand s'éveille la nuit la Champagne tonnante
La nuit quand les convois traînent leur rumeur lente
À travers la Champagne où tonnent nos canons
Et les flacons ambrés
Et si nous revenons
Dieu Que de souvenirs
Je suis gai pas malade
Et comme fut Ronsard le chef d'une brigade
Agent de liaison je suis bien aguerri
J'ai l'air mâle et fier j'ai même un peu maigri
Des braves fantassins je connais les tranchées
Où les Gloires de pourpre aux créneaux attachées
Attendent que nos bleus les violent enfin
Au nez de Rosalie épouse du biffin
Êtes-vous en Argonne ou dans le Labyrinthe
Moi je ne suis pas loin de Reims la ville sainte
Je vis dans un marais au fond d'un bois touffu
Ma hutte est en roseaux et ma table est un fût
Que j'ai trouvé naguère au bord du Bras de Vesle
Le rossignol garrule et l'Amour renouvelle
Cependant que l'obus rapace en miaulant
Abat le sapin noir ou le bouleau si blanc
Mais quand reverrons-nous une femme une chambre
Quand nous reverrons-nous Mais sera-ce en septembre
Adieu Léo Larguier ça barde en ce moment
105 et 305 le beau bombardement
Je songe au mois de mars à vous à la tour Magne
Où est mon chocolat Les rats ont tout croqué
Et j'ajoute mon cher style communiqué
Duel d'artillerie à minuit en Champagne
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Aquarelliste
À Mademoiselle Yvonne M...
Yvonne sérieuse au visage pâlot
A pris du papier blanc et des couleurs à l'eau
Puis rempli ses godets d'eau claire à la cuisine.
Yvonnette aujourd'hui veut peindre. Elle imagine
De quoi serait capable un peintre de sept ans.
Ferait-elle un portrait ? Il faudrait trop de temps
Et puis la ressemblance est un point difficile
À saisir, il vaut mieux peindre de l'immobile
Et parmi l'immobile inclus dans sa raison
Yvonnette a fait choix d'une belle maison
Et la peint toute une heure en enfant douce et sage.
Derrière la maison s'étend un paysage
Paisible comme un front d'enfant heureux,
Un paysage vert avec des monts ocreux.
Or plus haut que le toit d'un rouge de blessure
Monte un ciel de cinabre où nul jour ne s'azure.
Quand j'étais tout petit aux cheveux longs rêvant,
Quand je stellais le ciel de mes ballons d'enfant,
Je peignais comme toi, ma mignonne Yvonnette,
Des paysages verts avec la maisonnette,
Mais au lieu d'un ciel triste et jamais azuré
J'ai peint toujours le ciel très bleu comme le vrai.
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Yvonne sérieuse au visage pâlot
A pris du papier blanc et des couleurs à l'eau
Puis rempli ses godets d'eau claire à la cuisine.
Yvonnette aujourd'hui veut peindre. Elle imagine
De quoi serait capable un peintre de sept ans.
Ferait-elle un portrait ? Il faudrait trop de temps
Et puis la ressemblance est un point difficile
À saisir, il vaut mieux peindre de l'immobile
Et parmi l'immobile inclus dans sa raison
Yvonnette a fait choix d'une belle maison
Et la peint toute une heure en enfant douce et sage.
Derrière la maison s'étend un paysage
Paisible comme un front d'enfant heureux,
Un paysage vert avec des monts ocreux.
Or plus haut que le toit d'un rouge de blessure
Monte un ciel de cinabre où nul jour ne s'azure.
Quand j'étais tout petit aux cheveux longs rêvant,
Quand je stellais le ciel de mes ballons d'enfant,
Je peignais comme toi, ma mignonne Yvonnette,
Des paysages verts avec la maisonnette,
Mais au lieu d'un ciel triste et jamais azuré
J'ai peint toujours le ciel très bleu comme le vrai.
