joiedevie Forum de Aziza Rahmouni
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
-45%
Le deal à ne pas rater :
PC Portable LG Gram 17″ Intel Evo Core i7 32 Go /1 To
1099.99 € 1999.99 €
Voir le deal

Poèmes des JE & des J'ai

+9
magda
Najat
Nadej-isis
rayane
sherazed
daniel
samuel samhoun
Rita-kazem
nadia ibrahimi
13 participants

Page 2 sur 2 Précédent  1, 2

Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Poèmes des JE & des J'ai

Message par nadia ibrahimi Jeu 1 Avr - 21:31

Rappel du premier message :

J'aime le souvenir de ces époques nues,
Dont Phoebus se plaisait à dorer
les statues.
Alors l'homme
et la femme en leur agilité
Jouissaient
sans mensonge et sans
anxiété,
Et,
le ciel amoureux leur caressant l'échine,
Exerçaient
la santé de leur noble
machine.
Cybèle alors,
fertile en produits généreux,
Ne trouvait point
ses fils un poids trop onéreux,
Mais, louve
au cœur gonflé de tendresses communes,
Abreuvait
l'univers à ses tétines brunes.
L'homme,
élégant, robuste et fort, avait
le droit
D'être
fier des beautés qui le nommaient leur
roi ;
Fruits purs de
tout outrage et vierges de gerçures,
Dont la chair
lisse et ferme
appelait les morsures !

Le poète
aujourd'hui, quand
il veut concevoir
Ces
natives grandeurs, aux lieux
où se font voir
La nudité de l'homme
et celle de la femme,

Sent un froid
ténébreux envelopper son
âme
Devant ce noir
tableau plein
d'épouvantement.

Ô
monstruosités
pleurant leur vêtement !
Ô ridicules troncs
! Torses dignes
des masques !
Ô pauvres corps
tordus, maigres, ventrus ou flasques,
Que
le dieu de l'utile, implacable et serein,
Enfants, emmaillota dans
ses langes d'airain
!
Et vous, femmes, hélas !
Pâles comme
des cierges,
Que
ronge et que nourrit la débauche, et vous,
vierges,
Du
vice maternel traînant l'hérédité
Et toutes
les hideurs de la fécondité !

Nous avons,
il est vrai, nations corrompues,
Aux
peuples anciens des beautés inconnues :
Des
visages rongés
par les chancres du cœur,

Et
comme qui dirait
des beautés de langueur ;
Mais ces inventions de
nos muses tardives
N'empêcheront jamais
les races maladives
De rendre
à la jeunesse un hommage profond,
- À la
sainte jeunesse, à l'air
simple, au doux front,

À
œil limpide et clair
ainsi qu'une eau courante,
Et
qui va répandant sur
tout, insouciante
Comme l'azur du
ciel, les oiseaux et les fleurs,
Ses
parfums, ses chansons et ses douces
chaleurs !

[ J'aime le
souvenir de ces époques nues
]

Poèmes de Charles
Baudelaire


nadia ibrahimi
nadia ibrahimi

Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008

Revenir en haut Aller en bas


Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Sur la trace de l’amour

Message par sherazed Ven 9 Avr - 6:37

Je ne sais, si un jour, ma poésie rencontrera un vif succès,
Ou du moins, si publiée, elle suscitera quelques émotions
Chez les âmes sensibles à la joie et aux affres de la passion,
Mais, poussière d‘azur ne peut pas faire du mal à l’humanité.
Projectiles contre le temps, tiraillés au fusil de ma mémoire,
Mes mots, impacts sanglants, remplis de blessures, tuent
En mémorial, les amours déçus, au fil meurtrier de l’espoir
D’assassiner définitivement la nostalgie, arme de mon vécu.
Au combat de ma solitude, l’ennui reste mon propre ennemi,
Ma victoire, la caresse de rêve d’une femme métamorphose,
Où convergent toutes les joies et les peines, l’amour et la folie,
Un soleil de nuit, aux rais parfumés sur mon cœur morose.
Au fleuve inspiré, mon imaginaire, faire-part froissé, invite
Les eaux bouillonnantes à réchauffer l’abîme de ma nature,
Et, à inonder mon esprit plaintif de ses murmures insolites.
Le courant m’entraîne, au vertige de ses desseins obscurs.
L’amour est un sentiment insaisissable, engendré par la vie
Et la mort, un enfant, à l’âme épanouie, nous faisant grandir,
Réfléchissant sur son front de lumière, des horizons infinis,
L’espérance d’un juste bonheur que l’on ne devra plus fuir.
______________________________
Poésie et poèmes illustrés
http://artpoesie.com

sherazed

Nombre de messages : 763
Date d'inscription : 09/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty La vie profonde

Message par rayane Dim 11 Avr - 19:46

(À ma femme)


Autres, j'écrivais d'exubérants poèmes
D'où jaillissait ma vie en rires et en pleurs.
Je n'avais pas encore appris cette pudeur
Farouche, de sceller mes lèvres sur moi-même.


Et voici que ma plume est morte entre mes mains
Devant l'inexprimable. À quoi bon la souffrance
De voir toutes les fois qu'une sentiment s'élance
Se glacer dans les mots son pauvre sang humain.


Un monde vit en moi, comme en vous vit un monde.
Qui connaître jamais ses cimes et ses fonds ?
Moi-même les explore en des incantations
Railleuses de dépit, dans leurs stériles rondes.


