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poésie:Béroalde de VERVILLE

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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty poésie:Béroalde de VERVILLE

Message par magda Mer 21 Avr - 10:20


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Ainsi qu'on voit plorer la chaste tourterelle



Ainsi qu'on voit pleurer la chaste tourterelle
Quand la mort a éteint la moitié de son coeur,
Je veux en accusant ma fortune cruelle,
Éloigné de vos yeux soupirer ma douleur.

N'ai-je pas bien raison de faire ouïr ma plainte,
Puis qu'à votre départ mon coeur s'en va de moi ?
Et que ployant au joug d'une force contrainte
Il me faut supporter mon ténébreux émoi ?

Non non, je ne saurais tenir en mon courage
Sans le manifester, mon regret ennuyeux,
Ains je veux témoignant mon déplaisant dommage
D'un pleur continuel tenir moites mes yeux.

En lieu de sang j'aurai une source éternelle
D'une eau prête à monter en mon poésie:Béroalde de VERVILLE 923781 cerveau,
Où se changeant en pleurs viendra continuelle
Couler sur mon visage en un double ruisseau.

De mes venteux poumons le devoir ordinaire
Sera de soupirer, et en air me changer
Afin de plaindre mieux l'aventure contraire,
Qui las ! me veut de vous par l'absence étranger.

Est-ce pas un malheur assez fort pour contraindre
Les esprits plus félons à distiller en pleurs,
Que voir venir leur mal ? J'ai donc cause de plaindre
Lorsque vous absentant j'aperçois mes malheurs.

Bientôt d'un noir manteau la terre environnée
Effacera le jour, et seul je m'en irai,
Jetant mille soupirs pleurer ma destinée
Si tôt que de vos yeux la clarté je perdrai.

Regrettant sans cesser de vos yeux la présence,
Je n'aurai bien aucun pour me désennuyer,
Qu'en mon mal renaissant changer en autre essence,
Pour m'exhalant en pleurs en soupirs me noyer.

Espérance fuyez, car vous trompez ma vie,
Je veux sans espérer me tenir en mon mal,
Pour être bien heureux je ne veux autre envie,
Que suivre les erreurs de mon malheur fatal.

Courez tant que voudrez, inconstante fortune,
Je serai obstiné résolu en mes maux,
Attendant jour à jour que ma peine importune
Vienne enfin accabler mon chef sous mes travaux.

Hélas ! vous qu'en mon coeur chastement engravée
J'honore sans changer de foi ni loyauté,
Si vous êtes autant pitoyable qu'aimée,
Ayez quelque pitié de ma calamité.

Au moins si quelquefois l'amour vous a atteinte
Mesurez ma langueur par votre affection,
Et oyant les soupirs de ma juste complainte,
Ayez de mon ennui quelque compassion.

Ne souffrez que le deuil soit maître de mon âme,
Mais par quelque faveur étranger mon souci,
Autrement en l'horreur que mon malheur me trame
Il me faudra passer au royaume obscurci.

Ores que je ne vois qu'une porte prochaine,
Pour soulager mon coeur, souffrez que bienheureux
Pour de votre amitié avoir preuve certaine,
Je prenne de vos mains ce baiser amoureux.

Ne me refusez point ce qui me fera vivre,
Car loin de vos beautés je m'en resouviendrai,
Jà ce doux souvenir de mon mal me délivre
Et me promet plus d'heur quand je vous reverrai.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Complainte

Message par magda Mer 21 Avr - 10:21


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Complainte


D'un triste désespoir ma vie je bourrelle,
Je la veux obscurcir d'une nuit éternelle,
Puisque je suis si loin de mon heureux soleil,
Car sans âme je vis, sans poumon je respire,
Et absent de mon bien mon douloureux martyre
Ensevelit mon coeur sous l'oublieux sommeil.

Je vis, je ne vis pas, je meurs, je ne meurs pas,
Il n'y a point de vie, il n'est point de trépas,
Mais un ingrat destin sans cesse me tourmente,
Car je ne puis mourir pource que je suis mort,
Et je ne suis pas mort, pour autant que mon sort
Fait qu'encore dans moi un vain esprit se sente.

