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Mahmoud Darwish

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Mahmoud Darwish Empty Mahmoud Darwish

Message par Rita-kazem Dim 4 Avr - 14:16

Ô Hélène quelle pluie !







Traduit de l’arabe par : Noureddine Mhakkak.

Mahmoud Darwish Mahmood
Le mardi, j’ai rencontré Hélène
A quinze heures
A l’heure de l’ennui infini,
Mais le tintement de la pluie
Avec une femme comme Hélène
Est un chant de voyage
Pluie,
Quelle nostalgie…nostalgie du ciel
Au ciel !
Pluie,
Quel gémissement….gémissement des loups
Pour leur espèce !

Il pleut sur le toit de la sécheresse,
Sécheresse dorée dans les icônes des églises,
A quelle distance la terre est-elle loin de moi ?
Et l’amour de toi ?
Dit l’étranger à la vendeuse de pain, Hélène,
Dans une rue étroite comme ses chaussettes,
-Pas plus d’un mot….et pluie !
Pluie affamée d’arbres…
Pluie affamée de pierres…

Et l’étranger qui poursuit :
Hélène, Hélène ! Est-ce que l’odeur de pain
Monte maintenant
De toi, vers une fenêtre
Dans un pays lointain …
Pour répéter les paroles d’Homère ?
Est-ce que l’eau jaillit de tes épaules
Vers des arbres séchés dans un poème
Et Hélène de lui répondre :
Ô quelle pluie !
Ô quelle pluie !

L’étranger lui dit alors :
Me faut Narcisse pour que je puisse regarder
L’eau, la tienne
Regarder mon corps.
Regarde
Ô toi Hélène,
Dans l’eau de nos rêves tu trouveras
Les morts sur tes rivages qui chantent pour
Ton nom :
Hélène …Hélène ! Ne nous laisse pas
Seuls comme la lune
Ô quelle pluie !
Ô quelle pluie !
Et l’étranger qui poursuit :
J’ai déjà fait la guerre
Sous tes ordres,
Et tu n’es pas innocente de mon sang asiatique.
Et tu ne seras jamais innocente
D’un sang
Caché dans les veines de tes roses .Hélène
Qu’il étaient durs les grecs d’autan !
Et qu’il était morose, Ulysse, cet amoureux
De voyages
Qui cherchait sa légende
Dans les pèlerinages !

J’ai révélé ce que je lui ai tue
Et ce que j’ai dit je l’ai caché
A Hélène.
Mais elle sait ce que l’étranger ne peut dire …
Et sait ce qu’il chuchote à l’odeur
Qui se brise sous la pluie.
Elle lui dit enfin :
La guerre de Troie n’a eu lieu
Jamais !

Ô quelle pluie !
Rita-kazem
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Mahmoud Darwish Empty MA MERE

Message par Rita-kazem Dim 4 Avr - 14:16

Mahmoud Darwish Darwichb J'ai la nostalgie du pain de ma mere,
Du café de ma mere,
Des caresses de ma mere…
Et l'enfance grandit en moi,
Jour après jour,
Et je chéris ma vie, car
Si je mourais,
J'aurais honte des larmes de ma mere!
Fais de moi, si je rentre un jour,
Une ombrelle pour tes paupières.
Recouvre mes os de cette herbe
Baptisée sous tes talons innocents.
Attache-moi
Avec une mèche de tes cheveux,
Un fil qui pend à l'ourlet de ta robe…
Et je serai, peut-être, un dieu,
Peut-être un dieu,
Si j'effleurais ton Coeur!
Si je rentre, enfouis-moi!
Bûche, dans ton âtre.
Et suspends-moi,
Corde à linge, sur le toit de ta maison.
Je ne tiens pas debout
Sans ta prière du jour.
J'ai vieilli. Ramène les étoiles de l'enfance
Et je partagerai avec les petits des oiseaux,
Le chemin du retour…
Au nid de ton attente!
Rita-kazem
Rita-kazem

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Mahmoud Darwish Empty Je ne suis pas de ceux qui se regardent dans le miroir...