Aussi par les remous d'orages inconnus
Mon âme aux profondeurs secrètes et lointaines,
Suivra dans le chaos des forces et des peines,
La dure vérité des sentiments à nu.


Mais je ne dirai rien car il vaut mieux les taire
Les cris rageurs et vains des coeurs près d 'éclater
Car l'ordre est établi pour une éternité
Cet ordre qu'imposa les siècles sur la terre.


Laissons grouiller le monde au fond de son ennui.
Et n'arrachons personne au sommeil des légendes.
Les préjugés sont forts et la bêtise est grande.
Nul ne peut déchirer les voiles de la nuit.


Alors laissons les mots loin de nos états d'âme
Mobilisons-les tous au service d'action
Extérieure, étrangère, et des révolutions
Qui fondent aujourd'hui sur l'univers en flamme.


Oui façonnons un peu, durement le destin.
Marquons au fer rougi les vieilles décadences.
Jetons dans le grand feu les antiques créances
Et préparons tout neufs de flamboyants matins.


Agissons. Agissons et changeons l'air putride.
Agissons pour nos nerfs, nos muscles et nos coeurs
Élisons s'il le faut d'orgueilleuses douleurs
Plutôt que de subir l'âcre relent du vide.


Mais il est un royaume invisible et muet
Où réelle, la vie épanouit ses corolles.
Un royaume au delà de toutes les paroles.
Un royaume au delà de tout ce que je sais.


J'enferme en lui, jaloux, mes doutes, mes tempêtes
Ce qui rit, ce qui saigne et mes espoirs trop beaux
Et me rêves trop doux et mes trop lourds sanglots
Les flux et les reflux de mon coeur à ma tête.


J'ai cloué dans l'azur, à grands coups de ma Foi
L'étoile que je veux pour guide tutélaire
Et mon regard, levé vers elle de la terre,
Fixera dans le ciel un destin de mon choix.


Et bien qu'on me verra, dans les fracas de l'heure,
Marcher en forcené, sans fin, vers les combats,
Seulement absorbé par ce qu'on ne voit pas,
J'explorerai toujours mes intimes demeures.


Et que m'importe alors les nuages aux cieux.
Qu'importe l'ouragan qui dévaste la plaine
Et la mort qui répand ses ombres inhumaines
Si me vient la lumière immense de tes yeux,


Ô Toi qui seule entend les mots vrais de mon âme,
Seule pour qui ma voix ne se taira jamais,
Doux miracle accompli des rêves que j'aimais,
Dans mon royaume élu, ton royaume, Ma Femme,


Je vivrai, je vivrai réfugié en nous deux.
Nos regards confondus glisseront sur les choses,
Sur les êtres, la vie et les mondes moroses
Pour revenir toujours au Monde merveilleux


Que seuls nous avons su nous donner l'un à l'autre.
Tout le reste est folie et mensonge...et roblot. (a)a


Ne gâchons rien de nous. Sur les principes faux
Laissons les impudents faire les bons apôtres.

Et marchons au soleil, libres, forts, exaltés,
Lorsque chante en secret la sève dans les branches.
Ne poursuivons jamais que des joies toutes franches
Et que jamais nos pleurs ne coulent sans beauté.


De mon exil vers toi, monte la flamme claire
De ce lucide amour que porte mon destin
Bien plus fort que mes soifs et toutes mes faims
Plus fort que les horreurs gigantesques des guerres


Je sais que de tout temps existe un carrefour
Où le bonheur attend de nous rouvrir ses portes
Et que nos deux chemins, parmi les choses mortes
Sont tracés par la vie au devant de l'Amour.


Je sais que ta présence étend sur moi ses ailes.
Je sais que ma présence est tout entière en Toi,
Je sais que nous avons mêmes Voeux, mêmes Lois
Et le même mépris des humaines querelles.


Je sais que de tout temps, depuis le premier Port,
Voguent à l'infini nos âmes qui se fondent,
Comme Dieu le voulut en Une Âme profonde
En deça de la vie, au delà de la mort.


Nous laisserons sans doute un très fluide sillage
Sur l'eau pâle des jours. Que ce soit en passant
Mais regardons-nous vivre : un monde autrement grand
S'offre à nous qu'à créé notre Éternel Mariage.


Pentecôte 1942. André-Masson, Stalag V C.



***
rayane
rayane

Nombre de messages : 1418
Date d'inscription : 23/09/2008

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty ©Thierry François

Message par Nadej-isis Lun 12 Avr - 8:39

Poser ma tête
sur ton épaule




Je veux poser ma tête sur ton épaule

Fermer les yeux

Imaginer que le temps s'arrête

Ou qu'il nous appartient

Je veux, dans tes cheveux blonds,

M'enfuir à jamais

Et sur ton cou,

Au passage de mes lèvres,

Sentir ta peau

Doucement

Lentement

Enfuir la mémoire de mes peines

Ma tristesse



Au petit creux de ton épaule

Entre la douceur de ta peau

Et les caresses de ta blondeur

Vertigineuse

Illumineuse



©️Thierry François
Nadej-isis
Nadej-isis

Nombre de messages : 958
Date d'inscription : 15/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Le poète, Sonnets:Joachim Du Bellay

Message par Nadej-isis Lun 12 Avr - 8:53

Je ne veux point fouiller au sein de la nature


Je ne veux point fouiller au sein de la nature,
Je ne veux point chercher l’esprit de l’univers,
Je ne veux point sonder les abîmes couverts
Ni desseigner du ciel la belle architecture.
Je ne peins mes tableaux de si riche peinture,
Et si hauts arguments ne recherche à mes vers :
Mais suivant de ce lieu les accidents divers,
Soit de bien, soit de mal, j’écris à l’aventure.
Je me plains à mes vers, si j’ai quelque regret,
Je me ris avec eux, je leur dis mon secret,
Comme étant de mon coeur les plus sûrs secrétaires.
Aussi ne veux-je tant les pigner et friser,
Et de plus braves noms ne les veux déguiser,
Que de papiers journaux, ou bien de commentaires.

