Mahmoud Darwich
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Mahmoud Darwich
[…]
Un nuage dans ma main me blesse
Je n’exige pas de la terre plus que cette terre
Les senteurs de la cardamome et de la paille
Entre le cheval et mon père
Un nuage dans ma main m’a blessé
Je n’exige pas du soleil plus qu’une orange, et
L’or qui coule de l’appel à la prière
[…]
Extrait du poème Un nuage dans ma main, dans Pourquoi as-tu laissé le cheval à sa solitude, trad de l’arabe par Elias Sanbar, éditions Actes Sud 1996, page 19
La poésie de Mahmoud Darwich, souvent qualifiée de lyrisme épique, célèbre la terre du poète, La Palestine, avec tour à tour colère, peur, fidélité, soucis d’identité. Il est la personnification d’un peuple opprimé, son porte parole. Certains diront que cette écriture a une dimension politique, ce à quoi le poète répond « le poète n’est pas tenu de fournir un programme politique à son lecteur ». D’autres lui attribuent une image de prophète, de barde que le poète tente de chasser pour aller à la rencontre de sa propre voix. Quoiqu’il en soit, et un peu malgré lui, le message de Mahmoud Darwich tend vers l’universalité et l’humanisme.
père, dis-moi
est-il vrai que tous les hommes, en tous lieux
ont du pain, des espoirs
et un hymne national ?
Pourquoi donc avons-nous si faim
et chantons-nous, tout bas, des poèmes tristes ?
[…]
Extrait du poème Chanson naïve sur la Croix-Rouge dans Rien qu’une autre année, traduit de l’arabe par Abdellatif Laâbi, éditions de Minuit 1983, page 35
Mais pour mieux le connaître, revenons un peu à son histoire… Chassé à l’âge de 8 ans avec ses parents de son village natal, Birwa, il part pour le Liban. Un an plus tard en 1950, la famille est de retour mais Birwa a disparue et est occupée par des colonies israéliennes ; ils sont contraints de vivre en semi-clandestinité à Dayr al-Asad. La famille est donc devenue étrangère sur sa propre terre. Ca en fait beaucoup pour un petit enfant en soif de paix.
- Où me mènes-tu, père ?
- En direction du vent, mon enfant
[…]
- Qui habitera notre maison après nous, père ?
- Elle restera telle que nous l’avons laissée mon enfant
[…]
Extrait du poème L’éternité du figuier de barbarie, dans Pourquoi as-tu laissé le cheval à sa solitude, trad de l’arabe par Elias Sanbar, éditions Actes Sud 1996, page 27
j’ai en tête une chanson
sur ma ville natale
dors, ô ma sœur
que je puisse l’écrire
j’ai vu ton corps
soulevé par des chaînes
ruisselant de couleurs
et je leur ai dit :
Mon corps est là-bas
ils ont interdit la place de la ville
[…]
Extrait du poème La chute de la lune, dans Rien qu’une autre année, traduit de l’arabe par Abdellatif Laâbi, éditions de Minuit 1983, page 57
Mahmoud Darwich écrit donc très jeune, cherchant l’apaisement des mots dans la dureté de l’exil. Il sera ensuite emprisonné à cinq reprises entre 1961 et 1967 pour avoir exprimé la douleur d’un peuple, l’occupation d’une terre, l’espoir de liberté qui brille dans les yeux de chaque palestinien. Il partira vivre à Beyrouth, au Caire, à Tunis, à Paris pour revenir s’installer à Ramallah en 1996, quelques mois après le retrait de l’armée israélienne.
t’aimer, ou ne pas t’aimer
je pars, je laisse derrière moi des adresses susceptibles de se perdre
j’attends ceux qui reviennent
ils connaissent les échéances de ma mort, et ils viennent
Toi que je n’aime pas lorsque je t’aime
les murs de Babylone sont étroits le jour, tes yeux sont larges
et ton visage se propage dans la clarté
Comme si tu n’étais pas encore née. Et que nous ne nous
soyons jamais séparés. Comme si tu ne m’avais jamais assassiné.
[…]
Extrait du poème Cantiques, dans Rien qu’une autre année, traduit de l’arabe par Abdellatif Laâbi, éditions de Minuit 1983,page 87
C’est son poème Identité qui dans les années 60, le fait entrer dans la légende. Identité dépasse les frontières et devient une hymne chantée par tout le monde arabe. La poésie de Mahmoud Darwich chante la patrie perdue avec l’utilisation du langage de tous les jours, des formules saisissantes, des mots qui frappent et martèlent le torse du monde.
Pays au point de l’aube,
Nous nous entendrons
Sur la part de terre dévolue aux martyrs.
Les voici égaux
Qui déroulent l’herbe
Pour nous rassembler !
Extrait de Etat de siège, traduit de l’arabe par Elias Sanbar, éditions Actes sud 2004, page 25
Le poète ne veut néanmoins pas être qualifié de « poète de la résistance » et ne souhaite pas que de son œuvre ne soit retenu que le côté politique. Il se dit poète de l’amour également. « Je voudrais être présenté au public israélien comme un poète de l’amour. Je veux que le public, tout le public, connaisse le poète qui est en moi, pas seulement le Palestinien qui est en moi » (Mona Choller, « Inscris ! Je suis poète », www.inventaire-invention.com, 2000).