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
À la Santé
I
Avant d'entrer dans ma cellule
Il a fallu me mettre nu
Et quelle voix sinistre ulule
Guillaume qu'es-tu devenu
Le Lazare entrant dans la tombe
Au lieu d'en sortir comme il fit
Adieu adieu chantante ronde
Ô mes années ô jeunes filles
III
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Tournons tournons tournons toujours
Le ciel est bleu comme une chaîne
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Dans la cellule d'à côté
On y fait couler la fontaine
Avec les clefs qu'il fait tinter
Que le geôlier aille et revienne
Dans la cellule d'à côté
On y fait couler la fontaine
V
Que lentement passent les heures
Comme passe un enterrement
Tu pleureras l'heure où tu pleures
Qui passera trop vitement
Comme passent toutes les heures
VI
J'écoute les bruits de la ville
Et prisonnier sans horizon
Je ne vois rien qu'un ciel hostile
Et les murs nus de ma prison
Le jour s'en va voici que brûle
Une lampe dans la prison
Nous sommes seuls dans ma cellule
Belle clarté Chère raison
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
À travers l'Europe
À M. Ch.
Rotsoge
Ton visage écarlate ton biplan transformable en hydroplan
Ta maison ronde où il nage un hareng saur
II me faut la clef des paupières
Heureusement que nous avons vu M. Panado
Et nous sommes tranquilles de ce côté- là
Qu'est-ce que tu vois mon vieux M. D...
90 ou 324 un homme en l'air un veau qui regarde à travers le ventre de sa mère
J'ai cherché longtemps sur les routes
Tant d'yeux sont clos au bord des routes
Le vent fait pleurer les saussaies
Ouvre ouvre ouvre ouvre ouvre
Regarde mais regarde donc
Le vieux se lave les pieds dans la cuvette
Una volta ho inteso dire Chè vuoi
Je me mis à pleurer en me souvenant de vos enfances
Et toi tu me montres un violet épouvantable
Ce petit tableau où il y a une voiture m'a rappelé le jour
Un jour fait de morceaux mauves jaunes bleus verts et rouges
Où je m'en allais à la campagne avec une charmante cheminée tenant sa chienne en laisse
Il n'y en a plus tu n'as plus ton petit mirliton
La cheminée fume loin de moi des cigarettes russes
La chienne aboie contre les lilas
La veilleuse est consumée
Sur la robe ont chu des pétales
Deux anneaux d'or près des sandales
Au soleil se sont allumés
Mais tes cheveux sont le trolley
À travers l'Europe vêtue de petits feux multicolores
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918
Rotsoge
Ton visage écarlate ton biplan transformable en hydroplan
Ta maison ronde où il nage un hareng saur
II me faut la clef des paupières
Heureusement que nous avons vu M. Panado
Et nous sommes tranquilles de ce côté- là
Qu'est-ce que tu vois mon vieux M. D...
90 ou 324 un homme en l'air un veau qui regarde à travers le ventre de sa mère
J'ai cherché longtemps sur les routes
Tant d'yeux sont clos au bord des routes
Le vent fait pleurer les saussaies
Ouvre ouvre ouvre ouvre ouvre
Regarde mais regarde donc
Le vieux se lave les pieds dans la cuvette
Una volta ho inteso dire Chè vuoi
Je me mis à pleurer en me souvenant de vos enfances
Et toi tu me montres un violet épouvantable
Ce petit tableau où il y a une voiture m'a rappelé le jour
Un jour fait de morceaux mauves jaunes bleus verts et rouges
Où je m'en allais à la campagne avec une charmante cheminée tenant sa chienne en laisse
Il n'y en a plus tu n'as plus ton petit mirliton
La cheminée fume loin de moi des cigarettes russes
La chienne aboie contre les lilas
La veilleuse est consumée
Sur la robe ont chu des pétales
Deux anneaux d'or près des sandales
Au soleil se sont allumés
Mais tes cheveux sont le trolley
À travers l'Europe vêtue de petits feux multicolores
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
À Nîmes
À Émile Léonard.