Joachim Du Bellay, Les Regrets (1558)
Nadej-isis
Nadej-isis

Nombre de messages : 958
Date d'inscription : 15/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Sonnets:Charles Baudelaire

Message par Nadej-isis Lun 12 Avr - 8:54

Je te donne ces vers…


Je te donne ces vers afin que si mon nom
Aborde heureusement aux époques lointaines,
Et fait rêver un soir les cervelles humaines,
Vaisseau favorisé par un grand aquilon,
Ta mémoire, pareille aux fables incertaines,
Fatigue le lecteur ainsi qu’un tympanon,
Et par un fraternel et mystique chaînon
Reste comme pendue à mes rimes hautaines ;
Être maudit à qui, de l’abîme profond
Jusqu’au plus haut du ciel, rien, hors moi, ne réponds !
- Ô toi qui, comme une ombre à la trace éphémère,
Foules d’un pied léger et d’un regard serein
Les stupides mortels qui t’ont jugée amère,
Statue aux yeux de jais, grand ange au front d’airain !

Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal
Nadej-isis
Nadej-isis

Nombre de messages : 958
Date d'inscription : 15/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Paul Eluard

Message par Nadej-isis Lun 12 Avr - 8:56

La Parole


J’ai la beauté facile et c’est heureux.
Je glisse sur les toits des vents
Je glisse sur le toit des mers
Je suis devenue sentimentale
Je ne connais plus le conducteur
Je ne bouge plus soie sur les glaces
Je suis malade fleurs et cailloux
J’aime le plus chinois aux nues
J’aime la plus nue aux écarts d’oiseau
Je suis vieille mais ici je suis belle
Et l’ombre qui descend des fenêtres profondes
Epargne chaque soir le coeur noir de mes yeux.

Paul Eluard, Capitale de la douleur, 1923
Nadej-isis
Nadej-isis

Nombre de messages : 958
Date d'inscription : 15/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Max WALLER:Berceuse à Hélène

Message par Najat Mar 13 Avr - 11:29


Berceuse à Hélène



Je suis triste, ma reine,
Que mon coeur, mon coeur a de
peine,
Je suis triste, ma reine,
D'être si loin de vous.

Je vous
ai vue à peine,
Que mon coeur, mon coeur a de peine,
Je vous ai vue à
peine
Près du Fossé-aux-Loups.

Mon âme est pleine, pleine,
Que mon
coeur, mon coeur a de peine,
Mon âme est pleine, pleine
De vers aux
rimes d'or.

Je veille, Hélène, Hélène
Que mon coeur, mon coeur a de
peine,
Je veille, Hélène, Hélène,
C'est le lecteur qui dort.

La
chose est souveraine,
Que mon coeur, mon coeur a de peine,
La chose est
souveraine
Et ça ne coûte rien.

Dors tranquille et sereine,
Que
mon coeur, mon coeur a de peine,
Dors tranquille et sereine,
Dors mon
enfant, c'est pour ton bien.
Najat
Najat

Nombre de messages : 1088
Date d'inscription : 14/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Max WALLER:C'est ainsi

Message par Najat Mar 13 Avr - 11:30


C'est ainsi



Faire des vers, des vers gamins,
Et rire, et rire, et rire
encore,
Et, comme un pierrot qui picore,
Cueillir leurs parfums aux
jasmins ;

Forger des vers comme des armes,
Pointus, effilés, sans
merci,
Ou, pour expier son souci,
Égrener des ave de
larmes,

C'est bon supérieurement
Et tout le reste est journalisme ;

La strophe d'or est comme un prisme
Où s'irise le firmament.

Et
crevât-on, phtisique et blême,
Avec des recors à la clé,
Le violon qu'on
a raclé
Laisse des notes en nous-même.

La flûte, avec ses quatre
trous,
Quatre regards de mélodie,
Quand elle est triste, psalmodie

Comme un martyr sous les verrous ;

Et rien n'y fait, ni les
gendarmes,
Ni les huissiers, ni les tailleurs ;
L'air de flûte a
toujours des larmes
En attendant des jours meilleurs !
Najat
Najat

Nombre de messages : 1088
Date d'inscription : 14/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Max WALLER:Sun shine

Message par Najat Mar 13 Avr - 11:30


Sun shine



How do you do ? mon coeur a faim
De votre regard qui dédaigne
;
Et depuis l'autre jour il saigne,
Viendrez-vous le soigner enfin
?

Car, bien que le printemps commence
À dorer les longs boulevards,

Il fait très froid sans vos regards
Et ma solitude est
immense.

