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Poésie: Jean Joseph Rabearivelo

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Poésie: Jean Joseph Rabearivelo - Page 2 Empty Poésie: Jean Joseph Rabearivelo

Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:31

Rappel du premier message :

Traduit De La Nuit. (1935)

Par Jean Joseph Rabearivelo
. (1901-1937
IN MEMORIAM

FAGUS, Marcel ORMOY et Robert-Jules ALLAIN,
interrogateurs désormais d’une nuit qui ne peut se traduire que
par l’étonnement et l’angoisse de notre douleur
J.-J. R.


Pour avoir mis le pied
Sur le coeur de la nuit
Je suis un homme pris
Dans les rets étoilés.

Jules SUPERVIELLE


Une étoile pourpre
Évolue dans la profondeur du ciel-
Quelle fleur de sang éclose en la prairie de la nuit

Évolue, évolue,
Puis devient comme un cerf-volant lâché par un enfant endormi.

Paraît s’approcher et s’éloigner à la fois,
Perd sa couleur comme une fleur près de tomber,
Devient nuage, devient blanc, se réduit:
N’est plus qu’une pointe de diamant
Striant le miroir bleu du zénith
Où l’on voit déjà le leurre
Glorieux du matin nubile.
Quel rat invisible,
Venu des murs de la nuit,
Grignote le gâteau lacté de la lune?
Demain matin,
Quand il se sera enfui,
Il y aura là des traces de dents sanglantes.

Demain matin,
Ceux qui se seront enivrés toute la nuit
Et ceux qui sortiront du jeu,
En regardant la lune,
Balbutieront ainsi:
« À qui est cette pièce de quat’sous
Qui roule sur la table verte? »
« Ah! ajoutera l’un d’eux,
L’ami avait tout perdu
Et s’est tué! »

Et tous ricaneront
Et, titubant, tomberont.
La lune, elle, ne sera plus là:
Le rat l’aura emportée dans son trou.
La peau de la vache noire est tendue,
Tendue sans être mise à sécher,
Tendue dans l’ombre septuple.

Mais qui a abattu la vache noire,
Morte sans avoir mugi, morte sans avoir beuglé,
Morte sans avoir été poursuivie
Sur cette prairie fleurie d’étoiles?
La voici qui gît dans la moitié du ciel.

Tendue est la peau
Sur la boîte de résonance du vent
Que sculptent les esprits du sommeil.

Et le tambour est prêt
Lorsque se couronnent de glaïeuls
Les cornes du veau délivré
Qui bondit
Et broute les herbes des collines.

Il y résonnera,
Et ses incantations deviendront rêves
Jusqu’au moment où la vache noire ressuscitera,
Blanche et rose,
Devant un fleuve de lumière.
Ce qui se passe sous la terre,
Au nadir lointain?
Penche-toi près d’une fontaine,
Près d’un fleuve
Ou d’une source:
Tu y verras la lune
Tombée dans un trou,
Et tu t’y verras toi-même,
Lumineux et silencieux,
Parmi des arbres sans racines,
Et où viennent des oiseaux muets.
Tu dors, ma bien-aimée;
tu dors dans ses bras, ô ma dernière née.
Je ne vois pas vos yeux lourds de nuit
qui d’ordinaire s’irisent comme des perles authentiques
ou des raisins mûrs.

Une bouffée de bon vent entr’ouvre notre porte,
fait gonfler vos robes légères
et trembler vos cheveux,
puis emporte un papier de sur ma table
que je rattrape près du seuil.

Je lève ma tête,
le poème commencé dans la main:
vos yeux clignotent dans l’azur,
et je les appelle: étoiles.
Un oiseau sans couleur et sans nom
a replié les ailes
et blessé le seul oeil du ciel.

Il se pose sur un arbre sans tronc,
tout en feuilles
que nul vent ne fait frémir
et dont on ne cueille pas les fruits, les yeux ouverts.

Que couve-t-il?
Quand il reprendra son vol,
ce sont des coqs qui en sortiront:
les coqs de tous les villages
qui auront vaincu et dispersé
ceux qui chantent dans les rêves
et qui se nourrissent d’astres.
Reflux de la lumière océane.
Des poulpes, dans leur fuite,
noircissent le sable
avec leur bave épaisse;
mais d’innombrables petits poissons
qui ressemblent à des coquillages d’argent,
ne pouvant échapper,
s’y débattent:
ils sont pris dans les rets
tendus par des algues ténébreuses
qui deviennent des lianes
et envahissent la falaise du ciel.
La dévote a fini ses versets quotidiens
et vient écouter ses enfants qui apprennent à haute voix
leurs leçons bibliques
sur la vérandah.
On dirait une cascade lointaine
sautant quelque rocher moussu,
là-bas, derrière les collines,
ou des chrétiens surpris par l’ombre
récitant des surates musulmanes
sous le ciel pacifique.

Moi,
par les interstices des feuilles qui en retombent
comme des larmes noires qui ne cessent de couler,
je ne puis rien discerner
et n’entends que des bribes de paroles
où reviennent souvent les mots: Égypte
et Israël.

Je me hausse sur une motte de terre
fleurant l’herbe foulée,
et j’écarte la verdure qui me gêne les yeux;
un petit oiseau migrateur sanglote près de la cime;
et je lève la tête;
mais ce sont les étoiles que je vois:
bulbeuses comme les aulx,
mouchetées comme les cailles,
elles me rappellent les prières que je viens de confondre,
et, dans le désert de l’azur imérinien
où il me semble que l’exode
refuit les Pharaons,
voilà que les Religions se rencontrent -
et toi aussi, ô mienne, ô Poésie!
Les ruches secrètes sont alignées
près des lianes du ciel,
parmi des nids lumineux.

Butinez-y, abeilles de mes pensées,
petites abeilles ailées de son
dans la nue enceinte de silence;
chargez-vous de propolis
parfumée d’astres et de vent:
nous en calfeutrerons toute fente
communiquant au tumulte de la vie.

Chargez-vous aussi de pollen stellaire
pour les prairies de la terre;
et demain, lorsque s’y noueront
les roses sauvages de mes poèmes,
nous aurons des cynorrhôdons aériens
et des semences sidérales.
Te voilà,
debout et nu!
Limon tu es et t’en souviens;
mais tu es en vérité l’enfant de cette ombre parturiante
qui se repaît de lactogène lunaire,
puis tu prends lentement la forme d’un fût
sur ce mur bas que franchissent les songes des fleurs
et le parfum de l’été en relâche.