Message par Rita-kazem Dim 4 Avr - 14:17

Je ne suis pas de ceux qui se regardent dans le miroir avec satisfaction. En ce qui me concerne, le miroir reflète un moi tombé dans le domaine public. Autrement dit, les autres ont maintenant le droit d’y rechercher le reflet de leur moi. Si quelqu’un trouve des expressions et des images qui lui ressemblent ou le concernent, il dira : c’est bien moi. S’il n’y trouve aucun point commun avec le texte/image, il s’en détournera en disant : cela n’a rien à voir avec moi !
Par ailleurs, j’appréhende ce débat qui porte sur la relation qu’entretiennent la production poétique moderne et la majorité des lecteurs, débat qui a cours depuis que de nombreux poètes prennent un malin plaisir à creuser le fossé qui sépare le poème et ce second auteur qu’est son récepteur, car sans ce dernier et sans le mouvement qui le porte vers le texte, il n’y a point de projet poétique. Les accusations fusent des deux côtés. Mais la crise de la poésie, si crise il y a, est celle des poètes. C’est à chaque poète de s’efforcer de la résoudre selon sa propre voie créative.
Je sais qu’on va m’accuser, encore une fois, d’être contre la modernité arabe que les névrosés définissent selon les deux critères suivants. Le premier, c’est le mouvement de repli du moi sur sa subjectivité qui ne laisse aucune possibilité à l’intime de s’ouvrir sur l’extérieur. Quant au deuxième, c’est le rejet du poème composé selon la métrique classique hors du « paradis de la modernité » car, à leurs yeux, point de modernité en dehors du poème en prose.
J’ai toujours dit que le poème en prose écrit par des poètes doués était l’une des plus importantes réalisations de la poésie arabe moderne et qu’il avait acquis sa légitimité esthétique de par son ouverture sur le monde et sur tous les genres littéraires. Mais il ne constitue ni l’unique choix poétiques, ni « la solution finale » à toute la problématique poétique, à laquelle on ne peut d’ailleurs apporter aucune réponse définitive. L’espace poétique reste ouvert à tous les choix, connus et inconnus ; que cherchons-nous, en tant que lecteurs, dans les diverses expérimentations poétiques, sinon à réaliser la poéticité dans le poème, qu’il s’agisse d’un poème composé selon la métrique classique ou d’un poème en prose ?
Je sais également que mon nouveau recueil de poèmes, de même que les précédents, fournira à mes nombreux ennemis encore plus d’armes pour commettre ces assassinats symboliques si répandus au sein de la culture de la haine. On dira – comme on l’a déjà fait et comme on le fera encore – que j’ai abandonné « la poésie de la résistance ». Je reconnaîtrai devant ces juges sévères que, si j’ai bien renoncé à écrire la poésie politique et limitée quant à ses significations, je n’ai pas pour autant renoncé à la résistance esthétique au sens large. Ce n’est pas que les conditions ne soient plus les mêmes ou que nous soyons passés de « la résistance au marchandage » comme le prétendent les docteurs ès poésie héroïque, mais c’est parce que le style poétiques doit sans cesse changer. Le poète doit constamment améliorer ses outils poétiques et élargir son horizons humain : il ne doit pas répéter mille fois le même discours, sous peine d’exposer la langue poétique au risque de l’épuisement, du vieillissement et de la standardisation, et de tomber dans le piège qui lui a été tendu, celui de la sclérose et du ressassement. Renonce-t-on pour autant à l’esprit de la résistance ?
En effet, l’esprit de résistance peut-il se limiter à des propos tels que « Inscrit ! Je suis arabe » ou à la répétition du slogan « je résisterai encore et encore » ? Il n’est nullement nécessaire pour un résistant, tant du point de vue poétique que du point de vue pragmatique de dire qu’il aime. C’est Ghassan Kanafani qui nous a appelés « les poètes de la résistance », sans que nous sachions que nous l’étions. Nous écrivions notre vie telle que nous la vivions et la voyions. Nous consignions par écrit nos rêves de liberté et notre obstination à vivre comme nous le souhaitions. Nous dédiions nos poèmes d’amour à la patrie et à des femmes bien réelles… car tout n’est pas symbole : un tronc d’arbre élancé ne renvoie pas nécessairement à la taille fine d’une femme et vice versa ! Il est vrai que le poète ne peut se libérer des conditions historiques qu’il vit, mais la poésie nous offre une marge de liberté, et une compensation métaphorique à notre impuissance à changer la réalité. Elle nous relie à une langue se situant au-dessus des conditions qui nous enchaînent et nous empêchent d’être en symbiose avec notre vécu humain. Elle peut également aider le sujet à se comprendre lui-même en se libérant de ce qui l’empêche de voler librement dans un espace sans limites.