Je me suis engagé sous le plus beau des cieux
Dans Nice la Marine au nom victorieux
Perdu parmi 900 conducteurs anonymes
Je suis un charretier du neuf charroi de Nîmes
L'Amour dit Reste ici Mais là-bas les obus
Épousent ardemment et sans cesse les buts
J'attends que le printemps commande que s'en aille
Vers le nord glorieux l'intrépide bleusaille
Les 3 servants assis dodelinent leurs fronts
Où brillent leurs yeux clairs comme mes éperons
Un bel après-midi de garde à l'écurie
J'entends sonner les trompettes d'artillerie
J'admire la gaieté de ce détachement
Qui va rejoindre au front notre beau régiment
Le territorial se mange une salade
À l'anchois en parlant de sa femme malade
4 pointeurs fixaient les bulles des niveaux
Qui remuaient ainsi que les yeux des chevaux
Le bon chanteur Girault nous chante après 9 heures
Un grand air d'opéra toi l'écoutant tu pleures
Je flatte de la main le petit canon gris
Gris comme l'eau de Seine et je songe à Paris
Mais ce pâle blessé m'a dit à la cantine
Des obus dans la nuit la splendeur argentine
Je mâche lentement ma portion de bœuf
Je me promène seul le soir de 5 à 9
Je selle mon cheval nous battons la campagne
Je te salue au loin belle rose ô tour Magne
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Je me suis engagé sous le plus beau des cieux
Dans Nice la Marine au nom victorieux
Perdu parmi 900 conducteurs anonymes
Je suis un charretier du neuf charroi de Nîmes
L'Amour dit Reste ici Mais là-bas les obus
Épousent ardemment et sans cesse les buts
J'attends que le printemps commande que s'en aille
Vers le nord glorieux l'intrépide bleusaille
Les 3 servants assis dodelinent leurs fronts
Où brillent leurs yeux clairs comme mes éperons
Un bel après-midi de garde à l'écurie
J'entends sonner les trompettes d'artillerie
J'admire la gaieté de ce détachement
Qui va rejoindre au front notre beau régiment
Le territorial se mange une salade
À l'anchois en parlant de sa femme malade
4 pointeurs fixaient les bulles des niveaux
Qui remuaient ainsi que les yeux des chevaux
Le bon chanteur Girault nous chante après 9 heures
Un grand air d'opéra toi l'écoutant tu pleures
Je flatte de la main le petit canon gris
Gris comme l'eau de Seine et je songe à Paris
Mais ce pâle blessé m'a dit à la cantine
Des obus dans la nuit la splendeur argentine
Je mâche lentement ma portion de bœuf
Je me promène seul le soir de 5 à 9
Je selle mon cheval nous battons la campagne
Je te salue au loin belle rose ô tour Magne
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
À l'Italie
À Ardengo Soffici.