Sentir, croire que des racines te poussent aux pieds
et courent et se tordent comme des serpents assoiffés
vers quelque source souterraine,
ou se rivent dans le sable
et déjà t’unissent à lui, toi, ô vivant,
arbre inconnu, arbre non identifié,
Qui élabores des fruits que tu cueilleras toi-même.

Ta cime,
dans tes cheveux que le vent secoue,
cèle un nid d’oiseaux immatériels;
et lorsque tu viendras coucher dans mon lit
et que je te reconnaîtrai, ô mon frère errant,
ton contact, ton haleine et l’odeur de ta peau
susciteront des bruits d’ailes mystérieuses
jusqu’aux frontières du sommeil.
Combien de jumeaux sont-ils, les vents?
Ils sont tous espiègles,
ils se poursuivent en sortant de l’herbe,
escaladent les murs devenus doubles,
sautent par-dessus les toits où se recueillera la rosée,
se voûtent sur les collines
et y secouent de hauts arbres immatériels
d’où se dispersent des oiseaux
aux yeux de verre
qui n’ont de nids nulle part,
et des baies rondes comme des blocs de quartz
qui ne se peuvent reproduire sur terre,
et se dissolvent en étoiles filantes.
Pour les pauvres dévorés de punaises aussi grosses que le ciel,
pour les exilés qui errent,
venant de la cité du jour,
et pour les rebelles et pour les déserteurs
de l’armée ombreuse montant de la terre,
que veulent faire ces élans de palmiers sans nombre
reluisant comme autant de manches de sagaies enduits de graisse végétale,
qui s’élancent immobiles
et dépassent toutes les maisons
jusqu’à ce que leurs cimes,
résonnant de songes de ramiers,
parviennent au toit du monde?

Ils y ondulent, s’écrasent, puis s’effeuillent,
mais ne reviennent pas parmi les vivants,
et s’entassent dans le désert des étoiles,
et deviennent des huttes innombrables
pour les mendiants sans litière,
pour les captifs vêtus de leur seule peau puant la poussière,
et pour tous les oiseaux sans nid
qui seront délivrés ensemble.
Toutes les saisons sont abolies
dans ces zones inexplorées,
qui occupent la moitié du monde
et la parent de floraisons inconnues
et de nul climat.

Poussée de sang végétal provisoire
dans un enchevêtrement de lianes ténébreuses
où est captif tout élan de branches vives.
Déroute d’oiseaux devenus étrangers
et ne reconnaissant plus leur nid,
puis heurts d’ailes- éclairs-
contre des rochers de brume
surgis du sol
qui n’est ni chaud ni froid
comme la peau de ceux qui s’étendent
loin de la vie et de la mort.
Voici
celle dont les yeux sont des prismes de sommeil
et dont les paupières sont lourdes de rêves,
celle dont les pieds sont enfoncés dans la mer
et dont les mains gluantes en sortent
pleines de coraux et de blocs de sel étincelants.

Elle les mettra en petits tas près d’un golfe de brouillard
et les débitera à des marins nus
auxquels on a coupé la langue,
jusqu’à ce que tombe la pluie.

Elle ne sera plus alors visible,
et l’on ne verra plus
que sa chevelure dispersée par le vent;
comme une pelote d’algues qui se dévide
et peut-être aussi des grains de sel insipide.
Tu te leurres,
toi qui as l’air d’un petit oiseau
égaré dans la forêt neigeuse qui va
jusqu’à la poitrine de Tagore,
de Whitman et de Jammes
qui remplacent le Christ sur ta couche,
puisque ce n’est pas la vieillesse du monde
ni celle du jour plusieurs fois millénaire
qui caresse ici sa barbe blanche
et épaisse comme l’oubli,
comme l’espoir et comme la brume des matins torrides,
là-bas, sur toutes les montagnes,
astrologue interrogeant les étoiles
et fumant une pipe en terre,
c’est sa jeunesse, ô mon enfant,
sa jeunesse éternelle:
métamorphosée
(peut-être grâce au chant des poètes que tu préfères
et qui créent pour toi une religion
dans ce silence sans fond
peuplé de colonnes et de fleuves,
de vivants et de morts)
elle n’est plus que l’ombre de tout le passé
et n’écoute que le seul présent.
Il est des mains rouillées sans nombre,
-ondes, ombres, fumées -
qui sarclent et marcottent
dans un buisson de framboisiers,
envahi d’herbes à hauteur de géant
d’où ne sortent que des oiseaux aveugles.

Que récoltent-elles, une fois lasses?
Qu’y aura-t-il entre leurs doigts de vent?
Des molles baies noires à force d’être rouges
sont déjà devenues d’innombrables champignons
au bord de ce fleuve sans piroguiers
pour embarquer tous ces paniers de fruits nocturnes.
Le vitrier nègre
dont nul n’a jamais vu les prunelles sans nombre
et jusqu’aux épaules de qui personne ne s’est encore haussé,
cet esclave tout paré de perles de verroterie,
qui est robuste comme Atlas
et qui porte les sept ciels sur sa tête,
on dirait que le fleuve multiple des nuages va l’emporter,
le fleuve où son pagne s’est déjà mouillé.

Mille et mille morceaux de vitre
tombent de ses mains
mais rebondissent vers son front
meurtri par les montagnes
où naissent les vents.

Et tu assistes à son supplice quotidien
et à son labeur sans fin;
tu assistes à son agonie de foudroyé
dès que retentissent aux murailles de l’Est
les conques marines-
mais tu n’éprouves plus de pitié pour lui
et ne te souviens même plus qu’il recommence à souffrir
chaque fois que chavire le soleil.
Tu viens de relire Virgile,
tu viens aussi d’écouter les enfants
qui saluent la néoménie,
et les contes et les fables de ceux qui ne sont plus.

Est-ce l’heure bucolique,
ô coeur aspirant au repos,
coeur aussi hâlé que les roches?

Les pâtres? Ils ne sont pas ici;
leurs troupeaux? Regarde ces chèvres sauvages
aux cornes remplies de brume.
Leurs houlettes? voici que les arbres unissent leurs cimes.