Dire que le sujet a le droit d’être reconnu en tant que tel dans un groupe, c’est une façon comme une autre de vouloir la liberté des individus qui composent le groupe. De ce point de vue, dans le contexte d’une lutte de longue haleine, cette poésie qui exprime notre humanité et nos préoccupations individuelles – qui ne sont jamais seulement individuelles – est une poésie qui représente la dimension humaine subjective de l’acte de résistance poétique, même quand c’est une poésie qui parle de l’amour, de la nature, d’une rose que l’on contemple ou de la peur qu’inspire une mort ordinaire.
Il n’est pas vrai que le poète palestinien n’a le droit de s’asseoir sur une colline pour contempler le coucher du soleil ou de prêter l’oreille à l’appel du corps ou de la flûte lointaine, que si son âme est morte, si l’esprit du lieu est mort en lui et que le cordon ombilical entre lui et sa prime nature soit à jamais coupé.
Etre palestinien n’est ni un métier, ni un slogan. Un palestinien est d’abord un être humain qui aime la vie, tremble à la vue des fleurs d’amandier, a la chair de poule au contact de la première pluie de l’automne, fait l’amour pour assouvir un désir physique naturel et non pas pour répondre à un mot d’ordre, fait des enfants pour transmettre le nom et conserver l’espèce et la vie et non pas par amour de la mort, sauf s’il s’avère par la suite que la mort est préférable à la vie ! Cela revient à dire que la longue occupation n’a pas réussi à effacer notre nature humaine, ni à assécher notre langue et nos sentiments face aux barrières qu’elle dresse devant nous.
C’est un acte de résistance que de voir la poésie assimiler la force de la vie ordinaire qui est en nous. Pourquoi alors accusons-nous la poésie d’apostasie lorsqu’elle assume les beautés sensibles et la liberté d’imagination qui sont en nous et résiste à la laideur par la beauté ? La beauté est en effet liberté et la liberté beauté. C’est ainsi que la poésie qui défend la vie devient une forme de résistance …
Devrais-je encore me demander si la patrie avait besoin d’arguments poétiques ou si la poésie avait besoin d’arguments patriotiques ? La relation de la poésie à la patrie ne se limite pas à noyer la poésie sous un déluge de slogans, de cartes géographiques et de drapeaux. Il s’agit là d’une relation organique qui n’a pas besoin de preuves quotidiennes, car elle est une disposition innée, une conscience et une volonté. Elle est à la fois un héritage et un choix, à la fois un donné et un objet de création. Mais la mauvaise poésie patriotique porte malheureusement préjudice à l’image de la patrie, alors que le combat pour la patrie et au sein de la patrie permet d’accéder à des niveaux de création qui nous échappent souvent.
C’est pourquoi il convient de développer nos manières d’exprimer les aspects humains dans notre vie publique et privée en faisant évoluer la dimension esthétique du poème et la littéralité des textes des textes, en maîtrisant ce métier difficile, en se référant aux critères artistiques généraux et non pas uniquement à la spécificité de la condition palestinienne. Ce sont là des taches à la fois poétiques et patriotiques ; ce sont elles qui préparent notre poésie à un dialogue créatif avec le monde afin que la reconnaissance de notre haut pouvoir de création artistique incite au bout du compte à s’intéresser à la patrie de cette création. Combien de pays avons-nous aimés, sans les avoir connus, parce que nous en avons aimé la littérature !
C’est ainsi que s’effacent les frontières entre l’appartenance nationale de la poésie et sa tendance constante à dépasser les barrières de la culture et de l’identité, pour survoler le vaste horizon humain, sans oublier bien sûr que la poésie a un rôle à jouer dans l’élaboration d’une identité culturelle d’un peuple qui combat pour son identité.
Certes, les poètes doivent se rappeler toutes les souffrances, être à l’écoute de la voix de l’absence, nommer toute chose et s’engager dans toutes les batailles, mais ils ne doivent pas oublier leur de voir envers leur métier. Ils ne doivent pas oublier que la poésie ne se définit pas fondamentalement par son dit, mais bien par la nature du dit, laquelle tranche avec l’ordinaire ; ils ne doivent pas oublier que la poésie est à la fois un plaisir, un art et une beauté ; qu’elle est une joie confuse d’avoir vaincu les difficultés et la perte, et qu’elle est un voyage sans fin vers la recherche de soi dans l’inconnu.
Quant à moi, je ne défends pas ici ce nouveau livre qui ne m’appartient plus. Je ne m’en rappelle rien depuis qu’il est sorti de moi et m’a mis devant l’impasse de cette question évidente : « et après ? ». Mais je défends le droit des poètes à rechercher une nouvelle poésie, celle qui nettoierait la poésie de ce qui n’est pas elle. Car le malheur de l’innovation tâtonnante est préférable au bonheur de l’imitation sclérosé.
------------------------------
Texte prononcé à Ramallah lors de la cérémonie du dédicace du recueil
« Comme les fleurs d’amandiers ou plus loin ».
Traduit de l’arabe par Aziz HILAL
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Mahmoud Darwish Empty Pour saluer Mahmoud Darwich