Je ne suis pas vivant, pour autant que mon coeur
Ne reçoit mouvement, puissance ni chaleur,
Que des heureux brasiers que l'amour y attise :
Je ne suis pas éteint, je ne fais que languir
Pressé de mon tourment : car je ne puis mourir
Si loin de la beauté dont la vie j'ai prise.

Éloigné de mon feu je ne puis m'attiser,
Éloigné de ma mort je ne puis expirer,
Ainsi faut que je vive et faut que je trépasse,
En ma vie est ma mort, en mon bien ma douleur,
En ma nuit ma lumière, en mon mal mon bonheur,
Ainsi mon sort divers même soin me compasse.

Celle qui a ravi par sa force mon coeur,
Qui le fait vivre en moi par sa douce rigueur,
Et qui par ses beaux yeux humblefière, le tue,
L'ôte cruellement, le remet doucement,
Me l'arrache humblement, me le rend fièrement,
Gouvernant mes destins d'une sorte inconnue.

Je veux en mon ennui fondre en larmes de feu,
Et dans mon feu glacé consumer peu à peu,
Tirant de mes poumons par torrent mon haleine,
Je veux sans m'épargner distiller en humeur,
M'évanouir en air, au fort de ma chaleur,
Pour n'être n'étant point une semblance vaine.

Je veux être un beau mort vivant entre les morts,
Mourant entre les vifs par les cruels efforts
Du sort inévitable à mes désirs contraire,
Et comme on jette au loin ceux qui sont trépassés,
Je fuirai aux déserts tant que mes nerfs cassés
Fassent mourir d'un mort, par la mort la misère.

Je ne veux plus chercher au monde de pitié,
Je ne veux plus loger en mon coeur d'amitié,
Puisqu'elle cause en moi la cause de ma haine ;
Si ferai, la pitié encor je chercherai,
Pour enfin être aimé, encore j'aimerai,
Possible en ce faisant j'adoucirai ma peine.

Non non, je veux périr : car d'un destin heureux
Témoignant à jamais mon dommage amoureux,
Je vivrai par ma mort, je mourrai par ma vie,
Un dernier désespoir mon coeur consolera,
Et contente à la fin mon âme sortira
Des ceps qui si longtemps l'ont tenue asservie.

Larmes toutes de sang montreront ma douleur,
Les visibles soupirs des fragments de mon coeur
Seront justes témoins du malheur que j'endure,
Mes cris remplis d'effroi petits corps deviendront,
Qui soin, mort, craint, horreur aux hommes montreront
Tant que je tramerai ma cruelle aventure.

Le ciel sèche mes pleurs, humecté mes soupirs,
Mes cris sont emportés sur l'aile des zéphyrs,
Et je lamente en vain en ma peine ennuyeuse ;
Pourquoi par mon souci me rends-je furieux ?
Las ! pourquoi tant de pleurs écoulent de mes yeux,
Si je ne rends par eux ma fortune piteuse ?

Mes soupirs sont si doux, je lamente si bien,
Et toutefois mes pleurs ne me profitent rien,
Car un sort envieilli s'aigrit en ma détresse.
Que je poursuive donc et d'un gentil désir,
Bravant le fier destin, je vive pour mourir,
Et meure pour encor vivre pour ma maîtresse !

Quand je serai perdu on me regrettera,
Et ce petit regret que de moi on aura,
Si possible on en a, contentera mon âme,
Je vais donc ès déserts mort attendre la mort,
Me souvenant toujours de l'agréable sort
Des effets bien heureux de ma plus chaste flamme.

Enfin bois et rochers où je fais ma complainte,
Lors que pressé de mal dont mon âme est atteinte,
Je me consume en pleurs, en douleurs, en soupirs,
Celez-moi, perdez-moi, et dessous vos ténèbres,
Amortissant le son de mes plaintes funèbres,
Éteignez mon amour, ma vie et mes désirs
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty De feu, d'horreur, de mort, de peine, de ruine

Message par magda Mer 21 Avr - 10:21


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

De feu, d'horreur, de mort, de peine, de ruine



De feu, d'horreur, de mort, de peine, de ruine,
Jours, nuits, ans, temps, moments, je me sens tourmenté,
Et sous les fers meurtriers de ma captivité,
Je vois l'amour cruel qui mon âme ruine.

Je me perds de langueur, de douleurs je me mine,
Ma vie fuit de moi par trop de cruauté,
Et de mortels dédains mon esprit agité
Sent le dernier effort qui ma vie termine.