Les pâtres sont là-bas, ils escaladent le ciel.
Il y a des herbes nouvelles sous leurs pas,
Il y a des fruits irréels autour d’eux,
et des sources cachées qu’ils cherchent.

Et toi, et toi, tu crois être Corydon
tandis que, devant toi, apparaît comme un Alexis
qui souffle dans les flûtes
que sont devenues toutes les branches.
Il y aura, un jour, un jeune poète
qui réalisera ton voeu impossible
pour avoir connu tes livres
rares comme les fleurs souterraines,
tes livres écrits pour cent amis,
et non pour un, et non pour mille.

Sur le golfe d’ombre où il te relira
à la seule lueur de son coeur où rebattra le tien,
il ne te croira pas
dans les houles pacifiques
dont s’empliront toujours les abysses sans soleil,
ni dans le sable, ni dans la terre rouge,
ni sous les rochers dévorés de lichens
qui s’étendront derrière lui
jusqu’au pays des vivants
aveugles et sourds depuis la Genèse.
Il lèvera la tête
et sera sûr que c’est dans l’azur,
parmi les étoiles et les vents,
que ton tombeau aura été érigé.
Que de fois relayés
et que de fois les mêmes,
dans la lumière ruisselante,
les laboureurs de l’azur?

Ont semé quelles graines,
ont planté quelles tiges
au royaume du vent,
et sur les monts arasés?

Sont en quel inconnu,
derrière quel feuillage
et sur quelle herbe haute,
près des rives du soir?

-Boivent à une source noire,
arrachent cressons et menthes,
puis, couchés sur le dos,
regardent les astres croître

jusqu’à votre éclosion,
ô glaïeuls rouges et noirs,
et jusqu’au saccage par le jour
de leurs aires aériennes.
Celle qui naquit avant la lumière,
est-ce aujourd’hui son septième jour,
aujourd’hui comme hier et comme en l’éternité
sans passé ni futur?

Elle renaît pourtant
avec le sommeil des oiseaux
et tandis que se cachent les pierres blanches
sur les sentiers qu’ont désertés les chèvres
comme sur les routes où court le silence.

Mais tu ne vois d’elle que ses myriades d’yeux,
ses yeux reptiliens et triangulaires
qui s’ouvrent un à un
entre les lianes célestes.
Au bord des ombres qui stagnent,
sur des digues
dures et nues comme les roches,
mais où croissent des herbes précoces,
des pêcheurs sans nombre s’alignent
et jettent la ligne.

Des cimes qui s’arrondissent
comme des fruits qui mûrissent,
aux vallons qui s’allongent et deviennent plus humides
que les melons,
se suscitent des fuites d’oiseaux furtifs
et des dérives de clarté aveugle
qui effraient pareillement
et empêchent de mordre.

Maîtres du destin
et ne s’inquiétant de rien,
les pêcheurs s’interpellent de leur voix d’ombre
pour tendre les filets
dans lesquels ils rendront à la mer
ces poissons d’argent et de pourpre
qui se faufilent, insaisissables, à travers l’azur.
Lente
comme une vache boiteuse
ou comme un taureau puissant
aux quatre jarrets coupés,
une grosse araignée noire sort de la terre
et grimpe sur les murs
puis s’arc-boute péniblement au-dessus des arbres,

Jette des fils qu’emporte le vent,
tisse une toile qui touche au ciel,
et tend des rets à travers l’azur.

Où sont les oiseaux multicolores?
Où sont les chantres du soleil?
-Les lueurs jaillies de leurs yeux morts de sommeil
dans leurs escarpolettes de lianes,
font revivre leurs songes et leurs résonances
en cette évanescence de lucioles
qui devient une cohorte d’étoiles
pour déjouer l’arachnéenne embûche
que déchireront les cornes d’un veau bondissant.
Pour quels fruits, pour quelles grappes
tombés dans l’herbe
et cachés par les ramilles?

Pour quelles gemmes taillées
confondues avec les cailloux
couverts de brume épaisse?

Entre des mains calleuses
et rudes comme du pain
dévoré par le soleil,
des mains faites de doigts palmés
sans couleurs,
voici des myriades de torches
à la recherche de ce qui fut perdu
sur la terre
et qui germe au milieu de la prairie de chiendents
qu’est devenu tout ce que peut embrasser le regard.
Lames d’eau, verres étincelants
-lunettes pour myope ou pour presbyte?-
velours de prunelles
lisse comme le cuir blanc des lis
et plus fragile qu’ongle d’enfant.

Les vents naissent au-delà des montagnes
et glissent jusqu’ici où dorment les plantes
qu’ils saccagent puis abandonnent.

Élan de lumière à leur poursuite
jusqu’au désert sidéral
jonché de lames d’eau, de verres
et de velours de prunelles
luisant silencieusement
et indiquant une route herbeuse
entrecoupée de fleuves caillouteux,
à cette lune borgne
qui y chancelle
et qu’égarerait le moindre tremblement de ses cils.
Tu t’es construit une tour sous le vent
puis tu t’es accroupie sur l’eau,
ô reine sans visage
dont la pointe de la couronne
défie ce-qui-deviendra-pluies,
et dont les diamants embués
sont faits d’astres, et rien que d’astres.

Ô belle âme de ce-qui-change;
ô soeur et fille, tour à tour,
de cette lune qui vient de naître
à l’orée d’un verger,
tu as bâti sous le vent
et tu habites sur l’eau
comme mes rêves de sagesse!

Que nous fera la chute brusque
de ce qui est notre royaume?

Comme ta tour, comme la mienne,
comme la perfide que foulent nos pieds,
cette joie dont pétillent nos yeux,
si elle doit bientôt s’éteindre,
ne nous reviendra-t-elle pas autre et nouvelle?
Soeurs du silence en la tristesse,
les fleurs qui n’ont que leur beauté
et leur solitude,
les fleurs- morceaux de coeur terrien
palpitant à l’unisson des nids-
dorment-elles ici, font-elles des rêves
sur la fin de leur destinée?

Les doigts
qui ne voulaient d’elles que leur jeunesse,
les doigts se sont tous joints
dans la chaude blancheur des draps-
sauf les miens qui sont si frêles
et qui savent tant choyer
les choses délicates.

Mes lèvres aussi frôlent les fleurs,
les fleurs devenues plus mystérieuses,
et plus belles, et brusquement hardies.