Message par Rita-kazem Dim 4 Avr - 14:18

Mahmoud Darwish Mahmood_darwaish-5Au fond, la poésie c’est ça : Mahmoud Darwich, l’un des plus grands poètes de langue arabe, lisant ses poèmes en arabe en France devant un public français dont bon nombre ne comprennent pas un mot de sa langue, et qui l’écoutent des heures envoûtés par cette musique, captivés par ce que leur disent intimement ces mots qu’ils reçoivent en profondeur alors qu’ils leur sont en principe étrangers. C’est ce mystère qui est poésie. C’était il y a peu et plusieurs lecteurs de la “République des livres” ont témoigné ici même de l’émotion qui fut la leur cette nuit-là. Inoubliable. Avec la mort du poète palestinien aujourd’hui à 67 ans dans un hôpital de Houston (Texas) à la suite de sa troisième opération à coeur ouvert, quelque chose disparaît. Ses livres resteront bien sûr ; ses poèmes lui survivront, longtemps ; son nom va continuer à briller au firmament du patrimoine culturel du monde arabe ; mais ce qui manquera à jamais, c’est sa voix, ce grain unique assorti d’un regard porteur d’une vision.
Né à Al-Birweh (Galilée) dans la Palestine du mandat britannique, il s’était exilé en 1970, vivant dans plusieurs villes étrangères, notamment à Paris (”J’habite dans une valise” disait-il alors) ne retournant dans son pays qu’un quart de siècle plus tard pour s’installer à Ramallah (Cisjordanie). Il s’était retrouvé un peu malgré lui à se faire le porte-voix de la cause palestinienne, notoriété et prestige obligent. Militant quand il lui eût paru indigne de ne pas l’être, il n’avait de cesse de reconquérir sa liberté d’artiste. Ces dernières années, il avait pris ses distances avec la politique, réservant ses ultimes lances à Yasser Arafat auquel il consacra des tribunes implacables. Sans jamais retirer ne fut-ce qu’un atome de sa solidarité avec son peuple, il chérissait plus que tout son indépendance. Rien ne l’exaspérait comme d’être réduit et enfermé dans l’appellation de “poète officiel de son peuple” ou de ”poète de la résistance”. Son oeuvre est irradiée par la présence charnelle de cette terre, par son souvenir, par l’absence et par l’exil. Son poème “Pense aux autres”, reproduit ici même il y a un an en témoignait parmi tant d’autres. Il se réclamait d’une tradition lyrique et humaniste qui puise son inspiration dans un imaginaire arabe bien antérieur à la naissance de l’Islam. Sans ignorer l’Histoire, il travaillait à soulager sa poésie du poids, de l’intensité et de la pression de l’Histoire immédiate. Face au chaos ambiant, il revendiquait le droit à l’absurde. Sa poésie ne se lamentait pas. Il faut le lire et, le lisant, écouter son chant secret, universel dans sa faculté de dire la détresse et l’espoir de tous et de chacun, comme dans ce poème extrait de son dernier recueil paru en français :