L'amour a remué ma vie comme on remue la terre dans la zone des armées
J'atteignais l'âge mûr quand la guerre arriva
Et dans ce jour d'août 1915 le plus chaud de l'année
Bien abrité dans l'hypogée que j'ai creusé moi-même
C'est à toi que je songe Italie mère de mes pensées
Et déjà quand von Kluck marchait sur Paris avant la Marne
J'évoquais le sac de Rome par les Allemands
Le sac de Rome qu'ont décrit
Un Bonaparte le vicaire espagnol Delicado et l'Arétin
Je me disais
Est-il possible que la nation
Qui est la mère de la civilisation
Regarde sans la défendre les efforts qu'on fait pour la détruire
Puis les temps sont venus les tombes se sont ouvertes
Les fantômes des Esclaves toujours frémissants
Se sont dressés en criant SUS AUX TUDESQUES
Nous l'armée invisible aux cris éblouissants
Plus doux que n'est le miel et plus simples qu'un peu de terre
Nous te tournons bénignement le dos Italie
Mais ne t'en fais pas nous t'aimons bien
Italie mère qui es aussi notre fille
Nous sommes là tranquillement et sans tristesse
Et si malgré les masques les sacs de sable les rondins nous tombions
Nous savons qu'un autre prendrait notre place
Et que les Armées ne périront jamais
Les mois ne sont pas longs ni les jours ni les nuits
C'est la guerre qui est longue
Italie
Toi notre mère et notre fille quelque chose comme une sœur
J'ai comme toi pour me réconforter
Le quart de pinard
Qui met tant de différence entre nous et les Boches
J'ai aussi comme toi l'envol des compagnies de perdreaux des 75
Comme toi je n'ai pas cet orgueil sans joie des Boches et je sais rigoler
Je ne suis pas sentimental à l'excès comme le sont ces gens sans mesure que leurs actions dépassent sans qu'ils sachent s'amuser
Notre civilisation a plus de finesse que les choses qu'ils emploient
Elle est au-delà de la vie confortable
Et de ce qui est l'extérieur dans l'art et l'industrie
Les fleurs sont nos enfants et non les leurs
Même la fleur de lys qui meurt au Vatican
La plaine est infinie et les tranchées sont blanches
Les avions bourdonnent ainsi que des abeilles
Sur les roses momentanés des éclatements
Et les nuits sont parées de guirlandes d'éblouissements
De bulles de globules aux couleurs insoupçonnées
Nous jouissons de tout même de nos souffrances
Notre humeur est charmante l'ardeur vient quand il faut
Nous sommes narquois car nous savons faire la part des choses
Et il n'y a pas plus de folie chez celui qui jette les grenades que chez celui qui plume les patates
Tu aimes un peu plus que nous les gestes et les mots sonores
Tu as à ta disposition les sortilèges étrusques le sens de la majesté héroïque et le courageux honneur individuel
Nous avons le sourire nous devinons ce qu'on ne nous dit pas nous sommes démerdards et même ceux qui se dégonflent sauraient à l'occasion faire preuve de l'esprit de sacrifice qu'on appelle la bravoure
Et nous fumons du gros avec volupté
C'est la nuit je suis dans mon blockhaus éclairé par l'électricité en bâton
Je pense à toi pays des 2 volcans
Je salue le souvenir des sirènes et des scylles mortes au moment de Messine
Je salue le Colleoni équestre de Venise
Je salue la chemise rouge
Je t'envoie mes amitiés Italie et m'apprête à applaudir aux hauts faits de ta bleusaille
Non parce que j'imagine qu'il y aura jamais plus de bonheur ou de malheur en ce monde
Mais parce que comme toi j'aime à penser seul et que les Boches m'en empêcheraient
Mais parce que le goût naturel de la perfection que nous avons l'un et l'autre si on les laissait faire serait vite remplacé par je ne sais quelles commodités dont je n'ai que faire
Et surtout parce que comme toi je sais je veux choisir et qu'eux voudraient nous forcer à ne plus choisir
Une même destinée nous lie en cette occase
Ce n'est pas pour l'ensemble que je le dis
Mais pour chacun de toi Italie
Ne te borne point à prendre les terres irrédentes
Mets ton destin dans la balance où est la nôtre