Et j’entends,
mêlées à la respiration des herbes,
leurs dernières confidences.
Ah! comme elles seraient douloureuses
sans ces parfums pacifiques, Seigneur,
qui s’évadent avec leur vie!
Écoute les filles de la pluie
qui se poursuivent en chantant
et glissent
sur les radeaux d’argile
ou d’herbes de glaïeuls
qui couvrent les maisons des vivants.

Elles chantent,
et leurs chants sont si passionnés
qu’ils deviennent des sanglots
et se réduisent en confidences. . .
Peut-être pour mieux faire entendre
cet appel d’oiseau qui t’émeut.

Un oiseau seul au coeur de la nuit,
et il ne craint pas d’être ravi par les ondines?
Ô miracle! ô don inattendu!
Pourquoi rentres-tu si tard?
Un autre a-t-il pris ton nid
tandis que tu étais en quête d’un rêve au bout du monde?
Il est une eau vive
qui jaillit dans l’inconnu
mais qui mouille le vent
que tu bois,
et tu aspires à sa découverte
derrière ce roc massif
détaché de quelque astre sans nom.

Tu te penches,
et tes doigts caressent le sable.
Soudain tu repenses à ton enfance
et aux images qui l’ont charmée-
surtout à celle où ces mots naïfs mais étonnants se trouvaient:
« La Vierge Aux Sept Douleurs. »

Et voici une autre eau vive
qui ne cesse de sourdre sous tes yeux,
mais qui attise ta soif:
ton ombre
-l’ombre de tes rêves-
devient septuple
et, émergeant de toi,
alourdit la nuit déjà dense.
Vaines, toutes ces anticipations
qui veulent nous donner des ailes
et qui promettent
que nous séduirons un jour quelque Martienne?

Vain aussi, le rêve
qui perdit Icare
plus que le soleil
qui but la cire merveilleuse?

Mais quel triomphe certain
m’annoncent déjà tous ces signaux
que terre et ciel s’envoient
à l’orée du sommeil:

dans nos cités de vivants
jusqu’aux plus humbles huttes
répondent aux appels de feu
jaillis des étoiles naissantes.


Dernière édition par Rita-kazem le Ven 30 Avr - 20:40, édité 1 fois
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Poésie: Jean Joseph Rabearivelo - Page 2 Empty Re: Poésie: Jean Joseph Rabearivelo

Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:47

A MARCEL ORMOY

Un miracle trompeur m'amène aux carrefours,
comme vous, des visages,
et je suis étranger à tous les paysages
qui me proposent leurs amours.

Ah ! quand pourrai-je, Ormoy, me parant d'autres grâces,
dire les sentiments
que m'auront suscités mes éblouissements
par la voix seule de ma race,

afin d'être mieux digne et fier de l'amitié
que m'accorde votre âme ;
afin, surtout, afin d'entretenir la flamme
qui meurt dans mon âtre oublié ?

Qu'est-ce, sinon le sang qui coule dans mes veines,
et ma charte, et mon fonds,
et les morts qu'on oublie au siècle où nous vivons
dans leur déroute souterraine ?


Ah ! puisse tout cela briller à l'avenir
sur le front de ma muse !
Elle mériterait de vous, ma voix confuse,
laquelle aurait pu s'affermir

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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:48

A JEAN LEBRAU

Jean Lebrau, j'ai cueilli pour vous les jeunes fleurs
qui paraient mon verger de joie et de douleur.

Des lilas du pays offrant leurs grappes mauves
au coeur de notre azur grillé de soleils fauves,
ni des ficus perdus au flanc de nos coteaux,
- nids bruissant du maint ébat de nos oiseaux
couleur d'yeux ou de ciels,- ni les chansons plaintives
des filles du Regret aux grâces primitives :
je n'ai rien oublié, sauf l'âme et la rumeur-

Et je tremble d'offrir quelque chose qui meurt !
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:48

A PHILIPPE CHABANEIX

Mission du poète ?

Insolence, Philippe ! -
Lisant tous les aînés et fumant dans leur pipe,
je n'ai pu me gorger des lumières torrides
qui dévorent nos monts et nos landes arides,
ni baigner mon regard de lune et de rosée !
J'ai négligé nos nuits d'étoiles irisées,
nos matins, Adonis éternels dans leur gloire
de se voir refletés dans l'innombrable moire
de nos fleuves ; nos soirs, rois trahis par les ombres,
qui, de leur palais d'or, gisent sous les décombres
tandis qu'ascend au ciel, vibrant de nostalgie,
le coeur auquel l'Amour a donné sa magie
des filles d'Iarive au front couleur de sable-

Demain, plus tard, ma voix sera moins périssable
pour s'être éperdument aux tombeaux affutée ,
et, s'étant du sang vif de mes morts suscitée,
pour avoir su puiser sa cadence et sa grâce
dans le fonds poétique éternel de ma race.
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:48

A ROBERT-EDWARD HART

Donner un sens plus pur aux mots de la tribu
et l'imprégner du sang de mes morts que nos combes
ombreuses et nos monts ensoleillés ont bu :
mission périlleuse et double qui m'incombe !

Qui donc me donnera de pouvoir fiancer
l'esprit de mes aïeux à la langue adoptive,
et mon coeur naturel, calme et fier au penser
pervers et sombre de l'Europe maladive,

pour susciter des chants où ma pure entité
se précise selon le rythme et la cadence
de l'Intuition, et de toute influence
s'affranchit, changée ainsi par l'éternité ?
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:49

A G.HENRI DE BRUGADA

La grâce flexueuse et fragile de l'eau,
l'éclat évanescent des éclairs dans la nuit,
et ce que pour charmer insinue un sanglot
musical, mal d'amour en fleur épanoui -

c'est le jeu de mon âme en vous offrant ce livre
où raille et se lamente une jeunesse morte-
Qui va lui déchirer avec un coup d'aile ivre
le dur lac oublié sur le trésor qu'il porte ?