Little beauty ! venez, venez !
C'est si triste et si navrant
d'être,
Les yeux braqués, à la fenêtre
Pendant les doux
après-dîners,

Attendant toujours la chérie
En songeant qu'elle n'aime
plus,
Et c'est ridicule au surplus,
Et c'est naturel qu'on en
rie.
Najat
Najat

Nombre de messages : 1088
Date d'inscription : 14/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Henri WARNERY : Les Origines

Message par Najat Mar 13 Avr - 11:31


Les Origines



Dans la splendeur des cieux un astre vient de naître,
Sur ses
langes d'azur j'ai cru le reconnaître ;
Vers lui mon espérance a dirigé son
vol.
La Terre ! Ah ! je la vois ! La Terre ! c'est bien elle !
A son
souffle embrasé je sens frémir mon aile,
Et j'entends, sous mes pieds, mugir
son vaste sol.

Une sueur de feu pend à sa croupe nue ;
Les éclairs
sur son front crépitent dans la nue ;
Ses flancs partout béants fument de
toutes parts.
Un ciel obscur et lourd sur son écorce pèse,
Et, brisant
les parois de l'énorme fournaise,
Les éléments de tout dans les airs sont
épars.

Oh ! qui dira l'horreur des premiers jours du monde ;
La
matière hurlant dans sa gaine inféconde,
Et soudain ruisselant sur le globe
éventré ?
Qui dira le courroux des tempêtes natives,
Et, sortant
lentement des ondes primitives,
Les Alpes jusqu'au ciel portant leur front
sacré ? [...]
Najat
Najat

Nombre de messages : 1088
Date d'inscription : 14/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Henri WARNERY :Tableau du soir

Message par Najat Mar 13 Avr - 11:32


Tableau du soir



... Le soir descend. Sur la neige des frissons roses
Courent,
qui la font palpiter comme une chair ;
Et les toits des chalets, par leurs
trappes mi-closes,
Laissent un filet bleu monter dans le ciel clair.
[...]
Najat
Najat

Nombre de messages : 1088
Date d'inscription : 14/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Jean Cocteau

Message par magda Mar 13 Avr - 20:39

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Cocto
PLAIN-CHANT

Je n'aime pas dormir quand ta figure habite,
La nuit, contre mon cou ;
Car je pense à la mort laquelle vient trop vite,
Nous endormir beaucoup.


Je mourrai, tu vivras et c'est ce qui m'éveille!
Est-il une autre peur?
Un jour ne plus entendre auprès de mon oreille
Ton haleine et ton coeur.


Quoi, ce timide oiseau replié par le songe
Déserterait son nid !
Son nid d'où notre corps à deux têtes s'allonge
Par quatre pieds fini.


Puisse durer toujours une si grande joie
Qui cesse le matin,
Et dont l'ange chargé de construire ma voie
Allège mon destin.


Léger, je suis léger sous cette tête lourde
Qui semble de mon bloc,
Et reste en mon abri, muette, aveugle, sourde,
Malgré le chant du coq.


Cette tête coupée, allée en d'autres mondes,
Où règne une autre loi,
Plongeant dans le sommeil des racines profondes,
Loin de moi, près de moi.
Ah ! je voudrais, gardant ton profil sur ma gorge,
Par ta bouche qui dort
Entendre de tes seins la délicate forge
Souffler jusqu'à ma mort.

Extrait de "Plain-Chant",
Poésie/Gallimard
magda
magda

Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Antonio Machado

Message par magda Mar 13 Avr - 20:55

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Machado

Jamais je n'ai cherché la gloire
Ni voulu dans la mémoire
des hommes
Laisser mes chansons
Mais j'aime les mondes subtiles
Aériens et délicats
Comme des bulles de savon.


J'aime les voir s'envoler,
Se colorer de soleil et de pourpre,
Voler sous le ciel bleu, subitement trembler,
Puis éclater.


A demander ce que tu sais
Tu ne dois pas perdre ton temps
Et à des questions sans réponse
Qui donc pourrait te répondre?


Chantez en coeur avec moi:
Savoir? Nous ne savons rien
Venus d'une mer de mystère
Vers une mer inconnue nous allons
Et entre les deux mystères
Règne la grave énigme
Une clef inconnue ferme les trois coffres
Le savant n'enseigne rien, lumière n'éclaire pas
Que disent les mots?
Et que dit l'eau du rocher?


Voyageur, le chemin
C'est les traces de tes pas
C'est tout; voyageur,
il n'y a pas de chemin,
Le chemin se fait en marchant
Le chemin se fait en marchant
Et quand tu regardes en arrière
Tu vois le sentier que jamais
Tu ne dois à nouveau fouler
Voyageur! Il n'y a pas de chemins
Rien que des sillages sur la mer.


Tout passe et tout demeure
Mais notre affaire est de passer
De passer en traçant
Des chemins
Des chemins sur la mer
magda
magda

Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Rainer-Maria Rilke

Message par magda Mar 13 Avr - 21:00

    Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Pieta3
    LE LIVRE DE LA PAUVRETÉ
    ET DE LA MORT



    Je suis peut-être enfoui au sein des montagnes
    solitaire comme une veine de métal pur ;
    je suis perdu dans un abîme illimité,
    dans une nuit profonde et sans horizon.
    Tout vient à moi, m'enserre et se fait pierre.