“Dépose ici et maintenant la tombe que tu portes
et donne à ta vie une autre chance
de restaurer le récit.
Toutes les amours ne sont pas trépas,
ni la terre, migration chronique.
Une occasion pourrait se présenter, tu oublieras
la brûlure du miel ancien.
Tu pourrais, sans le savoir, être amoureux
d’une jeune fille qui t’aime
ou ne t’aime pas, sans savoir pourquoi
elle t’aime ou ne t’aime pas.
Adossé à un escalier, tu pourrais
te sentir un autre dans les dualités.
Sors donc de ton moi vers un autre toi,
de tes visions vers tes pas,
et élève ton pont
car le non-lieu est le piège
et les moustiques sur la haie irritent ton dos,
qui pourraient te rappeler la vie !
Vis, que la vie t’entraîne
à la vie,
pense un peu moins aux femmes
et dépose
ici
et maintenant
la tombe que tu portes !”
"Dépose ici et maintenant” extrait de Ne t’excuse pas, (Lä ta’tadhir’ammâ fa’alta) recueil de poèmes traduits de l’arabe par Elias Sanbar, 132 pages, 18 euros, Editions Sinbad/ Actes sud, 2006

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Mahmoud Darwish Empty Le poète palestinien Mahmoud Darwich

Message par Rita-kazem Dim 4 Avr - 14:20

Mahmoud Darwish Mahmood_darwaish-7Mahmoud Darwich avait reçu à La Haye le prestigieux prix Prince Claus pour «son oeuvre impressionnante». Crédits photo : AFP
Son oeuvre au grand lyrisme était notamment marquée par les drames de l'exil et de l'occupation vécus par le peuple palestinien.