Insolence !
Pourtant, son inutile exil
lui propose l'essor des vols qui n'ont pas fui
et le retour au fond d'un monde plus subtil
où le cygne ancien lui dira que c'est lui !
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:49

A RAMILIJAONA

Le vent pourra souffler, Ramily, dans ce livre
et, dispersant ses fleurs, saccager tous ses fruits ;
comme des tours restant de quels palais détruits,
vous y verrez encore, avec la paix de vivre,

les souvenirs heureux de la belle amitié
qui sait nous consoler de tant d'âmes perverses
pour qui n'est que poussière et cendres le commerce
de nos grands morts royaux et leur âge oublié !

Ainsi, le coeur plus clair que celui du printemps
et plus bleu qu'un verger qui se gorge de lune,
en vous offrant ces chants de notre ardeur commune,
je n'appréhende pas pour eux l'oeuvre du temps !
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:49

A J.-H. RABEKOTO

De mon coeur qu'ont dépossédé
de ses biens l'exil ou la mort,
et qui , trésor dilapidé,
s'épuise au gré mouvant du Sort,

éclos par le Rythme et le Nombre,
jaillit ce chant dont le postlude
dit, en l'honneur d'un peuple d'ombres,
mon calme et mon inquiétude.

Ah ! puisse-t-il avoir, là-bas,
dans ton val sombre et désolé,
les accents qui ne meurent pas,
vibrant des beaux jours en-allés

et réveillant en ta pensée
de nos passions tout le charme, -
escarpolette balancée,
mais par le vent de quelle alarme !
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:50

Interlude rythmique


à André Fontainas.



LEVANT

Souffle, ô vent, dans la conque embaumée
des daturas et de leurs hybrides,
enchantement des terres arides
de ma vieille Emyrne décimée,

souffle au coeur de la tiède verdure
où la nuit pesante entrave encore
un pur chant d'oiseaux couleur d'aurore
désolés par la grande froidure ;

et, comme pour délivrer du songe
fallacieux de l'aube en-allée
quelque paupière trop flagellée
de sommeil, souffle, souffle et prolonge

ta voix parmi le retour du monde
à sa destinée éphémère et profonde.
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:50

DESERT

Joie unie et chaude du désert !
Nulle part, l'azur n'est aussi bleu
que sur ces monts de sable et de feu
sillonnés de vol puissant et clair.

Rare en verdure comme mon coeur
d'homme mûri par des temps mauvais
leurrés par vous, ô bonheurs rêvés
en l'abri de la seule langueur !

Ici, devant ton aridité
ton silence, et ta soif, et ta faim,
paysage apparemment sans fin,
comme l'effroi de l'éternité,

tempérant ma joie et mon émoi,
je rêve d'un art dépouillé comme toi,
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:51

DZORAH

Dzorah, - enfant de sultans défunts,
dès longtemps, à l'archipel natal, -
tu veux venir avec tes parfums
de vanille et de bois de santal.

Venir si loin, et sans défenseur !
O Dzorah, rose que fanerait
le plus beau soleil en sa douceur
étendu sur le parc azuré !

Et prétendre à jamais conserver,
sous d'autres lois et de nouveaux cieux,
dans toute sa vierge pureté,
la foi si chaude de tes aïeux !

Mais brûlant d'amour pour un des miens,
je crains que ton coeur ne devienne chrétien !
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:51

REGARD

Sur quel monde englouti sans retour
te fermes-tu pour bientôt t'ouvrir
aux astuces vaines de l'Amour
sinon au piège amer du Mourir,


ô regard où pèsent divers poids ?
- Celui-ci, s'interrogeant au coeur
d'un miroir, ne voit que désarroi
où jamais ne s'est vu que de fleurs.

Cet autre qui s'attendait à voir
descendre la nuit sur son destin,
sent que jusqu'à la fuite du soir
prolonge l'éclat de son matin,

ô regard, innombrable tombeau
où gisent à la fois le laid et le beau.
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:52

Sept quatrains

à Fernand Mazade.




TENTATION

Belle d'une beauté plus sombre que la nuit,
l'amante au front de cuivre ancien est venue
avec l'intention d'effeuiller mon ennui
sur sa poitrine nue.

ROSSIGNOL DE MON COEUR-

Quels rêves attardés aux rives du Réveil ?
Tu chantes ! qui jamais n'élevas ton chant pur
après la floraison visible de l'azur
et le rutilement fluide du soleil !


OFFRANDE ILLUSOIRE

Je t'apporte un coeur neuf, oeuvre d'un rêve immense,
promesse de fleur née à la mort des semences,
ô Muse, et pure image où déplorent leur ombre
encore les jours morts et vains que je dénombre !


VENT

Sois Ganymède et verse un peu de ton amphore
dans le coeur de ces fleurs qui parent la terrasse
après avoir forcé les portes de l'Aurore,
coureur aérien, ô vainqueur de l'espace !


ANGOISSE DU DEPART

Est-ce un beau jour d'avril ou de mai commençant,
ô printemps de mon coeur, que te viendra l'automne
marin, et que, cueillant des fleurs pour Abéone,
tu les parfumeras avec ton propre sang ?


AUTOMNE AUSTRAL

Lorsque les bancouliers tresseront leur couronne
de neige soleilleuse au coeur sombre et profond,
ta désolation sera moins vaste, automne,
et sur ton front en deuil des oiseaux chanteront.


HERPES

O barque aventureuse aujourd'hui bien vétuste
et de qui l'océan a rongé la carène,
où sont tes matelots séduits par la Sirène
tandis qu'ils s'adonnaient au jeu de la flibuste ?
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:53

ZAHANA

Ce n'est pas au jeu vain de nos vieux amoureux
qui s'écrivaient, jadis, sur tes feuilles naissantes
et, se rendant le soir en ton sein ténébreux,
saccageaient les rosiers sauvages de nos sentes,

ni même à la saveur de tes fruits succulents
où jutent les soleils de notre terre chaude,
que ton nom inconnu se doit d'être en mes chants
et d'y répandre tes purs frissons d'émeraude !

Mais, exilé des lieux d'où nous sommes natifs,
tu n'as plus dans nos champs que des jets maladifs
qu'une terre inclémente et stérile harasse !

Comme le mien ton front n'offre plus au matin
que les dernières fleurs d'un arbre qui s'éteint,
et ta défaite est soeur de celle de ma race !
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:53

HASINA

Fiançons aujourd'hui nos graves destinées
et qu'en l'azur nos chants aient une voix égale :
nos âmes sont pareillement infortunées
car nous avons perdu notre force ancestrale !

