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Petrus BOREL

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Message par yassine Dim 2 Mai - 19:48


  • (1809-1859)

Isolement



(à Gérard, poète)

Sous le soleil torride au beau pays créole,
Où l'Africain se courbe au bambou de l'Anglais,
Encontre l'ouragan, le palmier qui s'étiole
Aux bras d'une liane unit son bois épais.

En nos antiques bois, le gui, saint parasite,
Au giron d'une yeuse et s'assied et s'endort ;
Mêlant sa fragile herbe, et subissant le sort
Du tronc religieux qui des autans l'abrite.

Gui ! liane ! palmier ! mon âme vous envie !
Mon coeur voudrait un lierre et s'enlacer à lui.
Pour passer mollement le gué de cette vie,
Je demande une femme, une amie, un appui !

- Un ange d'ici-bas ?... une fleur, une femme ?...
Barde, viens, et choisis dans ce folâtre essaim
Tournoyant au rondeau d'un preste clavecin. -
Non; mon coeur veut un coeur qui comprenne son âme.

Ce n'est point au théâtre, aux fêtes, qu'est la fille
Qui pourrait sur ma vie épancher le bonheur :
C'est aux champs, vers le soir, groupée en sa mantille,
Un Verther à la main sous le saule pleureur.

Ce n'est point une brune aux cils noirs, l'air moresque ;
C'est un cygne indolent; une Ondine aux yeux bleus
Aussi grands qu'une amande, et mourans, soucieux ;
Ainsi qu'en réfléchit le rivage tudesque.

Quand viendra cette fée ? - En vain ma voix l'appelle !
Apporter ses printemps à mon coeur isolé.
Pourtant jusqu'aux cyprès je lui serais fidèle !
Sur la plage toujours resterai-je esseulé ?

Sur mon toit le moineau dort avec sa compagne ;
Ma cavale au coursier a donné ses amours.
Seul, moi, dans cet esquif, que nul être accompagne,
Sur le torrent fougueux je vois passer mes jours.
yassine
yassine

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Petrus BOREL Empty L'incendie du bazar

Message par yassine Dim 2 Mai - 19:49


  • Petrus BOREL (1809-1859)





J'habite la montagne et j'aime à la vallée.
LE VICOMTE D'ARLINCOURT.


Ô toi, dont j'avais fait l'emplette
Pour danse au bois neige-noisette !
L'as-tu toujours, ma Jeanneton,
Ton jupon blanc, ton blanc jupon ?

Pour quelque muscadin, matière à comédie,
Ne va pas m'oublier dans ce coquet bazar,
Où tu trône au comptoir. Colombine hardie !
Perçant l'horizon gris d'un oeil au vif regard,
Flamboyant vois mon coeur, d'amour vois l'incendie !
Et si tu l'as encore, écris-moi, Jeanneton,
Ton jupon blanc, ton blanc jupon.

Au feu ! au feu ! au feu ! la Vierge à perdre haleine
Court... le bazar rissole ! au feu ! au feu ! au feu !
N'est-ce pas Margoton, Cathin ou Madeleine ?... -
Non, c'est la demoiselle au gendarme Mathieu.
- Fleur d'un jour, du ciel noir à la lueur soudaine,
Fuis !... et si tu l'emporte, écris-moi, Jeanneton,
Ton jupon blanc, ton blanc jupon ?

Plus que feu, grand mangeur, crains l'ardeur déréglée
Du bourgeois camisard, du rustre porteur d'eau,
Du beau sapeur-pompier, à coiffe ciselée,
Gare au rapt ! une fille est un léger fardeau.
À Blois, vers ton Titi, clerc à l'âme isolée,
Vole !... et si tu l'emporte, écris-moi, Jeanneton,
Ton jupon blanc, ton blanc jupon.