    Je ne sais pas encore souffrir comme il faudrait,
    et cette grande nuit me fait peur ;
    mais si c'est là ta nuit, qu'elle me soit pesante, qu'elle m'écrase,
    que toute ta main soit sur moi,
    et que je me perde en toi dans un cri.

magda
magda

Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Anna BLANDIANA

Message par magda Mar 13 Avr - 21:31

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 An-neige

ÉLÉGIE DU MATIN

Au début, j'avais promis de me taire
Mais plus tard, au matin,
Je vous ai vus sortir avec des sacs de cendre devant les portes
Et la répandre comme on sème le blé ;
N'y tenant plus, j'ai crié : Que faites-vous ? Que faites-vous ?
C'est pour vous que j'ai neigé toute la nuit sur la ville,
C'est pour vous que j'ai blanchi chaque chose toute la nuit - ô si
Vous pouviez comprendre comme il est difficile de neiger !
Hier soir, à peine étiez-vous couchés, que j'ai bondi dans l'espace
Il y faisait sombre et froid. Il me fallait

Voler jusqu'au point unique où
Le vide fait tournoyer les soleils et les éteint,
Tandis que je devais palpiter encore un instant dans ce coin,
Afin de revenir, neigeant parmi vous.
Le moindre flocon, je l'ai surveillé, pesé, éprouvé,
Pétri, fait briller du regard,
Et maintenant, je tombe de sommeil et de fatigue et j'ai la fièvre.
Je vous regarde répandre la poussière du feu mort
Sur mon blanc travail et, souriant, je vous annonce :
Des neiges bien plus grandes viendront après moi
Et il neigera sur vous tout le blanc du monde.
Essayez dès à présent de comprendre cette loi,
Des neiges gigantesques viendront après nous,
Et vous n'aurez pas assez de cendre.
Et même les tout petits enfants apprendront à neiger.
Et le blanc recouvrira vos piètres tentatives à le nier.
Et la terre entrera dans le tourbillon des étoiles
Comme un astre brûlant de neige.
magda
magda

Nombre de messages : 1253
Date d'inscription : 28/03/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Ici seul je me plains...

Message par chadiya madihi Mer 14 Avr - 18:18


  • Jean VAUQUELIN DE LA FRESNAYE (1535-1607)

...Ô Fresnaie-au-Sauvage...



Ici seul je me plains, Ô Fresnaie-au-Sauvage,
A toi de mes ennuis ; et ce bois m'est témoin,
Ces champs et ces beaux prés, du lamentable soin
Qui souvent m'accompagne au bord de ce rivage.

Quand je me vois, Fresnaie, en ton bois, en l'ombrage,
Racontant ma tristesse en quelque sombre coin,
Je suis comme un rocher, hors du péril au loin,
Qui bien aise raconte un évité naufrage.

Je t'ai de mes aïeux : tandis que je serai,
Comme en lieu que plus j'aime, en toi je me plairai,
Si contraire ne m'est de Dieu la destinée,

Ulysse voyageant de même en divers lieux,
De Circe et Calipso refusa l'heur des dieux,
Pour revoir de plus près fumer sa cheminée.
chadiya madihi
chadiya madihi

Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty quand je regarde au teins promt et leger

Message par chadiya madihi Mer 14 Avr - 18:21


  • Jean VAUQUELIN DE LA FRESNAYE (1535-1607)

Philis, ...



Philis, quand je regarde au tems promt et leger
Qui derobe soudain nos coulantes années,
Je commence à conter les saisons retournées,
Qui viennent tous les jours nos beaux jours abreger.

Car ja quarante fois nous avons veu loger
Le soleil au Lion des plus longues journées,
Depuis que nous avons nos amours demenées
Soubz la foy qui nous fist l'un à l'autre engager.

Et puis ainsi je dis : "O Dieu, qui tiens unie
De si ferme union nostre amitié benie,
Permets que jeune en nous ne vieillisse l'Amour ;

Permets qu'en t'invoquant, comme jusqu'à cet heure,
Augmente nostre Amour d'amour tousjour meilleure,
Et telle qu'au premier, soit-elle au dernier jour !"
chadiya madihi
chadiya madihi

Nombre de messages : 957
Date d'inscription : 28/06/2008

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Helas ! combien de jours...

Message par samuel samhoun Mar 20 Avr - 23:13

Helas ! combien de jours...

Hélas ! combien de jours, hélas ! combien de nuits
J'ai vécu loin du lieu, où mon coeur fait demeure !
C'est le vingtième jour que sans jour je demeure,
Mais en vingt jours j'ai eu tout un siecle d'ennuis.

Je n'en veux mal qu'à moi, malheureux que je suis,
Si je souspire en vain, si maintenant j'en pleure ;
C'est que, mal avisé, je laissais, en mal'heure,
Celle la que laisser nulle part je ne puis.


J'ai honte que déjà ma peau décolorée
Se voit par mes ennuis de rides labourée :
J'ai honte que déjà les douleurs inhumaines


Me blanchissent le poil sans le congé du temps.
Encor moindre je suis au compte de mes ans,
Et déjà je suis vieux au compte de mes peines.

Auteur :
Étienne de La Boétie (1530-1563)
samuel samhoun
samuel samhoun

Nombre de messages : 724
loisirs : écrire, marcher,voyager
Humeur : changeante !
Date d'inscription : 22/06/2008

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Louis VEUILLOT : Poids de la vie

Message par sandrine jillou Mer 21 Avr - 9:26


  • Louis VEUILLOT (1813-1883)

Poids de la vie



J'ai vécu, j'ai vieilli. De l'humaine misère
J'ai porté le fardeau tous les jours. Il est grand !
Sans en excepter un, j'ai refait en pleurant
Tous les chemins heureux que j'avais sur la terre.