La terre qui nourrit tes vivaces racines,
les ramiers dont l'amour élit ta touffe sombre,
ni l'air bu ne sont pas ceux de tes origines,
et ta présence ici n'est que celle d'une ombre !

Quant à moi, fils des Rois d'une époque abolie,
reposant au rebord d'un tombeau qu'on oublie,
je chante d'une voix qui n'est pas de mes morts !

Mais, nous savons, palmier, vivant notre nouvelle
vie, avoir le front ceint de nos fleurs les plus belles
et nous jouer ainsi des rigueurs de nos sorts !
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:54

FILAO

Filao, filao, frère de ma tristesse,
qui nous viens d'un pays lointain et maritime,
le sol imérinien a-t-il pour ta sveltesse
l'élément favorable à sa nature intime ?

Tu sembles regretter les danses sur la plage
des filles de la mer, de la brise et du sable,
et tu revis en songe un matin sans orage
glorieux et fier de ta sève intarissable.

Maintenant que l'exil fait craquer ton écorce,
l'élan de tes rejets défaillants et sans force
ne dédie aux oiseaux qu'un reposoir sans ombre,

tel mon chant qui serait une oeuvre folle et vaine
si, né selon un rythme étranger et son nombre,
il ne vivait du sang qui coule dans mes veines !
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:55

AMONTANA

Amontana, la nuit trouble à peine ton coeur
de palmes quand la lune, illuminant ton front
de sa lumière bleue, apaise ta langueur
et te fait oublier les jours noirs qui viendront.

Ni l'aile furieuse et puissante du vent,
ni le feu destructeur ne courbe ta fierté :
ton essor végétal va toujours s'élevant,
indifférent aux coups de la fatalité !

Et ton sang continue, incessant renouveau,
à nourrir de ton ombre ardente le tombeau
désolé d'être seul parmi le paysage.

Amontana, les jours où nous ne serons plus
que les mânes épars des âges révolus,
puisse ton souvenir couronner mon visage !
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:55

Au Soleil estival
(fragment)

pour Charles Maurras.





Tel, du coeur végétal, tu suscites la sève,
la jeunesse de l'arbre et la saveur du fruit,
ô soleil salué par le vent qui se lève
d'une ombre où l'on entend la fuite de la nuit,

tel, pénètre mon sang et mûris ma pensée :
je suis né sous ton signe ardent, et j'ai grandi
ainsi que nos palmiers à la voûte élancée,
dans l'ivresse de la gloire de tes midis ;

et pour que mon chant soit l'enfant de ta lumière,
pour qu'il recouvre l'âme éternelle et première
des chantres d'Iarive ivres de ta splendeur,

nourris-le, nourris-le, dans ta coupe enchantée,
du lait d'une sauvage et nouvelle Amalthée,
et que mon coeur, soleil, vibre de ton ardeur !





C'est depuis ce matin que je l'ai fiancé
à l'âme des monts bleus nubile dans les palmes,
à celle de l'azur où le soir annoncé
se devine avec son cortège d'heures calmes ;

mais c'est plus tard, parmi l'ivre réveil floral,
la libération des captives de l'ombre,
à l'heure où tu ceindras le front du ciel austral
de ton pampre de flamme et de sa pourpre sombre,

c'est alors que, devant ton exaltation,
je viendrai célébrer leur durable union
et t'en prendre à témoin au sein des paysages.

Je sais un lieu propice à ces amours nouveaux :
un manguier séculaire y garde des tombeaux
et veille au souvenir oublié de nos sages.





Nous arrivons devant l'enceinte désolée.
Le ciel d'octobre est lourd de signes pluvieux
et de la terre chaude, emplissant les allées,
s'élèvent quels parfums de sauges capiteux.

Le flot aérien déferlera, paisible ;
mais la tristesse intérieure de l'azur,
tu la rendras, soleil vivant, imperceptible
et la revêtiras d'un enchantement pur.

Insensible à l'averse et tout à sa pensée,
étreignant du regard sa jeune fiancée,
l'enfant de nos amours latentes attendra

que d'Imanga, colline anciennement royale,
vienne nous entourer l'âme immémoriale
de l'orgueil de l'Emyrne et du passé des Rois.
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:56

*soleil levant suite
Profitons, profitons de la claire embellie !
Les euphorbes, déjà, sont sortis de leur songe
bien que dans leurs faisceaux encore se prolonge
l'ivresse crépitante et fraîche de la pluie.

Mais profitons surtout de la fin de ton règne :
la fontaine a perdu ton apparence double
et son miroir plaintif n'a plus qu'un reflet trouble
où l'ombre de la lune et de la nuit s'imprègne !

Réalisons ce voeu qu'avant tes funérailles
qui seront, ce soir, ton ultime apothéose,
se tressent dans l'azur des couronnes de roses. -

Nous en consacrerons, soleil, les fiançailles
de mon Chant amoureux de votre âme en-allée,
ô race finissante, ô cité dépeuplée !





La sagesse des morts, l'esprit imérinien,
source fraîche où mon coeur vient se désaltérer,
disent de voir mourir l'Aujourd'hui sans regret,
les jours suivants pouvant nous donner d'autres biens.

Et tu me dis : « Ce jour disputé par la nuit
n'est pas le seul présent de la Vie en tes mains !
Entretiens l'espérance et charme ton ennui
en l'attente d'avoir les fleurs des lendemains !

« Accueille donc, accueille, en souriant, le Sort.
si le front de la vie est marqué par la mort,
tout est contre l'espoir vaine calamité !

« Et demain, revenus des gouffres de la mer
et du pays trompeur de ton sommeil amer,
nous renaîtrons, enfant, couronnés de clarté ! »





Le vent t'annonce, le doux vent
qui rompt notre torpeur humaine
et le sommeil si décevant,
ô soleil anadyomène !

O pur symbole de l'espoir
de cette belle matinée,
tombant aux embûches du soir
et de la lune déjà née,

tu reviens des vagues marines
parmi les roses purpurines
écloses sur les monts lointains,

proposant dans la neuve amphore
que nous figure cette aurore
quel ferme défi au destin !





Une légende obscure et vaine nous rallie,
race éteinte d'Emyrne au bois découronné,
à l'archipel lointain de la Polynésie
dont le passé floral n'est pas plus fortuné.