Le grand poète palestinien Mahmoud Darwich est décédé samedi dans un hôpital du Texas, au sud des États-Unis. Mahmoud Darwich se trouvait dans un état critique à la suite d'une intervention chirurgicale, avait dit plus tôt un responsable de cet établissement. Selon des proches du célèbre poète palestinien, ce dernier avait subi une opération à coeur ouvert mercredi et se trouvait sous assistance respiratoire suite à des complications. Il avait déjà subi deux opérations du coeur en 1984 et 1998.
Mahmoud Darwich, 67 ans, était l'un des plus grands poètes de langue arabe contemporains, avec une oeuvre au grand lyrisme marquée par les drames de l'exil et de l'occupation vécus par le peuple palestinien. Il avait acquis une notoriété internationale, avec près de trente ouvrages traduits en quarante langues. Son célèbre poème de 1964, «Identité» («Sajjel: Ana arabi»), sur le thème d'un formulaire israélien obligatoire à remplir, deviendra un hymne repris dans tout le monde arabe.
Mahmoud Darwich est né le 13 mars 1941 à Al-Birweh, en Galilée, alors en Palestine sous mandat britannique et aujourd'hui dans le nord d'Israël. Lors de la guerre israélo-arabe de 1948, ce village est rasé et ses habitants sont forcés à l'exil. La famille Darwich s'enfuit au Liban, où elle restera un an, avant de rentrer clandestinement en Israël. Après ses études (en arabe et hébreu) dans des écoles arabes israéliennes, Darwich s'installe à Haïfa, le grand port du nord d'Israël, où vit une importante communauté arabe.
Assigné à résidence
En 1960, à l'âge de 19 ans, il publie son premier recueil de poésie «Oiseaux sans ailes». Un an plus tard, il rejoint le Parti communiste d'Israël, une formation judéo-arabe. Il rêve encore de révolution et d'internationalisme et exprime dans sa poésie une identité palestinienne encore niée à l'époque. Il est assigné à résidence durant de longues périodes. Début des années 1970, il choisit l'exil. Il part pour Moscou étudier l'économie politique puis se rend au Caire en 1971. À Beyrouth, en 1973, il travaille comme rédacteur en chef au Centre de recherche palestinien de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) rejoignant l'organisation alors en guerre avec Israël. Après la guerre israélienne au Liban durant l'été 1982, qui a forcé la direction de l'OLP à trouver refuge à Tunis, Darwich reprend la route de l'exil: Le Caire, Tunis puis Paris.
En 1993, il démissionne de l'OLP pour protester contre les accords d'Oslo, estimant qu'ils n'apporteront pas une «paix juste» pour les Palestiniens. Le poète se rend en 1995 dans la bande de Gaza après l'avènement de l'Autorité palestinienne, avant de s'installer à Ramallah, en Cisjordanie. En mai 1996, il est autorisé à fouler le sol d'Israël pour la première fois depuis son exil afin d'assister aux funérailles de l'écrivain arabe israélien Emile Habibi.
En 2000, le ministre israélien de l'Education propose que deux poèmes de Darwich soient inclus dans les programmes scolaires israéliens. Mais le premier ministre Ehud Barak refuse alors que la droite rappelle que Darwich a écrit en 1988 un poème appelant les Israéliens à mourir où ils veulent «mais pas chez nous».
«Un poète pas une cause»
En juillet 2007, il retourne en Israël lors d'un récital donné à Haïfa, devant une foule considérable composée notamment de la plupart des députés arabes de la Knesset (parlement israélien). À cette occasion, il ironise amèrement sur la prise du contrôle du mouvement islamiste Hamas de la bande de Gaza: «Nous avons triomphé. Gaza a gagné son indépendance de la Cisjordanie. Un seul peuple a désormais deux Etats, deux prisons qui ne se saluent pas. Nous sommes des victimes habillés en bourreaux». Le poète critique également la «mentalité israélienne de ghetto» et la politique israélienne qui empêche la création d'un Etat palestinien viable.
Plus récemment, au festival des musiques du monde d'Arles en juillet dernier, il a confié préférer les thèmes universels de l'amour, la vie, la mort à ceux purement politiques de ses débuts et vouloir être lu «comme un poète», «pas comme une cause». Lauréat du prix Lénine de l'ex-URSS, chevalier des Arts et des Lettres (en France), il avait reçu à La Haye le prestigieux prix Prince Claus pour «son oeuvre impressionnante».
Le président palestinien, Mahmoud Abbas, va envoyer un avion aux Etats-Unis afin de ramener la dépouille du poète. Une cérémonie aura lieu à Amman puis le corps sera transporté à Ramallah, en Cisjordanie. Des responsables palestiniens doivent aussi demander aux autorités israéliennes que le défunt puisse être enterré dans sa Galilée natale. L'Autorité palestinienne a décidé un deuil national de trois jours à la suite du décès du poète.