Les réflecteurs dardent leurs lueurs comme des yeux d'escargots
Et les obus en tombant sont des chiens qui jettent de la terre avec leurs pattes après avoir fait leurs besoins
Notre armée invisible est une belle nuit constellée
Et chacun de nos hommes est un astre merveilleux
Ô nuit ô nuit éblouissante
Les morts sont avec nos soldats
Les morts sont debout dans les tranchées
Ou se glissent souterrainement vers les Bien-Aimées
Ô Lille Saint-Quentin Laon Maubeuge Vouziers
Nous jetons nos villes comme des grenades
Nos fleuves sont brandis comme des sabres
Nos montagnes chargent comme cavalerie
Nous reprendrons les villes les fleuves et les collines
De la frontière helvétique aux frontières bataves
Entre toi et nous Italie
Il y a des patelins pleins de femmes
Et près de coi m'attend celle que j'adore
Ô Frères d'Italie
Ondes nuages délétères
Métalliques débris qui vous rouillez partout
Ô frères d'Italie vos plumes sur la tête
Italie
Entends crier Louvain vois Reims tordre ses bras
Et ce soldat blessé toujours debout Arras
Et maintenant chantons ceux qui sont morts
Ceux qui vivent
Les officiers les soldats
Les flingots Rosalie le canon la fusée l'hélice la pelle les chevaux
Chantons les bagues pâles les casques
Chantons ceux qui sont morts
Chantons la terre qui bâille d'ennui
Chantons et rigolons
Durant des années
Italie
Entends braire l'âne boche
Faisons la guerre à coups de fouets
Faits avec les rayons du soleil
Italie
Chantons et rigolons
Durant des années
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
L'amour a remué ma vie comme on remue la terre dans la zone des armées
J'atteignais l'âge mûr quand la guerre arriva
Et dans ce jour d'août 1915 le plus chaud de l'année
Bien abrité dans l'hypogée que j'ai creusé moi-même
C'est à toi que je songe Italie mère de mes pensées
Et déjà quand von Kluck marchait sur Paris avant la Marne
J'évoquais le sac de Rome par les Allemands
Le sac de Rome qu'ont décrit
Un Bonaparte le vicaire espagnol Delicado et l'Arétin
Je me disais
Est-il possible que la nation
Qui est la mère de la civilisation
Regarde sans la défendre les efforts qu'on fait pour la détruire
Puis les temps sont venus les tombes se sont ouvertes
Les fantômes des Esclaves toujours frémissants
Se sont dressés en criant SUS AUX TUDESQUES
Nous l'armée invisible aux cris éblouissants
Plus doux que n'est le miel et plus simples qu'un peu de terre
Nous te tournons bénignement le dos Italie
Mais ne t'en fais pas nous t'aimons bien
Italie mère qui es aussi notre fille
Nous sommes là tranquillement et sans tristesse
Et si malgré les masques les sacs de sable les rondins nous tombions
Nous savons qu'un autre prendrait notre place
Et que les Armées ne périront jamais
Les mois ne sont pas longs ni les jours ni les nuits
C'est la guerre qui est longue
Italie
Toi notre mère et notre fille quelque chose comme une sœur
J'ai comme toi pour me réconforter
Le quart de pinard
Qui met tant de différence entre nous et les Boches
J'ai aussi comme toi l'envol des compagnies de perdreaux des 75
Comme toi je n'ai pas cet orgueil sans joie des Boches et je sais rigoler
Je ne suis pas sentimental à l'excès comme le sont ces gens sans mesure que leurs actions dépassent sans qu'ils sachent s'amuser
Notre civilisation a plus de finesse que les choses qu'ils emploient
Elle est au-delà de la vie confortable
Et de ce qui est l'extérieur dans l'art et l'industrie
Les fleurs sont nos enfants et non les leurs
Même la fleur de lys qui meurt au Vatican
La plaine est infinie et les tranchées sont blanches
Les avions bourdonnent ainsi que des abeilles
Sur les roses momentanés des éclatements
Et les nuits sont parées de guirlandes d'éblouissements
De bulles de globules aux couleurs insoupçonnées
Nous jouissons de tout même de nos souffrances
Notre humeur est charmante l'ardeur vient quand il faut
Nous sommes narquois car nous savons faire la part des choses
Et il n'y a pas plus de folie chez celui qui jette les grenades que chez celui qui plume les patates