Vous filles de la nuit, vous Fureurs éternelles,
Vous qui froissez là-bas, dessous vos mains cruelles,
Les esprits échappés du monde et de leurs corps,

Chassez par vos rigueurs la rigueur de ma gêne,
Et si la peine peut se chasser par la peine,
Faites fuir de moi par ma mort mille morts.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty De fureur, de souci, mon âme tourmentée

Message par magda Mer 21 Avr - 10:22


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

De fureur, de souci, mon âme tourmentée



De fureur, de souci, mon âme tourmentée
Sous votre cruauté, désire contre un fer,
Caché dedans mon coeur, trébucher en l'enfer,
Pour s'aller rafraîchir en l'onde Achérontée :

Mais lors que de tel soin je la sens agitée,
Voulant dedans mon sang teindre un mortel acier,
Vos yeux tiennent ma main, et me font désirer
La vie que j'en ai heureusement sucée.

Et vous qui connaissez qu'avec toute puissance
Vous maîtrisez mon coeur, et cette belle essence,
Dont l'heureuse chaleur me fait vivre ici-bas,

Vous vous jouez de moi et d'une bonne grâce,
Cruelle, vous voulez ores que je trépasse,
Et puis changeant de front vous ne le voulez pas.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty De mon sang exhalé toute l'humeur périe

Message par magda Mer 21 Avr - 10:23


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

De mon sang exhalé toute l'humeur périe



De mon sang exhalé toute l'humeur périe
Me laisse desséché, et l'esprit de mon coeur
Éteint par trop d'ennui, me pousse en ma douleur
Aux extrêmes effets de la mélancolie.

Ha ! presque hors de moi forcenant de furie,
Tué, brisé, rompu, accablé de malheur,
J'ai souci, j'ai dépit, j'ai crainte, j'ai horreur,
De vos yeux, de mon mal, de la mort, de ma vie.

Ha ! si dans votre coeur se trouve quelque idée
Des désirs qui vous ont en mon coeur imprimée,
Ayez pitié d'un mort qui pour vous veut mourir ;

Ou pour rendre ma mort encore plus heureuse,
Avouez les soupirs qu'en ma peine amoureuse
Je tire cependant que me faites languir.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Faut-il qu'incessamment passionné je traîne

Message par magda Mer 21 Avr - 10:23


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Faut-il qu'incessamment passionné je traîne



Faut-il qu'incessamment passionné je traîne
Les rigoureux liens de l'amour qui me gêne,
Et que sans espérer de me voir en repos
Je loge le souci pour toujours en mes os,
Que lamentant en vain mon malheur je soupire,
Sans pouvoir m'alléger en mon cruel martyre,
Faut-il, hélas ! faut-il, qu'avecque tant d'ennuis
Je passe en mes regrets mes malheureuses nuits,
Et que sous la clarté que le Soleil nous donne,
Je souffre le tourment qui toujours me poinçonne,
Sans pouvoir une fois sous un meilleur destin
Sentir de tant de maux une agréable fin,
Sans que madame m'aime et qu'une douce flamme
L'émouvant à pitié attise dans son âme
Un amoureux brasier, qui par quelques soupirs
S'égale aux doux effets de mes chastes désirs ?
Non non, il ne faut point qu'en tel espoir je vive,
Il faut qu'en mon malheur ma fortune me suive,
Pour me tyranniser et loger en mon flanc
Mille traits inhumains qui répandront mon sang,
Afin que dedans moi sa source étant faillie
Se finisse en un coup mes amours et ma vie.
Car j'ai trop entrepris d'aimer en si haut lieu,
Une beauté divine appartient à un Dieu,
Et non à un mortel, dont la faible pensée
Ne doit s'imaginer une si belle Idée.
Mais quoi las ! faudrait-il qu'un si divin portrait
Pour n'y renaître plus de mon coeur fût distrait,
Et que de feux divins qui mon âme ont atteinte
La douceur pour jamais de mon coeur fût éteinte ?
Ha feux qui nourrissez vos flammes en l'humeur
Qui m'entretient ici, ne partez de mon coeur,
Brûlez-moi, brûlez-moi d'une ardeur éternelle,
Pour les chastes beautés d'une dame si belle,
Tant que la pâle mort lors qu'il en sera temps
Par un juste destin fasse finir mes ans,
Et puis quand de ce corps je laisserai la cendre,
Échappant de mon sang, allez soudain vous rendre
Autour de mon esprit, y allumant toujours
Les plus heureux brasiers de mes chastes amours.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Je change de désirs, non pas de volonté

Message par magda Mer 21 Avr - 10:24


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Je change de désirs, non pas de volonté



Je change de désirs, non pas de volonté,
Je change de fortune, et non pas d'espérance,
Je change de conseil, et non pas d'assurance,
Je change de liens, non de captivité.