AFP
09/08/2008
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Mahmoud Darwish Empty CARTE D’IDENTITE

Message par marwa Lun 17 Mai - 21:34

(Mahmoud Darwich)



Mahmoud Darwish _mahmoud_darwish-4-955482


Ecris
Je suis arabe
Et le numéro de ma carte est cinquante mille
J’ai huit enfants
Et le neuvième… viendra après l’été !
Es-tu fâché ?

Ecris
Je suis arabe
Et je travaille avec mes camarades dans une carrière
J’ai huit enfants
Je leur extrais le pain,
Les vêtements et les cahiers
De la roche
Et je ne demande pas l’aumône
Devant ta porte
Et je ne m’humilie pas
Devant les marches de tes palais
Es-tu fâché ?

Ecris
Je suis arabe
Je suis un nom sans titre
Patient dans un pays, où tout ce qu’il y a
Vit avec la colère
Mes racines
Avant le temps se sont établies
Avant l’éclosion des ères
Avant le cyprès et l’olivier
… et avant l’herbe
Mon père… est de la famille de la charrue
Non des seigneurs du golf
Mon grand père était paysan
Sans titre… ni fortune
Il m’apprenait la grandeur du soleil avant la lecture
Ma maison est une cabane
Faite de branche et de roseaux
Ma vie te satisfait-elle ?
Je suis un nom sans titre

Ecris
Je suis arabe
La couleur des cheveux… noire
La couleur des yeux… marron
Mes caractéristiques :
Sur ma tête un agal au dessus d’un keffieh
Et ma main, dure comme la roche,
Blesse celui qui la touche
Mon adresse :
Je suis d’un village isolé, oublié
Ses rues n’ont pas de nom
Et tout ses hommes sont dans le champ et la carrière
Es-tu fâché ?

Ecris
Je suis arabe
Tu m’as volé les vignes des mes grands-pères
Et une terre que [sur laquelle] je cultivais
Moi et tous mes enfants
Et tu ne nous as laissé que ces rochers
Ton gouvernement va-t-il les prendre
…Comme on dit ?
Ecris... à la tête de la première page
Je ne hais pas les gens
Et je n’agresse personne
Mais… quand j’ai faim
Je mange la chaire de celui qui m’a volé
Attention... attention... à ma faim
Et à ma colère !

(Trad. Y. Kouzzi)
marwa
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Message par marwa Lun 17 Mai - 21:36

L'Art d'Aimer



Avec la coupe sertie d'azur,
Je l'attends
Auprès du bassin, des fleurs du chèvrefeuille et du soir,
Je l'attends
Avec la patience du cheval sellé pour les sentiers de montagne,
Je l'attends,
Avec le bon goût du prince raffiné,
Je l'attends
Avec sept coussins remplis de nuées légères,
Je l'attends
Avec le feu féminin omniprésent,
Je l'attends
Avec le parfum masculin du sarcal drapant le dos des chevaux,
Je l'attends

Et ne t'impatiente pas. Si elle arrivait après son heure,
Attends-la
Et si elle arrivait avant,
Attends-la
Et n'effraie pas l'oiseau posé sur les nattes,
Et attends-la
(...)

Et converse avec elle, comme la flûte avec la corde craintive du violon,
Comme si vous étiez les deux témoins de ce vous réserve un lendemain,
Et attends-la
Et polis la nuit, bague après bague,
Et attends-la
Jusqu'à ce que la nuit te dise :
Il ne reste plus que vous deux au monde.
Alors porte-la avec douceur vers ta mort désirée
Et attends-la !...

Mahmoud DARWICH (1999)
marwa
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