Je sais ce qu'ici-bas le ciel donne et reprend :
Deuil d'ami, deuil d'époux, deuil de fils, deuil de père,
Et deuil public encor ! J'ai bu cette heure amère.
J'ai tenu dans mes bras Valdegamas mourant.

J'ai vu l'esprit de l'homme au mal vouer son culte ;
Sur mon drapeau sacré j'ai vu monter l'insulte ;
Chez des amis vivants Je me suis vu mourir.

Et parmi ces douleurs, humiliant mon âme,
Satan m'a fait sentir son ironie infâme ... !
Ô mort ! comme parfois tu tardes à venir !
sandrine jillou
sandrine jillou

Nombre de messages : 1700
loisirs : écrire, courir, vélo.
Date d'inscription : 08/10/2008

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Jean ROBERTET

Message par marie la rebelle Lun 26 Avr - 19:45


  • (14??-1503)

Ballade



Je meurs de soif auprès de la fontaine ;
Je treuve doulx ce qui doit estre amer ;
J'aime et tiens chiers tous ceulx qui me font haine,
Je hé tous ceulx que fort je deusse amer ;
Je loue ceulx que je deusse blamer,
Je prens en gré plus le mal que le bien ;
Je vais querant ce qu'à trouver je doubte ;
Croire ne puis cela que je sçay bien,
Je me tiens seur de ce dont plus j'ay doubte.

Je prens plaisir en ce qui m'est atayne ;
Ung peu de chose m'est grant comme la mer ;
Je tiens de près celle qui m'est loingtaine,
Je garde entier ce que deusse entamer,
Saoul suis de ce qui me fait affamer ;
J'ay largement de tout, et si n'ay rien,
J'oublie ce que plus à cuer je boute ;
Ce qui me lasche me tient en son lien :
Je me tiens seur de ce dont plus j'ay doubte.

Je tiens pour basse chose qui est haultaine ;
Je fuy tous ceulx que deusse reclamer,
Je croy plus tard le vray qu'une fredaine ;
Tant plus suis froit, plus me sens enflamer ;
Quand j'ay bon cuer, lors je prens a pasmer,

Ce que j'acquiers je ne tiens pas pour mien,
Je prise peu ce qui bien chier me couste ;
Sote manière m'est plus que beau maintien,
Je me tiens seur de ce dont plus j'ay doubte.

Prince, j'ay tout, et si ne sçay combien :
J'atire à moy ce qui plus me déboute ;
Ce que j'esloigne m'est plus qu'autre rien ;
Je me tiens seur de ce dont plus j'ay doubte.
marie la rebelle
marie la rebelle

Nombre de messages : 1328
Date d'inscription : 11/07/2008

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Jean ROBERTET

Message par marie la rebelle Lun 26 Avr - 19:46


  • (14??-1503)

L'exposition des couleurs



Le blanc
Entre toutes couleurs suis la premiere,
Humilité signiffie et simplesse,
Dont le lys blanc est des fleurs la maistresse :
Saincte Escripture en donne foy planiere.

Bleue
Et moy qui suis de coulleur celestine,
Dont fin azur a son pris et valleur,
Signiffiant loyaulté pour meilleur,
Je doy au blanc par droit estre voisine.

Rouge
Rouge ne doit des autres couleurs moindre
Soy repputer, car il monstre victoire,
Pompe, orgueil, arrogant veyne gloire,
Qui ne peult hault et bas ne veult descendre.

Gris
Je qui suis gris signiffie esperance,
Coulleur moyenne de blanc et noir meslée ;
Et soye seulle ou à autre assemblée,
Le moyen tiens en commune actrempence.

Vert
A l'esmeraulde ressemble precieuse,
Me delectant en parfaicte verdeur ;
Mal seant suis avec noire couleur
Et n'appartiens qu'à personne joyeuse.

Jaulne
De rouge et blanc entremeslez ensamble,
Ma coulleur est ressemblant à soucie ;
Qui joyra d'amours ne se soussie,
Car il me peult porter se bon luy semble.

Violé
Je suis de noir et rouge composée
Coulleur viollée ainsi m'appelle l'on.
Vestu en fut le traistre Gannellon,
Dont par le monde encor suis diffamée.

Tanné
Je porte ennuy en couverte pencée,
Car ma coulleur est de sorte terrestre,
De faitz et ditz qui doubteux peuvent estre,
je suis changeant et de peu de durée.

Noir
Je signiffie dueil et merencolie,
Desplaisance, tristesse, aspre courroux ;
Obscure noire coulleur desplaist à tous ;
Qui son cueur taint en moy fait grant folie.

Riolépiolé
Et moy qui suis riolé piolé,
Broille meslé de rouge, noir et blanc,
Comparé suis de sorte à Faulx Semblant,
Qui a maint homme destruit et afollé.

L'acteur
Prince, qui veult porter coulleur diverse
En devise, cecy luy peult valloir ;
Chascun choisisse et preigne à son vouloir :
Quant est à moy, j'ay prins la blanche et perse.
marie la rebelle
marie la rebelle

Nombre de messages : 1328
Date d'inscription : 11/07/2008

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Marie NERVAT: Je voudrais aller me promener dans les bois

Message par julien Mer 28 Avr - 8:38


  • Marie NERVAT (1874-1909)

Je voudrais aller me promener dans les bois



Je voudrais aller me promener dans les bois ;
j'aurais un grand chapeau, une robe légère,
je me griserais d'air et de bonne lumière,
et tu me rapprendrais à marcher à ton bras.