De mourir pour vos yeux mes désirs ont été,
Et ma fortune était en mon mal patience,
Mon conseil, de périr sous votre obéissance,
Mes liens, les rigueurs de votre cruauté.

Et maintenant je veux vivre pour vos beaux yeux,
J'espère de trouver en vous aimant mon mieux,
Assuré du loyer de mon heureux servage,

De vos perfections éternel serviteur,
En un meilleur état, je change mon malheur,
Et je change constant sans changer de courage.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Je ne suis plus celui qui respirait la vie

Message par magda Mer 21 Avr - 10:25


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Je ne suis plus celui qui respirait la vie



Je ne suis plus celui qui respirait la vie
De vos yeux, mon soleil, je ne suis qu'un vain corps.
Amour qui m'a frappé de ses traits les plus forts
Pour triompher de moi, a mon âme ravie.

Mon esprit erre en bas en la plaine obscurcie,
Et mon corps au tombeau croît le nombre des morts.
Ma vie sous l'horreur des meurtrissants efforts
Qui bourrellent mon coeur, de moi s'est départie.

Je suis l'ombre amoureux de vos rayons formé,
Lorsque de vos beautés, chastement enflammé,
Je tirais de vos yeux une seconde essence.

Puis donques que je suis de vous seule animé,
Il faut que comme vous, de vous je sois aimé,
Ou pour le moins nourri d'une juste espérance.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Je veux seul, écarté, ores dans un bocage

Message par magda Mer 21 Avr - 10:25


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Je veux seul, écarté, ores dans un bocage



Je veux seul, écarté, ores dans un bocage,
Ores par les rochers, soupirer mon dommage,
Et plaindre sous l'horreur du destin irrité,
Je veux auprès des eaux tristement murmurantes,
Et près l'obscurité des grottes effrayantes,
Soulager mon esprit de soucis tourmenté.

Vous, bois qui entendez le réson de ma plainte,
Vous, rochers qui m'oyez quand mon âme contrainte
Sous trop de cruauté se plaint de son malheur,
Et vous eaux qui traînez en vos fuites tardives
Les regrets que j'épands dessus vos molles rives,
Soyez justes témoins de ma triste langueur !

Vous, antres reculés où les ombres dernières
De ceux à qui la mort a fermé les paupières
Errent tant que leurs corps soient mis dans le tombeau,
Recevez mes soupirs, et d'une longue haleine
Redoublez plusieurs fois la voix dont en ma peine
Je demande en vos creux un remède nouveau.

Car un injuste sort, me privant de ma vie,
M'absente des beaux yeux dont mon âme ravie
Adorant les rayons fait vivoter mon coeur,
Et veut que sans espoir de revoir ma maîtresse,
J'oublie de ce trait qui tant heureux me blesse,
Pour mourir en l'aimant, l'agréable douceur...

Adieu tout mon bonheur, adieu tout ce que j'aime,
Adieu mon sang, mon coeur, adieu mon âme même,
Je vais pleurer tout seul sous mon astre malin.
Mais pour mieux soupirer, je veux en votre absence
Prier les Déités que changeant mon essence
Je plaigne à mon plaisir mon contraire destin.

Vous donc dieux d'ici-bas, vous saintetés féées,
Qui des amants avez les essences changées,
Si vous errez encor aux déserts ou aux bois
Muez-moi, je vous prie, en un soupir si tendre
Que le coeur des passants mon accent fasse fendre,
Me faisant pour me plaindre une éternelle voix.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Le Mai

Message par magda Mer 21 Avr - 10:26


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Le Mai


Maintenant que l'Amour renaît heureusement
Et qu'à ce beau printemps il commande qu'on plante
D'un Mai long et dressé la désirable plante
Il faut suivre l'arrêt de son commandement.