Au vague souvenir que tu viens de ces terres
et qu'elles t'ont vu naître en leur azur marin,
je revis dans mon coeur l'exode de mes pères
parmi le glorieux triomphe du matin.

Et je vois, vers le golfe où l'ombre végétale
approfondit le ton bleu d'une mer étale,
des pirogues voguer, souples comme le vent.

Leur chargement est fait de pulpes savoureuses,
mûres sous les climats des îles bienheureuses
qui s'estompent sous les brumes de l'Océan.





O soleil, est-ce ainsi qu'a fini l'aventure
des nomades venus du continent lointain ?
Ou bien, un vent mauvais, soufflant dans leur mâture
et jetant dans les flots leur plus riche butin,

lourd de l'odeur humide et chaude de l'orage,
implacable comme la volonté des dieux,
a-t-il fait chavirer le gros de l'équipage
et prospérer les survivants sous d'autres cieux ?

Mais qui nous le dira sans la science vaine
d'interroger le sol muet des Hauts-Plateaux
qui séparent des mers la terre imérinienne ?

Perdus parmi les bois détruits et la poussière
des âges, des tombeaux, qui sont deux fois tombeaux,
renferment à jamais l'originel mystère !
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:56

Coeur et Ciel d'Iarive

à Robert-Jules Allain.


« Mangataka amy nao, Rasoalao,
fa zavatra mba tia'ko, lalao ko- »
T. ny A. .

O princesse exilée, ô reine devenue,
diane au front paré de pauvres fleurs d'automne,
la déesse des bois que le temps découronne
et la gardienne jalouse des landes nues,

j'ai vu ce qui restait des pieuses offrandes
promises à ton âme errante et désolée :
le sang d'un taureau pourpre à la nuque étoilée
du signe rituel et de belles guirlandes-

Bien que mon coeur accepte et que mon âme écoute
la voix seule des jours renégats et modernes,
veuille, veuille sortir du fond des Six Imernes
oublieuses jusqu'aux traces de ta déroute !

Je ne demande ni tes grands troupeaux sauvages
dispérsés aujourd'hui dans les bois désertiques,
ni le filon perdu de tes pierres magiques,
mais seulement la paix ancienne des villages !



Qu'en sorte pour m'emplir l'âme immémoriale
de ma terre qui meurt et de ma race éteinte,
afin que, subissant le sort et son atteinte,
en ajoutant au poids de la cendre royale,

ma jeunesse dernière ait pour orgueil suprême
d'avoir pur refleurir des tombes désolées
et d'avoir, ô mon sang, accordé ta coulée
au rythme intérieur, au chant de mon Poème !





Iarive, Iarive, Iarive la morte,
depuis longtemps déjà tu m'as fermé la porte
destinée à donner sur le soir de ma race !

En vain, parmi le jour qui naît sur la terrasse
couronnée autrefois de gerbes corallines,
je te cherche au milieu de nos douze collines ;
en vain, et dans l'espoir de retrouver en elles
les meilleures de tes grâces simples et belles,
je prends part à la ronde ardemment enroulée
de tes filles, mes soeurs, ô mère désolée :
de leur perversion qui me trouble et m'étonne,
je ne sais que tresser des fleurs de quel automne
en l'honneur ténébreux de ta mémoire vaine
vers qui seules s'en vont ma tristesse et ma peine !





O mon coeur amoureux de trois zones du monde :
l'Europe froide où va le meilleur de toi-même,
l'Inde au ciel aussi rose et bleu que ton poème,
et l'Afrique, ta source et limpide et profonde,

nul arbre n'a plongé ses vivaces racines
dans le sol différent de trois vergers contraires !
Fixe ton choix sur l'une ou l'autre de ces terres,
bien que toutes, dis-tu, gardent tes origines !





Si le monde a changé, si ma voix elle-même
renonce à ta musique, ô parler ancestral,
et que, sous le sillon du clair Navire-Austral,
elle chante selon une langue que j'aime,

le sang héréditaire et l'âme de mes morts,
sève toujours vivante en l'arbre qui décline,
m'animent à jamais comme, sur la colline,
le vent du sud qui souffle au coeur des ficus tors ;

et je te suis semblable, ô beau rosier de France
qui, fleurissant au flanc d'un tombeau de chez nous,
fiances aux églantiers au feuillage roux
la pureté perdue, hélas ! de ton essence !





Cette branche qui meurt sous le poids de ses fruits,
lesquels ne sont pas sûrs de périr avec elle,
jeunesse regrettant ses beaux rêves détruits
d'être un peu moins qu'éternelle,

c'est toi, ô coeur d'enfant qu'un sentiment obscur
a prématurément offert à mes délices,
et dont abuse, hélas ! le piège le plus pur
de mes perverses malices !

Ou bien, c'est toi, Cité qui, triomphale, sors
du sable dispersé d'une ville abolie :
Iarive du jour sur la terre des morts,
soeur de ma mélancolie !
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:57

MATIN MALADE

Matin d'été, ô matin d'été,
bel et triste comme mon coeur,
tes arbres tremblent dans la clarté
en berçant mollement leur langueur.

Quel espoir de soleil virtuel,
paysage vert sans ramiers,
te nourrit de son leurre cruel
qui colore à peine tes palmiers

et te fait un frère adultérin
d'un sentiment lourd de chagrin
et plus lourd encor de soif d'azur

que du poids de l'épuisante nuit
qui m'a tendu son fruit bien mûr
mais gonflé de vénéneux ennui ?
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:57

REVE DEVANT L'ATRE
pour Ramilijaona

Quelle belle aurore en-allée,
rose en sa promesse pure,
rend de regret inconsolée
ton âme que plus rien n'azure ?

Devant le mur que la nuit ronge,
- et ton coeur par quelle peine ! -
devant le mur, leurrés du songe
d'une musique sombre et vaine,

dans la jouissance d'un rare
bonheur, tes yeux flous écoutent
l'âme d'un instrument barbare
où se décantent et dégouttent,

lentement, les profonds silences
de la nuit et de la lune,
qui couvrent les dures cadences
dont s'enivre ton infortune.
Rita-kazem
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 20:58

pour Armand Godoy

Nature exubérante et puissante, ô Tropique !
Nous, du moins, qui vivons en zones tempérées,
ne jouissant que d'un faux renom exotique,
nous n'avons que des fleurs roses décolorées !