Ô toi, dont j'avais fait l'emplette
Pour danse au bois neige-noisette !
L'as-tu sauvé, ma jeanneton,
Ton jupon blanc, ton blanc jupon !
yassine
yassine

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Petrus BOREL Empty Misère

Message par yassine Dim 2 Mai - 19:49


  • Petrus BOREL (1809-1859)





La faim mit au tombeau Malfilâtre ignoré.
GILBERT.


À mon air enjoué, mon rire sur la lèvre,
Vous me croyez heureux, doux, azyme et sans fièvre,
Vivant, au jour le jour, sans nulle ambition,
Ignorant le remords, vierge d'affliction ;
À travers les parois d'une haute poitrine,
Voit-on le coeur qui sèche et le feu qui le mine ?
Dans une lampe sourde on ne saurait puiser
Il faut, comme le coeur, l'ouvrir ou la briser.

Aux bourreaux, pauvre André, quand tu portais ta tête,
De rage tu frappais ton front sur la charrette,
N'ayant pas assez fait pour l'immortalité,
Pour ton pays, sa gloire et pour sa liberté.
Que de fois, sur le roc qui borde cette vie,
Ai-je frappé du pied, heurté du front d'envie,
Criant contre le ciel mes longs tourments soufferts
Je sentais ma puissance, et je sentais des fers !

Puissance,... fers,... quoi donc ? - rien, encore un poète
Qui ferait du divin, mais sa muse est muette,
Sa puissance est aux fers. - Allons ! on ne croit plus,
En ce siècle voyant, qu'aux talents révolus.
Travaille, on ne croit plus aux futures merveilles. -
Travaille !... Eh ! le besoin qui me hurle aux oreilles,
Étouffant tout penser qui se dresse en mon sein !
Aux accords de mon luth que répondre ?... j'ai faim !...
yassine
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Message par yassine Dim 2 Mai - 19:50


  • Petrus BOREL (1809-1859)





À LÉON CLOPET, architecte.

"Voici, je m'en vais faire une chose nouvelle
qui viendra en avant ; et les bêtes des champs,
les dragons et les chats-huants me glorifieront."
La Bible.


Quand ton Petrus ou ton Pierre
N'avait pas même une pierre
Pour se poser, l'oeil tari,
Un clou sur un mur avare
Pour suspendre sa guitare, -
Tu me donnas un abri.

Tu me dis : - Viens, mon rhapsode,
Viens chez moi finir ton ode ;
Car ton ciel n'est pas d'azur,
Ainsi que le ciel d'Homère,
Ou du provençal trouvère ;
L'air est froid, le sol est dur.

Paris n'a point de bocage,
Viens donc, je t'ouvre ma cage,
Où, pauvre, gaiement je vis ;
Viens, l'amitié nous rassemble,
Nous partagerons, ensemble,
Quelques grains de chenevis. -

Tout bas, mon âme honteuse
Bénissait ta voix flatteuse
Qui caressait son malheur ;
Car toi seul, au sort austère
Qui m'accablait solitaire,
Léon, tu donnas un pleur.

Quoi ! ma franchise te blesse ?
Voudrais-tu que, par faiblesse,
On voilât sa pauvreté ?
Non, non, nouveau Malfilâtre,
Je veux, au siècle parâtre,
Étaler ma nudité !

Je le veux, afin qu'on sache
Que je ne suis point un lâche,
Car j'ai deux parts de douleur
À ce banquet de la terre ;
Car, bien jeune, la misère
N'a pu briser ma verdeur.

Je le veux, afin qu'on sache
Que je n'ai que ma moustache,
Ma chanson et puis mon coeur,
Qui se rit de la détresse ;
Et que mon âme maîtresse
Contre tout surgit vainqueur.

Je le veux, afin qu'on sache,
Que, sans toge et sans rondache,
Ni chancelier, ni baron,
Je ne suis point gentilhomme,
Ni commis à maigre somme
Parodiant lord Byron.

À la cour, dans ses orgies,
Je n'ai point fait d'élégies,
Point d'hymne à la déité ;
Sur le flanc d'une duchesse,
Barbotant dans la richesse
De lai sur ma pauvreté.
yassine
yassine

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