J'ai un Mai long et gros et fort également,
Poussant devers le haut une verdeur plaisante,
Qui frisonne sa cime en tout temps verdoyante
Et qui se peut planter assez facilement.

Ma dame, permettez que l'on m'ouvre la porte,
Et je le planterai sur la petite motte
Qui de votre maison remarque le milieu ;

Je le mettrai tout droit dessous votre croisée
Où en petits frisons la terre relevée
Fait l'endroit plus plaisant qui soit en tout le lieu
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Mon âme languissait, et d'une longue haleine

Message par magda Mer 21 Avr - 10:27


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Mon âme languissait, et d'une longue haleine



Mon âme languissait, et d'une longue haleine,
Par mes tristes soupirs, j'allégeais en ma peine
Mon éternel regret, et logeais en mes os
Les soucis importuns qui m'ôtaient le repos.
Tout m'était déplaisant et ma gêne cruelle
Me pressait sous l'horreur de sa force mortelle,
Tandis que loin de vous, je n'ai eu en mon coeur
Que peine, que souci, que travail, que malheur.
Tout m'était déplaisant, et durant mon dommage,
Je ne couvais que peur et perte en mon courage,
Car une froide crainte épandue dans moi
Compagne de l'amour redouble mon émoi,
Et tâchant d'arracher l'espérance meilleure
Qui plantée en mon sang, garde que je ne meure.
Las ! tout m'était fâcheux, la clarté du soleil
Nuisait par votre absence au cristal de mon oeil,
Et des obscures nuits l'horreur épouvantable
Martyrait encor plus mon esprit misérable.
Les moments m'étaient ans, et en mon triste sort,
Je n'avais devant moi que l'effroi de la mort ;
Et combien que le temps de ma peine fâcheuse
N'ait longuement pressé ma vie langoureuse,
Si n'ai-je pas laissé d'être cruellement
Travaillé en mon coeur de mal et de tourment,
Car les mois ni les ans ne sont par la mesure
Des effets de l'esprit qui n'est de leur nature.
Il mesure ses maux et ses contentements
Non par âges tournants, par siècles ou moments,
Mais selon la douleur de son cruel martyre,
Ou selon la douceur d'un bonheur qu'il désire.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Mon sang est tout gelé, je n'ai plus dans le coeur

Message par magda Mer 21 Avr - 10:27


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Mon sang est tout gelé, je n'ai plus dans le coeur


Mon sang est tout gelé, je n'ai plus dans le coeur
De pouvoir pour encor entretenir ma vie,
Mes nerfs sont retirés et je sens amortie
La vertu qui tenait mes esprits en chaleur.

Mes os n'ont plus en eux cette agréable humeur
Qui les entretenait, et ma force est faillie,
De mon cerveau séché goutte à goutte est sortie
La douce humidité qui lui donnait vigueur.

Mes yeux ne servent plus à mon corps de lumière,
Et je n'attends plus rien qu'en mon heure dernière,
La mort de mes poumons ôte le mouvement :

Mais elle n'y peut rien, pour autant qu'en mon âme
Éclairent vos beaux yeux qui me sont, vous aimant,
Sang, coeur, nerfs, vie, esprits, force, humeur, cerveau, flamme
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Perdez, froissez, tuez cette âme vagabonde

Message par magda Mer 21 Avr - 10:28


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Perdez, froissez, tuez cette âme vagabonde



Perdez, froissez, tuez cette âme vagabonde,
Qui délaissant ce jour cherche votre manoir,
Ô puissances d'en-bas, si vous avez pouvoir
Sur les captifs d'amour qui dédaignent ce monde.

Vous Esprits, qui toujours allez faisant la ronde
A l'entour de nos coeurs, tâchant nous décevoir,
Employez les secrets de tout votre savoir
Pour mettre en mon esprit une peine seconde.

Fuyez, Esprits, fuyez, votre mort, votre horreur
Ploye sous les efforts de l'aveugle fureur
Qu'excite dans le sang une rage amoureuse.