Nos coeurs, nos coeurs ardents en sont influencés :
ils sont déjà couverts de cendres sous leur feu,
car pour eux le Présent est déjà le Passé
et n'ose même pas affronter l'azur bleu

de Demain. Leurs rejets rares, leurs pousses maigres,
sortant d'un sol avare, héritant d'un ciel sombre,
ont la seules promesse aride des fruits aigres !

Nourris-nous mieux, soleil qui doubles un cap d'ombre !
Sois-nous plus enflammé pour les gorger de suc,
notre terre et nos coeurs avant l'âge caducs !





Bien que ton avenir, à tes yeux, se dessine,
lauré de thyrse en fleurs, promesse de beaux fruits,
comme un puissant fruitier dont l'élan se destine
à reverdir le champ détruit,

ouvriras-tu toujours la fenêtre qui donne
sur toute l'étendue océane du bois,
coeur chargé de printemps, mais qui cèles l'automne
et les jours mauvais d'autrefois ?



Il est un monde qui doit mourir.
Paul Husson.

Il est un monde, il est des hommes qui mourront ;
d'autres, ni pires ni meilleurs,
suscités de ces morts porteront sur le front
de belles couronnes de fleurs ;

celles-ci, sous l'ardeur des soleils successifs,
au seuil de l'automne nouveau,
ne laisseront qu'une ombre aux contours fugitifs
à graver sur quelque tombeau ;

mais une vie obscure, exilée au milieu
de cette calme absurdité,
recherchera le coeur profond de l'azur bleu
pour refaire l'Eternité-

Il est un monde, il est des hommes qui mourront ;
d'autres, ni pires ni meilleurs,
suscités de ces morts, porteront sur le front
de vaines couronnes de fleurs.





Cité nouvelle, encore inaccessible aux yeux,
qui, buvant le sang des partants,
saccages la promesse enclose en leur printemps,
mortelle fiancée à d'obscurs jeunes dieux,

je pense aux jours futurs où des palais de pierre
et des usines spacieuses
briseront en mon Emyrne silencieuse
les lignes de l'azur et les flots de lumière ;

je pense au paysage hier inviolé
comme le coeur vert des forêts,
ainsi qu'à vous, oiseaux roses, bleus ou dorés,
ivres du seul espace aride et désolé ;

à toi, ma soeur, à toi, fille de roi sans trône,
à toi, rose de la terrasse,
dernière floraison vivante de ma race,
couchant d'un jour heureux et fleur d'une âpre automne !

Où, parmi le ciment de la Cité future
qui viendra délaver le beau rouge des murs,
où te retrouverai-je, intégrale Nature,
ô corbeille de fleurs, de miel et de fruits mûrs ?

Civilisation, tu dresseras sur elle,
au milieu de tes parcs, tes routes et jets d'eau,
comme sur une tombe, une émouvante stèle,
mais sans l'inscription que demande un tombeau !

Et de toi seul, mon chant que l'avenir déroute,
l'écho plus faible, hélas ! que le sanglot du vent,
redira du passé la ferveur et le doute
de sa voix enchantée et naïve d'enfant !






Source: http://www.poesies.net
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 21:03

LAURIER

Laurier, usurpateur du trône séculaire
où verdissaient jadis les arbres des Tropiques,
et qui plantes partout tes thyrses magnifiques,
dons de sang proposés au coeur crépusculaire,

est-ce pour mieux marquer la chute de ma race
et pour symboliser l'empreinte occidentale
qui souille l'entité de son âme ancestrale,
que tes ardents flambeaux veillent sur nos terrasses ?

Essence d'outre-sylve aux fleurs couleur de lèvre,
emblème de triomphe, objet de mainte fièvre,
laurier, ce n'est pas toi qui vas ceindre mon front !

Je préfère cet arbre aux vivaces racines,
gardien de nos vallons, orgueil de nos collines,
au pied duquel mes soeurs venaient danser en rond !
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 21:03

LILAS

Ce n'est pas seulement l'annonce printanière
en cette terre où l'arbre a toujours sa verdure
et dédie à l'amour fleuri de la lumière
sa cime qui résiste à la grande froidure,

ni l'union au bleu rose des crépuscules
du mauve parfumé qui jaillit de ta sève,
que m'apportent, ce soir, tes primes panicules,
ô lilas où la nuit fait retentir son rêve !

Plus encor, la saison ranime en ma mémoire
les plaisirs que j'avais sous ta frondaison noire
à deviser avec mes amis en-allés !

Et suscitée, hélas ! par ta seule venue,
ma jeunesse surgit, découronnée et nue,
de ton ombre où j'entends quels appels désolés !
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Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 21:03

ORANGER

Incessant renouveau d'un arbre qui vieillit,
fruit gonflé du soleil des zones les plus calmes,
ô source aérienne, ô source au coeur des palmes
et dont le jet sucré pour notre soif jaillit,

disputerai-je autant à l'abeille sauvage
qui prépare son miel en ta maturité,
qu'à l'oiseau dont le chant nous annonce l'été,
la clarté, le parfum, le goût de ton breuvage ?

Au moins, lorsque ton ombre accueillera le soir,
je viendrai savourant les Eglogues, m'asseoir
devant le paysage auguste et magnifique,

et vivre sous ton vocable, jusqu'à la nuit,
fiançant, oranger nuptial, mon ennui
aux tristesses d'un ciel profond et pacifique !
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Poésie: Jean Joseph Rabearivelo - Page 2 Empty Re: Poésie: Jean Joseph Rabearivelo

Message par Rita-kazem Ven 30 Avr - 21:04

MANGUIER

A qui goûte ta pulpe où le soleil austral,
suscitant de la sève une douce saveur,
s'est tant de fois penché dans toute sa splendeur,
ô gardien du village ancestral,

ou, passant éphémère, enchantant sa langueur
loin des bruits d'Iarive, au pied du mont royal,
à qui va pénétrant le palais végétal
qu'ouvre au soir majestueux ton coeur,

dis, oh ! dis, beau manguier, qu'en tes rameaux puissants,
il est d'autres attraits que tes fruits mûrissants
ou que l'ombre où vibre la lumière !

Entr'ouvre-les parmi les pâleurs de l'azur
et que se montre aux yeux le mausolée obscur
sous lequel dort la race première !
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