Le cheval est tombé du poème.
Les Galiléennes étaient trempées
de papillons et de rosée,
qui dansaient sur les marguerites des près.
Les deux absents : toi et moi,
moi et toi, les deux absents.
Deux blancs époux de mouettes
conversent de nuit sur les branches des chênes.
Pas d'amour, mais j'aime
les poèmes d'amour
anciens qui protègent
la lune souffrante, de la fumée.
Poussées et tirées, tel le violon dans les quatuors,
je m'éloigne de mon temps
quand je me rapproche
Des reliefs du lieu...
Plus de place dans la langue moderne
pour fêter ce que nous aimons,
tout ce qui adviendra... fut.
Le cheval est tombé, baignant
dans mon poème
et moi je suis tombé, baignant
dans le sang du cheval...
Extrait de Le cheval est tombé du poème dans Ne t’excuse pas, éditions Actes Sud 2006, page 34
Pour s’affranchir de la pression collective, Mahmoud Darwich casse sans cesse le langage poétique employé par la poésie arabe. Il donne à lire dans chaque nouveau poème une rupture avec ce qu’il a pu écrire auparavant. Néanmoins ce n’est pas toujours sans difficultés car sa poésie donne à interprétation, la mère ou la femme deviennent la patrie, l’enfant devient le peuple. « On s’est habitué à penser que, pour moi, la femme, c’est la patrie. Il faut toujours que je prouve que je suis normal et que je fais l’amour avec des femmes, pas avec la terre ! » (« Mahmoud Darwich, poète de la Palestine », L’Humanité, op. cit.). C’est aussi que dans sa poésie, le lecteur peut avoir quelques peines à différencier l’intime du collectif, l’histoire du poète de celle de son pays, la rage de vivre du combat politique. Difficile pour Mahmoud Darwich de rester un simple poète lorsque son public l’acclame et voit en lui davantage un prophète en qui confier un peu d’espoir.
sauraya ilyas- Nombre de messages : 381
Date d'inscription : 29/10/2010
Re: Mahmoud Darwich
Le poète palestinien Mahmoud Darwich, considéré comme l’un des plus grands écrivains arabes, est mort à Houston, aux Etats-Unis. Il était né en 1941 dans le village de Birwa, en Galilée, qui fut rasé lors de la guerre de 1948. Jeune adulte, il milite au Parti communiste israélien ; il s’exile à plusieurs reprises, à Moscou, au Caire, à Beyrouth ou à Paris. Un temps membre de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), auteur de discours pour Yasser Arafat, il démissionne au moment des accords d’Oslo, auxquels il est opposé. Il était revenu s’installer en Palestine en 1996 et vivait à Ramallah, où il dirigeait la revue Al Karmel.
Ses poèmes, qui, lors de ses années à l’étranger, entraient en Palestine, dit-on, « sur un nuage », et dont les plus célèbres sont Identité, Rita ou Je me languis du pain de ma mère, marquent profondément des générations entières, dans son pays et au-delà. Ils ont fait l’objet d’adaptations théâtrales et ont été mis en musique par le chanteur libanais Marcel Khalife. Ses vers sont parfois devenus des slogans, l’amenant à développer des réflexions fines et souvent empreintes d’humour sur les liens qu’entretiennent poésie et politique. Il se définissait comme le poète des vaincus — comme un « poète troyen », c’est-à-dire comme « l’un de ceux à qui on a enlevé jusqu’au droit de transmettre leur propre défaite (1) ». Mais il refusait d’être réduit au rôle de porte-parole de la cause palestinienne, ou de subordonner son art aux exigences de la lutte de libération nationale — ce qui, à terme, assurait-il, n’aurait pu que desservir l’un comme l’autre.
Ses poèmes, qui, lors de ses années à l’étranger, entraient en Palestine, dit-on, « sur un nuage », et dont les plus célèbres sont Identité, Rita ou Je me languis du pain de ma mère, marquent profondément des générations entières, dans son pays et au-delà. Ils ont fait l’objet d’adaptations théâtrales et ont été mis en musique par le chanteur libanais Marcel Khalife. Ses vers sont parfois devenus des slogans, l’amenant à développer des réflexions fines et souvent empreintes d’humour sur les liens qu’entretiennent poésie et politique. Il se définissait comme le poète des vaincus — comme un « poète troyen », c’est-à-dire comme « l’un de ceux à qui on a enlevé jusqu’au droit de transmettre leur propre défaite (1) ». Mais il refusait d’être réduit au rôle de porte-parole de la cause palestinienne, ou de subordonner son art aux exigences de la lutte de libération nationale — ce qui, à terme, assurait-il, n’aurait pu que desservir l’un comme l’autre.
sauraya ilyas- Nombre de messages : 381
Date d'inscription : 29/10/2010
Re: Mahmoud Darwich
MERCI POUR LE PARTAGE
joakim- Nombre de messages : 238
Date d'inscription : 18/03/2011
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