Tout votre vain pouvoir n'a pouvoir sur l'amour.
Je veux donc encor voir les douceurs de ce jour,
Flattant en mon malheur ma vie malheureuse.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Quand vous considérez en cette claire glace

Message par magda Mer 21 Avr - 10:29


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Quand vous considérez en cette claire glace



Quand vous considérez en cette claire glace
De vos perfections les belles raretés,
Non, vous n'y voyez point cette parfaite grâce
Que tout oeil reconnaît aux traits de vos beautés.

De quoi vous peut servir de savoir être belle ?
C'est cela que sans plus vous montre le miroir,
Mais dans le coeur amant qui vous est tout fidèle
Vous verrez vos beautés pour savoir leur pouvoir.

Votre oeil beau roi des yeux ne se devrait pas plaire
Au rapport des miroirs bien souvent imparfaits,
C'est dans les yeux d'amour qu'il se faut satisfaire
Et voir dedans les coeurs le pouvoir de ses traits.

Voyez donc par mes yeux dans mon âme constante,
Voyez votre pouvoir sur mes affections,
Non comme en ce miroir qui ne vous représente
Que les traits passagers de vos perfections.

Mais Belle, voyez-y, voyez-y donc ma Belle,
Et vous y connaîtrez un effet merveilleux,
Regardez-y de près, vous me verrez fidèle,
N'avoir autre lumière en mon coeur que vos yeux.
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Un jour reconnaissant que je suis incapable

Message par magda Mer 21 Avr - 10:30


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Un jour reconnaissant que je suis incapable



Un jour reconnaissant que je suis incapable,
Belle, de vous servir, j'en vins au désespoir,
Et prenant le chemin du désert effroyable,
Je voulus m'y cacher pour jamais ne rien voir.

C'est bien avoir des yeux de voir ce qui s'adresse,
Et de le discerner. Mais voir parfaitement
Est voir le jour heureux des yeux de sa maîtresse,
Car c'est voir sans rien voir que de voir autrement.

Pour donques ne rien voir, j'élus un ermitage
Pour le lieu destiné du reste de mes jours,
Et me déterminant dans sa grotte sauvage,
J'y pensais consumer ma vie et mes amours.

Je me déterminais à cette vie austère
Afin d'être puni de ma témérité.
Et cherchant à ma vie une vie contraire,
J'étais à ce dessein ardemment arrêté.

Déjà je lamentais sur ma vie passée,
Dessous le triste habit voulant m'ensevelir,
Et de dévotion mon âme tant pressée
Voulait tout autre soin de mon coeur abolir.

J'estimais que ce monde était une balote
Formée de savon, figurée de vent,
Et voulant l'oublier, ma pensée dévote
En ma dévotion m'enfonçait plus avant.

J'étais presque réduit par cette déplaisance,
Et pensais résigner au désert mon vouloir,
Et comme n'ayant plus dessus moi de puissance,
Tout mon penser était religieux devoir.

Mais comme je cuidais franchir cette barrière,
Je sentis mille feux en mon coeur s'allumer,
Et pour y résister je me mis en prière,
Et les éteignis tous fors le doux feu d'aimer...

Je n'irai plus tracer après le triste ombrage
De ces lieux écartés où se meurt tout plaisir,
Par des desseins plus beaux, je veux que mon courage
Rende l'effet égal à mon brave désir...
magda
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poésie:Béroalde de VERVILLE Empty Voulez-vous voir mon coeur, ouvrez-moi la poitrine

Message par magda Mer 21 Avr - 10:31


  • Béroalde de VERVILLE (1556-1626)

Voulez-vous voir mon coeur, ouvrez-moi la poitrine



Voulez-vous voir mon coeur, ouvrez-moi la poitrine,
Vous y verrez les traits de vos rares beautés,
Vous verrez en mon sang mille diversités
Émues par l'amour qui par vous y domine.

Vous y verrez l'ardeur de ma flamme divine,
Vous verrez tout au près mes poumons agités
Qui soupirent pour vous, et mille cruautés
Exciter la rigueur qui ma vie termine.

Mais las ! arrêtez-vous, vous n'y pourriez rien voir,
Car la mort aussi tôt ayant sur moi pouvoir
Effacerait l'effet du désir qui m'enflamme.

Regardez mes soupirs, vous y verrez mon coeur,
Vos beautés mon amour, vos rigueurs ma douleur,
Et soyez humble aux pleurs que vous offre mon âme.
magda
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