Tu aimes un peu plus que nous les gestes et les mots sonores
Tu as à ta disposition les sortilèges étrusques le sens de la majesté héroïque et le courageux honneur individuel
Nous avons le sourire nous devinons ce qu'on ne nous dit pas nous sommes démerdards et même ceux qui se dégonflent sauraient à l'occasion faire preuve de l'esprit de sacrifice qu'on appelle la bravoure
Et nous fumons du gros avec volupté
C'est la nuit je suis dans mon blockhaus éclairé par l'électricité en bâton
Je pense à toi pays des 2 volcans
Je salue le souvenir des sirènes et des scylles mortes au moment de Messine
Je salue le Colleoni équestre de Venise
Je salue la chemise rouge
Je t'envoie mes amitiés Italie et m'apprête à applaudir aux hauts faits de ta bleusaille
Non parce que j'imagine qu'il y aura jamais plus de bonheur ou de malheur en ce monde
Mais parce que comme toi j'aime à penser seul et que les Boches m'en empêcheraient
Mais parce que le goût naturel de la perfection que nous avons l'un et l'autre si on les laissait faire serait vite remplacé par je ne sais quelles commodités dont je n'ai que faire
Et surtout parce que comme toi je sais je veux choisir et qu'eux voudraient nous forcer à ne plus choisir
Une même destinée nous lie en cette occase
Ce n'est pas pour l'ensemble que je le dis
Mais pour chacun de toi Italie
Ne te borne point à prendre les terres irrédentes
Mets ton destin dans la balance où est la nôtre
Les réflecteurs dardent leurs lueurs comme des yeux d'escargots
Et les obus en tombant sont des chiens qui jettent de la terre avec leurs pattes après avoir fait leurs besoins
Notre armée invisible est une belle nuit constellée
Et chacun de nos hommes est un astre merveilleux
Ô nuit ô nuit éblouissante
Les morts sont avec nos soldats
Les morts sont debout dans les tranchées
Ou se glissent souterrainement vers les Bien-Aimées
Ô Lille Saint-Quentin Laon Maubeuge Vouziers
Nous jetons nos villes comme des grenades
Nos fleuves sont brandis comme des sabres
Nos montagnes chargent comme cavalerie
Nous reprendrons les villes les fleuves et les collines
De la frontière helvétique aux frontières bataves
Entre toi et nous Italie
Il y a des patelins pleins de femmes
Et près de coi m'attend celle que j'adore
Ô Frères d'Italie
Ondes nuages délétères
Métalliques débris qui vous rouillez partout
Ô frères d'Italie vos plumes sur la tête
Italie
Entends crier Louvain vois Reims tordre ses bras
Et ce soldat blessé toujours debout Arras
Et maintenant chantons ceux qui sont morts
Ceux qui vivent
Les officiers les soldats
Les flingots Rosalie le canon la fusée l'hélice la pelle les chevaux
Chantons les bagues pâles les casques
Chantons ceux qui sont morts
Chantons la terre qui bâille d'ennui
Chantons et rigolons
Durant des années
Italie
Entends braire l'âne boche
Faisons la guerre à coups de fouets
Faits avec les rayons du soleil
Italie
Chantons et rigolons
Durant des années
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
Allons plus vite
Et le soir vient et les lys meurent
Regarde ma douleur beau ciel qui me l'envoies
Une nuit de mélancolie
Enfant souris ô sœur écoute
Pauvres marchez sur la grand-route
Ô menteuse forêt qui surgis à ma voix
Les flammes qui brûlent les âmes
Sur le boulevard de Grenelle
Les ouvriers et les patrons
Arbres de mai cette dentelle
Ne fais donc pas le fanfaron
Allons plus vite nom de Dieu
Allons plus vite
Tous les poteaux télégraphiques
Viennent là-bas le long du quai
Sur son sein notre République
A mis ce bouquet de
Qui poussait dru le long du quai
Allons plus vite nom de Dieu
Allons plus vite
La bouche en cœur Pauline honteuse
Les ouvriers et les patrons
Oui-dà oui-dà belle endormeuse
Ton frère
Allons plus vite nom de Dieu
Allons plus vite
Guillaume Apollinaire (1880 - 1918
Rita-kazem- Nombre de messages : 4254
Date d'inscription : 18/02/2010
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