Je voudrais aller dans un grand bois, un vieux bois,
où l'on dit que les fées se promènent encore ;
peut-être en attendant du soir jusqu'à l'aurore,
qu'une d'elles nous laisserait ouïr sa voix.

Moi je n'ai pas vu d'arbres depuis si longtemps,
ni de fleurs dans les jardins ! Celles que tu portes,
et que tu poses sur mon lit, à moitié mortes,
achèvent de mourir dans les appartements.

Ce ne sont pas de vraies fleurs libres sous le ciel ;
elles ont des robes rouges trop tuyautées,
puis, sur les draps, on dirait des taches figées,
taches de sang qui font plus pâles mes mains frêles.

J'aime mes mains à présent, elles sont si blanches !
je vois les petites veines bleues sous la peau,
je n'ai gardé à ma main gauche que l'anneau,
l'anneau d'or que tu m'as donné avec ton âme.

Mes pauvres mains ont l'air si lasses sur les draps !
Ah ! je voudrais sortir, marcher, je me sens forte,
je voudrais fuir bien loin, et refermer la porte
sur cette chambre monotone de malade.
julien
julien

Nombre de messages : 1159
Date d'inscription : 24/02/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Charles NODIER:Le vieux marinier

Message par julien Mer 28 Avr - 8:51


  • Charles NODIER (1780-1844)

Le vieux marinier



Oh ! si l'homme naissait deux fois à la lumière,
Que je tenterais peu les destins du nocher !
Et de quel soin plus doux que ma chaîne première,
J'attacherais mes jours au seuil de la chaumière
Comme l'huître au rocher.

Non, je ne suivrais plus une proue écumante
Qui broie en poudre d'or les flots étincelants,
Et je n'épierais plus, de la vague fumante,
Le phoque au regard bleu qui crie et se lamente
Sur ses rochers tout blancs.

Non, jamais je n'irais sur la foi d'une prame,
Jouer ma vie errante au caprice des eaux ;
Non, jamais l'Océan n'humecterait ma rame,
Quand le temps recoudrait tous les noeuds de ma trame
A d'éternels fuseaux.

Qu'ai-je fait sur la mer et qu'y ferais-je encore ?
Quelle moisson produit le flot que j'ai frayé ?
De quelle île propice ai-je gravi l'accore,
Et le sang répandu dont la pourpre décore,
Quel prix me l'a payé ?

Est-ce braver assez de ciels et de Neptunes,
Léguer à mille écueils d'assez tristes lambeaux,
Avoir assez commis de changeantes fortunes
Aux vents que fatiguaient nos voiles importunes,
Pour trouver des tombeaux ?

Qui mieux que moi pourtant sut calfater l'étrave,
Haler sur la bouline ou tenir le timon ?
Et, pour nous déborder d'un mauvais fond de grave
Qui fut jamais plus prêt, plus adroit et plus brave
A tourner l'artimon ?

Qui mieux que moi surtout, et d'une main moins lente,
Sut jeter sur la prise un grappin triomphant,
Quand la lame bondit sous la nef chancelante,
Et qu'aux efforts des airs une vergue hurlante
Vagit comme un enfant ?

Mais mon coeur s'envolait au sil de la carène
Comme une jeune abeille aux parfums de l'Hybla,
Et j'aurais délaissé les amours d'une reine,
Pour affronter de près les chants de la sirène,
Et les chiens de Scylla.

Car je lisais Homère, et mon âme empressée
Des froids âpres de l'Ourse et des feux du Lion,
N'avait pas un désir et pas une pensée
Qui ne prisât plus haut les travaux d'Odyssée
Que l'orgueil d'Ilion.

Et, quand d'un vif essor je défiais les mousses,
Comme un oiseau marin perché sur les huniers,
Je ne voyais que bois tout veloutés de mousses,
Et je rêvais partout l'abri des pamplemousses,
Ëden des nautoniers.

C'est ainsi qu'apparaît l'Océan de la rade.
Le voyageur de mer est fou comme l'amant.
Tout visage nouveau lui paraît camarade,
Tout lougre, galion, et tout poisson dorade,
Et tout roc diamant.

Il en est autrement, quand bouillonne la houle,
Quand le grain élargi noircit ses flancs massifs,
Quand la foudre s'abat sur le mât qui s'écroule,
Et quand, ras comme un bac, le vaisseau sombre ou roule
De récifs en récifs.

Aujourd'hui, bon espoir vous reste à la hélée ;
Les marcheurs ont leur cap en plein de votre bord,
Et si quelque lutin, tapi sur la coulée,
N'égare pas encor leur aiguille affolée,
Vous surgirez au port.

La nature prodigue, à vos chasses heureuses
Promet les albatros et les fous étourdis,
Sous des pitons, chargés de mouettes peureuses,
D'où tombent frissonnant les petits des macreuses
Par le froid engourdis.

La tortue arrondit ses épaules nacrées
Sous cette herbe marine aux mobiles scions,
Et des cayeux béants les bouches déchirées
Vous livreront ce soir, au reflux des marées,
Le nid des alcyons.

Moi, j'ai filé du câble, et ma tâche est remplie.
J'ai serré trop de lofs, j'ai rasé trop de bancs,
Et j'ai trop entendu grincer l'aigre poulie,
Quand l'aquilon mordant sous qui le beaupré plie
Siffle dans les haubans.

J'ai changé maintenant de projet et d'allure,
Et, quand vous vogueriez aux jardins de Circé,
Je prends pic. J'ai ferlé ma dernière voilure,
Et je n'étendrais pas d'une seule encablure
Mon trajet insensé.

J'ai cherché comme vous, marinier intrépide,
Le péril pour l'argent, l'argent pour le péril.
Que me fait désormais la perle à l'oeil limpide,
Et l'opale inconstante où brille un feu rapide,
Et l'azur du béryl ?

En quelque lieu nouveau que le destin vous porte,
Dieu vous gard'. Mon espoir n'en a plus de souci.
Un esprit de malheur s'est assis à ma porte.
Mon toit est déserté. Ma pauvre femme est morte.
Ma fille l'est aussi.

Et quand, au champ natal que vient baigner la Manche,
Les Gémeaux protecteurs me conduiraient tout seul,
Verrais-je Marguerite en habits de dimanche,
Pour son bonnet de fête et pour sa robe blanche
Dépouiller son linceul ?

Ma Lise viendrait-elle, espiègle et rebondie,
D'un pas alerte et sûr aider mes pas pesants ?
Et moi qui me flattais de la trouver grandie,
Car on n'a jamais vu de vague plus hardie
Danser sur les brisants !

Je ne conterais plus au feu de la veillée,
Ce que pour les revoir un père peut oser ;
La mère palpitante, et de larmes mouillée,
Tandis que la petite à ma joue éraillée
Collerait un baiser !...

" Apporte-moi, dit-elle, une perruche verte !... "
Qui la demanderait de l'oeil et de la main ?
Lise est morte ! - Adieu donc ! Adieu, la Découverte !
Mais une salve encore à la tombe entr'ouverte
Où je couche demain !
julien
julien

Nombre de messages : 1159
Date d'inscription : 24/02/2010

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Chinoiserie_Théodore HANNON

Message par nadia ibrahimi Jeu 29 Avr - 12:59


  • Théodore HANNON (1851-1916)

Chinoiserie



J'ai sur ma table une potiche
Chinoise, et du goût le plus fin,
Qu'avec l'extase d'un fétiche
Plus d'un contemplerait sans fin.

Le soleil chérit son front pâle,
Car dans son émail lactescent
Toujours un rayon caressant
Sertit quelque perle d'opale.

Sur ses flancs polis et bleutés
Vient s'épanouir une flore,
Belle d'inédites beautés,
Qu'un caprice étrange colore.

L'oeil découvre parmi ces fleurs
Qui carminent l'azur des grèves,
Les monstres entrevus en rêves :
Dragons hagards, sphinx persifleurs,

Folles chimères, oiseaux gauches
Et funambulesques magots,
Assistant froids à ces débauches
De cinabres et d'indigos.

Japon ! Terre-Promise rose !
Sonore du chant cristallin
Des tourelles de kaolin
Qu'un fleuve de féerie arrose !

Bercé par les senteurs du thé,
Dans l'oubli qui pleut de grands aunes,
J'envie en ce nouveau Léthé
La jonque des mandarins jaunes.

Oui, dans ce merveilleux séjour,
Plaise au destin sourd que je vive
Aux pieds d'une Chinoise olive,
Grisé d'opium et d'amour !
nadia ibrahimi
nadia ibrahimi

Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Henri De Régnier:LE CENTAURE BLESSÉ

Message par nadia ibrahimi Ven 30 Avr - 18:53

Henri De Régnier
Le cri qu'il nous arrache est un hennissement.

J. M. DE HEREDIA.

Je t'ai vu devant moi surgir. Tu étais beau.
Le soleil au déclin, de la croupe aux sabots,
T'empourprait tout entier de sa splendeur farouche.
Ardent de ta vitesse et cabré de ta course,
Tu dressais, sur le ciel derrière toi sanglant,
Homme et cheval, le double effort de ton élan
Où le poitrail de bête et la poitrine humaine
Respiraient d'un seul souffle et d'une seule haleine.
Alors, dans ce ciel rouge où tu m'es apparu,
Comme un fatal présage, ô Centaure, j'ai cru
Voir monter tout à coup, en un reflet lointain,
La tragique rougeur du fabuleux festin
Où, sous les yeux d'Hercule et de sa blanche Épouse,
Votre troupe avinée et brusquement jalouse
Mêla, dans un combat fameux et hennissant,
A la pourpre du vin la pourpre de son sang!

J'ai tremblé. Ton galop remplissait mon oreille,
Sonore de l'écho de sa rumeur vermeille,
Et j'ai tendu mon arc en invoquant les Dieux!
Et l'air porta vers toi mon trait victorieux...
Tu tombas. Maintenant je maudis ma prière,
Ma flèche trop certaine et ma peur meurtrière,
Cher monstre! je te pleure et je revois encore
Ta main d'homme presser à ton flanc, ô Centaure,
Ta blessure et j'entends, au fond du soir, j'entends
Le cri humain jailli de ton hennissement!
nadia ibrahimi
nadia ibrahimi

Nombre de messages : 1223
Date d'inscription : 18/07/2008

Revenir en haut Aller en bas

Poèmes des JE & des J'ai - Page 2 Empty Re: Poèmes des JE & des J'ai

Message par Contenu sponsorisé


Contenu sponsorisé


Revenir en haut Aller en bas

Page 2 sur 2 Précédent  1, 2

Revenir en haut

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum